Texte intégral
G. Cahour : Bienvenue, si vous nous rejoigniez, sur RMC et sur BFM TV, avec notre invitée ce matin, C. Lagarde. Bonjour, C. Lagarde.
Bonjour.
G. Cahour : Ministre de l'Economie, des Finances, de l'emploi, de l'Industrie. Et également E. Izraelewicz, qui sera à mes côtés pour cette discussion jusqu'à 9 h, directeur de la rédaction de La Tribune. On fait marcher les complémentarités de groupes ce matin avec Erik. C. Lagarde, 360 milliards d'euros, ce plan de sauvetage des banques rien que pour la France. Alors, c'est un chiffre très difficile à mesurer, on dit en général que ça donne le vertige. J'ai trouvé ce matin quelques petites comparaisons, c'est un peu plus du tiers de la dette de la France, c'est 275 millions de Smic mensuels, c'est 12.000 rames de TGV, et finalement ça sera combien pour le contribuable ?
Aujourd'hui, rien ! Vous avez raison de dire que c'est un chiffre astronomique. Pour vous donner un ordre de grandeur, le financement de l'économie française c'est à peu près 500 milliards d'euros, donc avec 360 milliards d'euros, vous voyez qu'on est à un peu plus des deux tiers. Je dis « rien » parce que c'est en réalité le montant de la garantie de l'Etat pour 320 milliards et c'est aussi d'une certaine manière la garantie de l'Etat pour 40 milliards. Je m'explique, les 320 milliards que je mentionnais au début seront destinés à prêter de l'argent aux banques. Qu'est-ce qui se passe, qu'est-ce qui s'est passé jusqu'à maintenant ? Les banques ne se faisaient plus confiance, et donc les banques ne se prêtaient plus entre elles. Or, pour faire fonctionner l'économie, pour que le moteur tourne, il faut que les banques se prêtent entre elles. Donc, on met en place une espèce d'énorme caisse de prêts pour que les banques à nouveau se prêtent entre elles. Et on assortit ces prêts... alors, ces prêts ils ne sont pas tombés du ciel, c'est la société qui va refinancer, (qui) va sur le marché, elle lève de l'argent, et elle lève de l'argent facilement et à un coût relativement bas parce que l'Etat donne sa garantie.
E. Izraelewicz : Mais l'Etat va être obligé d'emprunter pour pouvoir prêter, donc il va emprunter, vous venez de l'expliquer, et l'emprunt ça coûte, même pour l'Etat, même si ça coûte moins cher que pour un particulier, ça coûte. Donc, d'une certaine manière, en bout de course, il y aura quand même le contribuable qui devra payer les intérêts de la dette.
Non, parce que ça coûte quand on emprunte, mais ça rapporte quand on prête.
G. Cahour : C'est-à-dire que vous allez prêter à des taux supérieurs à ceux que vous vous payez.
Voilà, j'y viens ! On ne va emprunter que si on doit prêter, d'accord. Donc, on paie des intérêts lorsqu'on emprunte mais on en encaisse quand on prête.
G. Cahour : Et quels seront ces taux ?
Voilà, j'y viens !
G. Cahour : Quels seront ces taux auxquels vous prêterez de l'argent aux banques ?
Nous, on va donner notre garantie. Aujourd'hui, la garantie de l'Etat elle vaut beaucoup parce que c'est un endroit où les gens savent qu'ils peuvent faire confiance. Donc, le taux auquel on va emprunter sera relativement bas. En revanche, le taux auquel on va prêter sera plus élevé, si bien qu'entre les deux on réalise une marge, pour faire simple. Cette marge-là, eh bien elle rapporte à l'Etat.
E. Izraelewicz : Il y a des prêts qui ne seront pas remboursés, que l'Etat finalement devra rembourser, des pertes donc pour ces structures. Donc, là aussi c'est le contribuable en bout de course qui paiera.
Alors, ça aussi on n'y a pensé, et on a demandé...
E. Izraelewicz : (...)
Non mais, on est garant des intérêts du contribuable. Donc, ce que demandera aux banques qui viennent emprunter chez nous, on va leur dire « très bien, on vous prête, vous allez payer un intérêt, et puis en plus vous allez nous apporter des gages, vous allez nous apporter des sûretés, vous allez nous apporter soit des titres, soit des créances que vous détenez sur vos propres clients, et nous on va les garder, on ne va pas les encaisser, on ne les acquiert pas mais on les garde comme un gage. Et si jamais, vous, banques, qui avez emprunté vous êtes défaillants, à ce moment-là on exercera nos gages ».
G. Cahour : C'est la caution, quoi ?
Exactement !
E. Izraelewicz : Donc, ça ne coûtera jamais rien aux contribuables, c'est ce que vous dites aujourd'hui ?
Ecoutez, on a construit le mécanisme pour que non seulement ça ne coûte pas mais que ça rapporte à l'Etat.
G. Cahour : Alors, dans quel cas, concrètement, ces banques pourront-elles profiter de ces 320 milliards d'euros ?
Elles vont en profiter à trois conditions. La première, c'est qu'elles soient en bon état. Il faut qu'elles aient suffisamment de fonds propres, qu'elles soient conformes à toutes leurs obligations. Donc, ce sont des banques en bon état, en bonne santé, qui vont pouvoir...
G. Cahour : ...celles en situation de faillite, elles ne peuvent pas en profiter ?
Attendez, attendez, j'y viens. Ah non, non, non, non, non. Donc, il faut qu'elles soient en bonne santé.
G. Cahour : D'accord.
Deuxièmement, il faut qu'elles paient les intérêts ; troisièmement, il faut qu'elles apportent des gages, c'est-à-dire la caution dont je parlais tout à l'heure ; et quatrièmement, il faut qu'elles s'engagent à ce qu'on appelle des contreparties, c'est-à-dire qu'elles s'engagent à des principes éthiques, notamment concernant les rémunérations, notamment concernant les bonus, notamment concernant les parachutes dorés parce qu'on va en profiter pour mettre un petit peu d'ordre aussi dans tout cela. Ca sera leur choix de venir emprunter, mais si elles empruntent, elles devront satisfaire à ces obligations-là. Voilà les conditions. Pour celles qui sont en mauvaise santé...
G. Cahour : ... qui sont en situation de faillite ou proche de la faillite.
E. Izraelewicz : C'est les 40 milliards.
G. Cahour : C'est les 40 milliards qui restent.
A ce moment-là, c'est les 40 milliards et elles viennent à un autre guichet, ça n'est pas un guichet de prêt, c'est un guichet où elles peuvent...
E. Izraelewicz : ... c'est un guichet de participations.
Voilà, elles peuvent demander à l'Etat de prendre des participations, c'est-à-dire de rentrer au capital de la banque.
E. Izraelewicz : Il y avait une question un peu plus générale, je pense que beaucoup d'auditeurs, de téléspectateurs, se posent, c'est : pourquoi venir sauver des banques puisque vous nous avez dit depuis plusieurs semaines que les banques françaises vont bien ? Pourquoi venir les sauver, pourquoi mettre des montants aussi importants si elles vont s'y bien ?
Je rappelle la mécanique : sur les 360 milliards, il y en a 320, c'est-à-dire l'immense majorité qui est destinée à réamorcer la pompe, à refaire tourner le moteur, parce que aujourd'hui il est grippé, il est bloqué.
E. Izraelewicz : Pour que la machine à produire du crédit reparte.
Il faut que les pistons repartent, il faut que ça tourne. Donc, ça... il n'est pas du tout d'ailleurs exclu qu'une toute petite partie soit nécessaire seulement.
G. Cahour : Donc, finalement, ces 320 milliards c'est quelque part un feu d'artifice. Comme on est arrivé dans des extrêmes du côté des aberrations de la finance, avec ces cours de bourse qui ont plongé de manière astronomique, vous, vous arrivez et vous déployez un feu d'artifice avec ces 320 milliards sachant très bien que finalement ils ne serviront jamais. C'est de la psychologie, finalement !
C'est être en avant.
G. Cahour : Donc, si on dit que c'est de la psychologie, est-ce qu'on se trompe ?
Ce n'est pas de la psychologie parce que c'est de la vraie garantie. La garantie de l'Etat c'est quelque chose d'extrêmement fort, d'extrêmement lourd, c'est pour ça que...
G. Cahour : ... oui, mais vous auriez pu dire 500 ou 600 milliards.
Non mais, c'est pour ça que cet après-midi je vais devant l'Assemblée nationale, parce qu'il faut que le Parlement, il faut que la plus haute représentation du peuple français soit impliquée dans le processus, et c'est très important.
G. Cahour : Mais ça aurait pu être 500 ou 600 milliards, C. Lagarde.
320, vous savez, je vous l'ai dit tout à l'heure, 500 milliards c'est le financement de l'économie française chaque année.
G. Cahour : Non mais, c'est un peu arbitraire comme chiffre, non ?
Donc, couvrir les deux tiers ça paraît raisonnable.
E. Izraelewicz : Est-ce que vous pensez qu'il y aura une banque qui viendra au guichet pour sa recapitalisation, une banque française qui viendra ?
Mais il y en a une déjà.
E. Izraelewicz : Il y a eu Dexia qui a été faite.
Voilà, Dexia...
E. Izraelewicz : ... mais est-ce que vous pensez qu'au-delà...
... une belgo-française.
E. Izraelewicz : ... on parle de la Société Générale, on parle d'autres banques, est-ce que vous pensez qu'il va y avoir une banque qui va venir ?
G. Cahour : Oui, parce que finalement en Allemagne et en Grande-Bretagne, ça a déjà commencé.
En Grande-Bretagne, c'est trois banques, je crois, qui ont été identifiées. Moi, je suis incapable aujourd'hui d'identifier une quelconque banque française. Pourquoi ? Parce qu'elles ont des ratios de fonds propres qui sont élevés par rapport à la moyenne européenne. Mais, comme la Grande-Bretagne est en train de mettre actuellement en place un plan qui va permettre aux banques anglaises de remonter...
G. Cahour : ... juste une précision, qu'est-ce que vous appelez un ratio de fonds propres, pour que tout le comme comprenne ?
Ratio de fonds propres, c'est le montant de capitaux durs que détient la banque, qu'elle doit détenir, par rapport à ses engagements de prêts, pour faire simple.
G. Cahour : D'accord.
Et les banques françaises, aujourd'hui, elles sont plus solides, elles sont plus capitalisées, si on veut, que leurs concurrentes hors de France. Comme aujourd'hui, la Grande-Bretagne a décidé de recapitaliser et de porter les fonds propres, c'est-à-dire les capitaux durs des banques anglaises beaucoup plus haut qu'ils ne le sont actuellement, il se peut que les banques françaises souhaitent s'aligner...
E. Izraelewicz : ... ça veut dire que même des banques très saines pour pouvoir augmenter leurs fonds propres vont venir à ce guichet ? C'est ce que vous voulez dire, BNP/Paribas ou d'autres peut-être vont venir à ce guichet pour s'aligner sur les Britanniques ?
Elles peuvent tout à fait le faire, et ça c'est leur stratégie, c'est leur décision. Si elles le font, je rappelle qu'à ce moment-là (elles) n'entrent pas au capital au plus haut niveau mais un cran en dessous parce que lorsqu'une banque est saine, il n'y a aucune raison que l'Etat français aille au capital directement.
E. Izraelewicz : Et il pourrait y avoir des administrateurs dans les banques ? Ils prendraient des participations ?
Dans les banques où l'Etat français prendrait du capital - c'est la situation par exemple dans le cas de Dexia - là il est indispensable que l'Etat soit représenté, oui, bien sûr.
G. Cahour : On va marquer une pause et ensuite on va reparler ensemble des contreparties justement parce que N. Sarkozy a souvent défendu la moralisation des affaires. On dit que c'est une occasion de le faire avec cette crise. On y revient avec vous, C. Lagarde sur RMC et BFM TV dans un instant. A tout de suite.
[...]
source Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 14 octobre 2008
Bonjour.
G. Cahour : Ministre de l'Economie, des Finances, de l'emploi, de l'Industrie. Et également E. Izraelewicz, qui sera à mes côtés pour cette discussion jusqu'à 9 h, directeur de la rédaction de La Tribune. On fait marcher les complémentarités de groupes ce matin avec Erik. C. Lagarde, 360 milliards d'euros, ce plan de sauvetage des banques rien que pour la France. Alors, c'est un chiffre très difficile à mesurer, on dit en général que ça donne le vertige. J'ai trouvé ce matin quelques petites comparaisons, c'est un peu plus du tiers de la dette de la France, c'est 275 millions de Smic mensuels, c'est 12.000 rames de TGV, et finalement ça sera combien pour le contribuable ?
Aujourd'hui, rien ! Vous avez raison de dire que c'est un chiffre astronomique. Pour vous donner un ordre de grandeur, le financement de l'économie française c'est à peu près 500 milliards d'euros, donc avec 360 milliards d'euros, vous voyez qu'on est à un peu plus des deux tiers. Je dis « rien » parce que c'est en réalité le montant de la garantie de l'Etat pour 320 milliards et c'est aussi d'une certaine manière la garantie de l'Etat pour 40 milliards. Je m'explique, les 320 milliards que je mentionnais au début seront destinés à prêter de l'argent aux banques. Qu'est-ce qui se passe, qu'est-ce qui s'est passé jusqu'à maintenant ? Les banques ne se faisaient plus confiance, et donc les banques ne se prêtaient plus entre elles. Or, pour faire fonctionner l'économie, pour que le moteur tourne, il faut que les banques se prêtent entre elles. Donc, on met en place une espèce d'énorme caisse de prêts pour que les banques à nouveau se prêtent entre elles. Et on assortit ces prêts... alors, ces prêts ils ne sont pas tombés du ciel, c'est la société qui va refinancer, (qui) va sur le marché, elle lève de l'argent, et elle lève de l'argent facilement et à un coût relativement bas parce que l'Etat donne sa garantie.
E. Izraelewicz : Mais l'Etat va être obligé d'emprunter pour pouvoir prêter, donc il va emprunter, vous venez de l'expliquer, et l'emprunt ça coûte, même pour l'Etat, même si ça coûte moins cher que pour un particulier, ça coûte. Donc, d'une certaine manière, en bout de course, il y aura quand même le contribuable qui devra payer les intérêts de la dette.
Non, parce que ça coûte quand on emprunte, mais ça rapporte quand on prête.
G. Cahour : C'est-à-dire que vous allez prêter à des taux supérieurs à ceux que vous vous payez.
Voilà, j'y viens ! On ne va emprunter que si on doit prêter, d'accord. Donc, on paie des intérêts lorsqu'on emprunte mais on en encaisse quand on prête.
G. Cahour : Et quels seront ces taux ?
Voilà, j'y viens !
G. Cahour : Quels seront ces taux auxquels vous prêterez de l'argent aux banques ?
Nous, on va donner notre garantie. Aujourd'hui, la garantie de l'Etat elle vaut beaucoup parce que c'est un endroit où les gens savent qu'ils peuvent faire confiance. Donc, le taux auquel on va emprunter sera relativement bas. En revanche, le taux auquel on va prêter sera plus élevé, si bien qu'entre les deux on réalise une marge, pour faire simple. Cette marge-là, eh bien elle rapporte à l'Etat.
E. Izraelewicz : Il y a des prêts qui ne seront pas remboursés, que l'Etat finalement devra rembourser, des pertes donc pour ces structures. Donc, là aussi c'est le contribuable en bout de course qui paiera.
Alors, ça aussi on n'y a pensé, et on a demandé...
E. Izraelewicz : (...)
Non mais, on est garant des intérêts du contribuable. Donc, ce que demandera aux banques qui viennent emprunter chez nous, on va leur dire « très bien, on vous prête, vous allez payer un intérêt, et puis en plus vous allez nous apporter des gages, vous allez nous apporter des sûretés, vous allez nous apporter soit des titres, soit des créances que vous détenez sur vos propres clients, et nous on va les garder, on ne va pas les encaisser, on ne les acquiert pas mais on les garde comme un gage. Et si jamais, vous, banques, qui avez emprunté vous êtes défaillants, à ce moment-là on exercera nos gages ».
G. Cahour : C'est la caution, quoi ?
Exactement !
E. Izraelewicz : Donc, ça ne coûtera jamais rien aux contribuables, c'est ce que vous dites aujourd'hui ?
Ecoutez, on a construit le mécanisme pour que non seulement ça ne coûte pas mais que ça rapporte à l'Etat.
G. Cahour : Alors, dans quel cas, concrètement, ces banques pourront-elles profiter de ces 320 milliards d'euros ?
Elles vont en profiter à trois conditions. La première, c'est qu'elles soient en bon état. Il faut qu'elles aient suffisamment de fonds propres, qu'elles soient conformes à toutes leurs obligations. Donc, ce sont des banques en bon état, en bonne santé, qui vont pouvoir...
G. Cahour : ...celles en situation de faillite, elles ne peuvent pas en profiter ?
Attendez, attendez, j'y viens. Ah non, non, non, non, non. Donc, il faut qu'elles soient en bonne santé.
G. Cahour : D'accord.
Deuxièmement, il faut qu'elles paient les intérêts ; troisièmement, il faut qu'elles apportent des gages, c'est-à-dire la caution dont je parlais tout à l'heure ; et quatrièmement, il faut qu'elles s'engagent à ce qu'on appelle des contreparties, c'est-à-dire qu'elles s'engagent à des principes éthiques, notamment concernant les rémunérations, notamment concernant les bonus, notamment concernant les parachutes dorés parce qu'on va en profiter pour mettre un petit peu d'ordre aussi dans tout cela. Ca sera leur choix de venir emprunter, mais si elles empruntent, elles devront satisfaire à ces obligations-là. Voilà les conditions. Pour celles qui sont en mauvaise santé...
G. Cahour : ... qui sont en situation de faillite ou proche de la faillite.
E. Izraelewicz : C'est les 40 milliards.
G. Cahour : C'est les 40 milliards qui restent.
A ce moment-là, c'est les 40 milliards et elles viennent à un autre guichet, ça n'est pas un guichet de prêt, c'est un guichet où elles peuvent...
E. Izraelewicz : ... c'est un guichet de participations.
Voilà, elles peuvent demander à l'Etat de prendre des participations, c'est-à-dire de rentrer au capital de la banque.
E. Izraelewicz : Il y avait une question un peu plus générale, je pense que beaucoup d'auditeurs, de téléspectateurs, se posent, c'est : pourquoi venir sauver des banques puisque vous nous avez dit depuis plusieurs semaines que les banques françaises vont bien ? Pourquoi venir les sauver, pourquoi mettre des montants aussi importants si elles vont s'y bien ?
Je rappelle la mécanique : sur les 360 milliards, il y en a 320, c'est-à-dire l'immense majorité qui est destinée à réamorcer la pompe, à refaire tourner le moteur, parce que aujourd'hui il est grippé, il est bloqué.
E. Izraelewicz : Pour que la machine à produire du crédit reparte.
Il faut que les pistons repartent, il faut que ça tourne. Donc, ça... il n'est pas du tout d'ailleurs exclu qu'une toute petite partie soit nécessaire seulement.
G. Cahour : Donc, finalement, ces 320 milliards c'est quelque part un feu d'artifice. Comme on est arrivé dans des extrêmes du côté des aberrations de la finance, avec ces cours de bourse qui ont plongé de manière astronomique, vous, vous arrivez et vous déployez un feu d'artifice avec ces 320 milliards sachant très bien que finalement ils ne serviront jamais. C'est de la psychologie, finalement !
C'est être en avant.
G. Cahour : Donc, si on dit que c'est de la psychologie, est-ce qu'on se trompe ?
Ce n'est pas de la psychologie parce que c'est de la vraie garantie. La garantie de l'Etat c'est quelque chose d'extrêmement fort, d'extrêmement lourd, c'est pour ça que...
G. Cahour : ... oui, mais vous auriez pu dire 500 ou 600 milliards.
Non mais, c'est pour ça que cet après-midi je vais devant l'Assemblée nationale, parce qu'il faut que le Parlement, il faut que la plus haute représentation du peuple français soit impliquée dans le processus, et c'est très important.
G. Cahour : Mais ça aurait pu être 500 ou 600 milliards, C. Lagarde.
320, vous savez, je vous l'ai dit tout à l'heure, 500 milliards c'est le financement de l'économie française chaque année.
G. Cahour : Non mais, c'est un peu arbitraire comme chiffre, non ?
Donc, couvrir les deux tiers ça paraît raisonnable.
E. Izraelewicz : Est-ce que vous pensez qu'il y aura une banque qui viendra au guichet pour sa recapitalisation, une banque française qui viendra ?
Mais il y en a une déjà.
E. Izraelewicz : Il y a eu Dexia qui a été faite.
Voilà, Dexia...
E. Izraelewicz : ... mais est-ce que vous pensez qu'au-delà...
... une belgo-française.
E. Izraelewicz : ... on parle de la Société Générale, on parle d'autres banques, est-ce que vous pensez qu'il va y avoir une banque qui va venir ?
G. Cahour : Oui, parce que finalement en Allemagne et en Grande-Bretagne, ça a déjà commencé.
En Grande-Bretagne, c'est trois banques, je crois, qui ont été identifiées. Moi, je suis incapable aujourd'hui d'identifier une quelconque banque française. Pourquoi ? Parce qu'elles ont des ratios de fonds propres qui sont élevés par rapport à la moyenne européenne. Mais, comme la Grande-Bretagne est en train de mettre actuellement en place un plan qui va permettre aux banques anglaises de remonter...
G. Cahour : ... juste une précision, qu'est-ce que vous appelez un ratio de fonds propres, pour que tout le comme comprenne ?
Ratio de fonds propres, c'est le montant de capitaux durs que détient la banque, qu'elle doit détenir, par rapport à ses engagements de prêts, pour faire simple.
G. Cahour : D'accord.
Et les banques françaises, aujourd'hui, elles sont plus solides, elles sont plus capitalisées, si on veut, que leurs concurrentes hors de France. Comme aujourd'hui, la Grande-Bretagne a décidé de recapitaliser et de porter les fonds propres, c'est-à-dire les capitaux durs des banques anglaises beaucoup plus haut qu'ils ne le sont actuellement, il se peut que les banques françaises souhaitent s'aligner...
E. Izraelewicz : ... ça veut dire que même des banques très saines pour pouvoir augmenter leurs fonds propres vont venir à ce guichet ? C'est ce que vous voulez dire, BNP/Paribas ou d'autres peut-être vont venir à ce guichet pour s'aligner sur les Britanniques ?
Elles peuvent tout à fait le faire, et ça c'est leur stratégie, c'est leur décision. Si elles le font, je rappelle qu'à ce moment-là (elles) n'entrent pas au capital au plus haut niveau mais un cran en dessous parce que lorsqu'une banque est saine, il n'y a aucune raison que l'Etat français aille au capital directement.
E. Izraelewicz : Et il pourrait y avoir des administrateurs dans les banques ? Ils prendraient des participations ?
Dans les banques où l'Etat français prendrait du capital - c'est la situation par exemple dans le cas de Dexia - là il est indispensable que l'Etat soit représenté, oui, bien sûr.
G. Cahour : On va marquer une pause et ensuite on va reparler ensemble des contreparties justement parce que N. Sarkozy a souvent défendu la moralisation des affaires. On dit que c'est une occasion de le faire avec cette crise. On y revient avec vous, C. Lagarde sur RMC et BFM TV dans un instant. A tout de suite.
[...]
source Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 14 octobre 2008