Texte intégral
Monsieur le Président,
Madame la Directrice,
Mesdames et Messieurs,
La privation de famille est un drame. Cette situation expose très souvent les enfants à des situations humaines peu tolérables : laissés à la rue, victimes de trafics, abandonnés dans des institutions déshumanisées, livrés à la délinquance. Aucun pays n'y échappe, mais la situation est sans doute encore plus aiguë dans les pays dont les politiques sociales sont défaillantes.
Vos travaux que vous m'avez invitée à clôturer sont d'autant plus essentiels que l'Agence est encore un jeune opérateur. Il doit pouvoir apprendre de vos expériences, et Mme de Choiseul me disait à l'instant qu'il y avait parmi vous des représentants venus de nombreux pays, pour toujours mieux conduire la mission que le législateur lui a confié dans le respect des grands principes qui fondent la protection de l'enfance et la coopération en matière d'adoption internationale. Je pense évidemment à la convention de La Haye de 1993.
Ce sujet est au coeur de la réforme de l'adoption internationale voulue par le président de la République dans la suite de la remise du rapport de Jean-Marie Colombani. Il va de pair avec la réforme de l'adoption nationale conduite par Nadine Morano. Notre objectif ce n'est pas de "faire du chiffre" en adoption internationale, notre objectif c'est bien d'engager la France dans une politique ambitieuse de coopération avec les pays d'origine pour mieux soutenir les solutions existantes chez eux pour les enfants privés de famille.
C'est ainsi et seulement ainsi qu'on pourra créer un nouveau socle pour l'adoption internationale qui s'inscrit naturellement au nombre des solutions proposées. Ce n'est pas la première, ce n'est pas la principale, mais cela en est bien une qu'il faut gérer avec discernement et avec ambition. Avec Bernard Kouchner, nous avons décidé d'engager le ministère des Affaires étrangères et européennes dans une telle politique dès 2009.
Le premier de ces moyens c'est évidemment de redonner à la France une Autorité centrale de l'adoption internationale capable de remplir efficacement les missions qui lui incombent au titre de l'application de la convention de La Haye. C'est une réforme en marche. Un ambassadeur chargé de l'adoption internationale, M. Jean-Paul Monchau, a été nommé en Conseil des ministres en juin dernier. Dès le premier trimestre 2009 il prendra la tête de cette autorité centrale réformée et professionnalisée, forte de 22 agents entièrement dédiés à l'adoption internationale. Mais le travail est déjà engagé, et tout en conduisant cette réforme "administrative", il s'attache à définir une stratégie 2009 de l'adoption internationale en concertation avec les opérateurs, parmi lesquels en premier lieu l'AFA.
Mais aucune stratégie ne peut fonctionner si on ne se donne pas les moyens humains et financiers de la conduire sur le terrain. C'était une des recommandations du rapport Colombani. Nous avons activement travaillé en ce sens avec Bernard Kouchner et Alain Joyandet. J'ai pu en constater moi-même l'absolue nécessité chaque fois que mes voyages m'ont conduit à traiter de la protection de l'enfance, que ce soit par exemple en Haïti, au Guatemala ou au Cambodge.
Je ne compte plus le nombre de familles que j'ai croisées en plein désarroi, perdues dans le pays, ne sachant ni où aller ni à qui s'adresser, réduites à voir l'enfant qui allait devenir le leur grandir dans un orphelinat aux murs jaunis jusqu'à ce qu'aboutissent les procédures toujours plus compliquées. Sans même parler des coûts toujours plus lourds qu'elles doivent supporter, les voyages répétés, etc. J'y vois d'ailleurs un vrai facteur d'inégalité. Pour adopter aujourd'hui, il faut avoir les moyens !
Le résultat est là. Dès 2009, le ministère des Affaires étrangères et européennes consacrera 3 millions d'euros à la coopération humanitaire en faveur de l'enfance privée de famille. Sur ces 3 millions, 350 000 euros viendront s'ajouter ainsi aux 150 000 euros actuellement consacrés par le ministère à l'aide aux Organismes autorisés pour l'Adoption.
De plus en plus de pays conditionnent la faculté d'adopter à l'existence d'une véritable politique de coopération avec eux en faveur de l'enfance. Certains pays européens sont meilleurs que nous. Nous devons rattraper notre retard.
Nous devons agir sur plusieurs niveaux de coopération. L'Etat doit nouer avec les pays d'origine une politique de coopération forte en faveur des enfants privés de famille, qui n'exclut aucune des solutions existantes, à commencer par les solutions locales proposées à ces enfants. C'est l'esprit même de la convention de La Haye. La France entend le respecter au plus près. C'est d'ailleurs le coeur de mission du réseau des volontaires de l'adoption internationale que j'ai lancé en juillet dernier pour accompagner ce mouvement.
Les opérateurs, plus proches du terrain, disposant de moins de moyens, doivent pouvoir aider à l'amélioration des conditions d'accueil de ces enfants dans les institutions tout en se gardant au mieux, et je sais combien ce point est sensible et essentiel, de soutenir financièrement directement les institutions d'accueil des enfants avec lesquelles ils travaillent.
Dans un tel dispositif, leur rôle et leur professionnalisme sont cruciaux. Ce sont eux qui sont au contact direct des institutions d'accueil, ce sont donc eux qui sont les plus exposés aux risques comme aux détresses. Il fallait mieux les soutenir, nouer avec eux un véritable dialogue afin qu'ils puissent nous aider à identifier les besoins, afin que nous puissions les appuyer dans leur action.
Il fallait également que l'AFA ait cette même capacité d'agir en faveur des institutions. C'est pourquoi j'ai proposé au président de la République que la réforme en cours inclue la modification nécessaire de la loi portant création de l'Agence. Nous travaillons en ce moment même avec Nadine Morano sur cette modification qui sera proposée au Parlement dans le cadre du projet de Loi de Finances 2009. Dans le même temps, nous élaborons la convention d'objectifs et de gestion qui encadrera la relation entre l'agence et les pouvoirs publics et qui sera signée, comme cela a été annoncé, dans les tous prochains mois.
Quel est le but de tout ça ?
C'est le droit de l'enfant qui est au coeur de nos préoccupations, de notre action. Ce droit se défend sur le terrain. Nous devons savoir être à l'écoute des besoins des pays d'origine, et contribuer à leur apporter des solutions toujours plus efficaces, toujours plus développées. Dans une institution un enfant ne vit pas, il survit. Il est dans l'attente de quelque chose, sans savoir quoi. Sans savoir si cette attente sera satisfaite un jour.
Etre à l'écoute, identifier les besoins, construire des solutions, voilà la mission du réseau expérimental des volontaires de l'adoption internationale que j'ai cité. C'est un outil de plus. Il ne sera pas nécessaire partout. Il y a des pays dans lesquels la présence forte des opérateurs français et notamment l'AFA répond parfaitement à cette objectif. Mais ce n'est pas une généralité. Le pari que nous faisons c'est d'aller plus loin avec les pays dans la connaissance de l'ampleur des besoins, et la mise en oeuvre de toutes les solutions possibles.
De nombreuses familles françaises sont prêtes à offrir une solution aux enfants privés de famille. Ce n'est pas un problème, c'est un espoir pour les enfants à qui aucune solution n'est proposée. Pour qu'il devienne réalité nous devons devenir un véritable partenaire actif de la protection de l'enfance privée de famille dans les pays. Telle est mon ambition. Telle est l'ambition de la réforme en cours. Voilà l'objectif qu'ensemble nous nous sommes assignés et que j'espère de tout coeur que nous atteindrons dans l'intérêt des enfants. Encore et toujours.
Je vous remercie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 octobre 2008
Madame la Directrice,
Mesdames et Messieurs,
La privation de famille est un drame. Cette situation expose très souvent les enfants à des situations humaines peu tolérables : laissés à la rue, victimes de trafics, abandonnés dans des institutions déshumanisées, livrés à la délinquance. Aucun pays n'y échappe, mais la situation est sans doute encore plus aiguë dans les pays dont les politiques sociales sont défaillantes.
Vos travaux que vous m'avez invitée à clôturer sont d'autant plus essentiels que l'Agence est encore un jeune opérateur. Il doit pouvoir apprendre de vos expériences, et Mme de Choiseul me disait à l'instant qu'il y avait parmi vous des représentants venus de nombreux pays, pour toujours mieux conduire la mission que le législateur lui a confié dans le respect des grands principes qui fondent la protection de l'enfance et la coopération en matière d'adoption internationale. Je pense évidemment à la convention de La Haye de 1993.
Ce sujet est au coeur de la réforme de l'adoption internationale voulue par le président de la République dans la suite de la remise du rapport de Jean-Marie Colombani. Il va de pair avec la réforme de l'adoption nationale conduite par Nadine Morano. Notre objectif ce n'est pas de "faire du chiffre" en adoption internationale, notre objectif c'est bien d'engager la France dans une politique ambitieuse de coopération avec les pays d'origine pour mieux soutenir les solutions existantes chez eux pour les enfants privés de famille.
C'est ainsi et seulement ainsi qu'on pourra créer un nouveau socle pour l'adoption internationale qui s'inscrit naturellement au nombre des solutions proposées. Ce n'est pas la première, ce n'est pas la principale, mais cela en est bien une qu'il faut gérer avec discernement et avec ambition. Avec Bernard Kouchner, nous avons décidé d'engager le ministère des Affaires étrangères et européennes dans une telle politique dès 2009.
Le premier de ces moyens c'est évidemment de redonner à la France une Autorité centrale de l'adoption internationale capable de remplir efficacement les missions qui lui incombent au titre de l'application de la convention de La Haye. C'est une réforme en marche. Un ambassadeur chargé de l'adoption internationale, M. Jean-Paul Monchau, a été nommé en Conseil des ministres en juin dernier. Dès le premier trimestre 2009 il prendra la tête de cette autorité centrale réformée et professionnalisée, forte de 22 agents entièrement dédiés à l'adoption internationale. Mais le travail est déjà engagé, et tout en conduisant cette réforme "administrative", il s'attache à définir une stratégie 2009 de l'adoption internationale en concertation avec les opérateurs, parmi lesquels en premier lieu l'AFA.
Mais aucune stratégie ne peut fonctionner si on ne se donne pas les moyens humains et financiers de la conduire sur le terrain. C'était une des recommandations du rapport Colombani. Nous avons activement travaillé en ce sens avec Bernard Kouchner et Alain Joyandet. J'ai pu en constater moi-même l'absolue nécessité chaque fois que mes voyages m'ont conduit à traiter de la protection de l'enfance, que ce soit par exemple en Haïti, au Guatemala ou au Cambodge.
Je ne compte plus le nombre de familles que j'ai croisées en plein désarroi, perdues dans le pays, ne sachant ni où aller ni à qui s'adresser, réduites à voir l'enfant qui allait devenir le leur grandir dans un orphelinat aux murs jaunis jusqu'à ce qu'aboutissent les procédures toujours plus compliquées. Sans même parler des coûts toujours plus lourds qu'elles doivent supporter, les voyages répétés, etc. J'y vois d'ailleurs un vrai facteur d'inégalité. Pour adopter aujourd'hui, il faut avoir les moyens !
Le résultat est là. Dès 2009, le ministère des Affaires étrangères et européennes consacrera 3 millions d'euros à la coopération humanitaire en faveur de l'enfance privée de famille. Sur ces 3 millions, 350 000 euros viendront s'ajouter ainsi aux 150 000 euros actuellement consacrés par le ministère à l'aide aux Organismes autorisés pour l'Adoption.
De plus en plus de pays conditionnent la faculté d'adopter à l'existence d'une véritable politique de coopération avec eux en faveur de l'enfance. Certains pays européens sont meilleurs que nous. Nous devons rattraper notre retard.
Nous devons agir sur plusieurs niveaux de coopération. L'Etat doit nouer avec les pays d'origine une politique de coopération forte en faveur des enfants privés de famille, qui n'exclut aucune des solutions existantes, à commencer par les solutions locales proposées à ces enfants. C'est l'esprit même de la convention de La Haye. La France entend le respecter au plus près. C'est d'ailleurs le coeur de mission du réseau des volontaires de l'adoption internationale que j'ai lancé en juillet dernier pour accompagner ce mouvement.
Les opérateurs, plus proches du terrain, disposant de moins de moyens, doivent pouvoir aider à l'amélioration des conditions d'accueil de ces enfants dans les institutions tout en se gardant au mieux, et je sais combien ce point est sensible et essentiel, de soutenir financièrement directement les institutions d'accueil des enfants avec lesquelles ils travaillent.
Dans un tel dispositif, leur rôle et leur professionnalisme sont cruciaux. Ce sont eux qui sont au contact direct des institutions d'accueil, ce sont donc eux qui sont les plus exposés aux risques comme aux détresses. Il fallait mieux les soutenir, nouer avec eux un véritable dialogue afin qu'ils puissent nous aider à identifier les besoins, afin que nous puissions les appuyer dans leur action.
Il fallait également que l'AFA ait cette même capacité d'agir en faveur des institutions. C'est pourquoi j'ai proposé au président de la République que la réforme en cours inclue la modification nécessaire de la loi portant création de l'Agence. Nous travaillons en ce moment même avec Nadine Morano sur cette modification qui sera proposée au Parlement dans le cadre du projet de Loi de Finances 2009. Dans le même temps, nous élaborons la convention d'objectifs et de gestion qui encadrera la relation entre l'agence et les pouvoirs publics et qui sera signée, comme cela a été annoncé, dans les tous prochains mois.
Quel est le but de tout ça ?
C'est le droit de l'enfant qui est au coeur de nos préoccupations, de notre action. Ce droit se défend sur le terrain. Nous devons savoir être à l'écoute des besoins des pays d'origine, et contribuer à leur apporter des solutions toujours plus efficaces, toujours plus développées. Dans une institution un enfant ne vit pas, il survit. Il est dans l'attente de quelque chose, sans savoir quoi. Sans savoir si cette attente sera satisfaite un jour.
Etre à l'écoute, identifier les besoins, construire des solutions, voilà la mission du réseau expérimental des volontaires de l'adoption internationale que j'ai cité. C'est un outil de plus. Il ne sera pas nécessaire partout. Il y a des pays dans lesquels la présence forte des opérateurs français et notamment l'AFA répond parfaitement à cette objectif. Mais ce n'est pas une généralité. Le pari que nous faisons c'est d'aller plus loin avec les pays dans la connaissance de l'ampleur des besoins, et la mise en oeuvre de toutes les solutions possibles.
De nombreuses familles françaises sont prêtes à offrir une solution aux enfants privés de famille. Ce n'est pas un problème, c'est un espoir pour les enfants à qui aucune solution n'est proposée. Pour qu'il devienne réalité nous devons devenir un véritable partenaire actif de la protection de l'enfance privée de famille dans les pays. Telle est mon ambition. Telle est l'ambition de la réforme en cours. Voilà l'objectif qu'ensemble nous nous sommes assignés et que j'espère de tout coeur que nous atteindrons dans l'intérêt des enfants. Encore et toujours.
Je vous remercie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 octobre 2008