Texte intégral
Monsieur le Préfet de GIRONDE (Francis Idrac) ;
Madame la députée (Chantal Bourrague) représentant Alain Juppé, maire de Bordeaux;
Messieurs les députés (Jean-Paul Garraud) ; (François Rochebloine) ; (Alain Néri) ; (Georges Colombier) ;
Messieurs les sénateurs (Gérard César) ; (Xavier Pintat) ; (Guy Fischer)
Monsieur le président du conseil régional d'Aquitaine (Alain Rousset) ;
Monsieur le président du conseil général de Gironde (Philippe Madrelle) ;
Monsieur le Préfet, directeur général de ONAC l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (Rémy Enfrun) ;
Monsieur le Président de la Fédération nationale des anciens combattants en Algérie (Wladylas Marek) ;
Monsieur le Secrétaire Général de la Fédération nationale des anciens combattants en Algérie (Maurice Sicart) ;
Mesdames, Messieurs les présidents d'association
Mesdames et Messieurs,
Je sais que vous êtes un auditoire exigeant.
Comment n'en serait-il pas ainsi quand on sait que cela fait un demi siècle que vous défendez avec pugnacité la mémoire de ceux qui, un jour, ont dû quitter leur famille pour aller rejoindre une terre, l'Algérie, en proie à une guerre qui ne disait pas encore son nom?
Votre Fédération appartient à ce monde des associations qui se bat pour ses idées et parle avec toute la franchise et la sincérité de son coeur.
Votre d'exigence envers votre Secrétaire d'Etat est à la hauteur de votre engagement : de haut niveau.
Je le comprends d'autant mieux que mes attentes envers une association qui, comme la vôtre, a su au fil des années :
- oeuvrer pour la reconnaissance officielle d'une guerre,
- se battre pour les plus démunis et pour les veuves de vos camarades décédés,
sont aussi fortes.
La politique est pour moi la science de l'exigence.
Notamment, lorsqu'il s'agit, et je ne vous le cache pas, de faire évoluer les structures administratives en charge du monde combattant, mais j'y reviendrais un peu plus tard.
Lorsque nous nous étions rencontrés en avril dernier, monsieur le Président, je vous avais fait part de ma volonté de m'engager fortement au profit et aux côtés du monde combattant.
Ces paroles, mes paroles, je sais que vous les jugerez à l'aune de mes actes et vous avez raison.
Je connais vos aspirations et vos préoccupations grâce à vos représentants que j'ai eu l'occasion de rencontrer à travers mon parcours d'élu local, en tant que maire de Mulhouse, de parlementaire et désormais, de Secrétaire d'Etat.
Il faut dire que l'implantation de votre association dans tous les départements de France et d'Outre mer vous confère une force à la hauteur du nombre et de la qualité de votre réseau territorial.
370 000 adhérents directs, rassemblés dans 3600 comités locaux, ce n'est pas rien.
Je veux d'ailleurs aujourd'hui rendre hommage à cette troisième génération du feu, longtemps appelée « la dernière génération du feu ».
Les fondateurs de votre association espéraient que cette guerre soit effectivement la dernière.
Je ne veux pas oublier que lorsque la FNACA, ou devrais-je plutôt dire la FNAA (Fédération nationale des anciens d'Algérie), a été créée le 21 septembre 1958, la guerre, qu'on ne voulait pas nommer, faisait rage.
Lors du Congrès à l'hôtel Moderne de Paris, qui marqua la naissance de votre Fédération, Paul Debiesse, Paul Fromonteuil ou Jean-Jacques Servan-Schreider, pour ne citer qu'eux parmi les 110 délégués, avaient comme premières préoccupations :
- que le sang et la douleur cessent,
- que cette jeune génération, ayant fait l'expérience malgré elle de la guerre, revienne à la vie.
Sous la personnalité d'envergure de Jean-Jacques Servan-Schreiber, vous avez fondé une Fédération soucieuse de plus d'humanité.
Ce passionné de politique, qui a toujours cherché à faire bouger les lignes et qui fonda, à seulement 29 ans, le magazine « L'Express », fit parti de ces milliers de jeunes soldats qui ont participé à une aventure humaine hors du commun en Algérie.
Il était poussé à créer, comme tant d'autres qui sont peut-être présents dans cette salle, une association aux valeurs humanistes, préoccupée par la réconciliation entre les peuples.
Cette noble ambition, qui ne la partage pas ?
Je sais qu'il a fallu attendre 1999 pour que cette guerre, qui a marqué une génération entière de jeunes, âgés d'à peine 20 ans, soit reconnue officiellement et permette, d'une certaine façon, de tourner la page de chacune de vos histoires personnelles.
Lorsqu'aujourd'hui, vous vous retournez, c'est pour apercevoir 50 ans d'actions, 50 ans de mobilisation, 50 ans d'engagement.
Solidarité, courage, engagement, voici les mots que je souhaite voir guider mon action en faveur du monde combattant.
Permettez-moi d'ailleurs, en vous la décrivant, de répondre à certaines de vos préoccupations communes.
Parlons d'emblée de la réforme de l'administration en charge du monde combattant, de votre administration.
Je veux d'abord vous dire, sans démagogie, que cette réforme, conséquence de la Révision générale des politiques publiques, me paraît indispensable.
Avec toutes les autres réformes, elle doit permettre à notre pays, de regagner des marges de manoeuvre nécessaires au rétablissement de nos finances publiques.
Je n'ai à cet égard pas besoin de vous décrire le contexte économique et financier.
Ceci étant posé, ni le contexte économique, ni la Révision générale des politiques publiques ne doivent nous conduire à brader les intérêts du monde combattant.
Votre maillage territorial, la dispersion de vos adhérents, vous conduise naturellement à être très attaché au maintien d'un service rendu de qualité jusqu'à l'échelon départemental.
Cette attente forte est la mienne, celle du Président de la République que je représente aujourd'hui et celle, naturellement, de l'ensemble du gouvernement
Le deuxième contrat d'objectifs et de moyens de l'ONAC, qui est en cours de préparation et de rédaction, prendra en compte ces évolutions.
Il sera présenté au cours du tout prochain conseil d'administration de l'ONAC du 28 octobre, auquel participera votre président qui, je n'en doute pas, et vous non plus d'ailleurs, fera valoir vos positions
Je sais que cette réforme, je ne peux la conduire seul depuis mon bureau parisien.
Nous la conduirons ensemble, elle sera une réussite collective.
J'ai veillé à ce que le projet de loi de finances pour 2009 permette à l'ONAC, mais aussi à l'INI, d'aborder cette délicate phase de restructuration avec des enveloppes de fonctionnement en hausse, qui sont l'une des conditions du succès.
Il y aura sans doute, ici ou là, des accrocs. Je sais pouvoir compter sur Rémy Enfrun, le directeur général de la « maison des combattants », l'ONAC, que je salue au passage, et sur Liliane Block, notre directrice des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale (DSPRS) pour les régler avec mon équipe et moi-même.
Lorsque le contexte est difficile, je considère comme un devoir de faire effort sur celles et ceux les plus en difficulté.
C'est pourquoi, je m'étais engagé à revaloriser le plafond de l'allocation différentielle de solidarité en faveur des conjoints survivants à 750 Euros.
C'est aujourd'hui chose faite.
J'ai également décidé de ne plus prendre en compte le montant de l'allocation personnalisée au logement (APL) dans l'évaluation du montant des ressources.
Il faudra, et je m'y engage, renouveler à la fin du premier semestre de l'année prochaine, l'évaluation du dispositif effectué cette année et naturellement, en tirer toutes les conclusions tant au niveau d'une éventuelle hausse du plafond qu'au mode de calcul des ressources des allocataires.
Une autre de vos préoccupations concerne le suivi sanitaire des essais nucléaires français.
Ce dossier fait l'objet d'une attention particulière de la part des pouvoirs publics.
Vous savez qu'un comité de liaison pour la coordination du suivi sanitaire des essais nucléaires français (CSSEN) a été créé en janvier 2004 et qu'une étude épidémiologique commandé par le ministère de la défense afin d'évaluer l'existence d'une éventuelle surmortalité parmi ces personnels est en cours.
Le comité de pilotage, constitué des membres du comité scientifique de l'Observatoire de la santé des vétérans (OSV), composé d'experts appartenant pour la plupart aux agences et instituts sanitaires civils, chargé de suivre le déroulement de cette étude et d'en garantir l'indépendance scientifique, rendra ses résultats au cours du 1er semestre 2010.
D'autre part, d'anciens militaires, personnels civils ou retraités du ministère de la défense ayant séjourné sur les sites d'expérimentation nucléaires français ont fait part au ministre de la défense de leur souhait de bénéficier d'une consultation médicale auprès du Service de santé des armées.
Hervé Morin a répondu favorablement à ces demandes en donnant des directives, fin janvier 2008, pour que ces personnels puissent consulter dans les services médicaux des unités des trois armées et de la gendarmerie.
Il ne m'a pas échappé, et vous l'avez redit ce matin monsieur le président, que le sujet de la « campagne double », bien connu des fonctionnaires ayant participé à la guerre d'Algérie, est « sensible ».
Je n'ignore ni le rapport GAL, ni l'avis du conseil d'Etat qui s'en est suivi. N'ignorez pas non plus les difficultés d'application d'une telle mesure.
J'ai eu l'occasion de dire au comité d'entente, que j'ai vu brièvement rue de Bellechasse peu après mon arrivée, que rien à ce sujet ne pourrait être inscrit au budget 2009 et que je relancerai la consultation interministérielle.
J'ai tenu parole puisque vous savez que le budget 2009 ne prévoit aucune mesure particulière pour la « campagne double », et j'ai par ailleurs relancé la concertation interministérielle sur ce sujet. Un membre de mon cabinet était vendredi dernier encore à Bercy pour évoquer, entre autre, ce sujet.
Je me donne jusqu'à la fin du printemps 2009 pour vous faire part de propositions concrètes sur ce dossier.
J'avance également rapidement sur l'actualisation des critères d'attribution de la carte du combattant.
Je veux vous redire que mon objectif, et celui du Gouvernement, est bien de garantir les conditions naturelles et morales du monde combattant.
Pour la première fois depuis 28 ans, l'indice de la retraite a été majoré trois années consécutivement de deux points, en 2006, 2007 et 2008, ce qui représente un impact financier non négligeable chaque année et dans la durée.
Néanmoins, je sais que trois hausses successives ne vous satisfont pas.
Je ne méconnais pas les engagements du Président de la République qui ont commencé à être mis en oeuvre par mon prédécesseur, Alain Marleix, l'année dernière.
Je ne veux pas préjuger ici de l'issue du débat parlementaire sur le budget des anciens combattant qui débutera à l'Assemblée Nationale le 5 novembre prochain.
Sachez seulement que je m'engage à me battre pour que ceux qui prétendent que « les anciens combattants seront sacrifiés sur l'autel de la crise mondiale » aient tort.
Ils ont de toute façon déjà tort puisque mon budget, pour les trois prochaines années, permet de préserver le droit à la reconnaissance et à la réparation dû aux anciens combattants et de consolider l'ONAC et l'INI.
Les travaux d'entretien des sépultures de guerre et la rénovation des hauts lieux de mémoire bénéficient aussi de crédits en augmentation.
En 2009, une enveloppe de 100 Meuros a été dégagée au titre de la décristallisation : ce montant comprend une dotation de 24 Meuros pour permettre l'entrée dans le dispositif des veuves mariées après les dates d'indépendance, dont les droits à pension ont été ouverts dès 2007, mais pour lesquelles il a été estimé que les demandes arriveraient progressivement.
Vos préoccupations et vos aspirations ne concernent pas seulement des questions matérielles.
Vous avez à coeur de préserver et de faire connaître ce qu'a représenté pour vous la guerre d'Algérie.
Vous avez d'ailleurs créé, dans cette optique, la commission G.A.J.E (Guerre, Algérie, Jeunesse, Enseignement). Cette commission mène depuis 1981 un travail de mémoire remarquable auprès des jeunes générations.
Personne ne peut imaginer un avenir de paix et de fraternité sans un passage de témoins sérieux et vigilants à nos jeunes.
C'est parce que nous savons que le devoir de mémoire est primordial, que mon prédécesseur a lancé, voilà plus de 4 ans, une vaste opération, que je poursuis, de collecte des témoignages oraux des acteurs de la guerre d'Algérie.
Il en a confié le pilotage à la Direction de la mémoire, du patrimoine et des archives (DMPA) et la mise en oeuvre à l'ONAC.
En 2008, ce sont plus de 600 témoignages oraux, venant de tout horizon : hommes du contingent, militaires de carrière, et d'autres, qui ont été récoltés.
Ces récits de vie permettent de donner une autre perspective à la guerre d'Algérie en donnant la parole à ceux qui ont participé à ces évènements.
Ces témoignages, à la fois historiques et sociologiques, vont permettre d'honorer la mémoire de ces milliers de soldats morts de la Guerre d'Algérie ainsi qu'aux victimes civiles.
S'agissant de la « Fondation pour la mémoire de la Guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie », le schéma de création se met peu à peu en place.
Les statuts ont été validés au cours de l'été par une réunion interministérielle et les trois millions d'Euros prévus dans le cadre de cette création de budget 2008, seront préservés sur un compte spécial de l'ONAC dans l'attente de la finalisation du schéma définitif de création.
« Se souvenir pour préserver l'avenir », c'est le sens de l'action que vous menez avec opiniâtreté pour faire valoir le 19 mars 1962 comme journée nationale de commémoration.
Mais force est de constater qu'il n'existe pas encore de consensus national à ce sujet.
Comment donc traiter le 19 mars ?
Je ne compte pas, pour être franc, me distinguer de mon prédécesseur à ce sujet. Nous vivons dans un Etat de droit libre et démocratique.
Rien ne s'oppose donc à l'organisation de commémorations dans le calme et la dignité.
Quant à la participation des pouvoir publics, la règle de l'appréciation au niveau local me semble à la fois la plus opportune et la plus réaliste.
Je profite de l'occasion qui m'est donnée pour vous rassurer sur la commission Kaspi.
Il n'y aura pas en France de « Memorial day ». Une journée unique de commémoration à l'américaine ne s'inscrit ni dans notre culture, ni dans notre histoire.
Une telle évolution ne peut s'engager que sur le long terme.
Ce demi-siècle de combat que vous avez mené a encore de multiples raisons d'exister.
« Une patrie se compose de morts qui l'ont fondée aussi bien que des vivants qui la continuent » nous dit Ernest Renan.
Votre action, que vous menez en faveur de la paix mais aussi au profit de ceux qui ont été appelés à combattre en Algérie, au Maroc ou en Tunisie, est essentielle.
Vous le faites depuis 50 ans sans concession. C'est un hommage que je vous rends.
Permettez-moi de donc de vous redire que c'est un grand honneur pour moi de représenter aujourd'hui le Président de la République et le Gouvernement, dans cette magnifique ville de bordeaux, ou devrais-je dire Bordèu, comme les gascons !
Continuez à lutter avec toute la vitalité que l'on vous connaît, pour un monde plus humain et plus fraternel, pour cet avenir apaisé dont on rêve tous.
Je vous remercie.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 31 octobre 2008
Madame la députée (Chantal Bourrague) représentant Alain Juppé, maire de Bordeaux;
Messieurs les députés (Jean-Paul Garraud) ; (François Rochebloine) ; (Alain Néri) ; (Georges Colombier) ;
Messieurs les sénateurs (Gérard César) ; (Xavier Pintat) ; (Guy Fischer)
Monsieur le président du conseil régional d'Aquitaine (Alain Rousset) ;
Monsieur le président du conseil général de Gironde (Philippe Madrelle) ;
Monsieur le Préfet, directeur général de ONAC l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (Rémy Enfrun) ;
Monsieur le Président de la Fédération nationale des anciens combattants en Algérie (Wladylas Marek) ;
Monsieur le Secrétaire Général de la Fédération nationale des anciens combattants en Algérie (Maurice Sicart) ;
Mesdames, Messieurs les présidents d'association
Mesdames et Messieurs,
Je sais que vous êtes un auditoire exigeant.
Comment n'en serait-il pas ainsi quand on sait que cela fait un demi siècle que vous défendez avec pugnacité la mémoire de ceux qui, un jour, ont dû quitter leur famille pour aller rejoindre une terre, l'Algérie, en proie à une guerre qui ne disait pas encore son nom?
Votre Fédération appartient à ce monde des associations qui se bat pour ses idées et parle avec toute la franchise et la sincérité de son coeur.
Votre d'exigence envers votre Secrétaire d'Etat est à la hauteur de votre engagement : de haut niveau.
Je le comprends d'autant mieux que mes attentes envers une association qui, comme la vôtre, a su au fil des années :
- oeuvrer pour la reconnaissance officielle d'une guerre,
- se battre pour les plus démunis et pour les veuves de vos camarades décédés,
sont aussi fortes.
La politique est pour moi la science de l'exigence.
Notamment, lorsqu'il s'agit, et je ne vous le cache pas, de faire évoluer les structures administratives en charge du monde combattant, mais j'y reviendrais un peu plus tard.
Lorsque nous nous étions rencontrés en avril dernier, monsieur le Président, je vous avais fait part de ma volonté de m'engager fortement au profit et aux côtés du monde combattant.
Ces paroles, mes paroles, je sais que vous les jugerez à l'aune de mes actes et vous avez raison.
Je connais vos aspirations et vos préoccupations grâce à vos représentants que j'ai eu l'occasion de rencontrer à travers mon parcours d'élu local, en tant que maire de Mulhouse, de parlementaire et désormais, de Secrétaire d'Etat.
Il faut dire que l'implantation de votre association dans tous les départements de France et d'Outre mer vous confère une force à la hauteur du nombre et de la qualité de votre réseau territorial.
370 000 adhérents directs, rassemblés dans 3600 comités locaux, ce n'est pas rien.
Je veux d'ailleurs aujourd'hui rendre hommage à cette troisième génération du feu, longtemps appelée « la dernière génération du feu ».
Les fondateurs de votre association espéraient que cette guerre soit effectivement la dernière.
Je ne veux pas oublier que lorsque la FNACA, ou devrais-je plutôt dire la FNAA (Fédération nationale des anciens d'Algérie), a été créée le 21 septembre 1958, la guerre, qu'on ne voulait pas nommer, faisait rage.
Lors du Congrès à l'hôtel Moderne de Paris, qui marqua la naissance de votre Fédération, Paul Debiesse, Paul Fromonteuil ou Jean-Jacques Servan-Schreider, pour ne citer qu'eux parmi les 110 délégués, avaient comme premières préoccupations :
- que le sang et la douleur cessent,
- que cette jeune génération, ayant fait l'expérience malgré elle de la guerre, revienne à la vie.
Sous la personnalité d'envergure de Jean-Jacques Servan-Schreiber, vous avez fondé une Fédération soucieuse de plus d'humanité.
Ce passionné de politique, qui a toujours cherché à faire bouger les lignes et qui fonda, à seulement 29 ans, le magazine « L'Express », fit parti de ces milliers de jeunes soldats qui ont participé à une aventure humaine hors du commun en Algérie.
Il était poussé à créer, comme tant d'autres qui sont peut-être présents dans cette salle, une association aux valeurs humanistes, préoccupée par la réconciliation entre les peuples.
Cette noble ambition, qui ne la partage pas ?
Je sais qu'il a fallu attendre 1999 pour que cette guerre, qui a marqué une génération entière de jeunes, âgés d'à peine 20 ans, soit reconnue officiellement et permette, d'une certaine façon, de tourner la page de chacune de vos histoires personnelles.
Lorsqu'aujourd'hui, vous vous retournez, c'est pour apercevoir 50 ans d'actions, 50 ans de mobilisation, 50 ans d'engagement.
Solidarité, courage, engagement, voici les mots que je souhaite voir guider mon action en faveur du monde combattant.
Permettez-moi d'ailleurs, en vous la décrivant, de répondre à certaines de vos préoccupations communes.
Parlons d'emblée de la réforme de l'administration en charge du monde combattant, de votre administration.
Je veux d'abord vous dire, sans démagogie, que cette réforme, conséquence de la Révision générale des politiques publiques, me paraît indispensable.
Avec toutes les autres réformes, elle doit permettre à notre pays, de regagner des marges de manoeuvre nécessaires au rétablissement de nos finances publiques.
Je n'ai à cet égard pas besoin de vous décrire le contexte économique et financier.
Ceci étant posé, ni le contexte économique, ni la Révision générale des politiques publiques ne doivent nous conduire à brader les intérêts du monde combattant.
Votre maillage territorial, la dispersion de vos adhérents, vous conduise naturellement à être très attaché au maintien d'un service rendu de qualité jusqu'à l'échelon départemental.
Cette attente forte est la mienne, celle du Président de la République que je représente aujourd'hui et celle, naturellement, de l'ensemble du gouvernement
Le deuxième contrat d'objectifs et de moyens de l'ONAC, qui est en cours de préparation et de rédaction, prendra en compte ces évolutions.
Il sera présenté au cours du tout prochain conseil d'administration de l'ONAC du 28 octobre, auquel participera votre président qui, je n'en doute pas, et vous non plus d'ailleurs, fera valoir vos positions
Je sais que cette réforme, je ne peux la conduire seul depuis mon bureau parisien.
Nous la conduirons ensemble, elle sera une réussite collective.
J'ai veillé à ce que le projet de loi de finances pour 2009 permette à l'ONAC, mais aussi à l'INI, d'aborder cette délicate phase de restructuration avec des enveloppes de fonctionnement en hausse, qui sont l'une des conditions du succès.
Il y aura sans doute, ici ou là, des accrocs. Je sais pouvoir compter sur Rémy Enfrun, le directeur général de la « maison des combattants », l'ONAC, que je salue au passage, et sur Liliane Block, notre directrice des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale (DSPRS) pour les régler avec mon équipe et moi-même.
Lorsque le contexte est difficile, je considère comme un devoir de faire effort sur celles et ceux les plus en difficulté.
C'est pourquoi, je m'étais engagé à revaloriser le plafond de l'allocation différentielle de solidarité en faveur des conjoints survivants à 750 Euros.
C'est aujourd'hui chose faite.
J'ai également décidé de ne plus prendre en compte le montant de l'allocation personnalisée au logement (APL) dans l'évaluation du montant des ressources.
Il faudra, et je m'y engage, renouveler à la fin du premier semestre de l'année prochaine, l'évaluation du dispositif effectué cette année et naturellement, en tirer toutes les conclusions tant au niveau d'une éventuelle hausse du plafond qu'au mode de calcul des ressources des allocataires.
Une autre de vos préoccupations concerne le suivi sanitaire des essais nucléaires français.
Ce dossier fait l'objet d'une attention particulière de la part des pouvoirs publics.
Vous savez qu'un comité de liaison pour la coordination du suivi sanitaire des essais nucléaires français (CSSEN) a été créé en janvier 2004 et qu'une étude épidémiologique commandé par le ministère de la défense afin d'évaluer l'existence d'une éventuelle surmortalité parmi ces personnels est en cours.
Le comité de pilotage, constitué des membres du comité scientifique de l'Observatoire de la santé des vétérans (OSV), composé d'experts appartenant pour la plupart aux agences et instituts sanitaires civils, chargé de suivre le déroulement de cette étude et d'en garantir l'indépendance scientifique, rendra ses résultats au cours du 1er semestre 2010.
D'autre part, d'anciens militaires, personnels civils ou retraités du ministère de la défense ayant séjourné sur les sites d'expérimentation nucléaires français ont fait part au ministre de la défense de leur souhait de bénéficier d'une consultation médicale auprès du Service de santé des armées.
Hervé Morin a répondu favorablement à ces demandes en donnant des directives, fin janvier 2008, pour que ces personnels puissent consulter dans les services médicaux des unités des trois armées et de la gendarmerie.
Il ne m'a pas échappé, et vous l'avez redit ce matin monsieur le président, que le sujet de la « campagne double », bien connu des fonctionnaires ayant participé à la guerre d'Algérie, est « sensible ».
Je n'ignore ni le rapport GAL, ni l'avis du conseil d'Etat qui s'en est suivi. N'ignorez pas non plus les difficultés d'application d'une telle mesure.
J'ai eu l'occasion de dire au comité d'entente, que j'ai vu brièvement rue de Bellechasse peu après mon arrivée, que rien à ce sujet ne pourrait être inscrit au budget 2009 et que je relancerai la consultation interministérielle.
J'ai tenu parole puisque vous savez que le budget 2009 ne prévoit aucune mesure particulière pour la « campagne double », et j'ai par ailleurs relancé la concertation interministérielle sur ce sujet. Un membre de mon cabinet était vendredi dernier encore à Bercy pour évoquer, entre autre, ce sujet.
Je me donne jusqu'à la fin du printemps 2009 pour vous faire part de propositions concrètes sur ce dossier.
J'avance également rapidement sur l'actualisation des critères d'attribution de la carte du combattant.
Je veux vous redire que mon objectif, et celui du Gouvernement, est bien de garantir les conditions naturelles et morales du monde combattant.
Pour la première fois depuis 28 ans, l'indice de la retraite a été majoré trois années consécutivement de deux points, en 2006, 2007 et 2008, ce qui représente un impact financier non négligeable chaque année et dans la durée.
Néanmoins, je sais que trois hausses successives ne vous satisfont pas.
Je ne méconnais pas les engagements du Président de la République qui ont commencé à être mis en oeuvre par mon prédécesseur, Alain Marleix, l'année dernière.
Je ne veux pas préjuger ici de l'issue du débat parlementaire sur le budget des anciens combattant qui débutera à l'Assemblée Nationale le 5 novembre prochain.
Sachez seulement que je m'engage à me battre pour que ceux qui prétendent que « les anciens combattants seront sacrifiés sur l'autel de la crise mondiale » aient tort.
Ils ont de toute façon déjà tort puisque mon budget, pour les trois prochaines années, permet de préserver le droit à la reconnaissance et à la réparation dû aux anciens combattants et de consolider l'ONAC et l'INI.
Les travaux d'entretien des sépultures de guerre et la rénovation des hauts lieux de mémoire bénéficient aussi de crédits en augmentation.
En 2009, une enveloppe de 100 Meuros a été dégagée au titre de la décristallisation : ce montant comprend une dotation de 24 Meuros pour permettre l'entrée dans le dispositif des veuves mariées après les dates d'indépendance, dont les droits à pension ont été ouverts dès 2007, mais pour lesquelles il a été estimé que les demandes arriveraient progressivement.
Vos préoccupations et vos aspirations ne concernent pas seulement des questions matérielles.
Vous avez à coeur de préserver et de faire connaître ce qu'a représenté pour vous la guerre d'Algérie.
Vous avez d'ailleurs créé, dans cette optique, la commission G.A.J.E (Guerre, Algérie, Jeunesse, Enseignement). Cette commission mène depuis 1981 un travail de mémoire remarquable auprès des jeunes générations.
Personne ne peut imaginer un avenir de paix et de fraternité sans un passage de témoins sérieux et vigilants à nos jeunes.
C'est parce que nous savons que le devoir de mémoire est primordial, que mon prédécesseur a lancé, voilà plus de 4 ans, une vaste opération, que je poursuis, de collecte des témoignages oraux des acteurs de la guerre d'Algérie.
Il en a confié le pilotage à la Direction de la mémoire, du patrimoine et des archives (DMPA) et la mise en oeuvre à l'ONAC.
En 2008, ce sont plus de 600 témoignages oraux, venant de tout horizon : hommes du contingent, militaires de carrière, et d'autres, qui ont été récoltés.
Ces récits de vie permettent de donner une autre perspective à la guerre d'Algérie en donnant la parole à ceux qui ont participé à ces évènements.
Ces témoignages, à la fois historiques et sociologiques, vont permettre d'honorer la mémoire de ces milliers de soldats morts de la Guerre d'Algérie ainsi qu'aux victimes civiles.
S'agissant de la « Fondation pour la mémoire de la Guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie », le schéma de création se met peu à peu en place.
Les statuts ont été validés au cours de l'été par une réunion interministérielle et les trois millions d'Euros prévus dans le cadre de cette création de budget 2008, seront préservés sur un compte spécial de l'ONAC dans l'attente de la finalisation du schéma définitif de création.
« Se souvenir pour préserver l'avenir », c'est le sens de l'action que vous menez avec opiniâtreté pour faire valoir le 19 mars 1962 comme journée nationale de commémoration.
Mais force est de constater qu'il n'existe pas encore de consensus national à ce sujet.
Comment donc traiter le 19 mars ?
Je ne compte pas, pour être franc, me distinguer de mon prédécesseur à ce sujet. Nous vivons dans un Etat de droit libre et démocratique.
Rien ne s'oppose donc à l'organisation de commémorations dans le calme et la dignité.
Quant à la participation des pouvoir publics, la règle de l'appréciation au niveau local me semble à la fois la plus opportune et la plus réaliste.
Je profite de l'occasion qui m'est donnée pour vous rassurer sur la commission Kaspi.
Il n'y aura pas en France de « Memorial day ». Une journée unique de commémoration à l'américaine ne s'inscrit ni dans notre culture, ni dans notre histoire.
Une telle évolution ne peut s'engager que sur le long terme.
Ce demi-siècle de combat que vous avez mené a encore de multiples raisons d'exister.
« Une patrie se compose de morts qui l'ont fondée aussi bien que des vivants qui la continuent » nous dit Ernest Renan.
Votre action, que vous menez en faveur de la paix mais aussi au profit de ceux qui ont été appelés à combattre en Algérie, au Maroc ou en Tunisie, est essentielle.
Vous le faites depuis 50 ans sans concession. C'est un hommage que je vous rends.
Permettez-moi de donc de vous redire que c'est un grand honneur pour moi de représenter aujourd'hui le Président de la République et le Gouvernement, dans cette magnifique ville de bordeaux, ou devrais-je dire Bordèu, comme les gascons !
Continuez à lutter avec toute la vitalité que l'on vous connaît, pour un monde plus humain et plus fraternel, pour cet avenir apaisé dont on rêve tous.
Je vous remercie.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 31 octobre 2008