Déclaration de M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'Etat à la défense et aux anciens combattants, sur les politiques de la mémoire, notamment en Moselle, à Saint-Avold le 25 octobre 2008.

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Circonstance : Deuxième journée de la mémoire patriotique mosellane, à Saint-Avold (Moselle) le 25 octobre 2008

Texte intégral


Monsieur le Député,
Monsieur le Préfet,
Monsieur le Président du Conseil Général,
Messieurs les Officiers généraux,
Mesdames et Messieurs les représentants du monde combattant et associatif,
Mesdames et Messieurs,
Chers amis,
Je voudrais vous dire ma joie d'être aujourd'hui parmi vous, pour participer à cette deuxième « Journée de la mémoire patriotique mosellane ».
Je vous le dis d'emblée, je viens à double titre : bien sûr, en ma qualité de secrétaire d'Etat à la défense et aux anciens combattants, mais je viens aussi en ami et en voisin Alsacien.
Vous le savez, l'Alsace et la Moselle ont en partage une histoire commune, malheureusement souvent tragique.
Mais cette tragédie historique que nous avons vécue ensemble a créé des liens.
Et c'est donc aussi au nom de ces liens de solidarité, forgés durant les pages tragiques de notre histoire commune, que je suis ici aujourd'hui avec vous.
Cette « Journée de la mémoire mosellane » est une initiative heureuse, que je voudrais saluer.
- Tout d'abord, elle répare une injustice, en rappelant le sort tragique de la Moselle, victime à deux reprises de la guerre.
- Je crois que nos compatriotes ignorent encore trop souvent les deux annexions successives subies par le Département, une première fois en 1870, une seconde fois en 1940.
- Et je crois qu'il n'est pas inutile de rappeler que les habitants de la Moselle vécurent une première annexion qui dura 47 ans jusqu'à l'Armistice du 11 novembre, dont nous célébrons justement cette année le 90e anniversaire.
- A cela, il faut ajouter l'annexion de fait par le Reich nazi, en 1940, avec son cortège de souffrances et d'horreurs que nous connaissons bien, nous les Alsaciens : incorporation de force, pillage, déracinement culturel et familial, persécution des familles des patriotes réfractaires etc.
Je sais que les Mosellans ont parfois le sentiment que l'Alsace a davantage « exorcisé » ce passé douloureux, par un intense travail de mémoire qui porte aujourd'hui ses fruits.
Alors il convient de saluer les initiatives prises depuis quelques années en Moselle, qui visent à rattraper le temps perdu et à conjurer deux périls : l'ignorance et l'oubli.
Alors que nous cheminons lentement vers le « temps de l'histoire », qui consacre l'effacement progressif des témoins des événements de la Seconde Guerre mondiale, il était temps d'accélérer ce travail de mémoire à la fois utile et nécessaire.
Je voudrais ainsi saluer les différentes initiatives qui ont été prises ces dernières années sous l'égide notamment du Conseil Général :
- tout d'abord l'institution de cette « Journée de la mémoire Mosellane », qui est un symbole très fort - qui ne permet pas seulement au monde patriotique de compter ses troupes, au demeurant impressionnantes ! - mais aussi d'engager un travail de mémoire en profondeur et dans la durée.
- D'autre part, la création du Musée de Gravelotte, qui devrait ouvrir d'ici quelques années et qui mettra pleinement en valeur la riche histoire Mosellane depuis 1870, avec en particulier la création d'un mur des noms de toutes les victimes Mosellanes depuis la guerre de 1870.
Ces différentes initiatives m'inspirent deux remarques :
- Tout d'abord, elles soulignent une évolution de fond de notre pays : l'entrée en lice des territoires dans les politiques de la mémoire. Auparavant, l'Etat était le seul animateur des politiques de la mémoire. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas. Les Collectivités locales sont désormais co- animatrices et co- productrices de l'Etat dans les politiques de mémoire, à travers le tourisme de mémoire qui permet la revalorisation et la ré- appropriation par les territoires de leur patrimoine mémoriel.
- Votre initiative m'inspire une autre réflexion, qui est au coeur des préoccupations de la Commission confiée par mon prédécesseur à l'historien André Kaspi : la modernisation réussie des commémorations publiques, ce n'est pas leur suppression, bien au contraire, c'est leur réappropriation à l'échelon local.
- Je peux vous citer l'exemple de la commémoration du débarquement du 6 juin en Normandie, qui est le fait des acteurs locaux, sous la houlette de l'association Normandie-mémoire, et qui est une très grande réussite.
Je voudrais enfin rappeler que nous sommes aujourd'hui réunis au sein d'un lieu hautement symbolique, qui souligne le sacrifice héroïque de nos amis américains venus, il faut le rappeler, à deux reprises au secours de l'Europe au cours du XXe siècle.
- J'étais très récemment à Washington, où j'ai remis la rosette d'officier de la Légion d'Honneur au dernier combattant américain de la Grande Guerre, M. Franck Buckles, aujourd'hui âgé de 107 ans.
- C'était aussi l'occasion de rappeler que, dès la Première Guerre mondiale, les Américains avaient mobilisé deux millions d'hommes sur le continent européen.
- Ici nous honorons la mémoire des soldats tombés en 1944, lors des combats de la libération de la France : Saint-Avold est la plus grande nécropole militaire américaine d'Europe, avec ses 10.489 sépultures de soldats et d'aviateurs tombés pour libérer la France et l'Europe de la domination nazie.
- Aujourd'hui nous honorons ainsi la longue et douloureuse histoire Mosellane mais aussi le souvenir de ces hommes venus d'ailleurs et qui combattirent durement ici au coeur de cette région pour achever la libération de notre patrie.
En conclusion je voudrais vous dire que vous trouverez toujours chez moi un interlocuteur attentif pour appuyer vos efforts en matière de mémoire.
C'est la mission ministérielle qui m'a été confiée et j'entends la conduire en étroit partenariat avec les acteurs locaux. Je vous remercie. Source http://www.defense.gouv.fr, le 31 octobre 2008