Texte intégral
Comme vous venez de le voir, mes chers amis, l'Histoire est cruelle, terrible, injuste, inhumaine, mais jamais au grand jamais elle ne nous déçoit ! Avec son lot de grandes et de petites histoires, elle s'évertue à nous prouver qu'elle n'est jamais écrite. Car en vérité, l'Histoire ne s'écrit pas toute seule ! Ce sont les Hommes et les Femmes qui y participent qui l'écrivent inlassablement et qui fatalement scellent ou libèrent leurs destins ! Nous avons pu constater aussi dans ce document quelle conviction formidable les Hommes et les Femmes libres doivent se forger pour puiser la force de lutter afin de voir, parfois, leurs idéaux se réaliser. Ces leçons quotidiennes de courage, d'abnégation, de foi désintéressée, sont le lot de tous ceux qui ont décidé de servir et de libérer !
Les temps ont été terribles pour eux mêmes et les leurs, et certains d'entre eux d'ailleurs, n'auront jamais pu voir leurs actes récompensés. Qu'importe ! car au-delà de leurs actes et de leurs sacrifices, je me dis qu'ils sont encore là, aujourd'hui, parmi nous, et que surtout grâce à eux, nous, nous sommes ici, ce soir, prêts à reprendre le flambeau, le flambeau de la CFTC, de notre CFTC !
Car ce film nous rappelle aussi ardemment ce que le monde du travail doit à notre Syndicat. Parce qu'il montre que l'histoire de la CFTC n'a jamais été un long fleuve tranquille ; parce que son long chemin a toujours été semé d'embuches dont elle s'est toujours victorieusement sortie ; parce que la période que nous allons traverser constitue une nouvelle et périlleuse épreuve que nous franchirons, soyons en certains, si nous savons rester fidèles aux valeurs forgées par nos illustres prédécesseurs et solidaires en toutes circonstances.
Car mes chers amis, ce qui me frappe dans ce film, c'est que la CFTC a toujours su s'adapter aux époques qu'elle a traversées, tout en restant fidèle à ce qu'elle est, à ses valeurs et à sa raison d'être : la défense des salariés et de leur famille.
Dans cette déjà longue histoire de la CFTC que nous venons de revisiter l'espace d'un instant, je prends le pari devant vous, ce soir, que ce cinquantième congrès fera date.
Il fera date, parce que c'est notre devoir de tracer l'avenir de notre Syndicat !
Il fera date parce que, dans un contexte social frappé par une crise économique sans précédent, nous devons trouver des réponses pour nous-mêmes et ceux que nous représentons !
Ce cinquantième congrès fera date, aussi, parce qu'il nous appartient de trouver de véritables solutions pour « booster » notre CFTC et lui permettre d'affronter victorieusement les échéances primordiales que représentent les prud'homales et les élections professionnelles dans les entreprises !
Il fera date car nous allons aller conquérir cette représentativité «avec les dents». Car nous n'avons pas de craintes particulières : représentatifs, nous sommes, représentatifs, nous resterons !
Ce cinquantième congrès fera date, enfin, parce qu'il nous reviendra, tous ensemble, de donner une nouvelle impulsion au syndicalisme de construction sociale qui s'appuie sur l'histoire, les fondamentaux et le programme de la CFTC !
Car vous le savez mes chers amis, ce syndicalisme de construction sociale fondé sur les valeurs sociales chrétiennes repose sur :
- une priorité : être aux côtés des plus fragiles ;
- trois grands principes :
o le caractère sacré de la dignité de la personne,
o le bien commun,
o et des corps intermédiaires forts ;
- une aspiration : la mise en oeuvre du statut du travailleur ;
- et quatre axes d'actions :
o le syndicalisme de service,
o un paritarisme rénové,
o la négociation entre partenaires sociaux,
o les rencontres tripartites : syndicats, patronat et Etat.
Et tout cela, porté avec conviction, par les 140 000 adhérents qui vous ont mandaté à ce congrès.
Mais avant de décliner chacun de ces axes, je souhaiterais tirer certaines leçons et commenter certains faits apportés par l'actualité et par la crise que nous traversons aujourd'hui. Notre programme - tout entier contenu dans le Statut du travailleur et la motion d'orientation - n'en prendra que plus de poids et de sens, soyons en certains !
* La mondialisation
Alors que la course au profit à tout prix vient de plonger le monde dans une crise financière, monétaire et économique sans précédent, une question s'impose : s'agit-il d'une nouvelle crise de croissance de la mondialisation qui permettra, une fois les effets écartés, de repartir sur de nouvelles bases ou s'agit-il de la fin définitive de la globalisation qui à travers cette crise révèle toute son « horreur » et son irresponsabilité ? Il est encore trop tôt pour le dire ; mais une chose est sûre : nous ne pourrons plus faire comme si de rien n'était.
Cette crise, il y a longtemps que nous la pressentions, à la CFTC. Ce système fondé sur la spéculation et l'exploitation courait à sa perte, mais son effondrement risque de se révéler catastrophique pour les économies nationales et pour les centaines de millions d'hommes et de femmes qui y participent.
Où sont donc passés ces experts fringants du libéralisme qui, hier encore, traitaient de ringards tous ceux qui annonçaient l'imminence du krach et encensaient le système pour mieux en profiter ?
Et ces banquiers et ces assureurs qui en oubliant leur métier de base se sont montrés plus qu'irresponsables dans cette affaire ?
Et ces spéculateurs ou ces actionnaires qui exigeaient un retour sur investissement de 15 % minimum et refusaient de défendre l'activité réelle des entreprises ?
Et les politiques qui cédaient aux chants si rassurants des sirènes du libéralisme et qui démissionnaient et désertaient la scène publique en abandonnant leur mission première qui consiste, avant tout, à garantir le bien commun pour tous nos concitoyens !
Et, je me tairais sur le rôle les autorités monétaires, financières et les Institutions de contrôle internationales en tout genre qui encourageaient le système, en laissant au marché le soin de s'autoréguler sans entrave, dans la plus parfaite irresponsabilité...
Mais, mes chers amis, je m'arrête là, car l'heure n'est pas pour autant à la désignation de boucs émissaires ! Aujourd'hui, l'heure est à la proposition, pour demain passer à l'action ! Aujourd'hui, nous devons surtout regarder la réalité en face et tirer les leçons qui s'imposent.
Et la réalité c'est d'abord que les décideurs ne sont pas ceux qui, aujourd'hui, prennent les risques. Lorsque les fonds de pension exigent des retours sur investissement de l'ordre de 15 %, cela ne peut se faire qu'au détriment des salaires, de l'emploi et de l'investissement. La réalité, c'est aussi la crise du crédit pour tous, pour les entreprises comme pour les particuliers, et le manque de financement de l'économie réelle.
Et le monde du travail se trouve terriblement puni !
Après avoir payé au capitalisme financier et sauvage un lourd tribut, il va aujourd'hui et demain devoir recoller les pots cassés, et payer le prix « cash » en tant que salariés, en termes d'emploi et de pouvoir d'achat, mais aussi en tant que contribuable, usager, assuré social et finalement en tant que citoyen. Lui, il ne décide pas mais il assume tous les risques...
Certes, le monde a connu depuis plus de trente ans une longue période de prospérité et une croissance mondiale moyenne de l'ordre de 5 %. Il a vu l'émergence de nombreux pays. Mais à quel prix pour les travailleurs et l'environnement planétaire ?
Parce que le capitalisme financier et sauvage fait du salarié une variable d'ajustement facile et engendre des conflits sociaux ; parce qu'il affame des populations, par la spéculation sur les matières premières alimentaires, et fomente des émeutes de la faim ; parce qu'il pille, exploite et pollue à tour de bras les ressources naturelles, et ruine les forêts et les océans sans se préoccuper des générations à venir ; parce qu'il favorise une faible minorité qui détient le pouvoir, il est à l'origine des principales sources de dysfonctionnements, de discriminations et d'inégalités en tout genre sur notre planète.
Pour répondre à la crise, les gouvernements et les autorités monétaires ont réagi en soutenant les banques et les compagnies d'assurance. On nationalise les pertes alors que les profits demeurent privatisés... Alors ! nos concitoyens se posent de plus en plus de questions.
Comment se fait-il que les caisses soient vides, lorsqu'il s'agit de rééquilibrer les comptes de la sécurité sociale, de financer le service public, de soutenir une industrie en difficulté, et qu'on trouve, par miracle, des fonds illimités pour voler au secours des spéculateurs ?
Comment se fait-il, se demandent nos concitoyens, que lorsque la France réclame une baisse des taux directeurs pour relancer l'économie française, on nous rétorque qu'on ne peut pas à cause du retour de l'inflation, et que soudainement, la Banque Centrale Européenne, s'empresse de baisser les taux ?
Certes, une telle politique peut être nécessaire, d'abord pour rassurer les marchés, ensuite pour garantir l'épargne des salariés, enfin pour éviter la panique. Je comprends et je souscris à la nécessité d'agir pour préserver ce qui peut l'être encore...
Mais n'y a-t-il pas la même urgence quand il s'agit d'offrir à tous nos concitoyens la possibilité d'accéder à des soins de qualité, de permettre à nos enfants d'aller à l'école dans des classes qui ne sont pas surchargées, de créer des emplois dans des secteurs de pointe.
Les entreprises ne sont pas non plus épargnées par leurs contradictions. Pour la plupart, trop souvent, les salariés sont d'abord un coût qu'il faut à tout prix réduire, par des suppressions de postes ou par la stagnation des salaires au nom de la sacro-sainte compétitivité... ces mêmes entreprises qui assurent dans le même mouvement des parachutes dorés à leurs dirigeants, sans se soucier de leurs bons ou mauvais résultats, et leur permettent de percevoir en quittant leurs fonctions la modeste somme de l'équivalent de cinquante années de Smic...
Au nom de nos valeurs, parce que l'économie doit être au service de l'homme et non l'homme au service de l'économie, il faut en finir avec ce système qui bafoue la dignité humaine et crée des citoyens de seconde zone ! Il ne suffit pas de réformer le système il faut désormais en changer ! Remettons les pieds sur terre !
Je crois qu'il est nécessaire dès maintenant, d'effectuer une véritable transformation en profondeur et sans concession, qui placerait l'homme au centre de l'univers économique en lieu et place de la finance, de manière à ce que la mondialisation redevienne une espérance pour l'humanité entière, au lieu de le réduire à un objet de rejet !
Le projet de motion d'orientation contient des propositions concrètes en la matière que Philippe Louis aura l'occasion de vous présenter jeudi.
C'est le moment de profiter de cette crise pour que le développement de l'économie ne soit plus jamais fondé sur la satisfaction prioritaire des besoins de l'homme sans contrepartie pour la planète et le bien commun de ses habitants.
Voilà le sens que doit prendre, à mes yeux, le développement économique pour qu'il soit véritablement au service de l'homme. Et la CFTC doit y jouer avec humilité et ténacité son rôle et cela, au meilleur niveau !
* Le Travail
Cette crise révèle aussi cruellement l'urgence de revaloriser le travail. Depuis trente ans, le décalage entre les discours et les faits n'a jamais cessé de se creuser. Depuis trente ans, politiques, économistes, sociologues... déclarent qu'il faut réhabiliter le travail et depuis trente ans, on n'a de cesse que de le dévaloriser. Depuis trente ans, le travail n'est plus considéré, comme un investissement personnel et social mais comme un coût qu'il faut sans cesse réduire.
Contrairement à ce qu'on nous assène à longueur de discours, ce ne sont pas tant les 35 heures qui sont en cause que la multiplication des emplois précaires, sous-payés et peu qualifiés, la dégradation des conditions de travail, les entraves à un véritable dialogue social...
Dans l'idéal, le travail est un moyen de perfectionnement de l'homme ; c'est en puisant dans son potentiel créateur que l'individu se réalise et se perfectionne. Le travail est donc le lieu par excellence de fabrication du lien social.
Hélas ! la société globalisée le détourne de sa fin pour le transformer en source d'injustice et d'aliénation. Ainsi, il devient dégradant quand il est pénible ou quand il s'accomplit dans des conditions qui réduisent le travailleur au rang de ressource humaine sans respecter sa liberté et sa responsabilité.
Aujourd'hui, je ne peux m'empêcher de constater ce caractère contradictoire avec d'un côté, des travailleurs qui aspirent à un travail décent et respectable qui permet de gagner sa vie, et de l'autre, des entreprises qui considèrent le travail comme une simple variable d'ajustement.
Il est de bon ton, aujourd'hui, de prétendre que les 35 heures et la société de loisirs contribuent à une dévalorisation du travail sans voir que la conciliation du temps de travail, chère à la CFTC, permet de consacrer une partie de son temps à des activités sociales, politiques, sportives, syndicales... autant d'engagements qui, sans être rémunérés, participent à la détermination de meilleures conditions de vie commune.
C'est pouvoir aussi consacrer du temps à sa famille, c'est aussi prendre du temps pour soi. Les temps de loisir ne doivent plus être considérés comme des temps improductifs, mais des temps qui ont une utilité sociale qui contribue à la qualité d'une vie assumée et choisie.
C'est tout l'enjeu du Statut du Travailleur. Trop souvent, le Statut du Travailleur est perçu comme une banale sécurisation du parcours de vie professionnelle. C'est une erreur profonde ! C'est oublier que le Statut du Travailleur est, d'abord et avant tout, un projet de société conçu pour tenir compte des aspirations de l'ensemble des travailleurs sur le lieu de travail, mais aussi dans la vie personnelle, familiale, associative.
Il est fini le temps où les salariés entraient dans une entreprise à 16 ans, en sortait à 65, et était pris en charge par l'entreprise pour ses loisirs, ceux de leurs enfants, sa formation... Aujourd'hui, la vie professionnelle et personnelle comporte des aléas plus ou moins nombreux ; tout au long de sa vie, le travailleur a des envies différentes : tantôt il souhaite travailler beaucoup pour gagner beaucoup, tantôt, il souhaite lever le pied, tantôt, il a envie de prendre un congé sabbatique, tantôt, il entend parfaire sa formation pour évoluer professionnellement... Le Statut du Travailleur doit lui permettre de répondre à ses aspirations.
C'est toute la différence entre le Statut du Travailleur de la CFTC et les projets qui s'en approchent. Il n'y a que la CFTC qui pouvait proposer ce projet, parce qu'elle est attentive à la dignité de la personne !
Aujourd'hui, la valorisation du travail n'est vue qu'à travers la rémunération : c'est l'expression désormais fameuse : « travailler plus pour gagner plus ». Mais les salariés demandent avant tout un juste salaire ! Pas de travailler plus pour gagner ce qu'ils perdent en n'étant pas revalorisés ! Car pour la CFTC, mes chers amis, la valorisation du travail passe par la qualité de l'emploi définie par cinq critères : une juste rémunération, une formation tout au long de la vie, des conditions de travail décentes, un dialogue social de qualité et une protection sociale solidaire.
A propos de ce dernier critère, la crise aura au moins permis de mettre en évidence la supériorité du système de protection sociale solidaire à la française. Savez-vous que les fonds de pension ont, en quinze mois, perdu 2 000 milliards de dollars ? Savez-vous qu'à cause des répercussions de la crise sur l'économie réelle, les entreprises américaines ou anglaises, qui assurent leur retraite à leurs salariés, se retrouvent dans l'incapacité de verser leurs pensions ? Quand je pense qu'il y a six mois encore, Certains nous conseillaient de recourir à l'assurance privée pour assurer nos retraites, nos familles et notre santé. Tout cela dans notre propre intérêt, évidemment !
Dans ce débat complexe, d'une importance extrême, il faut peser de tout notre poids dans le débat. Pour cela il faut évidemment nous situer très clairement sur l'échiquier syndical français !
* Le Syndicalisme de Construction Sociale
Jusqu'à présent, il était de bon ton de scinder le syndicalisme en deux courants : le syndicalisme réformiste et le syndicalisme révolutionnaire. Les deux mots sont, aujourd'hui, dépassés.
Certaines des organisations dites « réformistes » sont devenues des organisations qui accompagnent les réformes plus qu'elles ne les conçoivent et ne les anticipent: Elles pratiquent donc ce que j'appelle le syndicalisme « d'accompagnement ».
Quant à la principale organisation « révolutionnaire », elle a du revoir sa stratégie : il serait donc plus judicieux de le qualifier, aujourd'hui, de « front du refus », ayant pour seule ligne de conduite d'être contre tout ce qui est pour et pour tout ce qui est contre, à quelques détails prêts.
Et nous, où nous situons nous ?
Le syndicalisme de construction sociale que promeut la CFTC se situe « ailleurs » : ni « accompagnement » des réformes ni « front du refus ».
Qu'est-ce que ça veut dire ? Tout simplement que la CFTC est hostile aux réformes si elles sont synonymes de régression sociale, si elles sont imposées sans concertation et sans négociation sur la base de présupposés idéologiques, et si elles accompagnent des mesures économiques qui ne respectent pas la dignité de la personne. La CFTC sera toujours opposée à ces réformes qui servent uniquement des intérêts particuliers, voire partisans.
En revanche, la CFTC soutiendra toujours les réformes qui se font au nom du bien commun, qui placent les salariés du privé, les agents de l'Etat, les demandeurs d'emploi et leur famille au centre des préoccupations du changement, et qui ont pour objectif : améliorer sans cesse la qualité de vie au travail et dans la société.
Le syndicalisme de construction social, pour être efficace, doit reposer sur quatre piliers :
Le premier pilier, le plus important, consiste dans le service à rendre à l'adhérent. En cotisant à la CFTC, le salarié s'engage clairement et doit, en retour, trouver une juste compensation. Dans ce domaine, nous ne partons pas de zéro. D'abord, parce que, à tous les niveaux, la CFTC porte les attentes exprimées par ses adhérents. Ensuite, parce que, lorsqu'il adhère à la CFTC, le salarié n'est pas livré à lui-même ; il bénéficie du soutien professionnel de son délégué syndical et de toutes les structures de la CFTC. Ce soutien se traduit par une écoute humaine attentive, un conseil juridique, une aide à la définition d'un projet professionnel toujours plus pertinent... Mais d'ors et déjà, nous préparons l'avenir.
Ainsi, dans certaines régions, nous testons déjà les services et de cabinets juridiques à proposer à nos adhérents. Nous irons plus loin dans les services innovants rendus aux syndiqués.
Mais, mes chers amis, nous ne limitons pas notre action à sa seule présence auprès des syndiqués dans l'entreprise. Se limiter au syndicalisme de service, au sens strict du terme, consiste à priver les salariés d'une véritable force de proposition. Une force de proposition que nous avons toujours été, car cela fait partie de notre identité et de nos valeurs !
A l'heure où nos partenaires patronaux sont devenus de véritables groupes de pression qui passent une partie de leur temps dans les cabinets ministériels et dans les couloirs de l'Assemblée nationale et du Sénat pour promouvoir leurs idées ultralibérales, il est important d'être présent aussi sur ces fronts pour faire passer les revendications de la CFTC. N'ayons pas peur de promouvoir nos idées car le combat se gagnera sur ce terrain là aussi !
Parce qu'elle participe aux négociations à tous les niveaux et parce qu'elle est auditionnée par le gouvernement et le parlement, la CFTC influence la construction du modèle social français, sur le plan national. Par son Statut du Travailleur qui guide ses revendications, par ses propositions qui irriguent le débat public, et par ses valeurs qui inspirent son action.
Le troisième pilier, fait partie de ce que j'appelle les nouvelles solidarités C'est une valeur qu'il nous appartient de défendre becs et ongles !
Je pense tout d'abord à notre système de protection sociale par répartition fondée sur la solidarité. Il est évidemment plus sûr que la capitalisation fondée sur des placements financiers dont la rentabilité est imprévisible et dont la crise vient de révéler l'irresponsabilité, les insuffisances et les risques qu'il fait courir à tous les salariés.
Certes, notre système de protection sociale doit être réformé pour tenir compte de l'évolution de la société, mais jusqu'à ce jour, les réformes ont essentiellement consisté en des ajustements techniques destinés à rétablir l'équilibre financier ! Résultats ? Les déficits se creusent et notre système se fragilise !
Plus grave encore, ces réformes ont conduit à introduire une logique de privatisation des risques et un déclin du paritarisme dans la gestion des caisses de protection sociale. Un nouveau système de protection sociale à deux vitesses se dessine, plus étatisé pour la couverture de base mais dont les garanties des risques courants sont progressivement prises en charge par les complémentaires privées.
Il est temps aujourd'hui d'en finir avec cette représentation caricaturale qui oppose artificiellement, un système que l'on dit trop généreux dont on ne peut plus résorber les déficits chroniques, à une politique de rigueur, soit disant responsable et sérieuse, qui réduise les prestations sous prétexte d'équilibrer les comptes !
La véritable question, la seule qui vaille, mes chers amis, est : quelle société voulons-nous pour demain ?
Voulons-nous une société fondée sur le chacun pour soi, où chacun s'assure en fonction de ses moyens, où les pauvres (et les plus fragiles) ont une protection sociale de base et les plus aisés bénéficient d'une protection sociale renforcée ? Ou souhaitons-nous une société solidaire qui permet à chacun de bénéficier des mêmes soins quels que soient ses revenus ?
Pour moi, le choix est vite fait. Il nous appartient donc de renforcer les solidarités, ces nouvelles solidarités que j'appelle de mes voeux :
- la solidarité dans l'emploi !
- la solidarité familiale !
- la solidarité en matière de santé !
- la solidarité intergénérationnelle !
- la solidarité avec les plus démunis !
- la solidarité en matière de logement !
- la solidarité en matière d'éducation et de culture !
Il reste cependant une autre question à résoudre: celle de la gouvernance des organismes paritaires !
Depuis plusieurs années, sous prétextes d'efficacité, le pouvoir de décision est de plus en plus dévolu à l'Etat au détriment de la gestion paritaire. Il fait l'objet d'une redistribution des missions et des attributions à un ensemble élargi de « partenaires ». Ce qui a pour effet d'écarter les salariés contributeurs des lieux de décision, et de dédouaner les entreprises de leurs responsabilités !
Parce que le système reste majoritairement financé par les salariés, la CFTC revendique toute sa place : nous ne voulons plus être cantonnés au rôle de spectateur (de consultant) que le gouvernement veut nous voir jouer ! Les partenaires sociaux doivent reprendre la main et rester acteurs de l'ensemble de la protection sociale !
Le quatrième pilier, qui permet de pérenniser le syndicalisme de construction social passe par une réponse définitive et responsable à la question du financement du dialogue social !
Si le financement du dialogue social ne repose pas sur la cotisation, comment s'en acquitter ? Durant les négociations sur la réforme de la représentativité syndicale, pas de réponse ! La CFTC avait pourtant demandé à plusieurs reprises que cette question soit réglée une fois pour toute.
Dans les entreprises, les choses sont claires ! Le dialogue social, par les heures de délégations et les mises à disposition, est intégré à la masse salariale. En revanche, au niveau des trop nombreuses branche ou de l'interprofessionnel, Il n'y a pas de réponse ! Personne ne se pose la question de savoir comment les négociateurs peuvent se libérer, comment ils sont formés, comment ils sont défrayés... les organisations syndicales, donc les adhérents n'ont qu'à payer la facture !
Arrêtons l'hypocrisie ! Nous revendiquons que la logique mise en place dans les entreprises soit appliquée aussi au niveau de la branche. Les cotisations pourraient, ainsi, retrouver leur usage premier qui réside dans le service à rendre aux adhérents, et le dialogue social qui ne tiendrait plus avec des bouts de ficelles ne s'en porterait que mieux !
Conclusion
Mes chers amis, dès maintenant, nous allons poursuivre notre travail et préparer la CFTC aux nouveaux enjeux qui l'attendent !
Nous le savons, la tâche sera difficile et nous n'avons qu'un seul choix : sortir renforcés et unis des combats futurs !
La plupart d'entre vous me connaissent bien et de mon côté, depuis tant d'années, j'ai appris à bien vous connaître !
Alors, je vous le dis avec conviction, avec sincérité, ne nous écartons pas de la route qui, depuis longtemps a été tracé par nos prédécesseurs ! Sachons nous inspirer de leurs combats, de leurs victoires et aussi parfois, hélas, de leurs défaites !
Mais, espérons toujours, et construisons librement dès aujourd'hui, cette CFTC de Demain, cette CFTC que nous appelons, toutes et tous, de nos voeux !
Une CFTC fraternelle, combative, innovante et indépendante !
Mes chers amis, Je déclare ouvert le 50e congrès de la CFTC et vous souhaite un très grand congrès et un très bon travail !
Source http://www.cftc.fr, le 29 octobre 2008