Déclaration de M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes, lors du point de presse conjoint avec M. Salam Fayyad, Premier ministre palestinien, sur les progrès du processus de paix israélo-palestinien et les avancées des projets en vue de la création de l'Etat palestinien, Paris le 13 novembre 2008.

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Circonstance : Visite en France du Premier ministre palestinien à Paris le 13 novembre 2008

Texte intégral

Mesdames et Messieurs,
J'accueille avec bonheur mon ami, le Premier ministre palestinien, Salam Fayyad.
Nous avons parlé de la situation après la rencontre du Quartet à Charm el-Cheikh. Nous avons félicité le Premier ministre - et je ne le féliciterai jamais assez - d'être l'artisan des projets qui ont été réalisés, près de 1050 depuis la Conférence de Paris. Pierre Duquesne vient de m'apprendre que 1,600 milliard de dollars avaient été consacrés à ces projets - pour la première fois les dons ont dépassé les promesses : 1,100 milliard avait été promis et 1,600 milliard ont été donnés.
Nous avons également évoqué l'avenir. La création de l'Etat palestinien est notre but commun. Nous ne pouvons pas nous arrêter sous prétexte que les administrations américaine et israélienne font face à des changements et à des élections. Nous avons, donc, décidé de nous revoir dans le cadre du suivi de la Conférence de Paris le 15 décembre et de travailler à d'autres projets. En décembre avant la fin de la Présidence française de l'Union européenne, à une date qu'il conviendra de déterminer, nous nous réunirons de nouveau. En janvier prochain se tiendra une réunion des directeurs et des experts pour le suivi de la Conférence de Paris.
Je dirai un mot tout de même sur le changement des mentalités et sur la réussite des "travaux forcés" du Premier ministre Salam Fayyad. En effet, la dernière fois que nous étions ensemble c'était pour visiter à pied, dans la foule, Jenine et la situation a considérablement changé grâce à la prise en charge palestinienne de la sécurité pour les Palestiniens. Le Premier ministre m'a expliqué où ils en étaient à Hébron. Personne n'aurait pu imaginer il y a encore un an qu'Hébron pouvait également assurer - pour le moment, plus dans la périphérie qu'au centre, pour des raisons que vous comprendrez - sa sécurité.
Avant de laisser la parole au Premier ministre, je tenais à le féliciter une nouvelle fois pour son travail et pour le fait qu'il est un partenaire essentiel de la création de l'Etat palestinien.
Nous arrivons tous les deux des Etats-Unis - le Premier ministre était à New York et moi-même à Washington - et le message que je portais à Washington, à nos amis, c'était la disposition, la volonté européenne, pas seulement de la Présidence française mais des 27 pays, de continuer à s'attacher à poursuivre notre oeuvre selon le processus d'Annapolis et de prier la nouvelle administration américaine de s'y mettre au plus vite. C'était également le voeu formulé du Quartet à Charm el-Cheikh. Il s'agissait d'insister sur la nécessité vitale de continuer à oeuvrer pour la création de l'Etat palestinien à côté d'Israël.
Q - Monsieur Kouchner, la création d'un Etat palestinien viable avant la fin de l'année 2008 était la priorité de la France et on est à la veille de 2009, peut-on parler d'un échec ?
R - Non, on peut parler d'un succès formidable ! Regardez ce qui se passe à Jenine, c'était inimaginable il y a encore peu de temps et aujourd'hui il y a une réalité qu'il faut absolument poursuivre. C'était une promesse faite à la Conférence de Paris, nous avions dit : "si cela peut être fait avant la fin 2008, c'est bien" - c'était le voeu américain -. La première étape a été de dire, du côté palestinien comme du côté israélien, que l'on continuait après la fin 2008 et l'on va continuer. Nous sommes tout à fait disposés, même si cela tombe dans une période de changements administratifs en Israël comme aux Etats Unis, à poursuivre sans attendre. C'était notre accord commun. Mais ce n'est pas un échec.
Q - Monsieur le Ministre, lors de votre visite à Washington avez-vous eu des contacts avec des personnalités de la nouvelle administration et avez-vous l'impression qu'ils seront plus à l'écoute de la position européenne, et notamment française, en ce qui concerne la Palestine et en ce qui concerne l'Iran ?
R - Je n'ai pas eu de contacts officiels avec la nouvelle administration pour une raison très simple, c'est que le futur président, M. Obama qui prendra ses fonctions à partir du 20 janvier, n'a pas souhaité que sa nouvelle administration - qui, vous le savez, n'est pas encore totalement composée - prenne quelque contact que ce soit officiellement en son nom. Il se trouve actuellement à Chicago, il réfléchit. J'ai eu l'occasion de rencontrer des personnes qui évidemment font partie - à la Brookings Institution - de ce qui a constitué le corps, le coeur de l'équipe Barack Obama.
Je pense, en effet, que véritablement le président Obama - il l'a d'ailleurs dit lors de son passage à Paris - sera beaucoup plus enclin à travailler avec les deux rives de l'Atlantique. J'en suis sûr, mais néanmoins ne nous faisons pas d'illusions, les problèmes graves qui attendent le président Obama sont surtout situés aux Etats-Unis, avant même les problèmes internationaux.
Quant à la question palestino-israélienne et le processus d'Annapolis, j'ai affirmé que c'était la première des priorités de notre point de vue européen avec les 27 pays qui ont fait ce document transatlantique, ainsi que la question de l'Iran, etc. Il y a de nombreuses questions qui attendent le président Obama, mais d'abord je crois qu'il faut régler la constitution, la création de l'Etat palestinien. Je l'ai fortement fait savoir là-bas.
Je remercie le Premier ministre.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 21 novembre 2008