Déclaration de M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'Etat à la défense et aux anciens combattants, en hommage aux travailleurs chinois et aux morts chinois pour la France, à Paris le 11 novembre 2008.

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Circonstance : 90e anniversaire de la Première Guerre mondiale, le 11 novembre 2008

Texte intégral

Monsieur l'Ambassadeur, S.E. Monsieur Kong Quan, ambassadeur de Chine en France,
Monsieur le Député,
Monsieur le Maire du 13e arrondissement de Paris,
Monsieur le président Takouenseun, Président du CICOC,
Mesdames et Messieurs,
Nous voici réunis ensemble aujourd'hui pour commémorer, dans le contexte du 90e anniversaire de l'Armistice de 1918, la participation de la Chine à l'effort de guerre des nations alliées durant la Première Guerre mondiale.
Beaucoup de nos concitoyens ont oublié la contribution essentielle du peuple chinois à la Grande Guerre et à la victoire des Alliés, le 11 novembre 1918.
Lorsque la guerre éclate en 1914, les belligérants croient alors qu'elle sera courte, et qu'ils seront rentrés pour le temps des vendanges, à l'automne.
Nous savons aujourd'hui, hélas, qu'il n'en fût rien.
Après les offensives meurtrières de l'été et de l'automne 1914, le front se fige et immobilise des millions de combattants.
A l'arrière, la nation doit se réorganiser pour soutenir l'effort de guerre dans la durée. Les usines ont besoin de bras. Au front, la guerre absorbe tous les hommes disponibles.
C'est dans ce contexte que les Français et les Britanniques entament des négociations avec les autorités chinoises, afin qu'elles leur fournissent des travailleurs susceptibles de remplacer les hommes à l'usine, aux champs et au front, dans différentes tâches vitales pour la guerre.
C'est ainsi que 138.000 travailleurs chinois sont acheminés en France sur les différents théâtres de la Grande Guerre entre 1916 et 1918.
Ces travailleurs se rendent très vite indispensables : ils assurent la construction de chemins de fer et de routes, sont employés dans des manufactures d'armes et de munitions, et participent à des chantiers de construction navale.
Après la cessation immédiate des combats, ces travailleurs chinois poursuivent leur dangereux labeur en nettoyant les champs de mines et en assurant à la fois l'exhumation et l'ensevelissement des corps de combattants tués à la guerre.
Une fois la guerre terminée, la majorité de ces travailleurs rentrent chez eux.
Mais un certain nombre décide de rester en France, généralement à Paris où dans sa proche banlieue.
Ce sera l'acte de naissance de la communauté chinoise de France, dont nous connaissons aujourd'hui à la fois le dynamisme et l'attachement à notre pays.
Il est important que la France se souvienne, en ce 90e anniversaire de l'Armistice de 1918, que le point de départ de cette immigration chinoise en France fût 1914 et la réponse des travailleurs chinois à l'appel des démocraties libérales, alors opposées aux empires centraux.
Nous savons que la Chine attendait beaucoup de cette participation à la grande Guerre aux côtés des Alliés.
C'est peu dire qu'elle fut déçue du sort qui lui fut réservé au moment du règlement de la paix.
Malgré la déclaration des grands principes Wilsoniens, malgré l'affirmation du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, la Chine n'obtint pas ce qu'elle voulait à l'issue du conflit, c'est-à-dire la restitution de ses territoires auparavant occupés par l'Allemagne.
Ce renoncement des Alliés aux grands principes qu'ils avaient eux-mêmes proclamés eut un effet négatif, en Chine, sur l'image de l'Occident.
Aujourd'hui, 90 ans après ces événements, c'est l'occasion pour la France de rendre hommage aux travailleurs chinois qui risquèrent leur vie sur le sol de France.
C'est l'occasion d'honorer la mémoire des milliers de travailleurs chinois morts durant les combats de la Première Guerre mondiale, dont les corps reposent dans le cimetière chinois de Noyelles-sur-Mer, dans la Somme.
C'est également pour nous l'occasion d'honorer la mémoire du soldat chinois mort pour la France, le 2 septembre 1918, à la suite de ses blessures.
Oui, Mesdames et Messieurs, le saviez-vous, il existe un chinois mort pour la France !
Il s'agit du légionnaire MA YI PAO, engagé en 1917 à l'âge de 23 ans dans la Légion Etrangère, plusieurs fois blessé au front et finalement décédé à Jaulzy, dans l'Oise.
Son corps repose aujourd'hui en la nécropole nationale de Vic, dans l'Aisne.
Nous lui rendons aujourd'hui l'hommage qu'il mérite, l'hommage au mort chinois pour la France.
Je vous remercie.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 27 novembre 2008