Texte intégral
C'est avec un très sincère plaisir que je m'exprime devant vous aux côtés de mes collègues en charge de la Justice, en un moment particulièrement important. Nous nous retrouvons en un début de semaine qui n'est pas ordinaire puisque, comme chacun le sait, nous nous mobilisons toutes et tous autour du 25 novembre, déclarée journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes pour sensibiliser l'opinion à ce problème, à ce fléau social intolérable.
Vous avez choisi ce moment pour présenter votre étude évaluative de l'expérimentation « Pro-victima » qui s'inscrit dans le cadre du programme européen Equal. Nous vous en sommes particulièrement reconnaissants. La dimension européenne, la valorisation des actions destinées à faciliter l'insertion professionnelle des femmes victimes de violences conjugales vont permettre des échanges de bonnes pratiques entre les multiples partenaires impliqués dans cette démarche.
Je voudrais tout d'abord remercier Rachida Dati qui a tenu à m'associer à ce Séminaire. Nous travaillons effectivement ensemble sur ces sujets et c'est pour moi l'occasion d'insister sur l'importance d'une approche transversale pour réussir. Ce n'est que par une prise en compte globale et des réponses adaptées aux besoins et aux attentes que nous réussirons à éradiquer ce phénomène de violence dont sont majoritairement victimes les femmes.
Je souhaite aussi rendre hommage à notre invitée britannique, Madame la Baronne Patricia SCOTLAND, dont la présence témoigne de la dimension européenne de nos préoccupations.
Je tiens également à saluer les actions de terrain des associations dont l'engagement et les efforts de proximité sont essentiels à la reconstruction des victimes.
Vos expérimentations en sont la preuve. En coordonnant vos initiatives, vous accompagnez les femmes victimes de violence, vous les aider à reconstruire leur identité et à retrouver leur autonomie. C'est, j'en suis convaincue, en apportant une réponse globale et en favorisant un suivi des parcours individualisés que les personnes prises en charge pourront retrouvé un emploi, un logement et confiance en elle-même.
Je remercie enfin très chaleureusement, Sabrina BELLUCCI Directrice de l'INAVEM, Annie GUILBERTEAU, Directrice du CNIDFF et Christine CLAMENS, Directrice de la FNSF qui ont contribué pendant 3 ans, grâce aux crédits du Fonds Social européen, à la réalisation de 21 expérimentations sur l'insertion professionnelle des femmes victimes de violences conjugales. Je remercie bien sûr Madame Catherine FROISSART qui nous présentera son étude sur l'évaluation qualitative de l'expérimentation Pro-victima. Je sais, et je m'en félicite, que mes services ont contribué, pour leur part au bon déroulement de ces expérimentations. Comme vous le savez, la lutte contre les violences faites aux femmes est ma priorité, et celle de mes collègues au sein du Gouvernement.
Depuis un an, nous mettons en oeuvre les 12 objectifs définis dans le second plan triennal global de lutte contre les violences.
Un après son lancement, il est important de dresser un bilan pour mesurer les actions entreprises par les différents ministères. J'y tiens d'autant plus que votre séminaire illustre la démarche interministérielle qui est au coeur de ce plan et s'inscrit dans le cadre d'une évaluation globale de toutes les actions menées par les acteurs publics et privés, institutionnels et associatifs.
Ce plan concerne l'ensemble des acteurs et s'accompagne tout au long de son application d'une campagne de communication grand public que j'ai lancée le 2 octobre dernier. Il s'agit d'une campagne de presse et d'affichage portant sur 3 cibles (la victime, le témoin et l'auteur) dédiée cette année aux violences au sein du couple.
Cette campagne est entretenue au quotidien grâce au site internet gouvernemental sur l'ensemble des violences faites aux femmes avec des témoignages directs pour que le silence se brise.
J'insisterai tout particulièrement sur la mise en place progressive d'un réseau de référents locaux sur tout le territoire. Ces référents sont les interlocuteurs uniques de proximité pour garantir l'accompagnement des femmes victimes de violences au sein du couple. Ils pourront ainsi apporter dans la durée une réponse globale aux femmes, ils pourront les orienter vers les structures adaptées à leurs besoins. Je sais déjà que 9 référents vont être recrutés d'ici la fin de l'année. 20 autres départements projettent de les mettre en place en 2009. Leur rôle sera déterminant, j'en suis convaincue, pour éviter la fragmentation des démarches auxquelles sont confrontées les femmes victimes de violence.
Ils participeront au suivi de leurs parcours individualisés auquel chacun des partenaires de Pro-Victima apporte sa coopération.
Si l'on veut aider les femmes à retrouver leur autonomie, à bénéficier de formations professionnelles pour accéder à un emploi, il faut faciliter leurs démarches.
A cet égard, la priorité que vous accordez à l'insertion professionnelle est fondamentale. Ce n'est en effet qu'en recouvrant leur indépendance financière que ces femmes sortiront de l'emprise d'autrui.
Ici encore, il faut être en capacité de répondre à leurs besoins.
Lorsqu'elles ont le courage de briser le silence, lorsqu'elles décident de quitter leur conjoint violent, elles doivent pouvoir pendant une période transitoire êtres hébergées. Pour cela j'ai tenu à améliorer et à diversifier les réponses offertes en matière d'hébergement et de logement. Aussi ai-je privilégié les familles d'accueil.
Avec ma collègue, Christine BOUTIN, Ministre du logement et de la ville, nous avons saisi le 25 juillet dernier, les Présidents des Conseils généraux.
Ceux-ci se sont fortement mobilisés. Aujourd'hui, plus de 70 familles ont été identifiées ou se sont portées candidates pour accueillir les femmes victimes de violence avec ou sans enfants. Elles sont réparties sur une vingtaine de départements. Quinze départements veillent à ce que les familles soient agréées et opérationnelles d'ici la fin de l'année (par exemple dans la Manche, la Sarthe, l'Oise, la Creuse, la Drôme, l'Ardèche...). 5 autres projets le seront en 2009.
J'avais annoncé 100 familles d'accueil d'ici 2010. Nous avons avons déjà dépassé 50% de notre objectif. Ces résultats dépassent mes espérances et je m'en réjouis. C'est non seulement très encourageant, mais c'est de bonne augure pour, je le répète, aider et soulager les femmes qui veulent reconstruire leur vie dans un cadre anonyme et chaleureux, hors des structures collectives.
Plus globalement, nous veillons aussi avec Christine BOUTIN, à ce que les femmes vicimes de violence conjugale soient prioritaires dans l'accès au logement. Nous avons ensemble rappelé aux préfets le 4 août dernier la nécessité de favoriser localement une meilleure prise en compte de leurs besoins. Ces exemples montrent combien il est essentiel que les collectivités territoriales soient étroitement associées à la politique que nous menons en matière de lutte contre les violences faites aux femmes.
Le rapport d'évaluation des inspections qui m'a été remis en juillet et présenté le 1er octobre dernier devant les membres de la Commission nationale contre les violences envers les femmes, le souligne parfaitement : il est essentiel que les collectivités territoriales et des partenaires diversifiés soient étroitement associés à la politique que nous menons en ce domaine.
Je me tourne maintenant vers notre Garde des Sceaux Rachida DATI, pour évoquer notre partenariat. En effet, nous avons tenu à mettre en place un groupe de travail interministériel sur l'évolution du cadre juridique afin d'examiner et de rechercher des pistes d'amélioration, portant notamment sur une définition des violences psychologiques dans le code pénal et une articulation entre les procédures pénales et civiles.
Ce groupe constitué le 2 juillet s'est déjà réuni deux fois. Les débats nécessairement complexes sont riches et constructifs. Ils feront l'objet de propositions, souhaitons-le, consensuelles. Ce groupe devra également évaluer l'opportunité d'une mesure ou d'une instruction pour prévenir les poursuites pour délit de soustraction à l'autorité parentale. La Garde des Sceaux et moi-même accordons une très grande importance à ces travaux.
A cet égard, je souhaiterais que nous examinions la possibilité de crééer , comme le propose le rapport d'inspection, une ordonnance de protection pour les femmes victimes .
Je terminerai en insistant sur la nécessité de la prévention. Prévenir c'est agir sur l'image de la femme Eradiquer le phénomène des violences ne peut se concevoir sans réfléchir à l'image des femmes, à leurs représentations dans tous les domaines en commençant par l'éducation, dès le plus jeune âge.
La Commission de réflexion sur « l'image des femmes dans les médias », présidée par Michèle REISER m'a rendu son rapport le 25 septembre dernier. Ses constats sont éloquents. Le poids des clichés et des stéréotypes continue à peser et à compromettre les progrès en faveur des femmes. Nous avons l'ambition de faire évoluer les mentalités. Nous ne pouvons tolérer dans nos démocraties les atteintes à l'intégrité physique et à la dignité des femmes. Pour cela, il est important de prendre conscience de l'inacceptable décalage qui perdure entre les stéréotypes qui continuent à s'appliquer à la représentation des femmes et la place réelle qu'elles occupent dans la société.
Prévenir c'est aussi sensibliser.
J'ai déjà rappelé la campagne de communication grand public lancée le 2 octobre. Je n'y reviendrai pas.
Je dirai simplement toutes les formes de violences sont prises en compte : 2008 est résolument dédiée aux violences conjugales, 2009 s'adressera essentiellement aux femmes et jeunes filles victimes ou susceptibles de l'être de mariages forcés ou de mutilations sexuelles. 2010 portera principalement sur les violences verbales et l'image de la femme. Ces focus s'imposent au regard de toutes les formes d'atteinte à l'intégrité des personnes dont sont très majoritairement victimes les femmes et qui requièrent une intervention forte de l'Etat. J'évoquerai enfin les guides à destination de tous les professionnels (Police, gendarmerie, santé, justice, intervenants sociaux...). La nouvelle édition de « Lutter contre la violence au sein du couple, le rôle des professionnels » qui s'inscrit dans le second Plan triennal résulte d'un travail collectif. Je remercie les différents Ministères qui ont participé à l'élaboration de ce document. Je me félicite aussi de l'actualisation de votre guide de l'action publique intitulé « La lutte contre les violences au sein du couple : de la révélation des faits à l'exécution des peines ». Ces guides sont des outils essentiels pour sensibiliser, informer et former tous les acteurs de lutte contre les violences à l'encontre des femmes. C'est un combat solidaire qui nous concerne toutes et tous. Poursuivons-le ensemble car il n'y a pas de fatalité à ces violences. Je vous remercie.
Source http://www.travail-solidarite.gouv.fr, le 26 novembre 2008