Interview de M. Roger Karoutchi, secrétaire d'Etat chargé des relations avec le Parlement, à France 2 le 23 décembre 2008, sur l'"obstruction de la gauche" durant les débats parlementaires sur la réforme de l'audiovisuel et le travail du dimanche et sur sa décision de se porter candidat de la majorité à l'élection régionale en Ile-de-France.

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Média : France 2

Texte intégral

G. Leclerc.- Bonjour R. Karoutchi.
Bonjour.
La session du Parlement s'est donc terminée hier soir à minuit, j'imagine que ce matin vous êtes, on va dire soulagé.
Oui, soulagé parce que c'est fini mais ça reprend très vite, nous reprenons dans 15 jours.
Ça s'est un peu terminé dans la douleur quand même, les derniers textes, ça a été difficile et compliqué.
Ça s'est terminé dans une certaine confusion liée à une attitude d'obstruction de la gauche qui, je l'espère, ne reprendra pas à la rentrée de janvier. Mais au total, sur l'année 2008, 54 textes de loi ont été votés, le budget a été voté, le plan de relance a été voté, le plan de financement a été voté, je veux dire l'essentiel des textes est passé.
Vous dites obstruction de la gauche, est-ce qu'il n'y a pas eu du côté de la majorité également quelques difficultés, quelques problèmes : sur l'audiovisuel, sur le travail le dimanche par exemple ? Ca a été plus difficile que prévu.
Alors il y a eu un débat normal - d'ailleurs les parlementaires ne sont pas des robots, il y a eu un débat normal - au sein de la majorité. On a trouvé un accord, la preuve le texte audiovisuel a été voté finalement avec plus de 50 voix d'avance.
Avec quand même beaucoup de retard par rapport au calendrier initial.
Ah ! Avec beaucoup de retards liés aux trois semaines de débats du fait de l'obstruction socialiste. De la même manière qu'on nous annonce 7 000 amendements socialistes sur le texte travail du dimanche, de la même manière que les socialistes nous disent qu'ils vont "faire la guerre" sur la loi organique, sur le fonctionnement du Parlement. Je veux dire il y aurait un seul texte audiovisuel par exemple, sur lequel les socialistes auraient dit "là-dessus on se bat", j'aurais dit : il y a une volonté politique claire. Quand sur trois textes en un mois, on dit on veut bloquer le système, il y a un problème politique qui dépasse le problème du choix des textes. C'est un problème de démocratie.
Il n'y a pas eu encore une fois du côté de la majorité certains se plaignent de trop de textes, un peu de lassitude, un peu de fatigue, des textes qu'ils n'ont pas toujours le temps de bien examiner.
Il y a beaucoup de textes, beaucoup de réformes ont été conduites, mais sincèrement, c'est vrai qu'on a voté 72 lois depuis juin 2007. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que N. Sarkozy était élu sur un programme de réformes, sur un programme de transformation du pays et c'est vrai que les parlementaires participent à cette transformation en votant de nombreux textes. Alors je ne dis pas qu'il n'y a pas des moments où moi-même dans les séances de nuit, et puis le vendredi et puis le weekend, je me dis pas c'est beaucoup. Mais en même temps, ils sont conscients, je crois, dans la majorité de participer à une oeuvre réformatrice tout à fait utile.
Franchement, si on reprend l'exemple du travail du dimanche, est-ce que c'était vraiment utile de faire deux heures de discussions alors qu'on sait très bien qu'on va vraiment démarrer les choses sérieuses à la rentrée de janvier ? C'est juste pour faire plaisir au président de la République ?
Symboliquement, c'était important de dire : de la part du Gouvernement, les choses sont claires, on affirme la vérité, nous tenons à ce texte. Deuxième élément, on serait allé un peu plus loin si on n'avait pas eu une extrême fin de session un peu houleuse. Vous savez, quand vous voyez des menaces physiques, des torrents d'injures dans l'hémicycle, ce n'est pas l'endroit, ce n'est pas le lieu et franchement j'espère que la reprise sera plus sereine.
Vous espérez effectivement, mais vous parliez tout à l'heure de 7 000 amendements pour le travail le dimanche qui va reprendre donc en janvier, comment vous allez faire ?
Moi, je dis d'abord, premier temps, nous allons avoir avec tous les présidents de groupe, de gauche comme de droite, des discussions. Est-ce que l'hémicycle doit devenir un lieu de ce genre avec des panonceaux, avec des badges, avec des manifs, avec des menaces ?
Est-ce que c'est normal ? C'est un vrai débat quand même dans le pays, ça traduit un débat dans le pays ?
Non, non. Je ne suis pas d'accord.
Le travail le dimanche....
Au Parlement, il y a un débat démocratique entre représentants de la nation. Ce n'est pas la castagne et ce n'est pas le cirque. Donc je souhaite qu'on revienne à une attitude plus sereine. Deuxième élément, si la gauche veut faire de l'obstruction systématique sur tous les textes qui viennent, alors il y a un vrai problème de démocratie. Les Français ont voté, les Français ont désigné une majorité, il y a une opposition qui doit s'exprimer...
Quand la droite était dans l'opposition, il y avait de temps en temps de l'obstruction, ça arrive quand même ?
Un texte de temps en temps, pas tous les textes d'affilés. Tous les textes d'affilés, c'est la négation de la majorité et c'est la négation de la démocratie, on doit donc avoir une conversation avec la gauche.
Pour l'audiovisuel donc le texte va revenir au Sénat, le 7 janvier prochain.
Exactement.
Est-ce qu'en l'état, le texte tel qu'il est peut passer, est-ce qu'il y a une véritable majorité au Sénat avec le texte tel qu'il est aujourd'hui ?
Oui je pense... Il y aura des discussions internes d'ailleurs à la majorité et avec la gauche. Je pense que le débat sera moins passionné, si je puis me permettre, au Sénat qu'à l'Assemblée. Ce sera un débat lourd, on a prévu deux semaines, donc il y aura un vrai débat de fond, il y aura des argumentations, probablement des amendements mais ce sera moins difficile parce que je ne pense pas qu'il y ait d'obstruction au Sénat.
Sur la redevance tout de même, et on a vu que les sénateurs n'étaient pas tout à fait de l'avis des députés, en tout cas au final, est-ce que là le Gouvernement ne pourrait pas faire un geste pour être sûr que ce texte soit finalement voté par la majorité, soit en augmentant un peu cette fameuse redevance - les sénateurs parlent de deux euros - soit peut-être en faisant un autre geste sur la taxe sur les télés privées, c'est envisageable ?
On peut toujours discuter mais dans un premier temps, le Sénat avait fait passer la redevance de 116 à 118 euros. Finalement en commission mixte paritaire, on l'a enlevé du collectif, enfin de la loi rectificative. On va voir dans le texte audiovisuel ce que re-propose le Sénat. Il faut qu'il y ait un vrai débat sur le financement des mesures qui sont prises, le gouvernement est ouvert, madame Albanel a toujours été ouverte d'ailleurs aussi bien à l'Assemblée qu'au Sénat. Si le débat se passe de manière sereine et constructive, on peut tous avancer ensemble.
Donc vous n'êtes pas fermé à éventuellement une petite modification ?
Ce n'est pas à moi d'en décider, ce sera à C. Albanel, à E. Woerth, mais je crois qu'on peut discuter, débattre sur le fond sans remettre en cause les équilibres du texte.
R. Karoutchi, nous sommes à la fin de l'année quasiment, l'année prochaine pour vous, ça va être une année importante....
Comme toutes les années.
Est-ce que vous êtes toujours bien candidat à la présidence du Conseil régional d'Ile de France ?
Oui, je remettrai d'ailleurs cet après-midi même mon acte de candidature aux primaires internes à l'UMP, je remettrai ça à R. Pandraud.
Comme adversaire ou concurrente, V. Pécresse.
Adversaire non, on fait ça en parallèle...
Pourquoi vous seriez le meilleur au fond ?
Si je vous disais parce que c'est naturellement moi, ça ferait un peu publicité pour quelqu'un d'autres, mais non tout simplement parce que des années je combats l'exécutif, je connais parfaitement cette région, je connais ses difficultés, ses problèmes, j'ai un programme alternatif, soutenu je le crois par la grande majorité des élus et des adhérents de l'UMP.
Ce serait plus intéressant cette présidence qu'au fond d'être ministre tel que vous l'êtes aujourd'hui, parce que vous n'allez pas pouvoir cumuler, c'est impossible ?
Ça, j'ai déjà dit que si j'étais président de la région, je ne cumulerais pas et que je me consacrerais entièrement à la région. Mais si je suis président, donc ça c'est en 2010. D'ici là, j'ai beaucoup, beaucoup de travail au Parlement et la poursuite des réformes, c'est l'essentiel.
Merci beaucoup R. Karoutchi, bonne journée.
Merci à vous.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 2 janvier 2009