Texte intégral
F. Laborde.- Nous allons d'abord parler ce matin de la situation au Proche- Orient. Bonjour H. Morin et merci d'être venu nous voir. Vous étiez d'ailleurs tout récemment avec le président de la République N. Sarkozy dans la région. On va revenir d'abord sur cette résolution des Nations Unies qui a demandé cette nuit un cessez-le-feu immédiat. Cela va dans le sens évidemment de l'initiative française ?
Très clairement, la visite du président de la République durant ces deux jours dans la région a cherché à faire en sorte qu'on puisse trouver d'abord et avant tout une solution immédiate, et cette solution immédiate elle passe par d'une part un cessez-le-feu, par d'autre part l'ouverture des points de passage permettant aux convoies humanitaires de pouvoir passer. Il y a ensuite bien entendu la solution à moyen terme et à long terme, et cette solution passe d'une part notamment par l'initiative égyptienne qui est de fermer les tunnels entre Gaza et l'Egypte, qui alimentent les réseaux d'armes pour le Hamas et, par ailleurs, bien entendu la solution à long terme qui est la création de deux Etats, l'un Israël existant mais dont on garantie la sécurité et l'autre, un Etat palestinien viable.
Mais on a le sentiment, aujourd'hui, qu'il n'y a pas le début du commencement d'un dialogue possible, enfin je veux dire on est même plus dans le processus de paix qui était envisagé à un moment. Il paraît totalement inenvisageable aujourd'hui ?
Tout est sur la table. On a eu depuis, Camp Davis, Annapolis... On connaît le processus qui doit amener à l'existence d'un Etat palestinien viable, et en même temps, les garanties apportées à Israël pour assurer sa sécurité, garantir sa sécurité. Et donc, tous les éléments sont sur la table. On peut espérer à la fois à travers l'initiative européenne, parce que l'Europe a un message, c'est ça qui... pour l'instant, ce sont surtout les Américains qui ont été à la manoeuvre sur le Moyen-Orient, même si depuis quelques années, les choses avancent moins vite. Mais l'Europe a un message et ce message c'est que nous, nous sommes une école de la paix et de la stabilité. Nous avons montré au monde entier...
Qu'on pouvait se réconcilier.
... Que nous avons été, à partir d'un champ de ruines, capables de pouvoir construire un continent de paix et de sécurité, bâti sur la norme et le respect du droit. Et donc, ce message européen, ce message français, nous pouvons le porter aussi au Moyen-Orient.
Il y a quand même une génération... Là, par exemple, à Gaza, 780 morts depuis le début de l'attaque en treize jours ; il y a l'attaque d'un convoi humanitaire des Nations unies, et donc l'Agence des Nations unies chargée de cela a décidé de suspendre l'aide humanitaire. On voit bien que Gaza est une sorte de poudrière, et qu'il y a une génération qui n'est pas prête au dialogue.
Mais la paix finira bien un jour par s'imposer dans l'esprit de tout le monde, je veux dire comme elle s'est imposée ailleurs. Il n'y a aucune raison qu'il y ait ad vitam aeternam une situation telle que vous la décrivez. Et vous aurez remarqué aussi la modération des Etats voisins dans cette crise.
Vous étiez aussi au sud Liban où, là encore, il y a des roquettes qui sont envoyées sur le territoire israélien. Il y a la Finul qui est en position là-bas avec notamment des soldats français. Que peut faire la Finul pour justement calmer un peu le jeu pour qu'il n'y ait une sorte d'embrasement de...
Dans l'état actuel des choses et selon nos connaissances, ces roquettes ne proviennent pas du Hezbollah. Le Hezbollah d'ailleurs a dénoncé ces tirs, et il semblerait que ce soit d'abord l'initiative d'extrémistes qui ont joué le jeu de la provocation. Et donc, vous voyez bien qu'il y a dans cette crise, la volonté des voisins d'éviter de mettre de l'huile sur le feu.
Vous espérez quand même qu'on puisse arriver à un cessez-le-feu puisque cette nuit, Israël a continué à pilonner, si je puis dire.
La communauté internationale fait tout pour que le cessez-le-feu soit en effet mis en oeuvre.
L'armée française est présente aussi en Afghanistan, vous y avez d'ailleurs passé...
Le 31 décembre.
Le 31 décembre. Avec l'arrivée de la nouvelle administration Obama, est-ce que cela va changer la collaboration entre Français et Américains en Afghanistan, ou cela va changer tout simplement la position de l'armée française ?
Non. Ce qu'on sait pour l'instant de l'administration Obama, c'est quoi ? C'est que B. Obama considère que la priorité pour les Etats- Unis, ce n'est plus l'Irak mais c'est l'Afghanistan... C'est une analyse que la France partage ? C'est-à-dire que nous nous ne sommes pas en Irak. Et l'autre déclaration de B. Obama durant la campagne a été celle d'annoncer des renforts importants, entre 20.000 et 30.000 hommes. Ce que nous nous disons, pour l'instant - d'ailleurs pas pour l'instant - ce que nous disons, c'est qu'il n'est pas question pour nous d'envoyer des renforts complémentaires, compte tenu de l'effort qu'a effectué la France au cours de l'année 2008.
Mais on va garder le même nombre de soldats stationnés en Afghanistan ?
Oui, en sachant que la solution en Afghanistan elle n'est pas uniquement militaire. On a besoin de stabilité et de sécurité pour le développement ; vous ne pouvez pas construire d'écoles ou d'hôpitaux si vous n'avez pas la stabilité et la sécurité. Mais la solution elle est aussi politique. Elle passe par un processus de réconciliation nationale que le président afghan Karzaï doit mener ; elle passe par des institutions afghanes qui soient compatibles avec ce qu'est l'Afghanistan ; l'Afghanistan c'est un pays féodal et on ne peut pas y plaquer des institutions européennes, comme on a voulu le faire. Bref, il faut aussi faire monter en puissance l'armée nationale afghane et la police afghane pour qu'un jour, nous soyons en mesure de nous retirer.
Passons maintenant, si je puis dire, à la politique française. Puisque vous êtes aussi président du Nouveau centre, c'est au chef de parti, si je puis dire, que je m'adresse. Cette réforme de la justice annoncée par le président de la République, avec la suppression notamment du juge d'instruction, qu'en pense le président du Nouveau centre que vous êtes ?
Nous avons défendu durant la campagne présidentielle l'idée du juge de l'instruction. C'est-à-dire non plus un juge qui soit chargé de mener l'enquête, mais qui soit un juge qui soit arbitre, qui puisse entendre les deux parties, que le système soit à charge et à décharge. Et donc, en tant que telle, l'idée, si j'ai bien compris puisque nous n'en avons que les grandes lignes, de la création d'un juge de l'instruction est une idée moi qui me convient. Il faut cependant qu'elle soit accompagnée d'un certain nombre d'éléments.
Ce sont des conditions, pour vous ?
On verra quel est le contenu, mais ce qu'il fau, c'est d'une part que bien entendu ce juge de l'instruction soit clairement indépendant, qu'il y ait des garanties pour les citoyens de son indépendance. Le second point c'est qu'il faut que chaque justiciable soit en situation d'égalité. Si F. Laborde se retrouve devant un juge de l'instruction, elle peut s'offrir un avocat ; il faut que les gens de conditions, les personnes de conditions modestes soient en mesure de pouvoir aussi s'offrir un avocat pour être défendues. Donc, il faut qu'il y ait un système qui permette à chacun de pouvoir être défendu de façon équitable et égale. Et la troisième condition, c'est aussi de faire en sorte que le citoyen, qui estime qu'on a laissé tomber l'enquête en considérant qu'il n'y avait pas lieu de continuer...
Que le procureur de la République s'est assis sur le dossier, pour dire les choses de façon un peu brutale...
Eh bien, que le citoyen puisse se constituer partie civile pour relancer une enquête, s'il estime qu'elle doit l'être.
Et cela, ce sont en effet trois conditions... demandes, qui...
Ce sont des choses qui nous semblent importantes dans une réforme de ce genre.
Merci H. Morin d'être venu nous voir ce matin. Merci.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 9 janvier 2009
Très clairement, la visite du président de la République durant ces deux jours dans la région a cherché à faire en sorte qu'on puisse trouver d'abord et avant tout une solution immédiate, et cette solution immédiate elle passe par d'une part un cessez-le-feu, par d'autre part l'ouverture des points de passage permettant aux convoies humanitaires de pouvoir passer. Il y a ensuite bien entendu la solution à moyen terme et à long terme, et cette solution passe d'une part notamment par l'initiative égyptienne qui est de fermer les tunnels entre Gaza et l'Egypte, qui alimentent les réseaux d'armes pour le Hamas et, par ailleurs, bien entendu la solution à long terme qui est la création de deux Etats, l'un Israël existant mais dont on garantie la sécurité et l'autre, un Etat palestinien viable.
Mais on a le sentiment, aujourd'hui, qu'il n'y a pas le début du commencement d'un dialogue possible, enfin je veux dire on est même plus dans le processus de paix qui était envisagé à un moment. Il paraît totalement inenvisageable aujourd'hui ?
Tout est sur la table. On a eu depuis, Camp Davis, Annapolis... On connaît le processus qui doit amener à l'existence d'un Etat palestinien viable, et en même temps, les garanties apportées à Israël pour assurer sa sécurité, garantir sa sécurité. Et donc, tous les éléments sont sur la table. On peut espérer à la fois à travers l'initiative européenne, parce que l'Europe a un message, c'est ça qui... pour l'instant, ce sont surtout les Américains qui ont été à la manoeuvre sur le Moyen-Orient, même si depuis quelques années, les choses avancent moins vite. Mais l'Europe a un message et ce message c'est que nous, nous sommes une école de la paix et de la stabilité. Nous avons montré au monde entier...
Qu'on pouvait se réconcilier.
... Que nous avons été, à partir d'un champ de ruines, capables de pouvoir construire un continent de paix et de sécurité, bâti sur la norme et le respect du droit. Et donc, ce message européen, ce message français, nous pouvons le porter aussi au Moyen-Orient.
Il y a quand même une génération... Là, par exemple, à Gaza, 780 morts depuis le début de l'attaque en treize jours ; il y a l'attaque d'un convoi humanitaire des Nations unies, et donc l'Agence des Nations unies chargée de cela a décidé de suspendre l'aide humanitaire. On voit bien que Gaza est une sorte de poudrière, et qu'il y a une génération qui n'est pas prête au dialogue.
Mais la paix finira bien un jour par s'imposer dans l'esprit de tout le monde, je veux dire comme elle s'est imposée ailleurs. Il n'y a aucune raison qu'il y ait ad vitam aeternam une situation telle que vous la décrivez. Et vous aurez remarqué aussi la modération des Etats voisins dans cette crise.
Vous étiez aussi au sud Liban où, là encore, il y a des roquettes qui sont envoyées sur le territoire israélien. Il y a la Finul qui est en position là-bas avec notamment des soldats français. Que peut faire la Finul pour justement calmer un peu le jeu pour qu'il n'y ait une sorte d'embrasement de...
Dans l'état actuel des choses et selon nos connaissances, ces roquettes ne proviennent pas du Hezbollah. Le Hezbollah d'ailleurs a dénoncé ces tirs, et il semblerait que ce soit d'abord l'initiative d'extrémistes qui ont joué le jeu de la provocation. Et donc, vous voyez bien qu'il y a dans cette crise, la volonté des voisins d'éviter de mettre de l'huile sur le feu.
Vous espérez quand même qu'on puisse arriver à un cessez-le-feu puisque cette nuit, Israël a continué à pilonner, si je puis dire.
La communauté internationale fait tout pour que le cessez-le-feu soit en effet mis en oeuvre.
L'armée française est présente aussi en Afghanistan, vous y avez d'ailleurs passé...
Le 31 décembre.
Le 31 décembre. Avec l'arrivée de la nouvelle administration Obama, est-ce que cela va changer la collaboration entre Français et Américains en Afghanistan, ou cela va changer tout simplement la position de l'armée française ?
Non. Ce qu'on sait pour l'instant de l'administration Obama, c'est quoi ? C'est que B. Obama considère que la priorité pour les Etats- Unis, ce n'est plus l'Irak mais c'est l'Afghanistan... C'est une analyse que la France partage ? C'est-à-dire que nous nous ne sommes pas en Irak. Et l'autre déclaration de B. Obama durant la campagne a été celle d'annoncer des renforts importants, entre 20.000 et 30.000 hommes. Ce que nous nous disons, pour l'instant - d'ailleurs pas pour l'instant - ce que nous disons, c'est qu'il n'est pas question pour nous d'envoyer des renforts complémentaires, compte tenu de l'effort qu'a effectué la France au cours de l'année 2008.
Mais on va garder le même nombre de soldats stationnés en Afghanistan ?
Oui, en sachant que la solution en Afghanistan elle n'est pas uniquement militaire. On a besoin de stabilité et de sécurité pour le développement ; vous ne pouvez pas construire d'écoles ou d'hôpitaux si vous n'avez pas la stabilité et la sécurité. Mais la solution elle est aussi politique. Elle passe par un processus de réconciliation nationale que le président afghan Karzaï doit mener ; elle passe par des institutions afghanes qui soient compatibles avec ce qu'est l'Afghanistan ; l'Afghanistan c'est un pays féodal et on ne peut pas y plaquer des institutions européennes, comme on a voulu le faire. Bref, il faut aussi faire monter en puissance l'armée nationale afghane et la police afghane pour qu'un jour, nous soyons en mesure de nous retirer.
Passons maintenant, si je puis dire, à la politique française. Puisque vous êtes aussi président du Nouveau centre, c'est au chef de parti, si je puis dire, que je m'adresse. Cette réforme de la justice annoncée par le président de la République, avec la suppression notamment du juge d'instruction, qu'en pense le président du Nouveau centre que vous êtes ?
Nous avons défendu durant la campagne présidentielle l'idée du juge de l'instruction. C'est-à-dire non plus un juge qui soit chargé de mener l'enquête, mais qui soit un juge qui soit arbitre, qui puisse entendre les deux parties, que le système soit à charge et à décharge. Et donc, en tant que telle, l'idée, si j'ai bien compris puisque nous n'en avons que les grandes lignes, de la création d'un juge de l'instruction est une idée moi qui me convient. Il faut cependant qu'elle soit accompagnée d'un certain nombre d'éléments.
Ce sont des conditions, pour vous ?
On verra quel est le contenu, mais ce qu'il fau, c'est d'une part que bien entendu ce juge de l'instruction soit clairement indépendant, qu'il y ait des garanties pour les citoyens de son indépendance. Le second point c'est qu'il faut que chaque justiciable soit en situation d'égalité. Si F. Laborde se retrouve devant un juge de l'instruction, elle peut s'offrir un avocat ; il faut que les gens de conditions, les personnes de conditions modestes soient en mesure de pouvoir aussi s'offrir un avocat pour être défendues. Donc, il faut qu'il y ait un système qui permette à chacun de pouvoir être défendu de façon équitable et égale. Et la troisième condition, c'est aussi de faire en sorte que le citoyen, qui estime qu'on a laissé tomber l'enquête en considérant qu'il n'y avait pas lieu de continuer...
Que le procureur de la République s'est assis sur le dossier, pour dire les choses de façon un peu brutale...
Eh bien, que le citoyen puisse se constituer partie civile pour relancer une enquête, s'il estime qu'elle doit l'être.
Et cela, ce sont en effet trois conditions... demandes, qui...
Ce sont des choses qui nous semblent importantes dans une réforme de ce genre.
Merci H. Morin d'être venu nous voir ce matin. Merci.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 9 janvier 2009