Interview de Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'Etat à la prospective et à l'économie numérique, à RMC le 4 février 2009, sur le développement de l'équipement numérique, l'objectif du haut débit accessible à tous en 2012 et la couverture des zones blanches de la téléphonie mobile.

Prononcé le

Média : Emission Forum RMC FR3 - RMC

Texte intégral

J.-J. Bourdin.- Nous sommes en direct de Coulommiers avec N. Kosciusko- Morizet. Bonjour. Merci d'être venue nous voir, surtout voir les habitants de Coulommiers. (...) C'est la première ville de France, équipée, tout numérique
 
C'est une ville pilote. C'est la première dans laquelle on éteint l'émetteur analogique. Tout le monde va passer au numérique et c'est la première d'une longue série, puisqu'en 2011, fin 2011, toute la France doit être passée entièrement au numérique. Donc, on continuera avec une petite ville en Alsace, qui s'appelle Kaysersberg. Après il y aura les émetteurs de Cherbourg (...) qui émettent sur 150 000 habitants, donc tout le Nord Cotentin. Ce sera le 18 novembre 2009 et puis après on enchaînera par des régions, Basse-Normandie, Alsace et progressivement toutes les régions françaises vont y passer.
 
Et toute la France sera équipée en 2011. C'est cela ?
 
Oui.
 
Toute la France sera équipée numérique en 2011.
 
Voilà.
 
Avec tous les avantages, on en a déjà beaucoup parlé depuis ce matin. On va parler du numérique, la télé numérique, on va parler de la téléphonie mobile aussi, du haut débit, parce que j'ai plein de question à vous poser.
 
On n'a pas encore le haut débit partout en France. Cela fait partie de...
 
Mais pourquoi ? Parce que les opérateurs ne veulent pas ? Qui doit investir pour que la France entière ait le haut débit ?
 
C'est un équipement qui se met en place progressivement et forcément, les premières tranches sont beaucoup plus faciles à réaliser, dans les zones plus denses, que les tranches suivantes. Donc, là, notre objectif, c'est d'avoir toute la France en haut débit.
 
Mais quand ?
 
En 2012.
 
En 2012. (...) Vous vous engagez, là, ce matin ? En 2012, toute la France, il n'y aura plus de zones d'ombre, de zones blanches ?
 
Cela fait partie de ma mission. J'ai trois mission prioritaires pour l'année 2009 : accélérer sur le haut débit, avec un objectif, tout le monde en haut débit en 2012. Lancer le très haut débit, qui est l'étape suivante, donc ça, ce ne sera pas tout le monde, tout de suite, mais cela permet de développer de nouvelles fonctionnalités, et puis organiser ce basculement de la télé analogique vers la télé numérique partout, pour que ça se passe bien, que ça se passe bien techniquement - mais ça, à la limite, c'est presque le plus facile. C'est aussi que cela se passe bien pour les personnes, c'est-à-dire que chaque personne soit informée, ait le temps de s'équiper, que les personnes qui en ont le moins les moyens, soit financièrement, soit parce qu'elles ne sont pas très proches du numérique, puissent être aidées, puissent être accompagnées, et que finalement personne ne se retrouve avec un écran noir sur sa télé.
 
Oui, mais je voudrais quand même insister sur le haut débit : qui doit faire les investissements aujourd'hui ? C'est l'Etat, les régions, les collectivités locales ? Internet haut débit, qui doit faire les investissements ? Les opérateurs ?
 
Ce sont des investissements conjoints, qui sont beaucoup portés par les opérateurs par les collectivités locales par endroit et...
 
Non, je vous dis ça, parce que ça freine, dans certaines régions, vous le savez bien.
 
Non, et justement, on est en train de mettre en place des outils, pour que les collectivités territoriales, qui sont souvent très motivées pour amener le haut débit, parce que les populations le demandent, parce que les entreprises le demandent - le haut débit, c'est un critère d'installation pour une entreprise, dans une zone d'activités...
 
C'est la lutte contre la désertification, aussi.
 
Donc, là, il y a une nouvelle possibilité, qui est ouverte pour, en fait, que les collectivités territoriales puissent prendre des participations minoritaires dans des sociétés, c'est-à-dire qu'elles servent, en fait, si vous voulez, de moteur, pour un système vertueux qui se met en place.
 
On se bouge, là ?
 
On se bouge. On a lancé un appel d'offres pour un service universel. L'idée, c'est que chacun puisse, pour moins de 35 euros par mois, équipement compris, avoir le haut débit.
 
D'accord.
 
Et donc on va labelliser un certain nombre de fournisseurs d'accès [pour le] service universel haut débit.
 
Et la téléphonie mobile ? Là aussi, il y a des zones blanches.
 
Alors, la téléphonie mobile, on est en cours de rattrapage sur les zones blanches. On a par ailleurs l'ouverture d'une quatrième licence UMTS.
 
Quand ?
 
Il y a un débat sur ce sujet, demain, à l'Assemblée nationale et au Sénat. Le débat au Parlement avait été demandé. C'est un engagement qui avait été pris avant que l'on fasse l'appel d'offres. Donc, l'idée, c'est de faire un appel d'offres dans la foulée. La quatrième licence, donc un quatrième concurrent, ça pourra permettre de faire baisser les prix...
 
Quand ?
 
Dans les mois qui viennent. C'est un appel d'offres qui est lancé, ça vient très vite.
 
Avant la fin de l'année 2009 ?
 
Bien sûr, avant la fin de l'année 2009. Cela doit permettre de faire baisser les prix. Cela doit permette d'accélérer l'équipement, parce que, si vous voulez, la couverture est un élément de différenciation ; donc, quand vous faites entrer de la concurrence dans le système, un nouvel opérateur, ça fait des opérateurs qui veulent avoir une couverture de meilleure en meilleure.
 
Evidemment, mais les opérateurs ne veulent pas couvrir des zones où il y a peu de monde, parce que ça rapporte moins.
 
Oui, sauf que cela fait partie aussi de la différenciation, justement, de pouvoir couvrir un maximum d'endroits. Vous savez bien, à une époque, il y avait un opérateur qui avait été critiqué parce que lui, il était moins accessible partout, et ça avait été un élément de différenciation, il avait perdu de la clientèle là-dessus. Donc, les opérateurs, du fait de la concurrence, sont aussi incités à couvrir mieux.
 
Et vous allez demander au quatrième, justement, opérateur, qui pourrait être Free...
 
La quatrième opération, s'il y en a un, aura les mêmes obligations de couverture que les autres.
 
Les mêmes obligations ?
 
Bien sûr, ça fait partie du jeu.
 
Avant la fin de l'année, donc, un 4ème opérateur, ce qui va favoriser la concurrence. Bien. Deux ou trois questions. On va revenir à la télévision numérique, N. Kosciusko-Morizet, mais j'ai deux, trois questions d'actualité à vous poser. Je ne sais pas si vous avez entendu, B. Obama va plafonner à 500.000 dollars la rémunération annuelle des dirigeants d'entreprises renflouées par les pouvoirs publics. On devrait faire la même chose en France, non ?
 
En fait, on le fait, d'une autre manière, mais on le fait.
 
Ah non. Non, on ne le fait pas. On recommande, nous.
 
Non. Quand le président de la République demande aux banques, aux banquiers, de renoncer à leurs bonus quand ils ont bénéficié des soutiens de l'Etat, en fait, c'est ce qu'on fait. C'est une façon différente de le faire, mais c'est ce qu'on fait. Bien sûr, c'est exactement la même chose.
 
B. Obama plafonne, lui ...
 
Le résultat est exactement le même.
 
Bon. Emmanuelle et Laurence sont homosexuelles, elles veulent adopter un enfant, la Cour européenne des Droits de l'homme a condamné la France pour discrimination sexuelle et l'administration française leur refuse une nouvelle fois ce droit d'adopter. Qu'en pensez-vous ?
 
Eh bien c'est vrai que pour le moment, en France, ce n'est pas prévu.
 
Alors, on peut dire non, comme ça, au droit européen ?
 
Je vais vous dire, je vous donne mon point de vue très personnel sur le sujet. Moi, ce qui me gêne actuellement, en fait, c'est que pour un couple homosexuel, on a intérêt à cacher son homosexualité, si on veut adopter, parce qu'en fait, un parent seul peut adopter, alors qu'un couple homosexuel ne peut pas adopter.
 
Mais, alors, Emmanuelle, seule, ne peut pas adopter parce qu'elle est homosexuelle ?
 
Mais parce que là, elle a fait une démarche en couple, en fait. Mais si elle avait essayé seule, elle aurait pu. Et là, je trouve qu'il y a un peu d'hypocrisie dans notre système en France. Donc, certainement, il est perfectible de ce point de vue là.
 
Quelle est votre position ? Est-ce que les homosexuels doivent pouvoir adopter des enfants ?
 
Je ne veux pas, comme ça, faire une position tranchée sur ce sujet. C'est un débat de société. Ces choses-là doivent être acceptées par l'ensemble de la société. Il faut pouvoir avoir un point de vue partagé sur ce sujet. Donc, je ne vais pas vous dire, là, oui ou non. Ce que je vous dis, c'est que je trouve ça gênant, que, en se cachant, qu'en fait il y ait une certaine prime à l'hypocrisie, c'est-à-dire qu'en se cachant, on ait plus de chances de pouvoir réussir son projet, en fait, qu'en disant la vérité sur sa vie. Je trouve ça très problématique. Moi, je trouve que la société n'a pas à s'organiser d'une telle manière, que finalement l'hypocrisie soit valorisée. (...)
 
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 5 février 2009