Texte intégral
J.-J. Bourdin.- Vous avez du pain sur la planche en ce moment, M. Hirsch. Tout de suite l'actualité : Natixis, 90 millions d'euros versés aux traders pour 2008. Natixis, filiale des Banques populaires et de la Caisse d'épargne ; Natixis, qui a perdu 2,8 milliards en 2008, qui est aidée par l'Etat à hauteur de plusieurs milliards d'euros ! Que fait-on de l'impact sur l'opinion publique ? Il s'agit de retenir les traders, dit la direction de Natixis !
Moi je n'ai jamais été convaincu par ce type d'argument. Le type d'argument qu'on sert depuis longtemps, consistant à dire : pour les plus modestes, il faut baisser leur salaire parce qu'il y la compétition internationale, et pour les plus riches, il faut augmenter leur salaire pour ne pas qu'il s'en aillent, ça ne m'a jamais, jamais convaincu ! Et là, c'est pire que tout. Il y a une sorte de pathologie...
D'autisme...
... de pathologie, de déni de crise, une sorte de goût pour l'argent qui, je trouve, est assez, effectivement, assez inquiétant.
Vous pensez que parmi les dirigeants de banques, de certaines grandes entreprises - je ne généralise pas, évitons de généraliser - parmi les dirigeants, certains dirigeants, parmi certains agents de change, courtiers, traders, on ne s'aperçoit pas, on ne veut pas accepter qu'il y a crise ? !
Je pense qu'il y a une sorte de déni de ces phénomènes-là, et puis il y a - comment dire ? Il y a une sorte de vie sur une autre planète aussi, et puis...voilà. Il faut changer, il y a des choses très simples qui peuvent être faites. Une fois qu'on a satisfait tous ses besoins de consommation et de richesse, je ne sais pas, la psychologie humaine pousse à s'engager. Je vais vous donner juste un exemple : vous vous rappelez qu'il y a eu des guerres dans ce pays, des grandes guerres, et maintenant on est en guerre économique. Qu'est-ce qui se passait pendant la Guerre de 1914 ? Qu'est-ce qui se passait pendant la Résistance ? Les chefs, qu'est-ce qu'ils faisaient ? Ils se mettaient devant, ils s'exposaient, ils risquaient des balles ! Sur les monuments aux morts c'est plein d'officiers qui sont morts pendant les guerres. Et puis ils disaient aux autres : allez-y ! Je vous donne du courage parce que c'est moi qui prends le plus de risques. Et là, on est en guerre économique, et on a l'impression qu'on met devant les troupes qu'on met en danger, les fantassins de l'économie, et puis que les officiers ils sont derrière, derrière à penser à leur propre matelas. Donc, il y a quelque chose... A mon avis, ça peut changer. C'est au-delà de la réglementation, c'est-à-dire que... Moi je leur dis : vos stock-options, faites deux choses : vous les transformez en job-options, c'est-à-dire que vous vous dites, vous avez le droit d'avoir un peu plus quand vous avez sauvé, préservé des emplois, pas quand vous avez augmenté la valeur en bourse, ça, ça n'a plus de sens et pas maintenant, pas maintenant ! Et en revanche, s'il y a de l'argent, si vous avez peur qu'il ne serve à rien, que... vous les mettez dans mon fonds d'expérimentation jeunes, vous les mettez dans les fondations, vous les mettez... pour que ça rende...
Oui mais ça, M. Hirsch, c'est "votre" discours. Je sais que vous aimez bousculer les choses de l'intérieur, on va en reparler, et notamment à propos du Plan Jeunes.
Mais il y a une chose : il y a un déclic à faire.
Mais alors, ça veut dire que le Gouvernement, lorsqu'il prend ce décret sur les stock-options concernant les dirigeants des entreprises recevant des aides publiques, ne va pas assez loin ?
Moi je pense qu'il y a une partie qui peut se faire réglementairement, parce qu'ensuite, je pense qu'un décret qui irait plus loin risquerait d'être illégal ou ferait des gens qui l'attaqueraient, etc.
Pourquoi pas une loi alors, pourquoi pas une loi ? !
Mais commençons... Moi je trouve que si on peut déclencher ce véritable déclic, on peut être deux fois gagnant. C'est-à-dire que tout le discours sur la réforme du capitalisme, etc., il sonne totalement creux.
Le discours de N. Sarkozy est totalement creux.
Non, non, non, ce n'est pas ça.
Mais, enfin c'est ce que vous pensez ?
Pas du tout, je dis : le discours de celles et ceux qui disent "on a changé", "on a compris", etc. ...
On moralise
...il sonne creux si au même moment, la manière dont on se rémunère est totalement déconnectée des questions de crise.
Alors, j'imagine, je prends un exemple concret, ensuite on passe au plan...
C'est juste une question de civisme, de...
Je suis d'accord avec vous, on est d'accord, on fait bouger les choses, on est là pour faire bouger les choses. Mais je prends l'exemple des dirigeants d'entreprise qui ne reçoivent d'aide de l'Etat, on est bien d'accord, mais qui font des bénéfices, et qui parallèlement suppriment des emplois, mettent en place des plans sociaux ?
Je leur propose de très simple...
Faut-il que ces dirigeants renoncent à leurs stock-options ?
Je leur propose quelque chose de très simple : au-delà du renoncement qui est une mesure négative, je leur propose un investissement... Vous allez rire de moi, etc.
Mais non, je ne vais pas rire de vous, mais non !
Nous, on a mis 150 millions d'euros pour un fonds pour les jeunes. Je leur dis : doublez la mise ! Mais doublez la mise, venez, écoutez-nous ! Là, BFM-TV ils doivent écouter quelquefois, ils écoutent ! Je leur dis : écoutez, faites-vous plaisir, faites-vous plaisir, voilà ! Au lieu d'être dans ce sentiment un peu pathologique et un peu... mettez l'argent ! J'ai essayé de convaincre T. Morin, le PDG de Valeo sur ses 3 millions d'euros, je suis passé par quelqu'un...
Il les a touchés ses 3 millions d'euros, il les a touchés ces 3 millions !
Je ne sais pas où il en est, mais je lui ai dit...
Si, si, il les a touchés !
Je lui ai dit : voilà, il y a un truc. Au lieu... sortez vous-en la tête haute comme un héros, comme un héros !
D'investir ses 3 millions d'euros où, par exemple ?
Mettez ces 3 millions d'euros dans le fonds sur les jeunes, et dites-vous... et puis ensuite, venez nous donner un coup de main - il est à la préretraite - venez donner un coup de main pour faire des programmes qui aident les jeunes. Je pense... Voilà, je leur propose un service civique aux patrons, voilà, avec un peu d'argent, un peu de temps, un peu de choses à faire !
C'est une bonne idée, tiens ! Service civique aux patrons. Alors, parlons des jeunes. Vous cherchez 1,5 milliards d'euros si j'ai bien compris...
Non, je cherche des boulots pour eux.
Des boulots pour eux, oui, parce que...
Mais non, non, non, je cherche des boulots pour eux. ... parce que le chômage des jeunes augmente deux fois plus vite que celui du reste de la population, il faut le savoir. On sera à combien de chômeurs chez les jeunes à la fin de l'année : 600, 700.000 si on continue comme ça ? C'est-à-dire que, à partir de la base actuellement, effectivement il peut y en avoir 150 à 200.000 de plus.
D'ici la fin de l'année, chez les jeunes ?
C'est possible.
Taux de chômage des jeunes en France : + de 21 % ! Il est de 10 % en Allemagne, de 5 % aux Pays-Bas. Il y a donc quelque chose qui ne va pas ?
Il y avait quelque chose qui n'allait pas avant la crise, déjà ; d'où tout un travail en profondeur à faire, etc. Cette différence entre la France et les autres pays elle existe depuis très, très, très longtemps. D'ailleurs, tous les gouvernements ont plus ou moins essayé et puis reculé parce qu'ils ont mis des trucs sur la table qui ont provoqué des manifestations et ils ont retiré etc. Donc, il y a un travail en profondeur qui soit se faire. Et puis, il y a le choc. IL y a le choc qui est : est-ce que... Moi je suis contre une génération sacrifiée, sous prétexte qu'il y a la crise pour les raisons qu'on vient d'évoquer.
Bon, eh bien, votre plan Jeunes, vous avez dans la tête, vous allez forcer. Est-il vrai que N. Sarkozy vous a dit : "l'ouverture sera complète lorsque tu auras pris ta carte à l'UMP" ? C'est vrai ça ?
C'est possible, oui, mais en disant... La phrase suivante, c'était : "mais je sais que ça ne se fera pas".
Il peut attendre longtemps ?
Non, non, ce n'est pas ça, mais il sait que ce n'est pas mon truc.
M. Hirsch est avec nous. Dans deux minutes, ce plan Jeunes, justement. Vos pistes.
[Pause]
De plus en plus de jeunes au chômage. Qui allez-vous aider ? Les jeunes qualifiés, qui ont des diplômes, diplômés, ou les jeunes sans qualification ? Tous, j'imagine ? Oui, non ?
Les deux catégories sont un problème. Du coup il ne faut pas apporter forcément les mêmes réponses aux uns et aux autres.
Alors, parlons des diplômés d'abord.
Une chose d'abord pour rappeler pourquoi je suis volontaire, pourquoi je pense que ce n'est pas un retour vers le passé, vers la vieille recette "il n'y a rien à faire" ? C'est parce qu'il ne faut pas oublier que la situation, non seulement la crise est exceptionnelle, mais les perspectives sont exceptionnellement favorables pour les jeunes, normalement, si on ne les bloque pas. Parce qu'il va y avoir beaucoup, beaucoup de départs à la retraite et un peu moins de jeunes. Donc, les cas... il y a 200.000 postes en plus dans l'économie, etc.
Il y a des opportunités, bien, sûr, bien sûr...
Je ne fais pas vous faire un dessin, mais c'est pour dire qu'on n'est pas en train de taper dans le vide en racontent des fariboles. On est en train de dire : plutôt que de se retrouver encore dans deux ans, comme j'entendais il y a six mois les entreprises me dire "j'ai du mal à recruter", cette fois, pendant la période de crise, ceux qui ne sont pas qualifiés, et que vous évoquiez, on les forme dans l'entreprise, avec l'entreprise, pendant deux ans, quitte à payer...
On va prendre un exemple : j'ai 20 ans...
C'est au stade des propositions, parce qu'on me demande toujours de faire mes preuves. Donc, il est acquis...
Donc, j'ai 20 ans, je suis sans qualification, une entreprise me prend...
Une entreprise vous prend, ça lui coûte quasi rien, mais pendant deux ans, elle s'engage à vous faire bosser, à vous former...
A quel salaire ?
A un salaire normal.
Ça veut dire quoi "un salaire normal" ?
Un vrai salaire.
Un Smic ?
C'est ce que je pense.
Plus que le Smic ?
C'est ce que je pense, ça peut être le Smic ou ça peut être la rémunération aujourd'hui des personnes en contrat, ce qu'on appelle de "contrat de professionnalisation", qui est peut-être un peu en-dessous du Smic pour tenir compte du fait qu'on vous offre la formation.
Vous allez réinventer le Smic jeunes là ?
Pas du tout, pas du tout, je ne vais pas du tout réinventer... ne vous inquiétez pas, je ne réinvente pas le Smic jeunes. Je dis simplement que, quand il ne travaillent pas à plein temps, et qu'il y a une partie de formation à côté, il y a ce qu'on a ce qu'on appelle "le contrat de professionnalisation" qui ne choque personne et qui peut fonctionner.
Donc, l'entreprise embauche ce jeune de 20 ans...
...S'engagerait pendant un ou deux ans, voilà, pendant la période de crise, et puis ensuite elle en aurait, j'allais dire, "naturellement besoin", et il y a l'engagement de pouvoir les embaucher, ces jeunes-là, après. Et puis éventuellement, je dis : si l'Etat paye, ça peut être une avance pour l'entreprise...
L'Etat va payer quoi ?
L'Etat peut payer cette partie de rémunérations : devant l'Etat, et puis les régions d'ailleurs qu'on est en train de voir, devant des entreprises qui aujourd'hui ont effectivement un gros trou d'air et des grosses difficultés, et demain auront des besoins...
C'est l'Etat qui pendant un an ou deux ans prendrait en charge, qui paye l'avance ?
Il investit, il investit. On prête bien de l'argent pour d'autres choses, on prête de l'argent. Mais là...
Pourquoi ne pas prêter de l'argent pour embaucher des jeunes ?
L'Etat prête l'argent de la formation. Voilà. Et puis ensuite, vous en aurez besoin, et puis ensuite vous allez gagner de l'argent, vous, les entreprises, les choses vont repartir.
Oui, mais il faut de l'argent pour ça, dites-moi, l'Etat n'en a pas !
Si, on peut trouver, on peut trouver. Si vous voulez, dès lors qu'on peut convaincre que 100 % de cet argent va vers de l'emploi, va vers de l'emploi des jeunes, et que cet emploi des jeunes va vers des projets futurs, ce sont des choses qui peuvent se trouver.
Vous allez devoir convaincre Bercy par exemple, ça ne va pas être facile !
La vraie conviction, c'est de revenir avec un certain nombre d'entreprises et de jeunes qui disent "banco !", voilà. Je ne suis pas pour la théorie, je suis pour la pratique. Donc, banco, et puis ensuite, on continue et on ira jusqu'au bout.
Moi, j'ai une idée, tiens pour vous : la TVA dans la restauration, voilà un joli laboratoire ?
Exactement, exactement ! TVA dans la restauration. J'en discutais avec un petit restaurateur, l'autre jour, on a fait le compte : il avait 100.000 euros de chiffre d'affaires. Combien allait lui économiser la TVA ? 15.000 euros. De quoi avait-il besoin ? Donc, on s'est dit : on a "topé" si vous voulez, mise aux normes de son évacuation qu'il n'avait jamais réussi à faire, un ; et deux, commis de cuisine, voilà. Au Smic...
Pris en charge par l'Etat, pendant deux ans ?
Non, non, par la baise de TVA, on n'a pas besoin d'autre chose. Par la baisse de la TVA d'un côté et, deuxièmement, par la mesure qui s'est appliquée, les moins de 10 salariés" qui fait... abaissement des charges sociales. Voilà. Et avec l'ensemble des hôteliers, cafetiers et restaurateurs, le but c'est qu'il y ait un tiers de ce qui vont gagner grâce à la baisse de la TVA qu'il soit utilisé pour embaucher des jeunes.
C'est ce que l'Etat va leur demander en contrepartie ?
Oui, par ma bouche notamment, mais par celle d'H. Novelli aussi.
C'est ce que vous allez leur demander ?
Oui.
Leur demander d'embaucher les jeunes ?
Oui. Et par exemple, juste dans ce secteur-là, il y a des jeunes qui sont en alternance, donc qui font des... Il y en a. J'en ai rencontré un l'autre jour qui m'a expliqué que son employeur lui avait dit qu'il n'était pas sûr de le maintenir après, alors qu'il est qualifié. Par exemple, là, début avril ou fin avril, aux états-généraux, la profession pourrait s'engager à prendre tous ceux qui sortent de l'alternance, il ne faut pas charrier non plus.
Oui, surtout que l'effort est important. Pour ceux qui sont très diplômés qui ne trouvent pas de travail, vous faites quoi ?
Pour ceux qui sont diplômés et qui n'ont pas de travail aujourd'hui, il peut y avoir ce système d'avance, mais effectivement eux ils n'ont pas besoin de la formation à ce moment-là, ils ont besoin de la première expérience professionnelle. Mais je peux témoigner : vous avez celui qui se demandait sur eBay...
Je me souviens. Vous l'avez embauché ?
Je l'ai embauché. D'abord, il fait un travail aussi fantastique que les autres membres de mon cabinet.
Ca se passe bien ?
C'est quand même fou de penser qu'il y en a tant comme ça qui depuis quelques mois...
Mais vous faites quoi pour ces jeunes diplômés ? Même chose, même système, vous aidez les entreprises à les embaucher ?
Contre engagement plus ferme. Là, c'est quand même le prêt d'un système fantastique pour les entreprises. Tout ce que je propose ne vaut que si les engagements qui vont après viennent derrière.
Est-ce que vous avez l'aval de Bercy, est-ce vous avez l'aval de Matignon aujourd'hui, vendredi 27 mars ?
A ce stade, vendredi 27 mars 9 heures, j'ai l'aval de tout le monde pour proposer, pour démontrer...
Vous proposez, on ne vous a pas dit oui ?
Oui, c'est déjà pas mal, mais c'est normal, il faut se battre, on nous dira oui si ça marche.
Pourquoi pas le RSA pour les moins de 25 ans ?
Parce que si... Vous avez rappelé le taux d'activité faible des moins de 25 ans, si on faisait le RSA plaqué tel quel aujourd'hui sur les moins de 25 ans, il y a un risque : celui qui a 19 ans à l'université, qui se demande où il va faire ou pas, il se dit "hop !" peut-être que j'arrête pour basculer plus tôt dans le RSA. Donc, nous on n'est pas là pour dissuader ni d'étudier, ni de se former, ni de travailler au contraire.
M. Hirsch, tiens ! On va demander à tous les ministères de vous écouter, parce que je sais que dans votre équipe, vous êtes en train de réfléchir ; vous, vous êtes prêt à un peu diminuer votre traitement pour embaucher une personne supplémentaire. Imaginons ! Vous êtes le premier...
Non, il y a des entreprises qui commencent à faire ça.
Des entreprises !?
Trop timidement.
Mais dans les ministres, sûrement pas ! Vous êtes le premier, vous donnez l'exemple.
C'est surtout vers les entreprises que je m'adresse. Tout à l'heure, on parlait...
Qu'est-ce que vous allez faire, vous ?
Nous, en est en train de discuter avec mon équipe, on est une équipe de 15 personnes en train de se dire- vous avez vu, on a embauché quelqu'un il n'y a pas longtemps - de se dire : est-ce qu'on peut en prendre un peu plus, sans demander plus à l'Etat, (...) aux subventions, mais en faisant un petit effort. Moi, vous savez, j'avais diminué mon salaire quand j'étais rentré au Gouvernement - enfin, je n'avais pas voulu avoir le salaire qu'on me proposait. Je propose, avec mon équipe on est en train de se dire, tout simplement, tout naturellement, tout modestement, se dire : est-ce qu'on peut faire chacun un petit effort de quelques dizaines d'euros - moi je peux faire un peu plus - pour arriver à avoir l'équivalent d'un poste, pour quelqu'un qui a des difficultés. Et je pense que dans des...
Vous demandez que les ministères prennent cet exemple ?
Non, je ne m'adresse pas aux ministères. Il se trouve que moi je suis chargé des jeunes et de la situation de la pauvreté, et qu'on doit plutôt donner l'exemple vis-à-vis de ceux qui ont des rémunérations un peu gigantesques, vous voyez, les rémunérations dont on parlait tout à l'heure. Donc, voilà, c'est quelque chose...
Est-ce que Total s'est engagé dans votre plan Jeunes, là ?
Total s'est engagé, oui, oui. On va se voir...
Contre des aides de l'Etat, Total va embaucher les jeunes ?
Non, non, ce n'est pas ça. Moi je ne me suis pas adressé à leur stratégie d'embauche. Je n'y connais rien à la stratégie d'embauche de Total, je ne sais pas comment ils font, etc. Je leur ai dit simplement, c'était face aux résultats et aux bénéfices qu'ils avaient, je leur ai tenu le discours que je vous tiens, je leur dis : regardez, sur le Fonds Jeunes, peut-être demain sur le service civique, vous devriez pouvoir investir là-dedans, investir socialement. Comme l'a fait Danone, qui met un fonds de 100 millions d'euros pour des programmes d'intérêts généraux. Comme le font... voilà. Donc, on se revoit le 21 avril, je crois, avec C. de Margerie, pour finaliser ça.
On va parler de solidarité. Devient-elle un délit ? Vous connaissez bien Emmaüs. Le président d'Emmaüs et d'autres associations, plusieurs associations, vont organiser une journée de manifestations le 8 avril prochain. Plusieurs milliers de militants de ces associations vont demander à être poursuivis, vont se constituer prisonniers volontaires. Pourquoi ? Eh bien, parce que le projet de loi de finances 2009, qui récapitule les crédits pour la Mission "Immigration, asile et intégration", fixe un quota d'aidants à interpeller, en 2009. 5.500 d'aidants ! Ce sont les personnes qui aident les sans-papiers en situation irrégulière. Et ces personnes-là risquent d'être poursuivies. Est-ce que vous trouvez cela normal ?
Que la solidarité soit un délit, cela me paraît strictement anormal. Il faut revoir la loi ? Il va y avoir un débat sur la loi dans quelques semaines. Et votre position ? Il y a deux versions. Il y a une version qui consiste à dire : la loi exclut déjà les associations de la possibilité de poursuites, et il y a une autre version qui dit : il faut être plus clair. Moi ce qui m'intéresse, c'est le résultat. Je ne sais pas s'il faut passer par la loi ou ne pas avoir la loi, mais quand, pour reprendre l'exemple d'Emmaüs, quand un bénévole d'Emmaüs, soit un responsable d'Emmaüs accueille un sans-papiers, il fait son devoir. Ce n'est pas un délit.
Voilà, ce n'est pas un délit, et il ne pourra pas être poursuivi ?
Il ne doit pas être poursuivi. L'accueil inconditionnel dans ces lieux d'hébergement, de la même façon qu'on ne poursuivait pas les curés quand il y avait un vagabond...
Oui, mais là, il y a un quota d'aidants interpellés qui a été fixé. Cela ne vous scandalise pas ?
Moi je suis pour que la solidarité ne soit pas un délit, il n'y a pas de doute là-dessus.
Vous n'avez aucun doute là-dessus ?
Je n'ai aucun doute là-dessus.
Il y a un projet de loi quand même. On va voir dans la discussion.
Voilà, il y a un projet de loi. Moi, honnêtement, sur la loi, je ne sais pas si avec la loi actuelle ou etc. En revanche, je redis que le fait d'être solidaire d'une personne en difficulté, ça ne vaut pas de poursuites. Point. C'est ma position. Cela me paraîtrait absurde. Moi je n'ai pas (subi ?) de lavage de cerveau en rentrant au Gouvernement. Donc, j'avais cette position quand j'étais chez Emmaüs et, tout d'un coup, je n'ai pas changé de... Cela ne me paraît pas...
Vous les gardez. Donc, on va entendre votre voix sur le sujet. L'évêque d'Orléans ! Vous avez entendu l'évêque d'Orléans, vous n'avez pas entendu ?
J'ai entendu ça.
Lui, il dit que le préservatif est dangereux, et qu'il laisse passer le virus, que finalement, il faut mettre sur les boîtes de préservatifs : "Attention, danger !". Où va-t-on ?
Je pense qu'on a... Vous savez, dans l'éthique que l'on doit avoir, on a d'autant de responsabilités qu'on a une place élevée dans la société. Donc, quand on est évêque comme quand on est député, comme quand on est patron, on parle de manière res-pon-sa-ble. Ce ne sont pas des propos responsables. Et je trouve que ça va à l'encontre de tout un travail qui a été fait, par l'épiscopat français notamment, pour se changer, pour avoir un discours un peu plus responsable. Voilà. C'est du relent de choses qui ne sont pas supportables.
M. Belliard, une question des auditeurs de RMC.
M. Belliard (de RMC) : J'ai sélectionné la question d'Annick, en Seine-et-Marne, qui s'inquiète pour ses enfants, et qui nous dit : on a conseillé l'alternance à beaucoup de jeunes qui ont aujourd'hui du mal à trouver une entreprise. Que pouvez-vous faire pour eux ?
Oui, c'est exactement ce qu'on entend aussi, c'est-à-dire qu'on commence par aller dans une filière d'alternance, et les entreprises ne sont pas au rendez-vous, pour différentes raisons, soit pour des raisons de coûts - c'est pour cela qu'on cherche à agir sur les coûts -, soit simplement pour des raisons de méconnaissance de ces systèmes - c'est pour cela qu'il faut leur expliquer comment ça fonctionne -, soit quelquefois de mauvaise coordination dans le temps, parce que les cours commencent en septembre, etc. Voilà. Donc, il y a des petits réglages qui se font et qui se feront.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 27 mars 2009