Déclaration de Mme Valérie Létard, secrétaire d'Etat à la solidarité, sur la politique en faveur des personnes âgées et des personnes âgées dépendantes et handicapées, les aides familiales à domicile et le traitement de la maladie d'Alzheimer, Paris le 31 mars 2009.

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Mesdames, messieurs,
Plusieurs communiqués ou interventions récents mettent en avant les interrogations et les critiques des associations du secteur médico-social vis-à-vis de la politique suivie par le Gouvernement en faveur de la prise en charge des personnes âgées et des personnes handicapées. Ces communications ont lieu dans le contexte de la réunion du Conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie qui se réunit aujourd'hui même. Il est donc important de rappeler les grandes lignes de la politique de l'Etat en faveur de ces publics fragiles et de répondre aux questions soulevées. A l'occasion de cette conférence de presse à laquelle je vous remercie de participer, je souhaite aussi, avec Brice HORTEFEUX, rassurer les Français qui, en cette période de crise, peuvent légitimement s'interroger sur le point de savoir si les personnes âgées et les personnes handicapées vont pâtir de cette situation. Certains prétendent même que le Gouvernement veut « renoncer à l'objectif de médicalisation des établissements accueillant des personnes âgées ».
Je tiens d'emblée à souligner qu'il n'en est rien, bien au contraire. Alors que le pays connaît une crise très grave, les moyens attribués aux établissements et services pour personnes âgées progressent cette année de 566 Meuros soit une augmentation de 8,2 %. Et il n'est bien entendu, en aucun cas question de diminuer cet effort voté par le Parlement.
Au total les crédits médico-sociaux en faveur des personnes âgées représentent pour 2009 plus de 15 000 emplois soignants, qualifiés et non délocalisables.
Pour répondre à ceux qui, à intervalle régulier, disent que l'on réduit les moyens, je n'avancerai qu'un argument : entre 2002 et 2009, les crédits médico-sociaux pour les personnes âgées ont plus que doublé puisqu'ils ont augmenté de 3,1 à 7,3 milliards d'euros au cours de cette période.
Et ceci est bien normal car pour la première fois dans l'histoire humaine, l'espérance de vie progresse non pas au début de la vie mais surtout après 75 ans. Cette catégorie d'âge voit sa population s'accroître rapidement puisque d'ici 2020, on dénombrera un million de personnes supplémentaires âgées de 85 ans. De cela, nous devons d'abord nous réjouir car un nombre croissant de nos concitoyens vieillissent en bonne santé. Mais notre société doit aussi se préparer à accueillir et prendre en charge un nombre croissant de personnes très âgées dont une part sensible est en perte d'autonomie. Je centrerai ainsi mon propos sur la politique en direction de nos aînés car sur tous ces points, je veux vous présenter ce que nous avons fait ainsi que ce qui nous reste encore à accomplir car je sais que le chemin est long.
1) Réaliser autant que possible le voeu des Français de rester à domicile, c'est ce que nous faisons en assurant par exemple le financement chaque année de 6000 places de services de soins infirmiers à domicile (SSIAD). Sachez que jusqu'en 2001, 2000 places en SSIAD étaient financées chaque années : l'effort a donc triplé depuis.
Mais il faudra faire plus, notamment dans le cadre du plan Alzheimer pour que ces services s'adaptent aux personnes désorientées : dès cette année 40 équipes pluridisciplinaires expérimenteront dans les SSIAD une prise en charge spécifiquement orientée vers les malades Alzheimer. Développer le soutien à domicile c'est aussi mettre effectivement en oeuvre l'objectif de doublement de l'offre d'accueils de jour et d'hébergement temporaire. Ces structures de répit sont essentielles pour permettre aux aidants naturels - sans qui rien n'est possible - de souffler un peu. Nous avons fait un pas en ce sens en intégrant en droit le transport dans le budget soins et dépendance des accueils de jour. En matière de soutien à domicile, l'évolution de l'allocation personnalisée à l'autonomie est également un des points majeurs de notre réflexion notamment lorsque les personnes sont isolées ou atteintes par la maladie d'Alzheimer.
2) Mais le soutien à domicile trouve parfois ses limites dans une société de plus en plus individualiste et éclatée, et le recours à l'hébergement médicalisé est parfois indispensable. En l'absence d'aidants naturels, ou face à l'épuisement de ces derniers, le maintien à domicile contraint est un réel danger. De ce point de vue l'Etat déploie des moyens considérables pour offrir aux usagers des maisons de retraite en nombre suffisant, aux locaux adaptés et dotées d'un personnel qualifié dont le nombre progresse d'ailleurs régulièrement. Pour 100 résidents, le nombre moyen d'agents est désormais de 62 dont 25 soignants.
Disons le tout de suite : beaucoup reste à faire parce que les attentes de la population augmentent et parce que les résidents accueillis dans les maisons de retraites sont de plus en plus dépendants, de plus en plus souvent atteints de la maladie d'Alzheimer. Il faut donc faire plus. Mais l'effort entrepris est déjà spectaculaire : les personnels soignants ont augmenté de 40% entre 2001 et 2007 soit 40 000 postes et 600Meuros dégagés en 2008 et 2009 sont destinés à la création d'environ 20 000 emplois supplémentaires dans les établissements existants. Il existe cependant d'importantes inégalités de répartition des crédits entre les établissements. Une bonne gestion des crédits publics passe par une répartition équitable. Ce n'est pas le cas aujourd'hui car on a laissé perdurer des situations de fait, acquises il y a plusieurs années en fonction des pressions exercées sur les autorités de tarification pour obtenir des crédits supérieurs aux dotations prévues. Il n'est pas souhaitable de laisser perdurer indéfiniment de telles inégalités. C'est pourquoi des efforts modestes sont demandés à environ 7% des établissements aujourd'hui beaucoup mieux dotés que les autres de façon à concentrer les moyens nouveaux sur les établissements qui nécessitent davantage d'être renforcés en moyens humains. Nous poursuivrons naturellement le dialogue et nous communiquerons la liste précise des établissements concernés par la convergence tarifaire. Nous étudierons la démarche à entreprendre pour que ces établissements puissent continuer à répondre aux besoins des personnes âgées. Une chose est claire : aucun établissement pour personnes âgées ne verra ses moyens réduits en 2009. Même les mieux dotés verront leur dotation progresser de 0,5 %, soit le taux d'inflation prévu cette année. L'effort public est également très important pour rénover les établissements et créer de nouvelles places en établissements pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). En 4 ans, de 2006 à 2009 près d'un milliard d'euros aura été consacré à l'investissement dans les maisons de retraites soit en moyenne 250 Meuros par an en regard d'un rythme de 70 Meuros antérieurement. Grâce à cela, 5 milliards de travaux ont été engagés, le taux de subvention étant en moyenne de 20% Le rythme de création de places a, quant à lui, été porté de 2500 places par an jusqu'en 2004, date de création de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie à 7500 à partir de 2008 et même 12500 cette année grâce au plan de relance. Là aussi, la progression est spectaculaire.
J'entends dire que le plan de relance ne serait que du vent. Et bien, dès lors que le Conseil de la CNSA aura voté les crédits correspondants, sera publiée dans les tout prochains jours, la liste des opérations financées avec leur localisation exacte.
Contrairement à ce qu'affirment certains, pas un euro des moyens affectés à la CNSA n'a été détourné de son objet. Ce n'est pas le Gouvernement qui le dit, c'est la Cour des comptes. Les moyens qui n'ont pas été utilisés dans l'année sont immédiatement reportés sur l'année suivante, soit pour financer des moyens nouveaux en personnel soit pour accélérer l'investissement. A partir de cette année la CNSA pourra également financer la formation des aidants et le remplacement des personnels partis en formation Je peux comprendre l'impatience des professionnels ou des familles, le sentiment que les choses ne vont pas assez vite. C'est également pour répondre à cette attente que plusieurs évolutions importantes ont été introduites dans le projet loi « Hôpital, patients, santé et territoires » que l'Assemblée Nationale vient d'adopter avant qu'il ne soit soumis au Sénat en mai prochain.
* La nouvelle procédure d'appels à projet, qui se substitue aux actuels CROSMS sera plus simple. Elle permettra d'accorder d'emblée autorisation et financement aux projets répondant le mieux aux besoins, tant en ce qui concerne les personnes âgées que les personnes handicapées.
* Un mécanisme financier (fongibilité asymétrique) a été conçu pour garantir au secteur médico-social un financement pérenne et croissant pour répondre à l'importance des besoins à venir.
* Enfin la loi HPST va permettre de financer la formation des aidants familiaux. Trop souvent, quand la maladie d'Alzheimer survient, les familles sont démunies : il est primordial que les « aidants naturels » (conjoints enfants, parents) soient formés pour faire face aux conséquences de la maladie d'Alzheimer dans de meilleures conditions. C'est d'ailleurs un axe fort du plan Alzheimer voulu par le Président de la République.
3) Mais il y a un domaine où d'importants progrès sont à accomplir : c'est celui du reste à charge des familles ou des personnes âgées en établissement. Je l'ai déjà dit, et je le répète : 4 personnes âgées sur 5 n'ont pas les revenus leur permettant de faire face aux tarifs des maisons de retraite et cela est à juste titre, incompris. Mettre en place une aide plus généreuse et plus équitable, dégressive avec le revenu constitue l'une des réflexions majeures du 5ème risque. Mais cela signifie aussi que les établissements, qu'ils soient privés ou publics doivent maîtriser leurs tarifs. A ce jour la réflexion se poursuit et nous aurons, bien entendu l'occasion d'en reparler.
Conclusion : Si je devais résumer en quelques mots nos orientations politiques en direction des personnes âgées et des personnes handicapées, je dirais : « solidarité, qualité, responsabilité ». Solidarité en direction des personnes handicapées parce que leur insertion dans la communauté nationale n'est pas assez profonde et que leur citoyenneté doit pouvoir s'exercer pleinement. Solidarité envers les personnes âgées parce que nous vivons une transformation démographique fondamentale. Qualité parce que, âgée ou handicapée, toute personne doit faire l'objet de soins attentifs et respectueux de sa dignité, de son projet de vie et de ses besoins. Des milliers de personnes travaillent dans ce domaine et doivent se voir reconnaître le rôle majeur qu'elles y jouent. Responsabilité car nous avons la charge de plusieurs centaines de milliers de personnes et de la gestion avec l'ensemble de nos partenaires de plusieurs milliards d'euros que les Français nous confient par le vote des lois de finances.
Je vous remercie.
Source http://www.travail-solidarite.gouv.fr, le 1er avril 2009