Point de presse de M. Bruno Le Maire, secrétaire d'Etat aux affaires européennes, notamment sur la coopération européenne en matière de grippe A (H1N1), les relations euro-israéliennes et sur les négociations avec la Croatie et la Slovénie, à Luxembourg le 27 avril 2009.

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Circonstance : Conseil affaires générales et relations extérieures, à Luxembourg le 27 avril 2009

Texte intégral

Je vous remercie de votre patience. Nous avons abordé plusieurs points au cours de ce Conseil Affaires générales et Relations extérieures où je représentais Bernard Kouchner qui est avec le président de la République en Espagne.
D'abord la situation au Sri Lanka où nous vivons comme vous le savez un véritable drame humanitaire. Bernard Kouchner et David Miliband se rendront sur place dans le courant de la semaine : nous avons adopté aujourd'hui au Conseil un texte de conclusions qui donne la priorité à la protection des populations afin que la situation s'améliore le plus rapidement possible sur place. Vous savez que l'un des objectifs de Bernard Kouchner lorsqu'il se rendra au Sri Lanka sera de vérifier la bonne mise en place de l'hôpital de campagne qui devrait être opérationnel à partir d'aujourd'hui.
Nous avons également abordé la question des négociations entre la Croatie et la Slovénie et du blocage du processus d'adhésion de la Croatie. Nous avons très largement apporté notre soutien à la proposition d'Olli Rehn et au travail remarquable accompli par Olli Rehn pour essayer de débloquer la situation. Vous savez que le Trio de la présidence suédoise, la Présidence tchèque et la Présidence française était impliqué aux côtés d'Olli Rehn pour essayer de trouver une solution, nous souhaitons que les négociations d'adhésion de la Croatie, sur la base des propositions faites par Olli Rehn, puissent reprendre très rapidement et pour être encore plus explicite, nous souhaitons que ces négociations d'adhésion puissent reprendre avant la fin de la Présidence tchèque, je crois que c'est l'intérêt de tous que ces négociations d'adhésion puissent reprendre et c'est l'intérêt de tous que nous puissions ouvrir une perspective pour les Balkans dans les années à venir et notamment pour la Croatie qui est la plus avancée des Etats des Balkans dans la perspective d'adhésion à l'Union européenne.
Enfin, la Présidence tchèque a également présenté les trois sommets portant sur l'emploi, le partenariat oriental et le corridor sud qui auront lieu au début du mois de mai.
Je voudrais également profiter de votre présence pour faire un point particulier sur la grippe porcine qui est évidemment un événement qui inquiète nos concitoyens et auquel l'Union européenne veut apporter une réponse coordonnée et forte. J'ai demandé à la Présidence tchèque, comme vous le savez, d'inscrire exceptionnellement ce point à l'ordre du jour afin que nous sachions où nous en sommes exactement et que nous puissions faire un point sur la situation sanitaire au Mexique. Et que nous puissions apporter les efforts et le soutien de l'Union européenne aux décisions, à la mobilisation pleine et entière de Roselyne Bachelot qui a traité ce sujet pendant tout ce week-end avec beaucoup de sens des responsabilités. Un autre point est clair : nous souhaitons que l'Union européenne agisse vite, qu'elle réagisse unie et qu'elle réagisse forte et pour cela nous pensons qu'il y a un certain nombre de décisions qui doivent être prises dans les jours à venir. Nous aurons comme vous le savez une réunion des ministres de la Santé qui aura lieu cette semaine qui permettra de faire un point plus précis et une évaluation exacte de la menace sanitaire. Nous avons d'abord besoin d'une évaluation partagée du risque. Une troisième réunion du Comité de sécurité sanitaire aura lieu à 15h00 aujourd'hui. L'Agence européenne de sécurité sanitaire de Stockholm réunira ses experts en épidémiologie, nous aurons donc la meilleure préparation possible au niveau européen de la réunion du comité scientifique de l'OMS qui a lieu demain. Je crois que c'est très important que nous arrivions à cette réunion avec une expertise unique de la part des Européens, une expertise coordonnée.
Nous avons également proposé trois points particuliers. Première proposition, que l'Union européenne travaille à des principes et à des procédures communes pour identifier des cas suspects, je crois que nous avons besoin d'échanges de bonnes pratiques en matière de diagnostic et de dépistage des éventuelles pathologies. Deuxième proposition, nous souhaitons aussi définir les protocoles communs à tous les Etats membres pour la prise en charge et le soin d'éventuels cas avérés, vous savez que comme la Commission nous l'a confirmé tout à l'heure, il y a désormais un cas déclaré de grippe porcine en Espagne. Nous voulons sur cette base contribuer à un guide européen sur la prise en charge et le soin des éventuels cas, là aussi je crois que l'unité européenne sera un atout pour tous. Enfin, troisième et dernière proposition, nous souhaitons une coordination accrue des messages qui vont être passés à nos concitoyens en matière de déplacements, en matière de prévention, en matière de voyage. vous savez que la France pour le moment recommande la plus grande prudence à ses ressortissants sur les déplacements au Mexique et conseille de se limiter aux seuls voyages obligatoires. Je crois qu'il est très important, c'est ce que j'ai dit tout à l'heure au Conseil, que les mesures qui soient prises si les circonstances l'exigeaient et les recommandations qui sont prises dès maintenant, soient des recommandations et des mesures coordonnées. A cette fin, j'ai proposé également tout à l'heure, la réunion immédiate du groupe de coopération consulaire qui permettra de coordonner les mesures et les recommandations en matière de déplacements. Voilà le point précis que je voulais vous faire sur ce sujet-là.
Vous voyez, je le redis, nous voulons que l'Union européenne ait une réaction rapide, une réaction unie, une réaction forte à cette crise de la grippe porcine, je crois que nous sommes sur la bonne voie, que les échanges que nous avons eu ce matin au Conseil montrent que nous sommes décidés à avoir cette réponse coordonnée et forte de l'ensemble des 27 Etats membres.
Q - Malgré une volonté de coordination accrue dans les messages aux citoyens, ce n'est pas vraiment le cas. En effet, on a vu dans ce cas chaque Etat membre donne un message de son côté à ses citoyens. Dans ce cas, sur quoi peut déboucher une coordination entre Etats membres dans les messages à paraître ?
R - Je vais être très concret. Vous savez depuis hier, je regarde attentivement l'évolution de la situation et des réactions européennes. Je suis là pour faire en sorte que l'Union européenne soit une protection pour nos concitoyens et donc en cas de crise, sur quelque sujet que ce soit, qu'elle apporte cette réponse coordonnée et forte qui est attendue par nos concitoyens. Vous l'avez constaté vous-même ce matin, je l'ai dit tout à l'heure au Conseil, nous n'avons pas pour le moment les mêmes recommandations dans l'ensemble des Etats membres en matière de déplacements et de mesures de précaution. Il n'y a pas des écarts gigantesques non plus, il ne faut pas exagérer la situation mais je crois que ce qui est rassurant pour nos concitoyens, ce qui serait utile, c'est que nous ayons les mêmes recommandations dans les 27 États membres en matière de déplacements et en matière de mesures de prévention, c'est pour cela que j'ai proposé cette réunion du groupe de la coopération consulaire puisque ce sont les consulats qui sont chargés de mettre en oeuvre ces recommandations, je pense que si nous avons une réunion rapide de ce groupe de la coopération consulaire, nous pourrons avoir des recommandations identiques dans les 27 Etats membres et je crois que c'est préférable plutôt que d'avoir des recommandations dans lesquelles il y a une toute petite marge d'interprétation, je crois que moins il y a de marge d'interprétation mieux c'est dans ce domaine.
Q - Quand vous parlez de coopération consulaire, vous faites référence au Mexique essentiellement ?
R - Non, je ne pense pas au Mexique, je pense à ce groupe de coopération consulaire qui rassemble l'ensemble des Etats membres et qui examine les mesures concrètes qui sont prises en matière de recommandations et de prévention et qui ensuite sont diffusés à l'ensemble des consulats des 27 Etats membres. De façon à ce que si vous allez au consulat espagnol, au consulat italien au consulat français ou au consulat slovène vous aurez exactement les recommandations, je crois que pour un citoyen européen il n'y a rien de plus inquiétant que d'avoir un Etat qui vous dit : "Vous pouvez vous rendre Mexique, il n'y a absolument aucune difficulté" et un autre Etat qui vous dit : "non, moi je serais vous, j'annulerais mon voyage". Il faut que nous ayons les mêmes recommandations, nous sommes un espace politique commun, nous devons face à une crise donner les mêmes recommandations de sécurité sanitaire.
Q - C'est en effet pour les politiques extérieures, mais pour les politiques intérieures, qu'en est-il ? En Espagne, 17 cas sont déjà déclarés. Quel est le bilan de la situation dans l'Union européenne ?
R - Non, ne mélangeons pas les rôles, il y aura une réunion des ministres de la Santé, c'est aux ministres de la Santé et de se prononcer sur le risque sanitaire et sur les mesures qui sont à prendre, ce n'est pas le rôle du ministre des Affaires étrangères ou du ministre des Affaires européennes. Nous ce que nous souhaitons au niveau des Affaires étrangères c'est une réponse rapide, coordonnée et forte, c'est je crois ce sur quoi il y avait ce matin un consensus, pour cela il y a des décisions à prendre et des propositions, c'est les propositions que j'ai faites au nom de la France ce matin, le guide de bonnes pratiques dont je vous ai parlé, la coordination accrue, la réunion du groupe de coopération consulaire, tout cela nous permettra d'avoir cette réponse coordonnée et forte.
Q - Quand pourra avoir lieu cette réunion ? (réunion des ministres de la Santé)
R - Le plus tôt sera le mieux. Je ne peux pas vous donner d'indication plus précise, c'est à la Présidence tchèque et à la Commission de prendre ensuite le relais et d'organiser ces réunions.
Q - Sur les relations avec Israël, comment expliquez-vous le report du conseil d'association en juin ? S'agit-il d'une façon de conditionner le rôle de l'Union européenne et ses relations avec Israël à des progrès dans le processus de paix israélo-palestinien ?
R - Je crois qu'il est de toute façon dans l'intérêt de l'Union européenne de développer ses relations avec Israël, pays avec lequel nous avons des intérêts en commun, avec lequel nous avons des valeurs communes. Nous pensons également, vous le savez, le président de la République l'a dit à plusieurs reprises, que le renforcement de ces relations permettra à l'Union européenne de peser davantage sur le processus de paix et nous sommes convaincus que l'Union européenne a un rôle à jouer pour renforcer le processus de paix et pour lui permettre d'aboutir à des résultats concrets. Vous savez également que le gouvernement israélien est dans un processus d'examen politique, policy review comme il est d'usage de le dire. Je pense que le bon sens et d'attendre la fin de cet examen politique et les grandes lignes politiques qui sortiront de cet examen avant de prendre une quelconque décision nouvelle de la part de l'Union européenne. Cela ne nous interdit pas et cela a été rappelé très largement par l'ensemble des États membres ce matin, de rappeler très clairement quelles sont les positions européennes en la matière, notamment l'arrêt de la colonisation qui est un élément important de la position européenne, le libre accès dont nous avons également parlé ce matin et enfin la perspective d'avoir deux Etats, l'idée d'avoir deux Etats a toujours été au coeur selon nous du processus de paix, au coeur de la possibilité d'avoir la paix, il se trouve que c'est également aujourd'hui la proposition et la position de l'administration américaine qui est une bonne chose. Donc laissons le policy review aller jusqu'à son terme, regardons quelles sont les conclusions qui en sont tirées par le gouvernement israélien mais tout cela sur la base des éléments politiques qui ont déjà été donnés par l'Union européenne et qui restent les mêmes.
Q - La position de l'UE est-elle unie devant ce constat ?
R - Je crois qu'il n'y a pas de raison qu'il y ait des divisions au sein de l'Union européenne à partir du moment où les lignes de fond restent les mêmes. La seule chose qui a changé et qui est un point évidemment important c'est qu'il y a un nouveau gouvernement israélien et que ce gouvernement est en train de réexaminer ses lignes politiques de fond mais ce n'est pas parce que ce gouvernement israélien réexamine ses lignes politiques de fond que nous, du côté européen, nous faisons bouger les nôtres. Cela a été rappelé de manière très claire ce matin que l'un des éléments cardinaux, selon nous, du processus de paix et de la capacité à avoir des solutions concrètes sur le terrain dans les mois à venir, c'est la perspective de deux Etats qui vivent en paix dans le cadre des frontières définies, je crois que cela reste au coeur de la position européenne, ce qui a été dit aussi par plusieurs délégations c'est que l'administration américaine désormais a mis aussi ce point au centre de ses discussions avec Israël, je crois que c'est une chance et que cela devrait ouvrir, en tout cas on l'espère, dans les mois à venir, la possibilité d'avancer en matière de processus de paix.
Q - Sinon, peut-on penser qu'il n'y aura pas de renforcement des relations en attendant ?
R - Il n'y a pas de conditionnalité, on n'est pas dans un chantage, on est dans l'attente de voir les décisions prises par le gouvernement israélien mais on ne fait pas de chantage, on ne dit pas "si jamais vous prenez cette décision, on fera ceci, si jamais vous ne la prenez pas en fera cela", la position européenne est connue nous attendons maintenant de savoir qu'elle sera la position de fond israélienne.
Q - Sur la Croatie et la Slovénie. Si la reprise des négociations avec la Présidence tchèque se concrétise, jugez-vous toujours possible la fin des négociations d'adhésion avant la fin de l'année ?
R - Sur la Slovénie et sur la Croatie nous estimons que c'est l'intérêt de l'Union européenne, de tous les Etats membres de l'Union européenne, y compris de la Slovénie, d'avoir une reprise rapide de ces négociations. Pourquoi est-ce que la France a proposé de s'impliquer dans cette négociation avec le Trio, avec la Suède et la Présidence tchèque ? Pour soutenir la Commission européenne, pour soutenir Olli Rehn qui je tiens à le dire a fait un travail remarquable pour parvenir à un texte de compromis qui soit acceptable par la partie croate comme par la partie slovène. C'est parce que nous estimons que les différents frontaliers ne font pas partie de l'identité européenne et que nous estimons également que ces négociations avec la Croatie qui étaient bien parties doivent se poursuivre et que ce serait un très mauvais signal adressé à l'ensemble des Balkans que d'avoir un blocage durable sur ce sujet-là, ce serait le signe qu'il n'y a plus de perspective européenne, que les choses sont arrêtées dans un moment où au contraire nous avons besoin de mouvement et de perspective constructive et ouverte pour les Etats des Balkans. Nous avons la proposition d'Olli Rehn sur la table, nous l'avons appuyée très fortement, nous attendons maintenant la réponse de la partie croate comme de la partie slovène, nous mesurons parfaitement que c'est un sujet difficile, notamment pour nos amis slovènes qui sont un Etat membre, qui ont des droits et ces droits doivent être naturellement respectés, c'est un problème de politique intérieure qui est sensible, mais il y a aussi un intérêt européen et l'intérêt européen c'est que ces négociations reprennent et qu'elles puissent aboutir le plus rapidement possible.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 5 mai 2009