Déclaration de Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'Etat au commerce extérieur, sur le développement de l'implantation des entreprises françaises au Japon, Paris le 10 juin 2009.

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Circonstance : Séminaire sur le thème : " Le Japon face à la crise : quelles opportunités pour nos entreprise?", à Paris le 10 juin 2009

Texte intégral

Monsieur l'ambassadeur,
Messieurs et Mesdames les présidents,
Monsieur le Directeur Général,
Mesdames, Messieurs,
Je suis ravie d'ouvrir aujourd'hui cette session consacrée au Japon à Ubifrance, dans la ligne de celles que j'ai déjà ouvertes sur la Chine et l'Allemagne et que j'ouvrirai bientôt sur les Etats-Unis et qui concernent la crise, non pas en tant que fatalité, mais en tant qu'opportunité, s'agissant notamment des plans de relance parfois gigantesques qui sont lancés par nos principaux partenaires commerciaux. C'est notamment le cas au Japon, seconde puissance économique mondiale, avec quatre plans de relance massifs décidés et mis en oeuvre depuis le début de la crise à l'automne de l'année dernière. Ma conviction est que ces plans de relance contiennent de nombreuses opportunités, dans beaucoup de secteurs, pour les entreprises françaises.
Grâce à une initiative de la ME et des conseillers du commerce extérieur de Tokyo, la thématique de cette journée sera élargie aujourd'hui aux opportunités offertes aussi par la crise économique pour l'acquisition d'entreprises japonaises par des entreprises françaises. Il s'agit également d'un thème stratégique qui sera traité dans un instant, après l'intervention de l'ambassadeur Philippe Faure, jusqu'à 11h30, par une quinzaine de conseillers du commerce extérieur venus spécialement du Japon. Ce sont des praticiens de l'acquisition d'entreprises japonaises et leur expérience et précieuse et mérite d'être partagée, comme vous le verrez. A noter que se sont aussi associés à cette heureuse initiative la Chambre de Commerce et d'Industrie Française au Japon, le Comité d'échanges franco-japonais de la Chambre de Commerce de Paris et le Jetro. En ce sens, cette opération d'aujourd'hui sur le Japon est exemplaire, car elle associe les principaux acteurs institutionnels du soutien à l'internationalisation des entreprises. Après la session sur les opportunités créées par la crise pour l'acquisition d'entreprises japonaises, nous aurons à 11h une présentation concrète et détaillée faite par le chef régional des services économiques à Tokyo, LM Morris, et son équipe, des opportunités offertes par les quatre plans de relance japonais.
1/ S'agissant des plans de relance, il est essentiel de partir du constat que le Japon a été, avec la Corée, le pays de l'OCDE le plus touché par la crise, car très dépendant des exportations pour sa croissance.
En effet, la contraction annualisée du PIB a été de 14,4% au 4ème trimestre 2008 et de 15,2% au 1er trimestre 2009. Le Japon a été doublement pénalisé par la hausse marquée du yen, concomitante à la crise et due à la fin de ce qu'on appelle le « carry trade », c'est-à-dire le fait d'emprunter en yen à taux très bas pour ensuite effectuer des placements sur d'autres monnaies à fort taux d'intérêt. Cette pratique, qui avait tendance à faire baisser le yen, s'est arrêtée net en septembre de l'année dernière avec l'aversion pour le risque née de la faillite de la banque Lehman.
Si la récession japonaise semble s'être aujourd'hui stabilisée, avec même une amorce de rebond fin avril, ceci est dû notamment à la réactivité du gouvernement japonais et au lancement de plans de relance massifs.
En effet, en simples dépenses budgétaires, les quatre plans de relance japonais représentent 210 milliards d'euros, soit 4,9% du PIB japonais, ce qui est considérable.
Parmi les mesures phares qui vous seront détaillées, on peut mentionner notamment la distribution en cash de 15 milliards d'euros aux ménages (90 euros par personne, 150 euros pour les moins de 18 ans et les plus de 65 ans) pour relancer la demande interne, même si cette mesure est assez controversée au plan macroéconomique.
Les plans de relance massifs japonais méritent d'être mieux connus en France, car ils offrent des opportunités à nos entreprises: ils vont sans doute d'abord permettre à l'économie japonaise de reprendre sa croissance globale tout d'abord, donc de faire redémarrer la demande intérieure et les importations, ils créent ensuite des opportunités sectorielles dans l'automobile, les nouvelles technologies, l'environnement et la construction en particulier.
Parmi les mesures sectorielles, le Japon entend ainsi soutenir les secteurs automobiles et électroniques, qui souffrent le plus de l'effondrement de la demande intérieure. Parmi les mesures spécifiques à ces industries, le gouvernement japonais prévoit de nouvelles incitations, réductions de taxes et subventions pour l'acquisition d'équipements plus économes en énergie (véhicules hydrides, produits électroménagers...).
Au travers de son quatrième plan de relance, l'ambition du Premier ministre Taro Aso est également de multiplier par vingt la production d'électricité d'origine solaire d'ici 2020. S'agissant de la construction, l'objectif du gouvernement japonais est double : avancer le calendrier des travaux publics et encourager, par l'intermédiaire de réductions de taxes notamment, les particuliers à acquérir ou faire construire de nouveaux logements.
Les plans de relance budgétaires japonais sont complétés par des mesures purement financières encore plus massives (puisqu'elles représentent en théorie 19% environ du PIB), sous forme de garanties bancaires et d'interventions de la Banque du Japon. Il s'agit par exemple :
- du renforcement des fonds propres des banques (101 milliards d'euros prévus),
- du programme de rachat des actions détenues par les banques (164 milliards d'euros prévus),
- d'un accès facilité au crédit des entreprises avec des garanties d'Etat massives pouvant aller jusqu'à 234 milliards d'euros,
- le rachat de papier commercial par la Banque du Japon (360 milliards d'euros) etc.
2/ Les opportunités créées par la crise en matière d'acquisition d'entreprises japonaises sera le premier thème traité aujourd'hui.
Il s'agit aussi d'un sujet qui me tient à coeur, qui n'est pas l'exportation proprement dite, mais qui est peut être aussi important, car la croissance externe des entreprises françaises à l'étranger permet de gagner rapidement des parts de marché et les enrichit souvent en termes de revenus, de technologies, de gestion, de ressources humaines etc. Le Japon n'est peut être pas le premier pays auquel on pense en matière d'acquisitions d'entreprises, car il a la réputation d'être relativement fermé, mais l'intérêt de la session qui va s'ouvrir est de montrer concrètement que c'est possible, à l'aide d'exemples vécus précis. La France est le second investisseur étranger au Japon derrière les Etats-Unis. On vous parlera des opérations les plus connues, comme celles de Renault-Nissan ou d'AXA, précisément réalisées à la faveur de la crise japonaise de la fin des années 90, mais aussi d'acquisitions plus modestes et plus discrètes de leaders technologiques mondiaux au Japon, par des groupes français de taille plus petite. Vous allez comprendre pourquoi la crise au Japon ouvre des opportunités en matière de rachat d'entreprises, du fait de la volonté de grands groupes de céder certaines activités et de la sous valorisation actuelle de nombreuses sociétés dans beaucoup de secteurs. Le vieillissement des chefs d'entreprises des PME moyennes japonaises crée aussi des opportunités de rachat, dont le Jetro ici présent, qui est l'Ubifrance japonais, est bien au courant. Le Jetro possède en effet une base de données unique des entreprises qui peuvent devenir des cibles de rachat, sur tout le territoire japonais.
Dans les trois panels suivants qui seront animés par M David Barroux, rédacteur en chef-entreprises des Echos, les CCEF chefs d'entreprises françaises à Tokyo répondront donc aux trois questions fondamentales suivantes :
- Pourquoi une acquisition d'entreprise sur le marché japonais ?
- Comment réussir l'acquisition et la due diligence ?
- Comment réussir la phase essentielle de la post acquisition ?
Le Japon a été particulièrement à l'honneur l'année dernière avec le 150ème anniversaire de nos relations diplomatiques et commerciales et la visite du Premier Ministre Fillon en avril. J'ai eu moi-même l'occasion d'y accompagner avec succès 90 PME en juin 2008 et j'y retournerai en octobre cette année, avant la visite du Président Sarkozy prévue au début de l'année prochaine. Comme vous le voyez, le gouvernement français est mobilisé sur le Japon et notre ambassadeur Philippe Faure va vous le confirmer, merci bien.
Source http://www.ubifrance.fr, le 15 juin 2009