Déclaration de Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé et des sports, sur l'exercice de la médecine libérale, notamment dans le cadre de la loi hôpital, patients, santé et territoires (HPST), Paris le 2 juillet 2009.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Texte intégral


Madame la ministre, chère Michèle Barzach,
Monsieur le ministre, cher René Teulade,
Madame et Messieurs les parlementaires, chère Marisol Touraine, cher Guy Lefrand, cher Jean-Pierre Door,
Monsieur le président, cher Michel Chassang,
Monsieur le directeur général de l'UNCAM, cher Frédéric Van Rockeghem,
Messieurs les présidents, cherBertrand Fragonard, cher Jean-Marie Spaeth, cher Jacques Monnot, cher Claude Maffioli,
Monsieur le président du groupe CMP MEDICA, cher Gérard Kouchner,
Mesdames, messieurs,
Je suis heureuse de répondre à votre invitation pour célébrer le 40ème anniversaire du centre national des professions de santé (CNPS).
Fille de professionnel de santé libéral, professionnelle de santé libérale moi-même, j'ai toujours eu à coeur de préserver cette identité forte.
Je connais votre expertise et votre dévouement. Je suis parfaitement consciente de la place qu'occupent les professionnels de santé libéraux dans l'offre de soins et, pour répondre d'emblée à la question que vous avez choisie pour cette conférence, l'exercice libéral existe et continuera d'exister.
Tout au long des débats parlementaires sur le projet de loi HPST, je me suis investie personnellement, avec conviction, pour m'opposer aux partisans de solutions simplistes comme la suppression de la liberté d'installation. L'avez-vous oublié ?
J'ai aussi été à votre écoute. Cela continuera ainsi, d'abord parce que c'est mon rôle et surtout parce que cela correspond à mon éthique personnelle.
Les professionnels de santé libéraux et leurs conditions d'exercice sont au coeur de mes préoccupations.
Ainsi, j'ai exigé que l'ONDAM de ville soit égal à l'ONDAM hospitalier lors de chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). Je tiendrai cette position cette année encore, car je crois qu'elle est juste.
Je le répète : lors de chaque débat parlementaire, que ce soit pour la loi « Hôpital, patients, santé et territoires » ou pour les LFSS, je me suis battue pour défendre la liberté d'installation et le libre choix du professionnel par son patient.
Pour autant, ne nous y trompons pas : notre société change.
Les transitions démographiques et épidémiologiques font émerger de nouveaux enjeux.
La sociologie et les aspirations des professionnels de santé évoluent également.
Nous devons tenir compte de ces mutations.
Le pacte social qui fonde la sécurité sociale nous impose à tous ce réalisme, qui doit être conjugué avec vos valeurs.
De plus, la crise économique majeure que nous traversons nous impose de tirer rapidement toutes les leçons utiles, pour guider et accompagner l'évolution de notre système de santé, au service de nos concitoyens.
Il s'agit donc, dans l'esprit d'ouverture qui m'anime, de garantir un équilibre vertueux des forces, dans le dialogue franc et constructif que je veux entretenir avec vous.
Cette évolution globale de notre système de santé correspond à l'objectif que s'est fixé le gouvernement avec la loi HPST.
J'ai souhaité, en effet, que la réforme de l'hôpital s'accompagne de celles, tout aussi importantes, de l'administration et des soins de ville. La réforme d'un système de santé n'a de sens que si elle est globale et cohérente.
J'ai donc abordé cette réforme non pas dans le but de contraindre et d'interdire, mais pour vous donner les outils les plus adaptés à une évolution professionnelle nécessaire et urgente, qui modernise l'organisation des acteurs en même temps qu'elle rénove son administration.
Vous dites, Michel Chassang, que les jeunes se détournent de l'exercice libéral.
Il ne faut pas se leurrer : aujourd'hui, si les jeunes choisissent moins l'exercice libéral, c'est principalement parce qu'il ne correspond pas toujours à leurs aspirations.
Ces jeunes, je les ai rencontrés ; je les ai entendus.
La loi HPST leur apporte et vous apporte un certain nombre de réponses. Ce sont ces réponses qui sont les meilleures garanties de la pérennité d'un exercice libéral fort et qui prend toute sa place dans notre édifice de soins.
A cet égard, je veux profiter de l'occasion qui m'est ici donnée pour rendre l'hommage qu'elle mérite à la remarquable implication des parlementaires, au premier rang desquels Jean-Marie Rolland.
Vous le savez, cette loi constitue une avancée importante pour notre système de santé en général, et pour les professionnels de santé libéraux en particulier.
Sans vous donner une lecture exhaustive de ce texte dont nous avons souvent débattu ensemble, je voudrais rappeler que la loi HPST vous offre, à vous, professionnels de santé, les outils du changement que nombre d'entre vous appellent de leurs voeux.
Ainsi, la modernisation de l'offre de soins passera par une organisation plus souple de la permanence des soins, en région, par la création des pôles de santé et celle des maisons et des centres de santé.
Pour la première fois, la loi autorise, en dehors de toute expérimentation, la coopération entre professionnels de santé volontaires.
Elle définit la télémédecine et reconnaît les missions des pharmaciens.
Elle rend effectives la formation des sages-femmes à l'université, la réforme des ordres professionnels ou la création d'un internat en odontologie.
Ce sont là les axes forts de la rénovation que nous lançons, qui seront mis en place par les agences régionales de santé (ARS).
Ces dernières permettront de simplifier l'administration régionale de la santé, et bénéficieront de partenaires privilégiés par l'intermédiaire d'une représentation élue de chaque profession.
A présent, la loi HPST doit être déclinée au niveau réglementaire et surtout mise en oeuvre sur le terrain pour exister pleinement.
Dans cette phase importante, j'ai besoin de vous et de votre mobilisation, afin que, sur l'ensemble du territoire, les professionnels de santé libéraux s'emparent
véritablement de ces outils, pour moderniser leurs pratiques, améliorer leurs conditions d'exercice et la qualité du service rendu à nos concitoyens.
Par ailleurs, je souhaite que ces mesures soient complétées par des relations conventionnelles fécondes et responsables.
Là encore, il s'agit de définir des relations cohérentes et équilibrées entre les Français et les professionnels de santé libéraux.
Pour toutes ces raisons, je souhaite que le syndicalisme professionnel se renforce au niveau national et régional, et que sa légitimité, à l'image de celle des salariés, s'appuie sur des élections.
C'est maintenant à vous de relever le défi et de fédérer autour de vous les propositions et les énergies de tous les professionnels de santé libéraux. Je rappelle qu'au niveau régional, tous les élus d'unions professionnelles seront issus des centrales syndicales nationales et que leurs travaux permettront d'enrichir les débats nationaux et apporteront, au niveau local, le réalisme et le pragmatisme indispensables des acteurs de terrain.
Enfin, je ne peux conclure sans ajouter qu'en plus de cette loi et du futur PLFSS, nous allons devoir faire face à la première pandémie du siècle.
C'est une nouvelle menace sanitaire dont la gravité est encore incertaine. Il convient de la prendre au sérieux, au vu de son potentiel de dommages à l'échelle de notre population.
Cette menace, que nous attendions virulente et déferlante, présente en fait pour le moment une virulence modérée et arrive progressivement.
Comme l'a dit la directrice générale de l'organisation mondiale de la Santé (OMS), nous avons affaire à un virus « subtil et sournois ».
Cette pandémie sera, en outre, la première, dans l'histoire de l'humanité, que nous aborderons avec un plan élaboré et testé de longue date. Il s'agit là d'un atout.
Ainsi, depuis 2005, la coordination interministérielle dirigée par le professeur Didier Houssin a élaboré un plan national. Ce plan a été évalué, testé par de nombreux exercices nationaux et locaux et mis à jour à plusieurs reprises.
Nous avons par ailleurs acquis d'importants moyens de protection en matériel et produits de santé : 1 milliard de masques anti-projections, destinés aux malades, 900 millions de masques de protection, dits « FFP2 » (dont 723 millions pour le seul secteur santé) pour les personnes particulièrement exposées, dont vous faites partie, et 33 millions de traitements antiviraux.
Des vaccins ont également été pré-réservés auprès de certains industriels.
Afin de gérer ces stocks et de mettre en place un corps de réserve sanitaire, nous avons créé l'établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS).
Ne nous y trompons pas cependant : aussi efficace soit-il, ce plan n'existe que parce vous le ferez vivre au quotidien.
Sans votre action de terrain, il n'y a pas de plan qui tienne !
Une épidémie de grippe n'est pas un événement exceptionnel en soi. Chaque hiver, la France y est confrontée et vous parvenez parfaitement à maîtriser la situation.
Même si, dans le cas présent, l'échelle n'est pas la même - c'est la raison pour laquelle nous avons prévu ces dispositions -, j'ai une absolue confiance dans votre capacité de réaction et d'adaptation.
C'est bien d'ailleurs précisément parce que nous avions identifié que les professionnels de santé auraient à jouer un rôle essentiel face à une telle situation que nous avons souhaité leur porter, vous porter, une attention tout à fait particulière.
Parce que nous avons absolument tenu à ce que cette mobilisation n'aboutisse pas à votre surexposition, ni à la désorganisation de l'offre de soins, l'ensemble des dispositifs préparés à votre endroit visent à ce que vous soyez protégés, informés et assurés personnellement.
Ainsi, je peux vous le dire aujourd'hui, vous pourrez aborder cette crise sanitaire dans le plus grand professionnalisme et les meilleures conditions possibles.
A cet égard, je vous encourage à vous inscrire sur la liste de diffusion « DGS urgent », qui permet aux professionnels de santé de recevoir automatiquement des messages les avertissant de problèmes sanitaires urgents. Je vous demande de répercuter cette information à vos adhérents : « DGS urgent » !
Il s'agit là d'une initiative concrète, créée pour vous et destinée à améliorer votre accès à une information rapide et efficace. Il vous appartient désormais de vous en emparer et de vous l'approprier.
Dans le même esprit, un site internet spécifiquement dédié à la pandémie sera mis en place dans les prochains mois. Je souhaite que vous puissiez également le fréquenter régulièrement.
Je suis fière de notre offre de soins libérale et de ses représentants, dont j'ai fait partie, je ne l'oublie pas, et dont je connais le professionnalisme exemplaire.
J'ai confiance en vous et en votre capacité à évoluer en préservant votre singularité. Vous en avez déjà fait la preuve par le passé ; je sais que vous serez à mes côtés à l'avenir encore.
Vous pouvez me faire confiance pour continuer à servir la haute idée que je me fais du secteur libéral et de son exercice, pour continuer à accompagner les nécessaires évolutions qu'il devra accomplir.
Je vous remercie.
Source http://www.sante-sports.gouv.fr, le 3 juillet 2009