Texte intégral
CLAUDE SERILLON : Allonger la durée de cotisation et relever l'âge de cessation d'activité : les idées du MEDEF font naître un front uni syndical. Invité de cette édition, le président du MEDEF, Ernest-Antoine Seillière.
CLAUDE SERILLON : Monsieur Seillière, bonsoir.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Bonsoir.
CLAUDE SERILLON : Alors, pour les 35 heures, vous aviez réussi à briser le front syndical. Mais là, vous les avez tous contre vous. Ca change quoi pour vous ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Eh bien, écoutez, franchement, pas grand-chose parce que, on l'a vu, les faits sont les faits, il n'y a aucune inquiétude pour les retraités, les Françaises et les Français qui sont à la retraite continueront de toucher leur retraite. Mais si les syndicats continuent de refuser à regarder l'évidence, c'est-à-dire l'impossibilité dans laquelle on sera de financer la retraite complémentaire si on n'allonge pas, très modérément et très progressivement la durée de cotisation, dans nos propositions, vous le savez, il s'agit de travailler grosso modo un an et demi de plus en 2010, et en commençant progressivement à partir de 2004, ces propositions sont de bon sens, elles sont en uvre partout en Europe. Alors, les syndicats disent : manifestons plutôt que de discuter. Nous sommes sûrs qu'ils reviendront discuter, c'est que nous leur proposons.
CLAUDE SERILLON : Mais alors pourquoi, vous, patrons, globalement, vous ne montrez pas l'exemple ? Parce qu'il n'y a pas un jour où on ne met pas en retraite anticipée des gens qui ont 55 ans, 56 ans. C'est-à-dire que l'on débauche sans arrêt des gens qui ont plus de 55 ans. C'est une pratique courante. Donc, ça vous met en porte-à-faux quand même dans ce que vous dites.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Eh bien, écoutez, je vous dirais non parce que, en fait, dans les questions de retraite, les choses sont très progressives. Alors, nous avons été dans une époque où nous avons eu beaucoup de chômage, des nécessités de restructuration et donc on a beaucoup en effet utilisé la préretraite pour pouvoir restructurer et parce que l'on avait beaucoup de chômage et qu'il fallait faire place aux jeunes. Mais dans ce que nous voyons venir pour les 10 ans qui viennent, nous allons manquer de main d'uvre, et nous aurons au contraire à faire travailler les gens plus âgés, les anciens, plus longtemps.
CLAUDE SERILLON : Pourquoi est-ce qu'on continue de débaucher les plus de 55 ans et que vous dites : non, il faut allonger la durée du travail.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Alors, voyez-vous, nous n'avons pas encore pu entamer la réforme et nous sommes dans le système ancien. Et dans le système ancien, on continue à faire de la préretraite. Mais bien entendu, dès que nous serons dans le système nouveau que nous proposons, ce sera fini, sauf pour les entreprises qui veulent le faire et qui le paieront elles-mêmes. Mais ça ne sera plus, comme on dit, mutualisé.
CLAUDE SERILLON : Mais actuellement, vous recommanderiez plutôt aux patrons de ne pas licencier ou de ne pas mettre, pardon de ne pas licencier mais de mettre en préretraite les gens qui ont plus de 55 ans ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Ecoutez, chacun dans l'entreprise fait ce qu'il croit devoir faire. Mais nous disons très clairement aux entreprises : quand vous voudrez demain mettre à la retraite, à la préretraite, eh bien vous devrez prendre en charge le différentiel de cotisation vous-même. Ce ne sera plus à la charge de la collectivité.
CLAUDE SERILLON : Alors, vous avez lancé l'idée de la Refondation sociale et pourtant, là, d'une certaine manière, vous cassez le paritarisme parce que vous dites : eh bien, nous, on ne paye plus.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Nous ne cassons rien du tout, nous proposons au contraire un système, encore une fois, modéré, de bon sens. Vous savez, sur l'assurance chômage, nous avons eu beaucoup de mal à faire comprendre notre position à l'opinion, à la majorité des syndicats, au gouvernement. Ils l'ont accepté. Ca a pris 6 ou 7 mois, ça a été long parce qu'on n'aime pas évidemment
CLAUDE SERILLON : Vous étiez moins radicaux. Là, vous n'irez plus discuter ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Non, au contraire, nous irons discuter et nous sommes demandeurs de l'ouverture de négociations, de discussions sur la base des propositions de bon sens. Si bien entendu
CLAUDE SERILLON : Mais est-ce qu'on peut ouvrir un dialogue alors que vous faites une sorte de chantage en disant : maintenant, nous, on ne paye plus ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Attendez, quand le patronat, comme on dit, prend une négociation, c'est toujours du chantage dans la terminologie des syndicats. Je vous demande de ne pas reprendre ce terme. C'est une position de négociation, elle est tout-à-fait naturelle et nous nous efforçons, vous savez, de protéger l'intérêt de tous les jeunes au travail, de tous ceux qui paieront des cotisations supplémentaires si l'on n'accepte pas le système que nous proposons. Et nous ne souhaitons pas que les jeunes qui payent déjà trois mois de leur salaire pour les retraites des plus anciens soient amenés à payer plus. Vous savez, on a mis beaucoup, beaucoup de réflexion là-dedans et je crois que le bon sens l'emportera.
CLAUDE SERILLON : Vous revenez à la table des discussions à quelles conditions ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Eh bien à la condition que les syndicats veuillent bien considérer que pour régler le problème des retraites complémentaires en France, il ne s'agit pas de nouvelles cotisations sur les plus jeunes, il ne s'agit pas d'abattre la retraite des aînés, mais il s'agit bien de, très progressivement, accepter de travailler un peu plus. Et encore une fois, il s'agit d'un trimestre par an jusqu'à 2023. C'est très lointain, c'est très progressif, mais c'est le bon sens et je crois que c'est ce qu'on fera.
CLAUDE SERILLON : Et c'est la fin de la retraite à 60 ans ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Eh bien, c'est la retraite, si vous voulez, à la carte, c'est-à-dire que chacun déterminera le moment de son départ et la retraite à 60 ans a été un slogan, a été une réalité pendant 20 ans, mais les choses ont changé et aujourd'hui, il faut regarder le monde qui vient. Tout le monde regrette ses vingt ans, on peut également regretter la retraite à 60 ans.
CLAUDE SERILLON : Est-ce qu'au fond, il n'y a pas derrière cela l'idée que la retraite par répartition est obsolète et qu'il faut aller vers des capitalisations, chères à votre ami, monsieur Kessler.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Non, pas du tout. Alors, si vous voulez, nous, nous sommes pour le système de répartition, nous le défendons parce que le système que nous proposons s'appuie sur un système de répartition qui sera financé et donc qui sera maintenu. La capitalisation, c'est quelque chose qui peut venir en plus, nous le souhaitons beaucoup. La France, seule en Europe ne l'a pas fait. Là aussi, je crois qu'un jour ou l'autre, elle y viendra.
CLAUDE SERILLON : Je retiens que vous êtes quand même plus nuancé, que vous êtes prêt à dialoguer avec les syndicats.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Nous sommes très nuancés, nous sommes toujours pour le dialogue. Mais vous savez, il y a des présentations syndicales qui sont quelquefois un peu abruptes. Ca fait partie du jeu. Nous ne leur en voulons pas.
CLAUDE SERILLON : Merci monsieur Seillière.
(Source http://www.medef.fr, le 07 mars 2001).
CLAUDE SERILLON : Monsieur Seillière, bonsoir.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Bonsoir.
CLAUDE SERILLON : Alors, pour les 35 heures, vous aviez réussi à briser le front syndical. Mais là, vous les avez tous contre vous. Ca change quoi pour vous ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Eh bien, écoutez, franchement, pas grand-chose parce que, on l'a vu, les faits sont les faits, il n'y a aucune inquiétude pour les retraités, les Françaises et les Français qui sont à la retraite continueront de toucher leur retraite. Mais si les syndicats continuent de refuser à regarder l'évidence, c'est-à-dire l'impossibilité dans laquelle on sera de financer la retraite complémentaire si on n'allonge pas, très modérément et très progressivement la durée de cotisation, dans nos propositions, vous le savez, il s'agit de travailler grosso modo un an et demi de plus en 2010, et en commençant progressivement à partir de 2004, ces propositions sont de bon sens, elles sont en uvre partout en Europe. Alors, les syndicats disent : manifestons plutôt que de discuter. Nous sommes sûrs qu'ils reviendront discuter, c'est que nous leur proposons.
CLAUDE SERILLON : Mais alors pourquoi, vous, patrons, globalement, vous ne montrez pas l'exemple ? Parce qu'il n'y a pas un jour où on ne met pas en retraite anticipée des gens qui ont 55 ans, 56 ans. C'est-à-dire que l'on débauche sans arrêt des gens qui ont plus de 55 ans. C'est une pratique courante. Donc, ça vous met en porte-à-faux quand même dans ce que vous dites.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Eh bien, écoutez, je vous dirais non parce que, en fait, dans les questions de retraite, les choses sont très progressives. Alors, nous avons été dans une époque où nous avons eu beaucoup de chômage, des nécessités de restructuration et donc on a beaucoup en effet utilisé la préretraite pour pouvoir restructurer et parce que l'on avait beaucoup de chômage et qu'il fallait faire place aux jeunes. Mais dans ce que nous voyons venir pour les 10 ans qui viennent, nous allons manquer de main d'uvre, et nous aurons au contraire à faire travailler les gens plus âgés, les anciens, plus longtemps.
CLAUDE SERILLON : Pourquoi est-ce qu'on continue de débaucher les plus de 55 ans et que vous dites : non, il faut allonger la durée du travail.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Alors, voyez-vous, nous n'avons pas encore pu entamer la réforme et nous sommes dans le système ancien. Et dans le système ancien, on continue à faire de la préretraite. Mais bien entendu, dès que nous serons dans le système nouveau que nous proposons, ce sera fini, sauf pour les entreprises qui veulent le faire et qui le paieront elles-mêmes. Mais ça ne sera plus, comme on dit, mutualisé.
CLAUDE SERILLON : Mais actuellement, vous recommanderiez plutôt aux patrons de ne pas licencier ou de ne pas mettre, pardon de ne pas licencier mais de mettre en préretraite les gens qui ont plus de 55 ans ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Ecoutez, chacun dans l'entreprise fait ce qu'il croit devoir faire. Mais nous disons très clairement aux entreprises : quand vous voudrez demain mettre à la retraite, à la préretraite, eh bien vous devrez prendre en charge le différentiel de cotisation vous-même. Ce ne sera plus à la charge de la collectivité.
CLAUDE SERILLON : Alors, vous avez lancé l'idée de la Refondation sociale et pourtant, là, d'une certaine manière, vous cassez le paritarisme parce que vous dites : eh bien, nous, on ne paye plus.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Nous ne cassons rien du tout, nous proposons au contraire un système, encore une fois, modéré, de bon sens. Vous savez, sur l'assurance chômage, nous avons eu beaucoup de mal à faire comprendre notre position à l'opinion, à la majorité des syndicats, au gouvernement. Ils l'ont accepté. Ca a pris 6 ou 7 mois, ça a été long parce qu'on n'aime pas évidemment
CLAUDE SERILLON : Vous étiez moins radicaux. Là, vous n'irez plus discuter ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Non, au contraire, nous irons discuter et nous sommes demandeurs de l'ouverture de négociations, de discussions sur la base des propositions de bon sens. Si bien entendu
CLAUDE SERILLON : Mais est-ce qu'on peut ouvrir un dialogue alors que vous faites une sorte de chantage en disant : maintenant, nous, on ne paye plus ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Attendez, quand le patronat, comme on dit, prend une négociation, c'est toujours du chantage dans la terminologie des syndicats. Je vous demande de ne pas reprendre ce terme. C'est une position de négociation, elle est tout-à-fait naturelle et nous nous efforçons, vous savez, de protéger l'intérêt de tous les jeunes au travail, de tous ceux qui paieront des cotisations supplémentaires si l'on n'accepte pas le système que nous proposons. Et nous ne souhaitons pas que les jeunes qui payent déjà trois mois de leur salaire pour les retraites des plus anciens soient amenés à payer plus. Vous savez, on a mis beaucoup, beaucoup de réflexion là-dedans et je crois que le bon sens l'emportera.
CLAUDE SERILLON : Vous revenez à la table des discussions à quelles conditions ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Eh bien à la condition que les syndicats veuillent bien considérer que pour régler le problème des retraites complémentaires en France, il ne s'agit pas de nouvelles cotisations sur les plus jeunes, il ne s'agit pas d'abattre la retraite des aînés, mais il s'agit bien de, très progressivement, accepter de travailler un peu plus. Et encore une fois, il s'agit d'un trimestre par an jusqu'à 2023. C'est très lointain, c'est très progressif, mais c'est le bon sens et je crois que c'est ce qu'on fera.
CLAUDE SERILLON : Et c'est la fin de la retraite à 60 ans ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Eh bien, c'est la retraite, si vous voulez, à la carte, c'est-à-dire que chacun déterminera le moment de son départ et la retraite à 60 ans a été un slogan, a été une réalité pendant 20 ans, mais les choses ont changé et aujourd'hui, il faut regarder le monde qui vient. Tout le monde regrette ses vingt ans, on peut également regretter la retraite à 60 ans.
CLAUDE SERILLON : Est-ce qu'au fond, il n'y a pas derrière cela l'idée que la retraite par répartition est obsolète et qu'il faut aller vers des capitalisations, chères à votre ami, monsieur Kessler.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Non, pas du tout. Alors, si vous voulez, nous, nous sommes pour le système de répartition, nous le défendons parce que le système que nous proposons s'appuie sur un système de répartition qui sera financé et donc qui sera maintenu. La capitalisation, c'est quelque chose qui peut venir en plus, nous le souhaitons beaucoup. La France, seule en Europe ne l'a pas fait. Là aussi, je crois qu'un jour ou l'autre, elle y viendra.
CLAUDE SERILLON : Je retiens que vous êtes quand même plus nuancé, que vous êtes prêt à dialoguer avec les syndicats.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Nous sommes très nuancés, nous sommes toujours pour le dialogue. Mais vous savez, il y a des présentations syndicales qui sont quelquefois un peu abruptes. Ca fait partie du jeu. Nous ne leur en voulons pas.
CLAUDE SERILLON : Merci monsieur Seillière.
(Source http://www.medef.fr, le 07 mars 2001).