Déclaration de M. Xavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, les inégalités sociales et salariales, Paris le 7 juillet 2009.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Xavier Darcos - Ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville

Circonstance : Remise du rapport sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes à Paris le 7 juillet 2009

Texte intégral

J'accorde une importance particulière à la remise de ce rapport préparatoire à la concertation avec les partenaires sociaux sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes :

  • * d'abord, parce qu'il constitue une base extrêmement solide pour aborder la phase de discussion prévue à l'automne dans le cadre de l'agenda social 2009 ;
  • * Mais aussi tout simplement parce que la réalité de la situation que décrit ce rapport et à laquelle nous allons nous efforcer d'apporter des réponses fortes est une réalité alarmante.

Je veux le dire sans ambages. Cette réalité nous fait honte.
Elle nous fait honte, parce qu'il n'est pas normal que dans un pays où les filles réussissent mieux à l'école que les garçons, elles soient aussi systématiquement sur-représentées dans les emplois non qualifiées, simplement parce qu'on les a progressivement découragées de s'orienter vers les filières les plus qualifiées et les plus prestigieuses.
Elle nous fait honte, parce que dans un pays où 83% des femmes âgées de 25 à 49 ans travaillent, elles sont cinq fois plus nombreuses que les hommes à travailler à temps partiel, et deux fois plus souvent rémunérées au niveau du SMIC.
Cette réalité nous fait honte, enfin, parce que plus une femme est diplômée, plus l'écart de salaire avec les hommes de même qualification s'accroît, comme s'il fallait définitivement décourager les femmes de poursuivre trop avant dans la voie des études supérieures.
Nous demandons beaucoup aux femmes de ce pays. Elles ont à la fois un taux d'activité et un taux de fécondité qui sont parmi les plus élevés d'Europe, ce dont nous nous félicitons régulièrement en pointant le dynamisme de notre modèle familial. Et pourtant, au prix de quelles concessions et de quels sacrifices y parvenons-nous !
Car derrière la réalité des chiffres, se cache la réalité des personnes, celle des gens dont le quotidien est l'objet même de mon ministère.
La réalité, c'est cette jeune fille qui aurait pu être médecin ou infirmière mais qui y renonce parce qu'on lui dit que ce n'est pas pour elle.
C'est cette femme cadre aux nuits ponctuées de pleurs d'enfants, qui travaille sans relâche toute la journée sans rien montrer de sa fatigue, mais se voit régulièrement reprocher ses absences à la réunion de 19 heures.
C'est cette jeune mère à la merci d'une fièvre qui lui interdira l'accès à la crèche et la privera inopinément d'une journée de travail, parce qu'il n'est pas question que ce soit son compagnon qui garde leur enfant malade.
Ce sont toutes ces femmes aux compétences irréprochables et qui pourtant, ne sont jamais promues, parce qu'on cherche plus souvent un directeur qu'une directrice.
Madame l'Inspectrice générale, je me félicite que mon prédécesseur vous ait confié la rédaction de ce rapport sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes le 4 mars dernier. C'est une question que vous connaissez bien puisque vous avez été chef du service des droits des femmes et de l'égalité pendant six ans, puis directrice de cabinet de Nicole Ameline, ministre de la parité et de l'égalité professionnelle.
Le texte que vous nous remettez aujourd'hui constituera une base précieuse pour mener la concertation sur l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes que le gouvernement conduira au second semestre 2009.
Car si depuis le 23 juillet 2008, l'article premier de la Constitution dispose que « la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sociales », c'est aussi à nous qu'il appartient de donner à ce principe une existence indiscutable.
C'est bien pourquoi le Président de la République a souhaité, dans son discours du 13 février dernier sur la politique familiale, que des discussions s'engagent entre les partenaires sociaux sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, sur la conciliation des temps de travail et des temps familiaux ainsi que sur l'articulation du contrat de travail avec les besoins familiaux à travers une simplification des congés familiaux.
Je me réjouis que votre rapport permette de contribuer à nourrir cette concertation et je voudrais saluer la richesse du travail que vous avez mené, notamment en consultant largement les acteurs concernés.
Je prendrai connaissance avec attention de vos propositions dans le détail, mais je voudrais insister d'ores et déjà sur deux axes de vos propositions, simplifier les règles et trouver des solutions innovantes. Je ne peux que souscrire à cette approche, car je suis convaincu que c'est par des dispositifs adaptés que les entreprises seront incitées à promouvoir l'égalité professionnelle.
Au nombre de ces innovations, vous proposez notamment d'établir une plus grande transparence sur les données relatives aux écarts de rémunération entre les femmes et les hommes. Je pense qu'il s'agit là d'une piste de travail qu'il serait bon d'approfondir.
La transparence en matière d'égalité professionnelle, cela signifie que chacun devrait pouvoir connaître la réalité de la situation dans les entreprises pour s'en faire une idée exacte et contribuer à la faire évoluer.
C'est la raison pour laquelle, à titre personnel, je souhaite que dans un laps de temps très rapproché, de l'ordre de deux ans, toute personne qui le souhaite puisse avoir accès à certaines informations de base sur les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes dans les entreprises, à commencer par les plus grandes d'entre elles.
J'ai bien noté aussi votre proposition d'accroître progressivement la part des femmes dans les conseils d'administration des sociétés. Je souscris tout à fait à cette proposition, dont il conviendrait de poser le principe et de discuter les modalités avec les partenaires sociaux, parce que si nous voulons que des décisions soient prises pour les femmes, il faut très certainement qu'ils soient prises par des femmes. J'ajoute que cette question ne concerne pas seulement l'entreprise, mais aussi la fonction publique qui doit être plus vertueuse dans sa politique de recrutement et de promotion interne.
J'y serai particulièrement attentif pour ce qui concerne la gestion de mon ministère.
Nous aurons l'occasion de discuter de ces propositions, et sans doute d'autres sujets, dans le cadre de la concertation avec les partenaires sociaux qui va s'ouvrir à l'automne. Je souhaite que cette concertation soit la plus ouverte et la plus riche possible et qu'elle débouche sur des actions concrètes. Ce n'est pas seulement la cause des femmes qui est en jeu. C'est l'idée que nous nous faisons de la justice et des relations sociales dans notre pays.
Je vous remercie.

Source http://www.travail-solidarite.gouv.fr, le 9 juillet 2009