Texte intégral
Voilà mes amis notre Université d'été touche à sa fin !
Les travaux et tous les échanges de ces deux journées ont donné lieu à des débats si riches qu'il me semble difficile de faire un choix tranché.
Mais avant d'entrer directement dans le sujet, je voudrais vous dire la satisfaction et la fierté que je ressens en clôturant cette université d'été. Une nouvelle fois, vous avez été à la hauteur: une université d'été doit, dans une ambiance conviviale nous permettre d'apprendre, de comprendre, de partager et d'avancer dans la réflexion afin de dresser des pistes pour l'action. De ce point de vue, nous sommes comblés.
Alors mes chers amis quels enseignements tirer de ces 2 journées ?
Je ferai, tout d'abord, un rapprochement entre deux moments forts de cette université.
Le premier, je veux parler de la présence de Jacques Delors -qui, comme à son habitude, nous a gratifiés d'un discours de très haut niveau et éclairé- du second qui concerne la représentativité syndicale, au cours duquel vous avez apporté des témoignages riches d'enseignements et avancé des pistes à notre réflexion.
Alors quel rapport peut-il donc bien y avoir entre Jacques Delors et la représentativité ?
Depuis août 2008, nous avons eu l'occasion de le dire et de le redire, la représentativité syndicale, en France, est fondée sur l'audience obtenue dans les entreprises.
Nous avons vu, aussi, qu'un syndicat qui ne ferait pas 10 % ne serait plus représentatif.
Il s'agit, là, vous le constatez tous les jours, d'une injustice flagrante, d'une attaque contre le pluralisme syndical, source de richesses, et d'un déni de démocratie.
Reprenons l'exemple de Jacques Delors. Si son courant de pensée devait obtenir 10 % pour être représentatif, il disparaitrait purement et simplement du paysage. Et pourtant, ce courant de pensée (qui associe démocratie chrétienne et sociale démocratie), bien que minoritaire en France, a contribué à de nombreuses avancées sociales.
Ce courant de pensée est également celui qui est à l'origine de la construction européenne et d'une vision de la construction sociale que nous partageons largement.
Jacques Delors, lui-même, est le Président de la Commission qui a le plus marqué l'histoire de cette institution.
De tout cela, si les règles étaient les mêmes que celles qui nous sanctionnent, il n'existerait plus rien !
De la même manière, parce que la CFTC ne parviendrait pas à atteindre la barre des 10 %, on voudrait qu'elle disparaisse du paysage syndical français, jetant dans les poubelles de l'histoire tous les progrès sociaux qu'elle a porté, accompagné : les allocations familiales, les conventions collectives, le SMIG, les allocations chômages, la formation tout au long de la vie, la transferabilité des droits attachés à la personne, l'accompagnement personnalisé...
Et plus près de nous : le conseiller du salarié; la participation, le congé individuel de formation... Et bien sûr, ce n'est pas fini, la CFTC contribue, chaque jour, dans chaque négociation, à faire progresser les droits des travailleurs...
C'est pourquoi, mes chers amis, il n'est pas question un seul instant de disparaître, ni de douter, ni de se plaindre ! Car la CFTC a encore tant de choses à accomplir qu'il ne nous reste qu'un seul choix : aller toujours plus loin !
Imaginez un seul instant, que nous n'existions plus !
Que se passerait-il si la CFTC ne prenait pas le risque de la négociation, de la construction sociale ?
Penseriez vous que le syndicat majoritaire prendrait sa place ?
Qu'à t il fait, lui, tout au long de son histoire? Que fait-il aujourd'hui encore en y regardant bien? Sinon que de l'opposition stérile.
Bien sur, on veut nous faire croire que le nouveau système est plus démocratique !
Mais, mes chers amis, ce n'est pas au nom de la démocratie sociale, que cette loi a été élaborée ; ce sont simplement les plus forts qui ont imposé leur loi avec l'intention de nous récupérer et en n'hésitant pas pour cela à s'allier au Medef. Pour eux, la Démocratie Sociale, La Négociation Sociale est un marché comme un autre. Pressons-nous, arrangeons-nous ! Il n'y en aura pas pour tout le monde !
Comment peut-on parler de démocratie sociale quand cette loi exclut du suffrage tous les salariés des entreprises de moins de cinquante salariés ?
Certains observateurs nous disent amicalement que pour continuer à exister, la CFTC devrait, si elle était maligne, fusionner avec d'autres organisations syndicales réformistes, un peu à l'image de ce qui se passe dans les partis politiques. Pourquoi faire !
On ne peut pas dire que pour l'instant, pour les partis politiques -quel que soit leur bord- ce soit une réussite : c'est trop souvent le mariage de la carpe et du lapin !
On fait semblant pour l'élection d'être "à tu et à toi" et quand les lumières sont éteintes on règle ses comptes entre amis, jusqu'à épuisement des forces !
Et puis quoi ! N'aurions-nous plus la force de défendre notre spécificité dans le paysage syndical français ?
Abandonnons ces hypothèses mercantiles et défaitistes et assumons-nous, comme nous sommes !
Si des alliances peuvent se trouver utiles, c'est avant tout dans les entreprises qu'elles doivent se négocier.
Cette spécificité de la CFTC, vous le savez, est tout entière contenue dans le Statut du Travailleur !
Selon ces mêmes observateurs il n'existerait aucune différence entre notre Statut du Travailleur et la « sécurité sociale professionnelle » de la CGT ou la «sécurisation des parcours professionnels» de la CFDT.
Ben Voyons! Là où la concurrence ne prend en compte que la vie professionnelle, et où l'individu, n'est considéré que du point de vue professionnel, la CFTC, elle, considère la personne dans toutes ses dimensions (salariés, mais aussi citoyen ou parent...) et à tous les moments de sa vie.
Notre Statut du Travailleur, c'est avant tout un projet global de société, un nouveau pacte social qui place l'homme au coeur de l'économie. Il doit permettre d'offrir un cadre collectif à la réalisation du projet de vie de chaque personne. Il se fonde sur le bien commun. Ce ne sont pas là, des slogans, ce sont nos racines ; je le répète, c'est notre spécificité !
Mais, mes amis, je ne suis pas non plus, en train de vous dire qu'il faut se contenter de ce que nous avons fait par le passé mais de vous parler de ce que nous devrons faire demain pour asseoir notre légitimité auprès des travailleurs.
La légitimité historique, aujourd'hui, ne suffit plus ! Une loi a été votée, nous devons, donc, nous y conformer, sans bien sûr lâcher sur sa révision. Et là, je compte sur vous toutes et vous tous !
Ne succombez pas non plus aux voix des oiseaux de mauvaises augures qui nous rappellent à longueur de journée, que dans certaines entreprises nous n'avons pas réussi à franchir le seuil fatidique de 10 %, et qui annoncent - pour s'en réjouir - que la CFTC est sur la mauvaise pente. Ce sont souvent ceux qui oublient de parler des entreprises où la CFTC réalise de bons scores, voire de très bons scores !
Les autres syndicats, eux aussi, perdront - et perdent déjà- leur représentativité dans certaines entreprises. Annonce-t-on pour autant leur disparition ?
Mes chers amis, Il n'y a qu'une solution, qu'un seul recours pour résoudre l'équation fatale ! Nous ne pouvons compter que sur nous- mêmes !
Et les réflexions de ces deux journées vont toutes dans ce sens là !
Nous savions que le chemin serait difficile, que des obstacles se dresseraient devant nous !
Grâce à vous, au fil de ces deux journées de travail, nous savons désormais, que la tâche n'est pas insurmontable !
C'est dans les entreprises et c'est en direction des délégués syndicaux et de la section syndicale que toutes nos structures (syndicats, FD, UD, UR, confédération) doivent porter leurs efforts.
Unies, tendues vers la réalisation d'un même objectif -la représentativité de la CFTC-, fort d'une stratégie d'accompagnement cohérente, et d'un programme novateur, je suis convaincu que nous y parviendrons !
Rappelez-vous, ce que je vous disais hier : pour remporter la compétition, il faut être solidaire et se mettre au service du collectif.
Mais vous vous mettrez d'autant plus au service de ce collectif, que, en retour, ce collectif se mettra dans les conditions de satisfaire vos aspirations.
Ici, devant vous, Nous en prenons l'engagement.
Je sais que vous en ferez de même, dans votre pratique quotidienne !
Avant de vous « rendre votre liberté », je voudrais évoquer la rentrée sociale.
Malgré de légers signes de reprises, l'été a été chaud avec ses chapelets de licenciements et ces salariés qui menacent de faire sauter leur entreprise pour qu'ils soient écoutés et respectés.
Comme pour les séquestrations de dirigeants, nous ne pouvons pas cautionner ce genre de pratique. Nous devons, au contraire, tout mettre en oeuvre pour éviter que les salariés en arrivent à de telles extrémités. Ce n'est pas parce que certaines entreprises agissent en dehors de toute moralité, que nous devons faire la même chose !
C'est pourquoi je crains que la rentrée s'annonce brulante, notamment parce que les chiffres du chômage risquent d'être catastrophiques, avec de nouveaux licenciements de nouveaux plans sociaux et l'arrivée sur le marché du travail de quelque 650 000 jeunes, dont une partie d'entre eux ne trouvera aucun débouché.
Il faut encore et à chaque fois que nécessaires protéger l'emploi et prolonger les dispositifs du travail à temps partiel au delà du contingent indemnisé comme la CFTC l'a exigé. Il faut combattre sans condition la précarité Il faut protéger le pouvoir d'achat des familles (prime 200euros).
Réinventer les solidarités. Nous sommes ici sur l'essentiel et il n'y a pas à transiger. Il faut soutenir, accompagner chacune des personnes fragilisées dans leur démarche de réinsertion.
Mais c'est vers les jeunes que nous devons faire porter nos efforts sur le court terme et sur le long terme.
Sur le court terme, nous avons proposé au gouvernement d'étendre le RSA à tous les jeunes sans emploi, le temps que durera la crise, et de créer un droit de tirage spécial jeunes. Il serait composé de deux allocations : l'une commune à tous les jeunes en situation précaire et destinée, par exemple, au financement d'un logement, d'une mutuelle santé ou d'un permis de conduire.
La seconde proposition, devrait leur permettre de mieux s'insérer sur le marché du travail; l'aide serait inversement proportionnelle au nombre d'années d'études poursuivies.
Il s'agit de mesures d'urgence qui vise un double objectif : donner à ces jeunes les moyens de ne pas sombrer définitivement dans l'exclusion et éviter une explosion sociale à la rentrée.
Dans le même esprit, nous proposons, aussi, de conditionner les aides aux entreprises à des embauches concrètes, aux conditions d'emploi; et sur des emplois pérennes, sous peine de sanctions, voire de remboursements de ces aides.
Pour le long terme, nous réfléchissons à quelques pistes ; elles ne sont pas finalisées, mais je peux vous en livrer la primeur.
La première consisterait à construire des campus universitaires -à l'aide des fonds récoltés par le grand emprunt national- sur l'ensemble du territoire.
Il s'agirait de créer une infrastructure dédiée aux jeunes (tous publics confondus, sans distinction de qualification et de situation de 16 à 30 ans). Cette «méga-structure» mutualiserait tous les moyens existants, les dispositifs formation, activités sportives et culturelles, une mission locale, une antenne Pôle emploi, et tous les nombreux dispositifs d'insertion sociale et professionnelle ou d'échec contre l'illettrisme...
Ces campus favoriseraient la mixité sociale et seraient des lieux d'échange, de découverte, de connexion ; ils permettraient d'assurer un suivi et un accompagnement global ; ils prendraient en compte toutes les difficultés et la complexité des problèmes que rencontrent les jeunes dans toutes ses dimensions (désinsertion, échec scolaire à la désocialisation...) ; ils éviteraient l'isolement, et la coupure à la sortie du système Scolaire.
Puisque j'évoque le grand emprunt, je vous confirme que nous ferons des propositions au gouvernement qui vient de solliciter notre avis. Parmi les pistes d'ores et déjà à l'étude, le financement de la construction de logements pour les plus modestes et d'infrastructures, mais aussi le financement d'investissements qui permettent de créer des emplois de qualité, à forte valeur ajoutée comme nous y invite la stratégie de Lisbonne.
La confiance de nos concitoyens dans ce grand emprunt tiendra pour beaucoup à l'information qu'ils auront de sa potentielle utilisation. Aussi, conviendra-t-il d'être novateur et créatif, en un mot d'oser.
L'Etat doit se donner les moyens d'investir dans les bassins industriels en difficulté pour les réindustrialiser en y développant des activités nouvelles », aussi sur le principe des pôles de compétitivité.
Pour sortir de la crise actuelle, il est nécessaire que tout le monde y mette du sien.
Les Français sont appelés à prêter à l'Etat pour que des projets d'avenir puissent aboutir.
Et les banques ??? Nous proposons, donc, que le gouvernement mette fin à cette aberration qui consiste à aider les banques sans contrepartie !
Celles-ci doivent s'engager à remplir leur mission qui est d'abord de financer l'économie, d'aider les entreprises à investir et les ménages.
Nous avons également vu, hier, l'importance pour les salariés de participer aux orientations stratégiques de l'entreprise dans le cadre de participation à la fois rénovée et qui renoue avec les sources qui ont inspiré sa mise en oeuvre.
Pour favoriser le dialogue social, nous proposons la création d'une instance permanente du dialogue social.
Nos partenaires n'ont, jusqu'à présent, pas répondu. Cette structure permettrait que le dialogue social se déroule dans la plus parfaite transparence en respectant toutes les parties prenantes. Faites-moi confiance : nous renouvellerons cette revendication jusqu'à ce qu'elle aboutisse.
Vous voyez, mes amis, les chantiers ne manquent pas. A chaque fois, nous répondrons présents : dans les entreprises, dans les régions, dans les branches et à l'échelon interprofessionnel parce que nous avons un projet qui nous tient à coeur, à faire valoir !
Nous avons confiance en vous, en votre fidélité et en votre engagement pour que vive la CFTC !
Bon retour dans vos foyers et surtout bon travail et bons résultats, dans l'esprit de ces 2 belles journées que nous avons partagées ensemble ! Mes chers amis, à très bientôt sur la route de nos prochains combats !
Source http://www.cftc.fr, le 28 août 2009