Texte intégral
L. Bazin.- "Chanson populaire", dit G. Carlier, c'est le titre de son nouveau livre. C'est assez surprenant l'éloge de G. Carlier vous concernant. Il vous détestait et il affirme que les Français vont désormais vous aimer. Votre sincérité redonne des émotions que l'on croyait perdues. Qu'est-ce qui s'est passé ? Il parle avec émotion de votre cicatrice au genou aussi...
G. Carlier ne m'appréciait pas surtout lorsque j'étais par exemple en débat face à A. Montebourg, puisqu'il est de gauche en fait. Et il explique qu'il a découvert la sincérité de mon engagement politique et mes combats politiques à d'autres occasions. Et donc c'est un peu l'histoire d'une rédemption de G. Carlier.
C'est un ralliement ?
Une rédemption...
Pas encore un ralliement ?
Pas un ralliement mais s'il veut, il n'y a pas de problème.
Bienvenue à l'UMP, G. Carlier !
Je pense qu'il pourrait être bienvenu à l'UMP et approfondir aussi sa connaissance d'autres membres du Gouvernement. Je suis sûr que là aussi, il changerait d'avis.
Oui, parce qu'il est saignant sur d'autres membres du Gouvernement dans le même ouvrage. Justement l'UMP, est-ce que vous partagez l'inquiétude d'un certain nombre de vos amis ? Je cite A. Juppé, je pourrais citer J.-F. Copé, sur la taxe carbone : « Si il s'agit de récupérer 4 ou 5 milliards dans la poche du contribuable, il n'en est pas question ».
Il n'en est pas question, je le confirme aujourd'hui. Il est question, en revanche, de changer notre comportement face au réchauffement climatique et donc, nous nous sommes engagés, le Gouvernement et je rappelle, l'ensemble des candidats à l'élection présidentielle, à mettre en place, à transformer la fiscalité et arriver vers une fiscalité verte. Il n'est pas question évidemment de taxer les contribuables mais bien de transformer notre fiscalité et donc de l'adapter avec cette contribution énergie climat pour que nous changions...
Qui sera bien un impôt, comme dit S. Royal ce matin dans le Parisien. Ce sera bien un impôt, arrêtons de nous cacher derrière des mots.
C'est une transformation de la fiscalité. Sur S. Royal, permettez-moi de vous dire qu'elle a sans doute besoin de reprendre de l'oxygène dans les sondages, parce que même face à D. Strauss-Kahn, elle est tellement bas - je crois qu'on parle de 19 %. Elle est en train de polluer non pas le débat mais son propre engagement. Ce n'est pas la première fois qu'elle renie son propre engagement puisqu'elle avait signé cette charte de N. Hulot au moment de l'élection présidentielle, qui était cette mise en place d'une nouvelle fiscalité verte, donc d'une transformation de la fiscalité. Et voilà qu'elle se renie à nouveau et qu'elle propose un espèce de débat démagogique en disant simplement d'une manière très simple, taxons seulement les producteurs, les grands groupes pétroliers pour arriver à transformer ou à apporter une aide financière aux entreprises. C'est un faux débat parce que le vrai débat, c'est que chacun contribue à protéger la planète.
En cette rentrée, vous dites vous-même que le sujet c'est le pouvoir d'achat. Vous avez même envoyé aux députés un argumentaire, parait-il, "choc" leur disant : défendez les mesures du Gouvernement, on a fait des choses il faut les défendre. Vous pensez que créer une nouvelle taxe c'est une bonne idée ?
Non, je dis que transformer la fiscalité et respecter...
J'entends dans l'esprit mais dans le moment, dans le tempo politique, il faut y aller à toute force ?
Vous savez, nous, à l'UMP, on respecte nos engagements. Le président de la République est toujours très attaché à faire évoluer la France et notamment en ce qui concerne le paquet énergie climat. Il l'avait fait dans le cadre de l'Union européenne et j'observe que c'est aussi un engagement européen de beaucoup de pays. Et donc nous devons transformer notre fiscalité, mieux l'adapter.
Donc ça ne vous inquiète pas, concrètement, à la rentrée pour le pouvoir d'achat des familles ?
Non, puisque, encore une fois, il n'est pas question d'aller grever le pouvoir d'achat des familles.
Quand même...
Non, il est question de transformer la fiscalité.
À 14 euros la tonne, on va avoir par exemple une famille avec deux enfants qui vit en périurbain, comme on dit, ou dans une zone rurale, qui est obligée de prendre sa voiture le matin, qui chauffe au gaz ou au fuel, 140, 150 euros de plus par an. Ce n'est pas rien. C'est l'équivalent d'ailleurs ce que le Gouvernement a donné début juillet pour aider les familles modestes.
D'abord, je veux vous dire nous n'avons pas fini l'intégralité du projet, qu'il y aura encore des réponses à apporter de la part du président de la République sur ce sujet. Mais encore une fois, je le réaffirme devant vous, il s'agit de transformer la fiscalité et que le contribuable, tout comme l'entreprise d'ailleurs, avec cette transformation de la fiscalité, je pense à la taxe professionnelle par exemple pour les entreprises qui verront justement une transformation telle qu'on pourra voir le réajustement et la compensation par rapport à cette fiscalité verte. Idem pour le contribuable. On parle de crédit d'impôt pour le contribuable, on parle de chèque vert. Encore une fois...
Tout ça vous va ? C'est ce que j'entends. Vous qui arrivez avec un drapeau en disant, "je vais défendre le pouvoir d'achat des familles", vous dites la taxe carbone c'est compatible ?
Je continue à le dire devant vous. Non seulement je vais défendre le pouvoir d'achat des familles mais puisque vous m'emmenez sur la rentrée, je vous rappelle que de juin à août, une famille ayant un enfant en primaire et une famille modeste ayant un enfant au lycée, donc deux enfants, aura touché 737 euros avec la prime exceptionnelle de 150 euros versée au mois de juin et l'allocation rentrée scolaire versée au mois d'août. Donc vous voyez, c'est 1,5 milliard pour la rentrée scolaire, c'est 450 millions d'euros consacrés à cette prime exceptionnelle du mois de juin. C'est donc une aide massive apportée par le Gouvernement aux familles modestes qui ont un niveau de revenu qui leur permette de toucher l'allocation rentrée scolaire. C'est près de trois millions de familles, je vous le rappelle.
Il faut attendre d'autres aides ? Par exemple, le Président est en déplacement aujourd'hui dans l'Orne, est-ce qu'il faut attendre de lui de nouvelles aides ?
Le Président est en déplacement dans l'Orne et là aussi, ce déplacement est extrêmement important s'agissant de l'emploi, s'agissant des mesures qui ont été mises en place.
Il est à Faurecia notamment, qui est un équipementier automobile qui a été mis à mal par la crise.
Un équipementier automobile qui a été aidé aussi dans le cadre du plan de relance. Et vous le savez, le président de la République a toujours eu un discours très offensif sur l'industrie, défendre l'industrie en France et donc il sera sans doute amené à faire là aussi des annonces.
Donc on doit attendre aujourd'hui de nouvelles aides de l'Etat vers ces secteurs qui sont en difficulté ?
Vous verrez de quelle manière le président de la République s'exprimera ce matin. Mais en même temps, j'observe que toutes les mesures que nous avons prises pour aider dans cette période de crise économique, notamment d'aide à l'emploi, de retour vers l'emploi et d'aide [inaud.], je pense par exemple aux contrats de transition professionnelle, nous avons aidé plus d'un demi million de personnes fragilisées par la crise rien qu'avec ces mesures emploi. Il y a aussi les mesures du plan de relance, il y a aussi l'ensemble des mesures que nous avons prises avec le plan social et je constate qu'aujourd'hui, plus personne ne remet en cause le plan de relance. Evidemment, le président de la République tirera les conséquences de toutes ces mesures qui ont été mises en place dans cette période de crise, qui nous permettent de mieux tenir le choc. Je rappelle que les Etats-Unis ont triplé leur taux de chômage. Je ne dis pas que c'est fini ou que ce n'est pas difficile, je dis que nous avons fait des choix, des bons choix, qu'il faut continuer de cette manière-là pour privilégier l'emploi, l'entreprise et l'activité.
Je vais venir très près du terrain parce que ça concerne un certain nombre de gens qui aujourd'hui se disent, "c'est compliqué, j'ai des enfants, je pourrais reprendre un travail mais finalement ça me coûte trop cher même, avec le RSA. Le RSA peine à redémarrer, j'ai du mal à faire garder mes enfants". Il manque, disent certaines associations, le chiffre va jusqu'à 300.000 places de crèche en France. On fait quoi ?
La réalité c'est qu'il nous faut arriver d'ici à la fin du quinquennat à mettre en place sur le territoire, 200.000 offres de garde supplémentaire. Pour cela, c'est du concret là aussi, puisque j'ai signé, nous avons signé, l'Etat avec la caisse nationale d'allocations familiales, un engagement de 1,3 milliard d'euros pour arriver à créer l'ensemble de ces places. Des mesures pour les assistantes maternelles, le regroupement d'assistantes maternelles, fiscalité plus avantageuse pour les entreprises pour développer des crèches d'entreprise et également des modes de garde innovants. Je vais inaugurer tout à l'heure les premiers jardins d'éveil, moins de trois mois après avoir lancé le cahier des charges et la méthodologie des jardins d'éveil.
200.000 places créées en trois ans, c'est pratiquement impossible. Les gens vont avoir du mal à vous croire.
Non, ce n'est pas impossible parce que quand je vois le rythme avec lequel l'ensemble des dossiers sont déposés dans les CAF, je vous donne l'exemple des jardins d'éveil, là c'est six projets qui sont déjà finalisés. J'en inaugure un, enfin presque deux aujourd'hui, 100 places sont déjà prêtes. J'ai ces dossiers qui sont déjà prêts. Donc avant la fin du mois d'octobre, six dossiers, 100 places en jardin d'éveil seront inaugurées. Et donc, à ce rythme-là, rien que pour les modes de garde innovants, aussi dans les quartiers difficiles où nous avons lancé avec F. Amara, en priorité sur ces 215 quartiers, une ligne budgétaire pour identifier 1.500 places nouvelles directement au coeur des quartiers, nous avons 380 dossiers déposés. C'est 3.000 places rien que dans les quartiers prioritaires que nous allons développer d'ici à 2011 parce que les dossiers sont là.
Vous allez aider les Français et les Françaises, on y pense parce que c'est souvent de ça dont il s'agit, à pouvoir aller travailler ?
Bien sûr !
Oui, mais au moment de la retraite, on leur enlève des bonifications puisque c'est le projet actuel du Gouvernement. Cela a été confirmé par X. Darcos.
Quelle horreur, ne dites pas ça !
C'est un peu comme ça qu'on l'a lu. Rectifiez, dites-moi.
Vous savez qu'on a eu un arrêt de la Cour de cassation...
On connaît...
Non mais vous dites que vous connaissez donc ce n'est pas un projet du Gouvernement. Il y a un arrêt de la Cour de cassation qui nous rappelle le droit européen parce qu'un père est venu réclamer les mêmes droits, la majoration de durée d'assurance à la retraite que pour les femmes.
Deux ans par enfant.
Et donc nous sommes obligés d'avoir ce débat de conformité égalité hommes-femmes et en ce moment X. Darcos est en train de mener des consultations avec les partenaires sociaux et les associations familiales. Notre objectif est de préserver les intérêts des mères. Pourquoi ?
Donc on le maintient en l'état ?
Non, il faut trouver des dispositifs pour le futur parce que c'est vrai que nous avons maintenant de plus en plus de pères qui participent à l'éducation des enfants, même si sur les 730.000 personnes qui prennent un congé parental, pour l'instant il y a juste 1 % des pères qui s'arrêtent. Mais j'observe que la situation actuelle des femmes, c'est quoi ? La retraite c'est 34 % de moins pour les femmes. L'égalité salariale c'est près de 20 % de moins, et donc, pour ma part, il nous faut trouver et X. Darcos est évidemment d'accord sur ce sujet, des solutions qui permettront de préserver les mères de famille d'une part et par ailleurs...
Autrement dit, on pourrait imaginer, une part à la grossesse, si j'ose dire - je le dis trivialement...
Une part à la maternité...
...Et une part répartie entre conjoints ? Vous validez cette idée ?
C'est un des scénarios possibles, je la validerai quand l'ensemble des scénarios aura été examiné.
Politique, pour finir : F. Fillon confirme que les ministres élus aux régionales devront quitter le Gouvernement, c'est bien ?
Oui, parce que vous voyez, au Parti socialiste, à La Rochelle...
Cela coince un peu quand même...
A La Rochelle, on nous explique qu'ils ne sont pas prêts, alors ils veulent débattre sur le cumul des mandats mais ce n'est pas pour les prochaines échéances. Alors que nous les régionales, c'est très bientôt, c'est mars prochain et nous prenons déjà des décisions. C'est-à-dire qu'on ne pourra pas être président de région et membre du Gouvernement. Donc sur le cumul nous sommes très clairs, mais nous tout de suite, parce que nous ne sommes pas que dans le débat, nous sommes dans l'action et surtout dans le respect des engagements. Donc quand on devient président de région, on reste conforme à l'engagement vis-à-vis des électeurs, on s'occupera de la région, on quitte le Gouvernement.
D'accord. Tant pis pour B. Hortefeux s'il décide d'être candidat, tant pis pour N. Sarkozy s'il décide qu'il a besoin de lui au ministère de l'Intérieur ?
B. Hortefeux a fait un choix. Il semblerait qu'il se consacrerait au ministère de l'Intérieur, tout comme moi j'avais choisi de me consacrer à mon ministère parce que je venais d'entrer au Gouvernement et qu'il me semblait très lourd de pouvoir briguer la région Lorraine parce que je sais que cette région a besoin d'un exécutif à temps plein, d'un président à temps plein. Et donc je serai candidate aux régionales mais pas à la présidence de l'exécutif. J'apporterai évidemment toutes mes convictions, tout mon appui à cette région que j'aime et dans laquelle j'habite.
Mais vous resterez au Gouvernement si le Président veut ?
Je travaillerais au Gouvernement si, encore une fois, vous avez raison de le dire, le Président a besoin de mes compétences au sein de ce Gouvernement.
Oui parce que, comme il l'a dit hier aux policiers et aux gendarmes, ceux qui sont fatigués peuvent s'en aller. Vous en voyez qui sont fatigués autour de vous ?
Non, mais je pense que c'est vrai qu'il faut rappeler que c'est le président de la République qui décide et que c'est une réalité. Lorsque vous entrez au Gouvernement, il faut savoir qu'un jour ça peut s'arrêter. Il faut en avoir conscience.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 3 septembre 2009