Interview de Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé et des sports, à LCI le 2 septembre 2009, sur l'épidémie de grippe A, notamment la livraison et l'autorisation administrative de mise en circulation des vaccins et le risque de vente de médicaments de contrefaçon.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : La Chaîne Info

Texte intégral


 
 
 
C. Barbier.- R. Bachelot, bonjour.
 
Bonjour C. Barbier.
 
Avant de parler grippe A, bien sûr, un mot de la taxe carbone. Vous avez été ministre de l'Environnement, approuvez-vous ceux qui, à droite, J.-F. Copé, A. Juppé ce matin, disent : « Attention, pas d'impôt nouveau » ?
 
Je crois qu'il est de toute façon très important de créer une fiscalité écologique, étant donné les enjeux qui nous attendent, tant sur les problèmes de pollution, de réchauffement climatique. Alors, nous sommes dans la collectivité nationale, et par le débat public, en train d'en fixer les limites. Je ne vais pas intervenir, moi, ministre de la Santé, dans le débat, mais ce que je sais en tant que ministre de la Santé, c'est l'impact des problèmes environnementaux, des pollutions environnementales sur les questions de santé, donc je suis très attachée à ce qu'une fiscalité écologique nous permette de combattre ces désordres.
 
Alors, venons-en à la grippe A. Des chercheurs américains l'affirment : le virus H1N1 ne mutera pas au contact des souches 2009 de grippe classique, de grippe saisonnière. Vous confirmez cette information ?
 
Ecoutez, pour l'instant, il y a beaucoup de querelles d'experts. Je les regarde avec intérêt. Autour de moi, il y a un certain nombre d'experts scientifiques, qui sont des aides à la décision, bien entendu ; nous avions encore une réunion, tard hier soir, avec un certain nombre d'experts. J'essaie de dégager le maximum de consensus scientifiques, c'est la raison d'ailleurs pour laquelle, pour fixer la stratégie vaccinale, il va y avoir une saisine, demain, du comité technique des vaccinations, où il y a un certain nombre d'experts, et à suivre, le 7 septembre, du Haut conseil de santé publique, qui va définir les publics prioritaires, la façon de vacciner.
 
C'est le 7 septembre que l'on aura une liste précise des Français qui seront vaccinés en priorité.
 
Voilà, c'est-à-dire qu'il y aura des listes de priorités. Bien sûr, le Gouvernement fixera, à partir de ces éléments scientifiques, la stratégie de vaccination.
 
Est-il vrai que le ministère de l'Intérieur vous demande de vacciner les forces de l'ordre en priorité, parce qu'on craint que si les effectifs de police sont alités, la délinquance flambe ?
 
Alors, il y a effectivement, dans les publics prioritaires, un certain nombre de publics qui sont en contact avec les malades ; on pense évidemment aux personnels de santé tout d'abord, peut-être aux personnels de police ou de sécurité, en tout cas, moi, ce que je veux dire, c'est que je veux donner dans ce domaine, la priorité aux personnels de santé, avant les personnels de sécurité.
 
Pourquoi l'autorisation de mise sur le marché se fait-elle autant attendre ? On nous avait parlé de la mi-septembre, puis de la fin septembre, maintenant c'est le mois d'octobre, il ne faut pas autant de temps pour vérifier que le médicament est efficace ?
 
C. Barbier, dans une autorisation de mise sur le marché, non seulement on vérifie l'efficacité, mais on vérifie aussi l'innocuité du produit que l'on va prescrire, que l'on va donner...
 
Des craintes sur les effets secondaires ?
 
Non, mais pour n'importe quel médicament, on fait ces éléments. Moi, je trouve au contraire que cela va vite, que cela va à un très bon rythme. Nous avons évidemment la saisine de l'Agence européenne du médicament, puis de la Commission européenne, puisque ces procédures sont largement européennes et nous sommes à peu près dans les temps des autorisations de mise sur le marché, qui vont à un bon rythme, mais que nous n'obtiendrons pas. Il y a les livraisons de vaccins que nous commençons à enregistrer, mais de toute façon, il n'a jamais été envisagé d'avoir d'autorisation de mise sur le marché avant, globalement, le milieu d'octobre.
 
Et si l'épidémie flambe vers la fin septembre, eh bien vous mettrez des vaccins en circulation, sans autorisation ?
 
Non. Actuellement, la question ne se pose pas, quand on voit que nous avons affaire à un virus relativement peu sévère, et la vaccination restera toujours d'actualité, même si nous enregistrions un pic épidémique consécutif à la rentrée, qui fait qu'effectivement il y a plus de promiscuité, pas seulement dans les écoles mais aussi dans les entreprises. La vaccination serait toujours d'actualité.
 
Est-ce qu'avec cette autorisation administrative, on n'est pas en train de protéger, surtout, les intérêts de tel ou tel labo qui n'est pas tout à fait prêt ?
 
Ecoutez, la question ne se pose absolument pas dans ces termes. Moi, ce que je veux, c'est avoir le plus rapidement possible des vaccins qui permettent à la fois de protéger mes concitoyens les plus fragiles et évidemment de protéger ceux qui les entourent et ceux qui sont responsables d'un certain nombre de fonctions vitales. Alors, véritablement, ce scénario que vous décrivez est absolument impossible dans la structuration actuelle de l'industrie pharmaceutique, et dans la structuration, surtout, des autorités qui délivrent ces autorisations.
 
Comment ferez-vous pour empêcher la vente sur Internet ou le marché noir, en matière de vaccin, de Tamiflu ou de contrefaçons ?
 
Eh bien je ferai la même information que celle que je fais pour d'autres produits. Jamais, évidemment, d'achat dans les circuits parallèles, les circuits ne sont pas garantis et c'est effectivement, en général, des produits de mauvaise qualité, quand ils ne sont pas parfois mauvais pour la santé.
 
1,5 milliard d'euros, c'est le coût de la lutte contre cette grippe A, plus évidemment tout ce que ça coûtera à la Sécurité sociale s'il y a beaucoup de malades, beaucoup de consultations, des hospitalisations. Est-ce qu'il faudra une taxe spéciale, comme il y a eu un impôt sécheresse il y a longtemps, eh bien un impôt grippe A ?
 
Nous n'en sommes pas là. Nous étudions, évidemment, tout cela, avec le Gouvernement, avec le président de la République. Mais vous savez, C. Barbier, il faut toujours faire deux colonnes : il faut faire évidemment la colonne du coût de la protection contre la grippe A, mais il faut faire aussi le coût de l'argent, enfin, le détail de l'argent économisé, et protéger nos concitoyens, dans leur santé, c'est évidemment tout à fait primordial. Il faut aussi - et ça je tiens à le redire - que nous nous fassions vacciner, du moins les publics prioritaires, contre la grippe saisonnière. La grippe A H1N1 n'a pas remplacé la grippe saisonnière. Je vais lancer la campagne sur la grippe saisonnière le 18 septembre, et il conviendra que les personnes, en particulier les plus âgés d'entre nous, qui reçoivent des bons de vaccination gratuits, sur la grippe saisonnière, se fassent vacciner contre la grippe saisonnière.
 
Alors, vous êtes, dit-on, peut-être candidate à la tête de liste UMP pour les élections régionales en Pays de la Loire. Les ministres élus devront quitter le Gouvernement pour présider les régions, mandat unique. Vous appliquerez cette règle ?
 
Ah, mais ce n'est pas moi qui vais décider d'appliquer cette règle, c'est le président de la République. Moi, j'ai été candidate à la candidature, ce sont évidemment les sympathisants, les militants de l'UMP qui ont décidé de me porter à la tête, chef de file des élections régionales, et puis évidemment nous envisagerons cela, le président de la République en décidera. Moi, ce que je sais, c'est qu'effectivement je suis tout à fait capable d'être à la fois ministre et présidente de région. Je signale d'ailleurs que j'ai un certain nombre de collègues au Gouvernement qui sont présidents de Conseils généraux ou qui sont maires de grandes villes et qui, je crois, font très correctement leur travail. C'est ensuite une décision politique, qui sera prise par le président de la République, mais vous savez, avant, C. Barbier, il faut gagner. Moi, ce n'est pas ce débat-là qui est important, le débat qui est important, c'est le débat du projet que nous voulons pour une région, c'est le débat de l'équipe qui sera autour de moi pour faire vivre ce projet, régional, le reste...
 
L'équipe, ça sera P. de Villiers ?
 
Le reste...
 
Ça sera les villiéristes...
 
Bien sûr, mais d'ailleurs...
 
Vous les accueillez à bras ouverts ?
 
Non seulement je les accueille à bras ouverts, mais nous travaillons ensemble depuis des années. Souvenez-vous qu'en 2004, lors de la campagne régionale, nous étions, j'étais aux côtés de P. de Villiers et de F. Fillon, pour mener ce combat régional.
 
R. Bachelot, merci, bonne journée.
 
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 3 septembre 2009