Interview de M. Martin Hirsch, Haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté et à la jeunesse, à RTL le 17 septembre 2009, sur la suppression du poste de défenseur des enfants.

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Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral

V. Parizot.- On supprime le poste de défenseur des enfants pour le fondre dans un poste plus large de défenseur des droits en général. Mais je ne sais si vous avez les réactions des associations, jusqu'à l'Unicef : elles sont scandalisées.
 
Oui, j'ai vu les réactions. Je voudrais mettre les choses au point : on fait cela pour les enfants soient mieux défendus, avec plus de force, avec plus de poids, avec plus de droits, avec plus de pouvoir.
 
C'est un peu paradoxal : pour mieux les défendre, on supprime le poste de défenseur des enfants. Alors, expliquez nous.
 
Je vais vous expliquer ça. Quand la Constitution a été retravaillée il y a deux ans, on avait une commission qui s'est demandé comment on pouvait donner plus de pouvoir au Parlement. Il y a quelque chose qui a émergé, qui était le fait qu'il fallait plus de droit pour défendre les citoyens, plus de contre-pouvoirs. Et il est écrit dans ce rapport d'il y a deux ans, les uns les autres se marchent sur les pieds, entre le médiateur de la République, le défenseur des enfants, différentes institutions, qui sont trop fragiles pour pouvoir véritablement peser. Et donc, il parle de dilution de responsabilité. Et puis, il explique très bien que, par exemple, le défenseur des enfants, pour pouvoir agir, doit forcément passer par le médiateur de la République. C'est pour ça qu'il propose de faire un grand défenseur des droits inscrits dans la Constitution. C'est dans la Constitution il y a un an, et il y a huit jour, pas hier, il y a huit jours, passe le projet de loi au Conseil des ministres, qui va créer cette nouvelle institution avec plus de pouvoirs.
 
Projet de loi, avec cette conséquence que D. Versini a découvert sur le moment, ce qui l'a un peu étonnée. Et puis surtout, elle dit, "Attention, mon poste a fait ses preuves". Je vous propose de l'écouter.
 
D. Versini : C'est une institution qui a fait ses preuves, depuis la création en 2000 par C. Brisset, qui a été à l'origine de différentes propositions de loi. C'est une institution qui a géré 20.000 situations d'enfants qui étaient dans des situations très difficiles. Une institution qui est reconnue au niveau européen, qui est reconnu par le comité des droits de l'enfant des Nations unies. Je vais prendre la présidence, cette semaine, du réseau européen des défenseurs des enfants ; nous sommes 35 défenseurs des enfants européens. Oui, c'est une institution reconnue et je peux vous dire que de partout, c'est la stupeur.
 
Voilà pour la défense. Je voudrais vous demander si fondre cette institution de défenseur des enfants dans quelque chose de plus vaste de défenseur des droits, ne risque pas de noyer, finalement ce système. 20.000 enfants en ont profité...
 
Ils n'en ont pas profité, ils ont juste eux, effectivement, à faire valoir des droits. Mais encore une fois, ils auront plus de droit. D. Versini a raison de dire que C. Brisset, qui a créé cette institution, l'a portée très haut. Mais par ailleurs, je lisais les interviews de D. Versini, maintenant, où elle explique "je ne peux discuter, échanger qu'avec le président de la République", alors qu'elle a vu plusieurs membres du Gouvernement ces derniers jours, qu'on se voit bientôt, etc. Donc je pense qu'il faut évacuer la question personnelle de D. Versini...
 
Vous pensez qu'elle l'a mal pris, qu'elle est vexée ?
 
J'ai l'impression qu'il y a une petite chose qui est un peu personnelle derrière. L'idée de défenseur des droits qui s'occupe de tout, c'est J. Lang qui l'a eue. J. Lang, il n'est pas infanticide. Et J. Lang n'a pas fait cela pour affaiblir la fonction. C'est J. Lang qui l'a eue, c'est quelque chose qui va être porté. Cela s'inspire des pays, des démocraties les plus avancées, dans lesquelles il y a ce qu'on appelle "Ombudsman", qui est celui qui peut défendre l'ensemble des droits. Et je vais vous donner un exemple très concret.
 
Très vite...
 
Oui, très vite mais c'est important, c'est tous les enfants et j'en parlerai avec les associations, je recevrai l'Unicef pour en discuter avec eux. Jusqu'à présent, le défenseur des enfants ne pouvait pas donner d'ordre à l'administration. S'il y avait un enfant qui était en prise avec une administration, un conseil général, l'Etat, il ne pouvait pas. Le défenseur des droits pourra le faire, pourra donner l'ordre, en disant "ça doit cesser tout de suite". Donc c'est plus fort, c'est plus solide et je suis sûr qu'on en convaincra l'Unicef et les associations et que ce sera beaucoup plus protecteur pour les enfants.
 Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 17 septembre 2009