Déclaration de M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat à la défense et aux anciens combattants, sur les actions en faveur des harkis, à Paris le 13 octobre 2009.

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  • Hubert Falco - Secrétaire d'Etat à la défense et aux anciens combattants

Circonstance : Réunion de travail avec les représentants des principales associations harkies, à Paris le 13 octobre 2009

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,

Je voudrais vous dire tout le plaisir que j'ai à vous accueillir cet après-midi. Pour beaucoup d'entre vous, nous nous sommes rencontrés aux Invalides, le 25 septembre, et nous avons pu faire connaissance au cours de la journée nationale d'hommage aux Harkis.
Il y a un temps pour tout. Il y a un temps pour la mémoire. Il y a un temps pour le travail. Et si j'ai souhaité vous retrouver cet après-midi c'est pour travailler, c'est-à-dire pour voir comment l'on peut faire avancer concrètement les dossiers qui nous préoccupent.
Je n'ai aucun préjugé. Je n'ai aucun a priori. Ce que je sais, en revanche, c'est que la seule manière de progresser, la seule manière de trouver de vraies solutions, c'est d'y travailler ensemble.
Je suis là pour vous écouter. Je suis là pour que nous confrontions nos idées et que nous le fassions le plus librement du monde. Sans aucun tabou, mais, si vous le permettez, toujours dans la confiance.
Je suis là aussi pour que nous prenions les problèmes les uns après les autres et que nous essayons, ensemble, d'y apporter des solutions.
Le Président de la République et le Premier ministre m'ont confié des responsabilités par rapport aux harkis et aux rapatriés : je prends cette mission très au sérieux. Et je n'ai qu'un seul objectif : agir.
Agir pour que les harkis et leurs enfants voient leur situation s'améliorer.
Agir, le cas échéant, pour que des mesures de justice soient prises.
Agir, enfin, pour que la mémoire des harkis soit pleinement reconnue et que leur honneur soit respecté partout en France.
C'est ce qui me motive et c'est ce qui me tient à coeur.
J'ai déjà pris devant vous, aux Invalides, un certain nombre d'engagements concrets.
Il y a le Plan Emploi, qui a déjà permis de ramener plus de 1 400 personnes : ce n'est pas rien... Mais il y a encore beaucoup à faire. Et nous allons le faire.
Tout d'abord, nous allons proroger ce Plan jusqu'à la fin de l'année 2010, afin qu'un nombre plus important d'enfants de harkis puissent en bénéficier.
Ensuite, des emplois réservés sont disponibles depuis le mois de juin dernier.
Les enfants de harkis peuvent désormais s'inscrire sur une liste d'aptitude pour accéder à ces emplois dans les trois fonctions publiques, en étant prioritaires sur les autres bénéficiaires, et sans condition d'âge. J'entends mobiliser l'ONAC, les préfets et l'ensemble des administrations pour que le dispositif ait une efficacité maximale.
Par ailleurs, je vais demander que soit mise en place une mission d'inspection destinée à apprécier l'efficacité réelle du dispositif institué pour la mise en oeuvre du plan emploi par la MIR, les services déconcentrés de l'Etat et les associations de rapatriés harkis. Il semble en effet que les résultats restent encore trop inégaux d'un département à l'autre. J'entends faire en sorte que ce rapport d'inspection me parvienne dans les meilleurs délais pour cibler les améliorations souhaitables.
Enfin, nous allons mobiliser l'association « Carrefours pour l'emploi » pour nous aider à faciliter l'accès des enfants de harkis au marché du travail. Cette association, qui couvre un large spectre d'entreprises et de secteurs d'activités, a fait la preuve de sa très grande efficacité en matière d'aide à l'accès et au retour à l'emploi. Nous souhaitons mobiliser ce savoir-faire au profit de la communauté harkie. A cette fin, une mission précise va être assignée à « Carrefours pour l'emploi » : accompagner et faire un suivi de chaque personne concernée, mais aussi, dans chaque bassin d'emploi, organiser des actions spécifiques pour toucher tous les enfants de Harkis.
C'est un engagement concret. Nous allons gagner en efficacité et réussir, avec les enfants de Harkis, le pari de l'emploi.
Il y a aussi la création de la Fondation pour la mémoire de la Guerre d'Algérie.
Trois grandes associations (le Souvenir Français, les Gueules Cassées, la Fédération Maginot) ont confirmé leur participation financière. L'Etat a lui-même inscrit la sienne au budget.
Au total, ce sont sept millions d'euros qui vont permettre de lancer cette grande Fondation.
Son objectif sera d'entretenir la mémoire de la guerre d'Algérie et, notamment, de transmettre l'histoire des Harkis aux générations futures.
Ce sera une Fondation indépendante, qui sera dotée d'un conseil scientifique, composée d'historiens et d'universitaires. Son président sera une personnalité incontestable.
Dès aujourd'hui, nous avons une question : comment, dans chacune de nos villes et de nos départements, recueillir la mémoire des Harkis ?
C'est un travail immense qui nous attend, mais c'est un enjeu exceptionnel pour que cette mémoire si importante soit transmise aux générations futures et qu'elle ne disparaisse pas...
C'est cette Fondation qui aura la charge d'entretenir la mémoire de ce qui s'est passé en 1962, quand des dizaines de milliers de Harkis ont été abandonnés en Algérie et ont été livrés, sans défense, à la main de leurs bourreaux. C'est une page extrêmement douloureuse de l'histoire de France.
Nous devons l'aborder sans rien cacher et sans rien taire. Car, je voudrais vous le redire cet après-midi : le devoir de mémoire exige le devoir de vérité.
Je ne veux pas préjuger du travail de la Fondation, mais il est quasiment certain qu'elle fera travailler des historiens sur ce sujet, afin que l'histoire de tous les Harkis et de ceux qui ont été tués en 1962 soit mieux connue de nos compatriotes.
La première des reconnaissances, c'est la connaissance.
Après, d'autres questions se posent, et nous sommes là pour en parler. Comment la reconnaissance de la Nation peut-elle s'exprimer envers les Harkis victimes des massacres de 1962 ? Par une cérémonie officielle aux Invalides ? Par la construction d'un monument ?
Là encore, nous allons en discuter librement et en confiance. Et nous allons essayer d'avancer.
Il y a un point - et c'est le dernier que je veux évoquer devant vous - sur lequel il me tient particulièrement à coeur d'avancer très vite, c'est la modification de l'article 5 de la Loi du 23 février 2005. Les tribunaux pourront condamner ceux qui diffament et injurient les Harkis, et les associations pourront se constituer partie civile. Là, c'est vraiment une question d'honneur.
J'avais dit que j'étais là pour vous écouter. J'ai évidemment parlé trop longtemps. Je voudrais simplement, pour conclure, vous remercier de votre présence à cette première réunion.
Et si je dis « première », c'est qu'il y en aura d'autres. Et elles nous permettront d'avancer ensemble.
Maintenant, à vous la parole.

source http://www.defense.gouv.fr, le 15 octobre 2009