Déclaration de M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat à la défense et aux anciens combattants, sur les combattants de la Première Guerre mondiale et sur la réconciliation franco-allemande, au Vieil Armand le 4 novembre 2009.

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Circonstance : Déplacement au Vieil Armand (Hartmannswillerkopf, Vosges), le 4 novembre 2009

Texte intégral

Mon Général,
Monsieur le Député (Michel SORDI),
Monsieur le Sénateur (Jacques MULLER),
Mesdames, Messieurs,
Nous sommes réunis aujourd'hui dans l'un des lieux les plus terribles de la Première Guerre mondiale.
Il y a 95 ans, le 25 septembre 1914, la 1ère brigade du 28ème bataillon de chasseurs alpins prenait position sur ce sommet.
Dès lors, commençait une lutte sans merci entre l'armée française et l'armée allemande. Elle allait durer toute la guerre.
Les assauts, les échanges d'artillerie, les offensives et les contre-attaques : ce fut, pour ces hommes, un déferlement de fer et de sang.
20 000 soldats, français et allemands, sont tombés ici. Et c'est leur mémoire que nous sommes venus honorer.
Ils avaient vingt ans à peine. Ils avaient des rêves et des espoirs. La vie les appelait. Et ils ont tout donné, jusqu'à leur vie même.
Le sacrifice qu'ils ont accompli ici, sur cette terre d'Alsace, est certainement le plus grand auquel un homme puisse jamais consentir. Ils méritent notre respect et notre reconnaissance. Ils méritent que l'on veille sur leur mémoire et que jamais leur souvenir ne s'efface.
Le Vieil-Armand, c'est l'autre montagne sacrée de l'Alsace.
La nécropole nationale, qui y a pris place dès 1921, nous rappelle la dette que nous avons envers les générations passées.
Elle nous rappelle l'histoire douloureuse d'une région meurtrie, dans ses paysages comme dans sa chair, par les conflits qui déchirèrent, au XXIe siècle, le continent européen.
Elle nous rappelle, enfin, que la paix entre les nations n'est pas une chose acquise. La paix a un prix que les hommes, inhumés dans cette nécropole, ont payé de leur vie.
Les combattants de la Grande Guerre, ceux qui avaient eu la chance de survivre à l'enfer des tranchées, virent, vingt ans après 1918, l'Europe s'embraser à nouveau. Il n'y avait alors, pour ces générations-là, qu'un seul horizon : la guerre.
Aujourd'hui, il n'y a, pour nous qui vivons dans une Europe réconciliée, une Europe unie, qu'un seul horizon : la paix.
Mesurons pleinement la chance que nous avons. Le devoir de mémoire, s'il exige le recueillement, nous invite toujours à l'action. Car le devoir de mémoire n'est pas tourné vers le passé. C'est un devoir d'humanité.
Alors, renforçons les liens qui nous unissent à l'Allemagne. Ici, en Alsace, sur cette terre rhénane, on le sait plus que partout ailleurs : il n'y a pas de progrès possible en Europe sans une entente parfaite entre nos deux pays. Faisons vivre ce que Pierre PFLIMLIN appelait le « miracle » de la réconciliation franco-allemande.
Continuons à construire l'Europe. Elle est notre avenir, celui de nos enfants et des générations futures.
Mais n'oublions jamais !
N'oublions jamais que ces soldats, morts au champ d'honneur, étaient nos pères et nos grands-pères.
N'oublions jamais le sacrifice de ceux qui sont tombés, comme ces milliers de soldats qui reposent ici au Vieil Armand. Car c'est à eux que nous devons de vivre aujourd'hui en paix.
N'oublions jamais que les jeunes générations, celles qui n'ont pas vécu la guerre, perdront de vue l'importance de la réconciliation franco-allemande si nous ne leur transmettons pas la mémoire des conflits.
Ce lieu terrible, ce lieu de mémoire, ce lieu de recueillement porte aussi une grande promesse. Le général Tabouis a voulu, dans les quelques années qui ont suivi la guerre, élever au-dessus du monument une croix visible des deux côtés du Rhin en signe de la réconciliation franco-allemande. Ce lieu est un lieu de mémoire partagée. Ce lieu est un lieu d'espoir.
Dans cinq ans à peine, en 2014, les événements que nous commémorons aujourd'hui auront atteint les cent ans. Les vétérans de la Grande Guerre ont hélas tous disparu. Voilà que nous sommes passés de la mémoire, celle que portaient et incarnaient les anciens combattants de 14-18, à l'histoire, celle que la communauté nationale doit entretenir et transmettre.
C'est la raison pour laquelle nous lançons collectivement aujourd'hui la restauration de la nécropole nationale du Vieil Armand.
C'est un projet d'importance, qui comprend la rénovation du monument national, la mise en valeur des vestiges du champ de bataille et la construction d'un historial franco-allemand.
C'est un projet qui a du sens, puisque nous rendons hommage aux morts et que nous transmettons aux générations futures le message qu'ils nous laissent : « Plus jamais ça ! ».

source http://www.defense.gouv.fr, le 24 novembre 2009