Texte intégral
Messieurs les ministres,
Messieurs les députés,
Monsieur le gouverneur,
Madame et Messieurs les directeurs,
Messieurs les Présidents,
Mesdames, Messieurs,
Avant que ne se déroulent les échanges prévus par l'ordre du jour de ce Comité national de l'euro -échanges auxquels j'aurai, pour partie, le plaisir d'assister-, permettez-moi de partager avec vous quelques réflexions sur l'introduction de l'euro fiduciaire. A moins de 250 jours de la mise en circulation des pièces et des billets en euro, j'ai souhaité participer aux travaux de votre instance pour souligner à nouveau l'importance que le Gouvernement tout entier attache à la réussite de cette réforme monétaire historique.
Je voudrais tout d'abord exprimer une conviction : l'introduction physique des euros est indispensable au plein accomplissement de l'Union économique et monétaire.
Certes, les Français ont déjà commencé à profiter des effets positifs de la monnaie unique, puisque la fin des dévaluations compétitives en Europe, la baisse des taux d'intérêt, la protection contre les effets des crises financières internationales ou ceux des variations erratiques du dollar ont été bénéfiques pour notre croissance.
Mais ces bénéfices sont étroitement liés à la perspective de l'euro fiduciaire. La confiance dans la monnaie n'existe que si cette monnaie a une traduction physique, quand bien même la grande majorité des paiements s'effectuerait par la voie scripturale. Si nous devions reporter la mise en circulation des espèces en euro, peu de temps serait nécessaire pour que le doute s'installe dans l'esprit des Européens et sur les marchés. Le projet serait mis en cause dans son ensemble. Très vite, la volonté politique des Etats serait suspectée et l'édifice européen fragilisé.
L'arrivée des billets et pièces en euro dans douze pays européens, mais aussi, très rapidement, dans les poches des Américains, des Japonais ou des Européens de l'Est, est la condition de la pleine affirmation de l'euro comme monnaie mondiale. C'est aussi sans doute celle de son renforcement contre le dollar, de la poursuite de l'abaissement des taux d'intérêt, ou encore de l'unification des prix des biens et des services, sans distorsion ni dumping, en faveur des consommateurs. L'introduction physique de l'euro est donc un acte par lequel l'Europe affirme son identité politique et économique, au bénéfice de tous les Européens.
Sur un plan pratique, l'échéance du 1er janvier prochain -il faudrait même plutôt parler du 31 décembre 2001- constitue moins le début d'une période que la fin d'une autre. L'introduction des espèces en euro viendra couronner les préparatifs auxquels chacun aura contribué d'ici là.
La mise en circulation des pièces et des billets en euro nous mobilise tous.
Cette grande opération est l'affaire de tout le Gouvernement. Laurent FABIUS, le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie -que je remercie de son accueil- est, en raison de ses fonctions, plus directement en charge de l'introduction de l'euro. Il s'y consacre avec une énergie et une détermination que je tiens à saluer.
Mais ce sujet comporte également de nombreux aspects qui touchent l'ensemble de l'activité gouvernementale. Depuis 1997, de très nombreuses réunions interministérielles ont préparé le passage à l'euro financier et, depuis 1999, le mouvement vers l'euro pratique. A chaque étape, de très nombreuses décisions ont été prises, souvent en Conseil des ministres -comme, par exemple, dès 1998, le vote des dispositions comptables et de droit des sociétés nécessaires ; en 2000, l'adoption d'une ordonnance intégrant dans notre législation les quelque 700 seuils monétaires qui méritaient un arrondi en euro ; ou, depuis le 1er juillet 2000, la passation en euro de tous les marchés publics dont l'échéance est postérieure au 1er janvier 2002. Je pense aussi à la priorité absolue que nous avons décidée, en novembre 2000, pour les travaux informatiques liés à l'euro entre juillet 2001 et mars 2002 dans l'administration, sans oublier la paye des fonctionnaires en euro dès le 1er juillet 2001.
Lors des réunions bimensuelles des ministres, l'euro pratique a été évoqué à de multiples reprises et il le sera de plus en plus fréquemment. D'ailleurs, la réunion des ministres d'hier lui a été toute entière consacrée. J'ai demandé aux ministres de continuer à conduire, chacun dans leur domaine, des opérations de promotion et d'explication de l'euro. Dans chaque cabinet ministériel a été désigné, à l'automne dernier, un conseiller en charge de ce dossier.
Beaucoup a donc déjà été accompli, sous l'impulsion des pouvoirs publics et avec le concours, grâce à vous, des entreprises, des banques, des commerçants et des consommateurs. Je pourrais multiplier les exemples qui en témoignent. Un récent rapport de la Commission européenne confirme que la France est plutôt en avance sur les autres pays de la zone euro pour la préparation de l'introduction des espèces en euro -en particulier pour ce qui concerne les administration publiques. Dans nombre de cas, les mesures que nous avons prises ont d'ailleurs fait école chez nos voisins. En outre, nous avons été les premiers à placer l'euro pratique au centre des priorités de la Présidence de l'Union. C'est à notre initiative qu'est suivi, depuis septembre dernier, un tableau de bord mensuel des préparatifs dans les douze pays concernés.
La mobilisation de tous les acteurs économiques doit se poursuivre. Comme vous, je peux regretter que la période transitoire, à tout le moins les années 1999 et 2000, n'ait pas été mieux mise à profit -y compris par les acteurs économiques eux-mêmes- pour préparer nos concitoyens à l'euro. Je ne crois pas du tout que cette échéance soit mal préparée. Beaucoup a été fait. Les pouvoirs publics, en particulier, se sont fortement mobilisés. Mais beaucoup reste à faire. Cette réforme, nous la réussirons ensemble, notamment au sein de votre Comité dont je salue le travail. La solidarité entre nous est essentielle.
L'aspect le plus préoccupant est un certain retard des PME et, surtout, des plus petites d'entre elles. Le passage à l'euro implique un certain nombre de changements de leur part, simples sans doute, mais qu'il faut anticiper. Cela demande de trois à six mois. Les pouvoirs publics et les organismes professionnels ont déjà accompli un gros effort d'information. Ainsi, plusieurs millions de dépliants ont été distribués. Tous nos services sont fortement mobilisés. Mais le passage à l'euro, lui, doit être décidé par les responsables de ces entreprises eux-mêmes. Nous devons les uns et les autres -et je le fais moi-même ici aujourd'hui- insister auprès de ces entreprises pour engager désormais, sans tarder, le passage à l'euro pratique.
Pour leur part, les administrations publiques continuent leur préparation. Celle-ci se fait au rythme relativement soutenu qui est le sien depuis plusieurs années, sous l'égide de la mission interministérielle placée auprès du ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie. Cette année, l'accent est mis sur l'informatique et la formation des agents, puisque la publication de tous les nouveaux seuils réglementaires sera achevée d'ici fin juin. Dès la prochaine rentrée scolaire, les enseignants utiliseront l'euro à la place du franc dans leurs cours. Le passage à l'euro des organismes sociaux est également déjà bien avancé. Je relève, par exemple, que toutes les URSSAF travailleront en euros à partir du 1er juillet et les organismes d'assurance maladie à compter du 1er octobre. Je souhaite que les organismes sociaux soient exemplaires, parce qu'ils sont en contact avec tous les Français, notamment les plus démunis d'entre eux.
Le Gouvernement informe nos concitoyens pour que l'introduction de l'euro ne fasse pas d'exclus. La communication vers le grand public a été relancée en janvier dernier. Dans quelques jours, 27 millions d'exemplaires d'une nouvelle brochure simple et pédagogique seront envoyés au domicile des Françaises et des Français. En outre, une information spécialisée à destination des publics les plus fragiles et une action démultipliée au niveau local, grâce à la formation de personnes-relais, ont été mises en uvre.
Cette opération ne doit pas faire de perdants. Tel est l'objectif du travail de conversion des seuils, législatifs et réglementaires. Même si le Gouvernement n'a pas d'inquiétude particulière sur la conversion des prix et donc sur les risques d'inflation, le ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie mettra en place des contrôles inopinés pour vérifier le respect des règles d'arrondis, notamment lors des soldes au début de 2002. En outre, les observatoires départementaux de l'euro fourniront, grâce à des commissions spécialisées, un espace de résolution amiable des litiges éventuels. La compréhension des nouveaux prix en euro devra être facilitée par le développement de l'affichage majeur dès cet automne et, surtout, par une refonte rapide des prix psychologiques. Je demande aux administrations publiques de travailler, pour ce qui les concerne, dans cette direction. Le développement de l'usage de l'euro scriptural dès cet automne sera facilité si ce travail est accompli au préalable.
Deux principes doivent nous guider collectivement : faciliter cette opération pour tous les Français et en assurer la sécurité.
Je répète ce que j'ai eu, tout comme le Président de la République, l'occasion de souligner il y a près d'un an : l'échange des pièces et des billets en francs contre leur équivalent en euro, prévu entre le 1er janvier et le 30 juin 2002, doit être facile et gratuit. Il est déjà acquis qu'il en sera ainsi, dans les banques -qui ont ici un rôle fondamental-, jusqu'au 17 février 2002, mais je souhaite que la somme que chacun pourra, le cas échéant, échanger hors de son propre réseau bancaire soit fixée à un niveau un peu plus élevé que les 2.000 francs dont il est actuellement question. En outre, les Français qui apporteront des espèces en francs à leur banque, entre le 18 février et le 30 juin 2002, devront pouvoir, s'ils le désirent, se voir proposer gratuitement des espèces de même montant en euro et non obligatoirement une inscription sur leur compte. Je souligne que la disposition que nous venons de faire voter à l'Assemblée nationale, à la demande de la profession bancaire et pour la rassurer sur l'application des mesures anti-blanchiment, vise un seuil de 10.000 euros. Je note également que cette disposition devrait s'appliquer jusqu'au 30 juin 2002.
Les banques occupent naturellement une place centrale pour l'échange des francs contre des euros. Ce n'est pas -à l'évidence- la fonction des commerces. Le secrétaire d'Etat chargé des PME, du Commerce, de l'Artisanat et de la Consommation, François PATRIAT, a souligné, lors de la remise du plan de sécurité, que les commerçants souhaitaient faire peu d'opérations mêlant les euros et les francs, mais surtout des opérations uniquement en euros.
Pour cela, il faut que les Français disposent d'assez d'espèces en euros dès le 1er janvier 2002. C'est dans ce contexte que je suis favorable à la distribution, par divers canaux -par exemple les buralistes, en plus des agences bancaires et postales-, de sachets encore plus nombreux de pièces en euro, à partir du vendredi 14 décembre 2001. Comme Laurent FABIUS et Nicole FONTAINE, la Présidente du Parlement européen, je me demande si les petites coupures de cinq et dix euros ne pourraient pas également être distribuées quelques jours avant la fin de l'année. Enfin, il est indispensable que la quasi-totalité des distributeurs automatiques de billets délivrent des euros en petites coupures dès le 1er janvier 2002. Je note que, dans son rapport, la Commission européenne nous faisait reproche sur ce dernier point. Je sais que les banques ont depuis avancé sur ce dossier -et je les en remercie.
Plus les Français disposeront d'espèces en euros au 1er janvier et plus aisément ils pourront échanger leurs francs dans les banques, moins ils auront à effectuer d'opérations dans les deux monnaies. Ces opérations ne pourraient que les inquiéter sur la fiabilité des prix et les obliger à manipuler un taux de conversion qu'ils ont peu l'envie d'apprendre -les enquêtes en témoignent.
Le second principe qui nous guide est la sécurité. Tel est le sens du plan que m'a présenté, la semaine dernière, le ministre de l'Intérieur, Daniel VAILLANT, et que j'ai approuvé. Elaboré en étroite concertation par les divers ministères concernés et par la Banque de France, ce plan s'appuiera sur une mobilisation exceptionnelle de la police, de la gendarmerie et des forces armées. Celles-ci assureront l'escorte des transports de fonds, la garde des centres départementaux de stockage des pièces, ou encore la sécurité des cinquante mille agences bancaires et postales ou du Trésor. Ces dispositifs de sécurité mobile s'inspireront notamment des opérations " anti hold-up " et " tranquillité vacances " mises en uvre régulièrement par la Police nationale. Ils bénéficieront de moyens accrus. La gendarmerie et la police assureront, en particulier, une protection renforcée des commerçants et des personnes les plus sensibles.
Ce plan de sécurité s'appliquera de l'automne 2001, pour la pré-alimentation en euros, jusqu'au printemps 2002, pour le retrait des francs. Le Gouvernement suggère que les billets en francs rendus aux banques soient dans leur totalité invalidés -c'est-à-dire troués- par celles-ci. Il prendra naturellement les mesures nécessaires pour retirer le cours légal à ces billets. Des instructions ont été données aux préfets pour qu'ils adaptent les mesures de ce plan au contexte de leur département. Dès le mois de septembre 2001, une coordination opérationnelle sera mise en place au ministère de l'Intérieur, sous l'autorité du directeur général de la Police nationale.
Pour appliquer ce plan de sécurité, des dérogations à l'application du droit du travail pourraient s'avérer nécessaires, concernant en particulier la durée du temps de travail. C'est le sens de certaines demandes des entreprises de convoyage de fonds ou des établissements bancaires. Comme dans le cas du passage à l'euro financier ou de celui à l'an 2000, le Gouvernement invite les partenaires sociaux à poursuivre leurs négociations sur ces sujets. Il est prêt à prendre les textes nécessaires pour que l'examen de ces dérogations -qu'il peut d'ailleurs envisager étendues- soit opéré au plan national et non local. Ces dérogations pourront sans doute s'appliquer entre le 1er septembre 2001 et le 17 février 2002. Par ailleurs, le surcroît temporaire d'activité dans ces entreprises à cette période ne devra pas induire d'effet négatif sur les allègements de charges sociales dont elles bénéficient au titre de la réduction du temps de travail.
Mesdames, Messieurs,
L'idéal serait que l'échéance du 1er janvier 2002 soit, avec le recul, considérée comme un non-événement, tout comme l'a été celle du passage -sans bogue- à l'an 2000. Chacun sait que les incidents risquent toujours de se produire ici ou là, même si nous faisons tout pour les éviter. La multiplicité des initiatives et des décisions prises -dont je n'ai d'ailleurs pas dressé une liste exhaustive- montre que les pouvoirs publics continuent de travailler pour une introduction réussie de l'euro. Ils n'ont nullement l'intention de relâcher leurs efforts.
L'ensemble des acteurs économiques doit partager ce même état d'esprit. Le travail de qualité effectué depuis plusieurs années au sein du groupe présidé par MM. Pierre SIMON et Jacques CREYSSEL va dans ce sens ; il doit être poursuivi. Dans ce domaine comme dans d'autres, l'Etat assume pleinement son rôle d'impulsion et de coordination. Il veillera à ce que l'arrivée de l'euro pratique soit pour tous nos concitoyens, comme pour nos voisins européens, la manifestation concrète et réussie d'une Europe non seulement économique et financière, mais également politique.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 14 mai 2001)
Messieurs les députés,
Monsieur le gouverneur,
Madame et Messieurs les directeurs,
Messieurs les Présidents,
Mesdames, Messieurs,
Avant que ne se déroulent les échanges prévus par l'ordre du jour de ce Comité national de l'euro -échanges auxquels j'aurai, pour partie, le plaisir d'assister-, permettez-moi de partager avec vous quelques réflexions sur l'introduction de l'euro fiduciaire. A moins de 250 jours de la mise en circulation des pièces et des billets en euro, j'ai souhaité participer aux travaux de votre instance pour souligner à nouveau l'importance que le Gouvernement tout entier attache à la réussite de cette réforme monétaire historique.
Je voudrais tout d'abord exprimer une conviction : l'introduction physique des euros est indispensable au plein accomplissement de l'Union économique et monétaire.
Certes, les Français ont déjà commencé à profiter des effets positifs de la monnaie unique, puisque la fin des dévaluations compétitives en Europe, la baisse des taux d'intérêt, la protection contre les effets des crises financières internationales ou ceux des variations erratiques du dollar ont été bénéfiques pour notre croissance.
Mais ces bénéfices sont étroitement liés à la perspective de l'euro fiduciaire. La confiance dans la monnaie n'existe que si cette monnaie a une traduction physique, quand bien même la grande majorité des paiements s'effectuerait par la voie scripturale. Si nous devions reporter la mise en circulation des espèces en euro, peu de temps serait nécessaire pour que le doute s'installe dans l'esprit des Européens et sur les marchés. Le projet serait mis en cause dans son ensemble. Très vite, la volonté politique des Etats serait suspectée et l'édifice européen fragilisé.
L'arrivée des billets et pièces en euro dans douze pays européens, mais aussi, très rapidement, dans les poches des Américains, des Japonais ou des Européens de l'Est, est la condition de la pleine affirmation de l'euro comme monnaie mondiale. C'est aussi sans doute celle de son renforcement contre le dollar, de la poursuite de l'abaissement des taux d'intérêt, ou encore de l'unification des prix des biens et des services, sans distorsion ni dumping, en faveur des consommateurs. L'introduction physique de l'euro est donc un acte par lequel l'Europe affirme son identité politique et économique, au bénéfice de tous les Européens.
Sur un plan pratique, l'échéance du 1er janvier prochain -il faudrait même plutôt parler du 31 décembre 2001- constitue moins le début d'une période que la fin d'une autre. L'introduction des espèces en euro viendra couronner les préparatifs auxquels chacun aura contribué d'ici là.
La mise en circulation des pièces et des billets en euro nous mobilise tous.
Cette grande opération est l'affaire de tout le Gouvernement. Laurent FABIUS, le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie -que je remercie de son accueil- est, en raison de ses fonctions, plus directement en charge de l'introduction de l'euro. Il s'y consacre avec une énergie et une détermination que je tiens à saluer.
Mais ce sujet comporte également de nombreux aspects qui touchent l'ensemble de l'activité gouvernementale. Depuis 1997, de très nombreuses réunions interministérielles ont préparé le passage à l'euro financier et, depuis 1999, le mouvement vers l'euro pratique. A chaque étape, de très nombreuses décisions ont été prises, souvent en Conseil des ministres -comme, par exemple, dès 1998, le vote des dispositions comptables et de droit des sociétés nécessaires ; en 2000, l'adoption d'une ordonnance intégrant dans notre législation les quelque 700 seuils monétaires qui méritaient un arrondi en euro ; ou, depuis le 1er juillet 2000, la passation en euro de tous les marchés publics dont l'échéance est postérieure au 1er janvier 2002. Je pense aussi à la priorité absolue que nous avons décidée, en novembre 2000, pour les travaux informatiques liés à l'euro entre juillet 2001 et mars 2002 dans l'administration, sans oublier la paye des fonctionnaires en euro dès le 1er juillet 2001.
Lors des réunions bimensuelles des ministres, l'euro pratique a été évoqué à de multiples reprises et il le sera de plus en plus fréquemment. D'ailleurs, la réunion des ministres d'hier lui a été toute entière consacrée. J'ai demandé aux ministres de continuer à conduire, chacun dans leur domaine, des opérations de promotion et d'explication de l'euro. Dans chaque cabinet ministériel a été désigné, à l'automne dernier, un conseiller en charge de ce dossier.
Beaucoup a donc déjà été accompli, sous l'impulsion des pouvoirs publics et avec le concours, grâce à vous, des entreprises, des banques, des commerçants et des consommateurs. Je pourrais multiplier les exemples qui en témoignent. Un récent rapport de la Commission européenne confirme que la France est plutôt en avance sur les autres pays de la zone euro pour la préparation de l'introduction des espèces en euro -en particulier pour ce qui concerne les administration publiques. Dans nombre de cas, les mesures que nous avons prises ont d'ailleurs fait école chez nos voisins. En outre, nous avons été les premiers à placer l'euro pratique au centre des priorités de la Présidence de l'Union. C'est à notre initiative qu'est suivi, depuis septembre dernier, un tableau de bord mensuel des préparatifs dans les douze pays concernés.
La mobilisation de tous les acteurs économiques doit se poursuivre. Comme vous, je peux regretter que la période transitoire, à tout le moins les années 1999 et 2000, n'ait pas été mieux mise à profit -y compris par les acteurs économiques eux-mêmes- pour préparer nos concitoyens à l'euro. Je ne crois pas du tout que cette échéance soit mal préparée. Beaucoup a été fait. Les pouvoirs publics, en particulier, se sont fortement mobilisés. Mais beaucoup reste à faire. Cette réforme, nous la réussirons ensemble, notamment au sein de votre Comité dont je salue le travail. La solidarité entre nous est essentielle.
L'aspect le plus préoccupant est un certain retard des PME et, surtout, des plus petites d'entre elles. Le passage à l'euro implique un certain nombre de changements de leur part, simples sans doute, mais qu'il faut anticiper. Cela demande de trois à six mois. Les pouvoirs publics et les organismes professionnels ont déjà accompli un gros effort d'information. Ainsi, plusieurs millions de dépliants ont été distribués. Tous nos services sont fortement mobilisés. Mais le passage à l'euro, lui, doit être décidé par les responsables de ces entreprises eux-mêmes. Nous devons les uns et les autres -et je le fais moi-même ici aujourd'hui- insister auprès de ces entreprises pour engager désormais, sans tarder, le passage à l'euro pratique.
Pour leur part, les administrations publiques continuent leur préparation. Celle-ci se fait au rythme relativement soutenu qui est le sien depuis plusieurs années, sous l'égide de la mission interministérielle placée auprès du ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie. Cette année, l'accent est mis sur l'informatique et la formation des agents, puisque la publication de tous les nouveaux seuils réglementaires sera achevée d'ici fin juin. Dès la prochaine rentrée scolaire, les enseignants utiliseront l'euro à la place du franc dans leurs cours. Le passage à l'euro des organismes sociaux est également déjà bien avancé. Je relève, par exemple, que toutes les URSSAF travailleront en euros à partir du 1er juillet et les organismes d'assurance maladie à compter du 1er octobre. Je souhaite que les organismes sociaux soient exemplaires, parce qu'ils sont en contact avec tous les Français, notamment les plus démunis d'entre eux.
Le Gouvernement informe nos concitoyens pour que l'introduction de l'euro ne fasse pas d'exclus. La communication vers le grand public a été relancée en janvier dernier. Dans quelques jours, 27 millions d'exemplaires d'une nouvelle brochure simple et pédagogique seront envoyés au domicile des Françaises et des Français. En outre, une information spécialisée à destination des publics les plus fragiles et une action démultipliée au niveau local, grâce à la formation de personnes-relais, ont été mises en uvre.
Cette opération ne doit pas faire de perdants. Tel est l'objectif du travail de conversion des seuils, législatifs et réglementaires. Même si le Gouvernement n'a pas d'inquiétude particulière sur la conversion des prix et donc sur les risques d'inflation, le ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie mettra en place des contrôles inopinés pour vérifier le respect des règles d'arrondis, notamment lors des soldes au début de 2002. En outre, les observatoires départementaux de l'euro fourniront, grâce à des commissions spécialisées, un espace de résolution amiable des litiges éventuels. La compréhension des nouveaux prix en euro devra être facilitée par le développement de l'affichage majeur dès cet automne et, surtout, par une refonte rapide des prix psychologiques. Je demande aux administrations publiques de travailler, pour ce qui les concerne, dans cette direction. Le développement de l'usage de l'euro scriptural dès cet automne sera facilité si ce travail est accompli au préalable.
Deux principes doivent nous guider collectivement : faciliter cette opération pour tous les Français et en assurer la sécurité.
Je répète ce que j'ai eu, tout comme le Président de la République, l'occasion de souligner il y a près d'un an : l'échange des pièces et des billets en francs contre leur équivalent en euro, prévu entre le 1er janvier et le 30 juin 2002, doit être facile et gratuit. Il est déjà acquis qu'il en sera ainsi, dans les banques -qui ont ici un rôle fondamental-, jusqu'au 17 février 2002, mais je souhaite que la somme que chacun pourra, le cas échéant, échanger hors de son propre réseau bancaire soit fixée à un niveau un peu plus élevé que les 2.000 francs dont il est actuellement question. En outre, les Français qui apporteront des espèces en francs à leur banque, entre le 18 février et le 30 juin 2002, devront pouvoir, s'ils le désirent, se voir proposer gratuitement des espèces de même montant en euro et non obligatoirement une inscription sur leur compte. Je souligne que la disposition que nous venons de faire voter à l'Assemblée nationale, à la demande de la profession bancaire et pour la rassurer sur l'application des mesures anti-blanchiment, vise un seuil de 10.000 euros. Je note également que cette disposition devrait s'appliquer jusqu'au 30 juin 2002.
Les banques occupent naturellement une place centrale pour l'échange des francs contre des euros. Ce n'est pas -à l'évidence- la fonction des commerces. Le secrétaire d'Etat chargé des PME, du Commerce, de l'Artisanat et de la Consommation, François PATRIAT, a souligné, lors de la remise du plan de sécurité, que les commerçants souhaitaient faire peu d'opérations mêlant les euros et les francs, mais surtout des opérations uniquement en euros.
Pour cela, il faut que les Français disposent d'assez d'espèces en euros dès le 1er janvier 2002. C'est dans ce contexte que je suis favorable à la distribution, par divers canaux -par exemple les buralistes, en plus des agences bancaires et postales-, de sachets encore plus nombreux de pièces en euro, à partir du vendredi 14 décembre 2001. Comme Laurent FABIUS et Nicole FONTAINE, la Présidente du Parlement européen, je me demande si les petites coupures de cinq et dix euros ne pourraient pas également être distribuées quelques jours avant la fin de l'année. Enfin, il est indispensable que la quasi-totalité des distributeurs automatiques de billets délivrent des euros en petites coupures dès le 1er janvier 2002. Je note que, dans son rapport, la Commission européenne nous faisait reproche sur ce dernier point. Je sais que les banques ont depuis avancé sur ce dossier -et je les en remercie.
Plus les Français disposeront d'espèces en euros au 1er janvier et plus aisément ils pourront échanger leurs francs dans les banques, moins ils auront à effectuer d'opérations dans les deux monnaies. Ces opérations ne pourraient que les inquiéter sur la fiabilité des prix et les obliger à manipuler un taux de conversion qu'ils ont peu l'envie d'apprendre -les enquêtes en témoignent.
Le second principe qui nous guide est la sécurité. Tel est le sens du plan que m'a présenté, la semaine dernière, le ministre de l'Intérieur, Daniel VAILLANT, et que j'ai approuvé. Elaboré en étroite concertation par les divers ministères concernés et par la Banque de France, ce plan s'appuiera sur une mobilisation exceptionnelle de la police, de la gendarmerie et des forces armées. Celles-ci assureront l'escorte des transports de fonds, la garde des centres départementaux de stockage des pièces, ou encore la sécurité des cinquante mille agences bancaires et postales ou du Trésor. Ces dispositifs de sécurité mobile s'inspireront notamment des opérations " anti hold-up " et " tranquillité vacances " mises en uvre régulièrement par la Police nationale. Ils bénéficieront de moyens accrus. La gendarmerie et la police assureront, en particulier, une protection renforcée des commerçants et des personnes les plus sensibles.
Ce plan de sécurité s'appliquera de l'automne 2001, pour la pré-alimentation en euros, jusqu'au printemps 2002, pour le retrait des francs. Le Gouvernement suggère que les billets en francs rendus aux banques soient dans leur totalité invalidés -c'est-à-dire troués- par celles-ci. Il prendra naturellement les mesures nécessaires pour retirer le cours légal à ces billets. Des instructions ont été données aux préfets pour qu'ils adaptent les mesures de ce plan au contexte de leur département. Dès le mois de septembre 2001, une coordination opérationnelle sera mise en place au ministère de l'Intérieur, sous l'autorité du directeur général de la Police nationale.
Pour appliquer ce plan de sécurité, des dérogations à l'application du droit du travail pourraient s'avérer nécessaires, concernant en particulier la durée du temps de travail. C'est le sens de certaines demandes des entreprises de convoyage de fonds ou des établissements bancaires. Comme dans le cas du passage à l'euro financier ou de celui à l'an 2000, le Gouvernement invite les partenaires sociaux à poursuivre leurs négociations sur ces sujets. Il est prêt à prendre les textes nécessaires pour que l'examen de ces dérogations -qu'il peut d'ailleurs envisager étendues- soit opéré au plan national et non local. Ces dérogations pourront sans doute s'appliquer entre le 1er septembre 2001 et le 17 février 2002. Par ailleurs, le surcroît temporaire d'activité dans ces entreprises à cette période ne devra pas induire d'effet négatif sur les allègements de charges sociales dont elles bénéficient au titre de la réduction du temps de travail.
Mesdames, Messieurs,
L'idéal serait que l'échéance du 1er janvier 2002 soit, avec le recul, considérée comme un non-événement, tout comme l'a été celle du passage -sans bogue- à l'an 2000. Chacun sait que les incidents risquent toujours de se produire ici ou là, même si nous faisons tout pour les éviter. La multiplicité des initiatives et des décisions prises -dont je n'ai d'ailleurs pas dressé une liste exhaustive- montre que les pouvoirs publics continuent de travailler pour une introduction réussie de l'euro. Ils n'ont nullement l'intention de relâcher leurs efforts.
L'ensemble des acteurs économiques doit partager ce même état d'esprit. Le travail de qualité effectué depuis plusieurs années au sein du groupe présidé par MM. Pierre SIMON et Jacques CREYSSEL va dans ce sens ; il doit être poursuivi. Dans ce domaine comme dans d'autres, l'Etat assume pleinement son rôle d'impulsion et de coordination. Il veillera à ce que l'arrivée de l'euro pratique soit pour tous nos concitoyens, comme pour nos voisins européens, la manifestation concrète et réussie d'une Europe non seulement économique et financière, mais également politique.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 14 mai 2001)