Conférence de presse de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports, sur la campagne de vaccination de la grippe A/H1N1, Paris le 26 novembre 2009.

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Circonstance : Conférence de presse sur la campagne de vaccination de la grippe A/H1N1 à Paris le 26 novembre 2009

Texte intégral

Mesdames, messieurs,
Cette conférence de presse s'inscrit comme les précédentes dans le cadre d'un point régulier sur la campagne de vaccination en cours.
Ce point est donc et restera régulier.
On ne peut évidemment pas en dire autant de la campagne de vaccination elle-même, qui a dû faire face au brusque sursaut d'adhésion de la population à notre proposition de vaccination.
Cette nouvelle adhésion, je m'en félicite évidemment, puisqu'elle montre que le message de santé publique et de prévention que nous portons depuis plusieurs semaines maintenant, et que certains d'entre vous ont bien voulu relayer, porte enfin ses fruits.
Je m'en félicite avant tout parce qu'à chaque fois qu'une personne se fait vacciner, elle se protège et contribue à casser la chaîne de transmission du virus.
Je m'en félicite parce que nos concitoyens ont enfin compris que la vaccination permettra de sauver des vies.
Alors bien sûr, il faut reconnaître que cette brusque montée de l'affluence dans les centres a un peu surpris. Il suffit, pour cela, de voir certains titres de journaux, samedi dernier, qui parlaient encore de centres de vaccination déserts alors que les files d'attente commençaient à se former.
Nous devons faire face à cette situation, Brice Hortefeux et moi-même, et nous allons mettre en oeuvre les moyens nécessaires.
Notre dispositif a été conçu pour être adaptable et robuste. Il faut justement qu'il s'adapte à cette nouvelle situation. J'y reviendrai.
Mais peut-être tout d'abord, un point sur la situation sanitaire.
Comme d'habitude, Françoise Weber, directrice générale de l'InVS, ici présente pourra y revenir plus longuement si vous le souhaitez.
Nous l'avions déjà dit la semaine dernière, mais cette fois de façon encore plus brutale, l'épidémie de grippe A(H1N1) accélère. Cette accélération concerne d'ailleurs la quasi-totalité du territoire national.
C'est ainsi que plus de 700 000 consultations pour grippe ont été recensées la semaine dernière, 730 000 exactement, soit 72% de plus que la précédente (où 401 000 consultations pour grippe avaient été recensées). C'est considérable. Cette donnée montre une fois encore, si c'était nécessaire, combien nous avons besoin des médecins généralistes, qui sont en première ligne pour soigner les patients grippés, et qui vont être de plus en plus sollicités dans les semaines à venir.
Je le dis et le répète, nous avons besoin d'eux. Il est plus que jamais important qu'ils soient protégés et pour cela se fassent vacciner.
L'augmentation de l'incidence de la grippe s'accompagne, hélas, sans surprise, de celle des formes graves et des décès. L'Institut de veille sanitaire a ainsi recensé 22 nouveaux décès en une semaine, ce qui porte le chiffre à 68 en métropole depuis le début de l'épidémie. 121 personnes atteintes du virus A(H1N1) sont actuellement hospitalisées en unités de réanimation ou en soins intensifs et nous nous préparons, du fait de ce chiffre et de l'accélération du nombre de cas, à observer les premières tensions sur le système hospitalier.
Je rappelle à cet effet que l'appel au centre 15 ou la consultation aux urgences hospitalières doivent être réservés aux cas graves et aux urgences. Si vous avez simplement de la fièvre ou des courbatures, c'est votre médecin traitant que vous devez aller voir d'abord.
Nous faisons donc clairement face à la première vague pandémique. Nous nous attendons néanmoins à voir circuler ce virus pendant plusieurs mois, jusqu'à ce que la population soit immunisée. Il est donc plus que jamais temps de se faire vacciner.
Aujourd'hui, avec les collégiens et les lycéens, plus de 10 millions de personnes ont été appelés à se faire vacciner. Ce sera bientôt le tour des plus jeunes (de 24 mois à 10 ans), à partir du début de la semaine prochaine.
La campagne vaccinale est donc bien lancée. La quasi-totalité des centres a ouvert ses portes.
Nous avons maintenant un recul suffisant pour donner de premiers chiffres.
Je tiens d'abord à saluer l'adhésion croissante des professionnels des établissements de santé à la démarche vaccinale. Les établissements de santé me signalent maintenant des taux de personnes vaccinées supérieurs à 20%.
Néanmoins, cette amélioration de la couverture vaccinale traduit des situations très hétérogènes entre les différentes catégories de professionnels de santé.
L'adhésion des médecins est bonne, mais celle des infirmiers, infirmières et aides-soignantes reste souvent à gagner.
Je m'inquiète tout particulièrement pour celles qui travaillent dans les services, qui accueillent dès à présent et vont accueillir, dans les semaines à venir, les patients grippés. Je pense tout particulièrement aux services de réanimation, d'accueil des urgences et de pédiatrie. Les infirmières de ces services vont être tout particulièrement exposées et risquent de disséminer autour d'elle la grippe qu'elles vont contracter, contaminant leurs patients.
Je m'inquiète, enfin, pour les patients très fragiles de certains services, comme les patients immunodéprimés, et j'engage les infirmières à les protéger en se faisant vacciner.
L'une des grandes conquêtes de la médecine hospitalière des vingt dernières années est son investissement dans la lutte contre les maladies nosocomiales.
Etre professionnel de santé et ne pas se faire vacciner aujourd'hui, c'est prendre le risque d'être le premier chaînon d'une contamination nosocomiale. Le Haut conseil de la santé publique, dans son avis du 7 septembre, a même parlé de risque de « flambées nosocomiales ».
Je rappelle que le personnel soignant non vacciné est, selon plusieurs études, la source principale des contaminations nosocomiales durant les épidémies de grippe.
Je tiens ensuite à saluer le travail fait par les équipes des centres de vaccination. Nous en sommes, à l'heure actuelle, si l'on compte les hôpitaux, à plus de 750 000 personnes vaccinées depuis le début de la campagne. C'est bien, mais ce n'est qu'un début.
Alors, c'est vrai, nous avons observé ces derniers jours des files d'attente devant certains centres de vaccination, et des centres ont même été obligés de refuser du monde.
Nous en sommes conscients, nous allons mettre en oeuvre des mesures qui permettront d'améliorer significativement la situation.
Je voudrais tout de même signaler qu'il n'est pas scandaleux de devoir patienter un peu pour obtenir une protection qui, au mieux, peut vous économiser une semaine de forte fièvre, cloué au lit, au pire, plusieurs jours en réanimation, avec une issue parfois fatale.
Je signale aussi que, si certains centres connaissent des difficultés, en particulier en région parisienne, une grande majorité accueille, dans de bonnes conditions, les candidats à la vaccination.
Pour autant certains dysfonctionnements ne sont évidemment pas acceptables :
- il n'est pas acceptable d'attendre 2, 3, voire 4 heures pour se faire vacciner ;
- il n'est pas acceptable que certains centres annoncés comme ouverts ne le soient en réalité pas ;
- il n'est pas acceptable que certains professionnels mobilisés pour faire fonctionner un centre ne respectent pas leur engagement, parfois sans prévenir et au dernier moment, bloquant tout le dispositif.
Ces problèmes sont connus. Je sais qu'ils conduisent parfois à décourager certains candidats à la vaccination de se faire vacciner. En tant que ministre de la santé, je ne peux pas l'accepter.
Nous travaillons donc, avec mon collègue Brice Hortefeux, à résoudre ces difficultés.
Dès le début de cette semaine, des instructions ont été données aux équipes opérationnelles départementales qui organisent la vaccination sur le terrain :
- les plages horaires d'ouverture des centres vont être élargies, en particulier le mercredi et le samedi ;
- le nombre d'équipes en charge de la vaccination va être augmenté.
J'en appelle, à ce titre, à la mobilisation de tous les professionnels de santé, médecins, infirmiers, en activité, retraités ou étudiants, professionnels libéraux ou salariés, médecins du travail, pour améliorer la prise en charge des candidats à la vaccination.
Tout est fait pour préserver les médecins généralistes, déjà mobilisés pour la prise en charge de leurs patients grippés, mais rien n'interdit à un spécialiste, qu'il soit rhumatologue, dermatologue ou autre, de venir faire une ou deux vacations dans un centre.
J'en appelle par ailleurs au respect, par l'ensemble de ces professionnels, des engagements qu'ils prennent, afin que les centres puissent fonctionner comme prévu. Les plages horaires doivent être scrupuleusement respectées.
Des mesures vont aussi être prises pour fluidifier les chaînes de vaccination.
Les entretiens médicaux peuvent être brefs et doivent servir en priorité à identifier les très rares contre-indications à la vaccination.
Par ailleurs, nous avons rappelé, avec Brice Hortefeux, que, face à cette affluence, seules les personnes munies de leur bon devaient se présenter en centre de vaccination.
Je rappelle que cette campagne est organisée autour d'un principe de priorité des populations en fonction de leur vulnérabilité. C'est dans cet ordre que les bons ont été émis.
J'en appelle au civisme de chacun pour respecter cet ordre.
J'invite par ailleurs les personnes munies de leur bon à consulter, avant de se déplacer, le site Internet de leur préfecture ou les affichages mis en place en mairies et dans
les officines pharmaceutiques afin de vérifier les jours et horaires d'ouverture des centres. Il s'agit d'éviter des déplacements inutiles source de frustration et de mécontentement.
Le dispositif que nous avons mis en place doit permettre de vacciner le plus grand nombre dans les meilleurs délais. Il est robuste et adaptable. Il n'a pas, et de loin, été activé cette semaine au maximum de ses capacités, car l'expérience de la semaine précédente ne nous avait pas préparés à une telle affluence.
Il faut donc maintenant que le dispositif monte très vite en puissance. La mobilisation de chacun est pour cela nécessaire. Nous nous y employons.
Depuis hier, mercredi, ce sont les collégiens et lycéens qui sont invités à se faire vacciner.
Je sais que beaucoup de rumeurs infondées ont couru ici et là, colportées en particulier par Internet.
Je rappelle, une fois encore, que la vaccination d'un mineur ne peut se faire qu'avec le consentement parental écrit. Le consentement d'un parent suffit, pourvu qu'il n'y ait pas d'opposition de l'autre. Je pense néanmoins que, les parents disposant maintenant à domicile de toute l'information nécessaire et du formulaire de consentement parental, cette inquiétude est apaisée.
Je précise également qu'il n'est pas question de demander, pour cette vaccination, la signature préalable du médecin traitant de l'enfant.
Comme je l'ai déjà indiqué, l'acte vaccinal est un acte médical à part entière et c'est pour cela qu'il y a un médecin, au sein de l'équipe en charge de la vaccination. C'est lui qui prescrit le vaccin et signe pour indiquer la prescription qu'il a effectuée.
Je voudrais m'attarder un peu sur la population particulière que constituent les collégiens et lycéens :
- d'une part, parce que les enfants représentent ce que nous avons de plus cher et ce que nous tenons le plus à protéger. J'ai donc été attentive, avec mon collègue Luc Chatel, à proposer le plus rapidement possible la vaccination aux moins de 18 ans ;
- d'autre part, parce que les moins de 18 ans sont la classe d'âge où le virus circule le plus. Environ 60% des cas de grippe recensés sont des jeunes, enfants ou adolescents. Nous avons donc décidé d'organiser la vaccination en milieu scolaire pour les élèves des collèges et lycées. Cette approche, par milieu de vie, permet d'avoir un impact optimal en termes d'interruption de la circulation virale. C'est le vaccin Pandemrix que nous utiliserons chez ces jeunes.
Pour les plus petits, les élèves des écoles maternelles et primaires, nous avons choisi de retenir la vaccination en centres afin de permettre aux parents de les accompagner.
Nous sommes attentifs, pour nos chers petits, à proposer le vaccin qui évite au mieux le risque toujours possible de douleur au site d'injection. C'est sans doute un détail pour la vaccination des adultes, mais il me paraît important d'être attentif à ce sujet dans cette tranche d'âge.
Aussi, quand nous lancerons les invitations la semaine prochaine, nous utiliserons dans la mesure du possible, les nouvelles livraisons de vaccin sans adjuvant de Sanofi pour proposer la vaccination aux 2 - 9 ans (inclus) qui, selon les experts, limite ce risque de petite douleur locale.
Sanofi-Pasteur nous a proposé une livraison en avance de phase de vaccin Panenza par rapport à ce qui était prévu pour son vaccin avec adjuvant et nous l'avons acceptée. Il servira pour nos plus jeunes enfants.
Comme je l'ai déjà évoqué et conformément aux engagements que j'avais pris, la plus grande transparence est appliquée au suivi des événements indésirables rapportés dans le cadre de cette vaccination.
L'AFSSAPS publie, à ma demande et chaque semaine, un bulletin détaillant la totalité des signalements et de leur analyse.
Jean Marimbert, le directeur général de l'AFSSAPS, fera un point sur le bulletin du jour et répondra à vos questions sur le sujet.
Je voudrais enfin revenir sur la question du schéma vaccinal et de la deuxième injection.
J'attendais, comme je l'avais annoncé, la position de l'Agence européenne du médicament, l'EMEA, sur ce sujet. Cette agence a rendu vendredi dernier un avis que j'ai demandé à l'AFSSAPS et à la direction générale de la santé d'analyser.
Les données dont nous disposons désormais sont suffisamment robustes pour confirmer la bonne protection conférée par l'injection d'une seule injection. Je vais donc pouvoir donner, à partir d'aujourd'hui, des consignes claires aux professionnels de santé en charge de la vaccination.
Sur la base des recommandations émises par l'EMEA, la vaccination sera réalisée avec une seule injection à l'exception de certaines tranches d'âge. Les jeunes de moins de 9 ans, en particulier, recevront toujours deux injections, car la protection immunitaire est plus difficile à obtenir pour eux.
Le recueil des données sur l'immunité conférée par la vaccination et surtout sa pérennité se poursuivent. Si ces données montrent que la protection faiblit avec le temps, nous serons en mesure de proposer, sans hésiter, une vaccination de rappel.
L'urgence reste donc, et même plus que jamais, la même aujourd'hui : celle de réaliser la première injection qui offre la meilleure protection dont nous disposons contre le virus.
Cette campagne de vaccination a vraiment démarré aujourd'hui. A nous tous d'en faire un succès.
Je vous remercie.Source http://www.sante-sports.gouv.fr, le 1er décembre 2009