Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Mon cabinet m'avait préparé un projet d'intervention affreusement technique... Je leur ai demandé alors :
« Mais avez-vous vu Ponyo sur la Falaise, le dernier film animé d'Hayao Myazaki ?! »
Manifestement, non !
C'est l'histoire d'une princesse poisson qui rêve de découvrir le monde des humains. Un jour, elle s'échappe et s'échoue au pied de la falaise. Le petit Sosukéla nomme "Ponyo" et lui jure de la protéger contre vents et marées. Ponyo se métamorphose alors, peu à peu, en une très jolie petite fille. Mais son père, le sorcier Fujimoto la force à revenir parmi les siens. Pour ce faire, depuis le fond des océans, il déchaine les éléments : des vagues géantes fragilisent les digues et des pluies diluviennes font sortir les fleuves et les rivières, de leur lit ... La catastrophe naturelle semble inéluctable.
Seuls nos jeunes héros peuvent sauver la situation ; et ils le feront en agissant ensemble et de concert.
Mesdames, Messieurs,
Malheureusement, il n'y a que dans le monde Ponyo et Sosuké que les catastrophes naturelles peuvent êt re évitées. Dans le notre, nous ne pouvons que les prévenir et les gérer au mieux.
Mais comme eux, nous devons travailler et intervenir ensemble. Parce que la prégnance du risque d'inondations et le bon sens l'exigent.
Le risque d'inondations exige une collaboration exemplaire.
La densité de notre réseau hydrographique et l'importance de notre littoral font la richesse de notre pays. Ils en font aussi sa faiblesse.
Le risque « inondation » est, en effet, devenu le premier risque naturel en France : 27.000 km2 de zones inondables dans lesquels vivent plus de 5 millions de Français. Ce sont près de 400.000 entreprises qui y sont installées.
Nous payons cher aujourd'hui, notre aveuglement d'hier. Combien de cours d'eau et de rivières ont été aménagés, canalisés, couverts et déviés sous la contrainte de pressions économiques, sociales, foncières et politiques, aussi... Et désormais, comme si cela ne suffisait pas, la vulnérabilité des hommes et des biens s'accroit sous l'effet de l'impact des changements climatiques qui menacent. Rien que pour l'élévation des mers, les scénarios conduisent à plus de 1 mètre d'ici 2100.
Et si nous voulions être juste mercantiles, le coût moyen annuel des dommages est au minimum de 500 millions d'euros par an. Si aujourd'hui une crue de la Seine comme celle de 1910 survenait, elle coûte rait dix milliards d'euros à la collectivité nationale.
Alors nous pouvons nous lamenter sur nos erreurs urbanistiques passées ou sur les folies de la sociétédu carbone. Mais cela ne changerait pas grand-chose... E t encore moins face à l'urgence du moment. Elle commande des actions immédiates de salubrité pour rendre notre société et notre économie toujours moins vulnérables aux risques inondations.
Cet impératif, cette tension de tous les instants, oblige à :
- une connaissance fine des risques,
- une maîtrise de l'urbanisation,
- l'organisation d'une chaîne de vigilance et d'alerte,
L'État joue bien évidemment un rôle essentiel. Cependant, l'État ne peut tout faire seul ; la mobilisation de l'ensemble des acteurs est indispensable.
Pour l'avoir mieux compris que d'autres, les Programmes d'Actions et de Prévention des Inondations font autorités parmi les différents outils de contractualisation. Mais ce n'est pas, pour autant, une raison pour s'en satisfaire. Dès lors que l'on intervient en matière de risque, il faut sans cesse évaluer les dispositifs et les rendre le plus perfectible possible.
C'est donc avec beaucoup d'attention que j'ai écouté la synthèse de vos travaux, rapportée par Christian KERT et Laurent MICHEL. J'ai entendu, également, les propos d'Éric DOLIGE qui nous a présenté sa vision des attentes des collectivités locales à l'égard de ce nouveau dispositif.
Je les en remercie très sincèrement tous les trois. Je voudrais dire plus particulièrement à Christian KERT et
Éric DOLIGE combien leur implication constante en faveur de la prévention des risques naturels est
précieuse.
De ce bilan, vous me permettrez de ne retenir que deux points :
- La dynamique créée par les PAPI est globalement positive. Elle nous a permis une réelle sensibilisation au risque inondations. C'est une très bonne chose. Nous ne devons pas perdre de vue que l'objectif est d'intervenir le plus en amont possible.
- Les difficultés des maîtres d'ouvrage à faire le lien avec les acteurs en charge de l'urbanisme.
C'est ici un point essentiel. Comment pouvons-nous imaginer réduire durablement le risque dans la durée, si l'aménagement de l'espace ne prend pas en compte les risques d'inondations ?
Nous ne pouvons plus nous contenter d'être bon en a val... C'est en amont qu'il faut être meilleur ! C'est une question de bon sens.
La gestion de l'inondation : une question de bon sens
Mesdames, Messieurs,
C'est précisément ce à quoi nous invite la Directive européenne sur l'évaluation et la gestion des inondations de 2007. En cours de transposition dans le projet de loi Grenelle 2, cette Directive va nous obliger à changer de logiciel.
Et vous me permettrez de penser, ici, que c'est une bonne chose : en matière de prévention des inondations - comme plus globalement en matière de gestion du risque naturel- on ne peut plus raisonner chacun dans son pré-carré de compétences.
C'est donc à un partenariat accru auquel nous allons devoir nous atteler. Et je vise ici tant les services de l'Etat que tous les acteurs de terrain. C'est le préalable pour atteindre une réelle efficacité dans al prévention - et au-delà dans la gestion et l'éducation du risque naturel.
C'est donc en intégrant ces nouvelles exigences que nous voulons poursuivre les démarches contractuelles. Les PAPI sont une bonne base mais il faudra aussi aller plus loin, dans l'esprit qui est celui de la directive européenne.
C'est pourquoi j'ai décidé de rénover le dispositif en le voulant plus ambitieux et plus partenarial, encore...
Étant entendu que les Programmes qui font l'objet de contrats en cours, seront honorés jusqu'à leur terme... On ne détruit pas pour construire. Les engagements pris seront tenus.
S'agissant du nouveau dispositif contractuel, vous en avez déjà largement débattu aujourd'hui. Je n'y reviendrai pas dans le détail. Simplement, j'insisterai sur ce qui constitue pour une innovation : c'est ce lien plus efficace et plus cohérent avec les politiques d'urbanisme.
Je vous demanderai de veiller à cette cohérence des politiques publiques.
Cohérence des politiques publiques avec l'aménagement des territoires et l'urbanisation.
Les collectivités maîtrisent l'urbanisme. Elles ont tout intérêt à concevoir leur développement en prenant en compte dès l'amont la question des inondations. Si l'on prend l'exemple des ruissellements urbains, leur origine se trouve d'abord dans les modalités d'aménagement.
Cohérence des politiques publiques avec les objectifs écologiques.
Les projets devront privilégier les actions qui concilient les objectifs écologiques des milieux et la gestion des inondations. Je pense par exemple au rétablissement de l'espace de liberté des cours d'eau et à la restauration des zones humides. Il faut trouver des solutions qui concilient ces impératifs à ceux de la prévention du risque inondation.
S'agissant de la mise en oeuvre, nous tiendrons compte des difficultés du précédent processus d'appel à projets.
Ainsi, il a été décidé de passer d'un procédé d'appel à projets à un processus de labellisation. Le comité sera opérationnel, dès le printemps 2010. Il réunira des représentants des collectivités territoriales, des établissements publics territoriaux de bassins, ainsi que des experts, et des représentants des services de l'État.
Les moyens financiers seront à la hauteur de notre ambition : l'État consacrera 400Meuros de travaux sur la période 2010-2015. C'est un 1/3 de l'ensemble du coût des travaux.
Le nouveau dispositif sera finalisé en tenant compte des débats de ce séminaire.
Mesdames, Messieurs,
Notre ambition est forte. Elle est à la hauteur des enjeux et de l'attente de nos concitoyens. Ceux-ci attendent beaucoup de l'État et des collectivités locales sur ces questions qui touchent à leur sécurité, à leur santé, à la qualité de la vie de nos territoires.
Il faut être conscient qu'avec les changements climatiques nous serons de plus en plus confrontés à ces catastrophes, alors que la société accepte de moins en moins leur caractère « naturel ».
D'ailleurs, globalement, il y a urgence en France à penser un plan d'adaptation aux changements climatiques. D'ailleurs, dans le même esprit, nous sommes plus qu'hier dans une obligation de résultat face aux risques industriels.
Nos concitoyens sont en droit d'attendre cela de nous. Notre responsabilité est engagée.