Texte intégral
J. Wittenberg.- Bonjour à tous, bonjour à vous J.-L. Borloo. Vous êtes en direct du Sommet de Copenhague. On est exactement à mi-chemin de ce sommet dont on espérait beaucoup. C'est vrai que l'on a démarré dans l'enthousiasme il y a une semaine, on est donc à la moitié. Où on en est aujourd'hui ? On a l'impression, et vous le disiez vous-même hier, que c'est beaucoup plus dur que prévu, d'arriver à un accord.
Non, c'est forcément difficile d'arriver à un accord, à 194 pays, qui sont dans des situations de pauvreté et de richesse, de climat, de longitudes, de latitudes aussi différentes. Je ne sais pas s'il y avait de l'enthousiasme et que c'est plus difficile maintenant. Plus on se rapproche de la formulation définitive, donc qu'on rentre dans le détail, si j'ose dire, plus, évidemment, c'est difficile. C'est simplement la proximité de la fin. En réalité, il ne nous reste plus que 4 jours et demi pour trouver un accord global. C'est une absolue révolution dans les comportements, dans les modes de production, de consommation, qu'il faut essayer de faire. Donc, c'est difficile.
On voit bien qu'il y a quand même, disons, une antithèse entre ce que veulent les pays européens et par exemple ce que défendent les Etats-Unis et la Chine. Est-ce que vous pouvez nous dire ce matin, pour les téléspectateurs, concrètement, ce qui coince et qui fait qu'un accord, encore une fois, risque d'être difficile ?
Ce qui coince c'est assez simple : il faut que les pays industrialisés réduisent, en valeur absolue, leurs émissions, donc l'Europe est en pointe, si j'ose dire... à - 30 %, c'est l'engagement le plus fort. Les Etats-Unis ont un peu de mal à aller aussi loin, par rapport au chiffre de 1990 ; pour l'instant, ils sont à - 4, -5 %, donc tout le monde espère que les Etats-Unis vont faire un effort complémentaire. Et puis les grands émergeants, notamment la Chine, doivent maîtriser, avant de baisser, en tous les cas maîtriser à moyen terme leur croissance. Donc, voilà, c'est des ajustements difficiles. Et puis il y a le financement des pays les plus vulnérables, qui est pour nous incontournable dans cette discussion. Et enfin l'architecture de demain, c'est-à-dire le président français souhaite qu'il y ait une Organisation mondiale de l'environnement, pour suivre Copenhague, pour faire le suivi de ce que j'espère être la somme des engagements, et puis, d'une manière plus générale, d'organiser l'après Copenhague.
Mais, de quels moyens vous disposez pour convaincre les Etats-Unis dont vous dites aujourd'hui qu'ils sont réticents à aller plus loin dans la baisse des émissions de gaz à effet de serre ? Qu'est-ce qui peut se passer ?
La conviction. Vous n'avez, dans cette affaire, que la conviction à essayer d'échanger les uns avec les autres. Personne n'est convoqué à Copenhague, les pays sont là librement, ils ont une souveraineté. Nous, ce que l'on dit simplement à nos amis Américains : vous émettez à peu près trois fois plus par habitant qu'un Français. Pour autant, nous nous engageons à réduire de l'ordre de 30 %. Un grand pays comme les Etats-Unis peut évidemment faire au moins aussi bien. Partant de beaucoup plus d'émissions, ce n'est quand même pas très difficile. C'est bon pour vos universités, c'est bon pour votre économie, c'est bon pour vos emplois, c'est bon pour votre autonomie énergétique. Donc, voilà. C'est la preuve un peu par l'exemple, sans arrogance, sans arrogance, sans donner des leçons à quiconque, mais vous savez, il faut lutter contre cette vieille idée que la réduction des gaz à effet de serre serait de la décroissance ou contraire au développement économique et social. C'est évidemment faux, et c'est évidemment le contraire. Mais cette idée, elle est encore très, voilà... elle prospère encore.
J.-L. Borloo, si on doit aller vers le compromis, est-ce qu'il pourrait y avoir un scénario où il n'y a pas d'accord, ou alors un accord à minima qui finalement ferait que Copenhague ne va pas tellement plus loin que le sommet de Kyoto, il y a quelques années ?
Non, je crois que dans tous les cas de figure on ira beaucoup plus loin que Kyoto. Enfin, j'ai beaucoup de mal à imaginer, compte tenu de la réalité de la situation, de l'envie, quand même, de tous, les chefs d'Etat et de gouvernement à la différence de Kyoto, et comme l'avait souhaité le Président français, seront présents, tous en même temps, pas pour faire une reculade par rapport à Kyoto. Il y aura des avancées, j'en suis absolument convaincu. Alors, ensuite, l'ampleur des avancées, eh bien il faut attendre la fin de la semaine. On va vivre, quand même, 4 journées très très décisives sur l'organisation du monde, sur l'économie du monde, sur l'emploi du monde, sur les nouvelles solidarités dans le monde, sur le climat bien entendu, donc, c'est cette mise en mouvement qui se joue pendant 4 jours, il faut juste... Vous savez, on peut toujours craindre un... tout d'un coup une mauvaise ambiance, avec un effet domino, mais enfin, on est très attentifs, vous le voyez, très tôt le matin jusqu'à très tard le soir.
J.-L. Borloo, dans ce que vous craignez, est-ce qu'il n'y a pas aussi le scepticisme de certaines opinions publiques. Par exemple, en Grande Bretagne, une partie importante de la population, ce n'est pas le cas en France, mais ne croit pas au réchauffement climatique. Par exemple, les « climato-sceptiques », comme on les appelle, ne sont pas invités à Copenhague. Comment vous gérez ça, en quelques sortes ?
Ecoutez, la machine elle est lancée, ça n'a au fond plus beaucoup d'importance, parce que tout le monde comprend bien, même quelqu'un qui serait un peu climato-sceptique, allez, je lui recommande d'aller au Bengladesh ou au bord du Lac Tchad, mais on peut être climato-sceptique. Dans tous les cas de figure, qu'est-ce que ça change ? De toute façon, notre modèle fondé sur le charbon, sur le pétrole, peu respectueux des ressources naturelles, ou de l'énergie, doit évoluer, dans tous les cas de figure. On ne va pas aller construire des voitures qui font 20 litres aux cent, tout le monde comprend bien que la modernité, que le progrès, ça va être des voitures à un demi litre, un litre ou tout électrique ou très hybride. Tout le monde comprend bien qu'il vaut mieux construire des usines pour des ampoules qui consomment dix fois moins, que des ampoules qui consomment dix fois plus. Tout le monde comprend bien que c'est mieux de construire des bâtiments très performants au plan énergétique, c'est bon pour le pouvoir d'achat, c'est bon pour les économies, des Français, des Allemands, des Britanniques. Donc, quelle que soit la façon dont vous abordez et quel que soit au fond, vos sentiments les plus profonds, quoi qu'il arrive, la nouvelle économie doit être beaucoup plus sobre.
J.-L. Borloo, vous allez avoir des visites, cette semaine, évidemment le président Sarkozy, des chefs d'Etats, mais il y a aussi une part de la classe politique française qui fait le déplacement. Rien que pour le Parti socialiste, il y a M. Aubry, mais aussi S. Royal. Copenhague c'est un peu l'endroit où il faut être. Ça vous réjouit où il y a une sorte de mode, aussi, de l'écologie ?
Non, ce n'est pas... Écoutez, ça me parait la moindre des choses. Moi je suis extrêmement heureux que les responsables des différentes formations politiques de notre pays soient là, qu'on échange, on discute. Vous savez, ce n'est pas une négociation, les uns contre les autres. On essaie de bâtir, tous ensemble, un nouveau monde. Ce n'est pas facile, mais ça peut se faire que dans une forme d'union, d'unité, d'échange de points de vue, de progrès partagé. On demande à le faire entre les continents et on ne le ferait pas dans notre propre pays ! Cela n'a évidemment pas de sens. Ils sont vraiment les bienvenus.
Merci J.-L. Borloo, en direct de Copenhague.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 14 décembre 2009
Non, c'est forcément difficile d'arriver à un accord, à 194 pays, qui sont dans des situations de pauvreté et de richesse, de climat, de longitudes, de latitudes aussi différentes. Je ne sais pas s'il y avait de l'enthousiasme et que c'est plus difficile maintenant. Plus on se rapproche de la formulation définitive, donc qu'on rentre dans le détail, si j'ose dire, plus, évidemment, c'est difficile. C'est simplement la proximité de la fin. En réalité, il ne nous reste plus que 4 jours et demi pour trouver un accord global. C'est une absolue révolution dans les comportements, dans les modes de production, de consommation, qu'il faut essayer de faire. Donc, c'est difficile.
On voit bien qu'il y a quand même, disons, une antithèse entre ce que veulent les pays européens et par exemple ce que défendent les Etats-Unis et la Chine. Est-ce que vous pouvez nous dire ce matin, pour les téléspectateurs, concrètement, ce qui coince et qui fait qu'un accord, encore une fois, risque d'être difficile ?
Ce qui coince c'est assez simple : il faut que les pays industrialisés réduisent, en valeur absolue, leurs émissions, donc l'Europe est en pointe, si j'ose dire... à - 30 %, c'est l'engagement le plus fort. Les Etats-Unis ont un peu de mal à aller aussi loin, par rapport au chiffre de 1990 ; pour l'instant, ils sont à - 4, -5 %, donc tout le monde espère que les Etats-Unis vont faire un effort complémentaire. Et puis les grands émergeants, notamment la Chine, doivent maîtriser, avant de baisser, en tous les cas maîtriser à moyen terme leur croissance. Donc, voilà, c'est des ajustements difficiles. Et puis il y a le financement des pays les plus vulnérables, qui est pour nous incontournable dans cette discussion. Et enfin l'architecture de demain, c'est-à-dire le président français souhaite qu'il y ait une Organisation mondiale de l'environnement, pour suivre Copenhague, pour faire le suivi de ce que j'espère être la somme des engagements, et puis, d'une manière plus générale, d'organiser l'après Copenhague.
Mais, de quels moyens vous disposez pour convaincre les Etats-Unis dont vous dites aujourd'hui qu'ils sont réticents à aller plus loin dans la baisse des émissions de gaz à effet de serre ? Qu'est-ce qui peut se passer ?
La conviction. Vous n'avez, dans cette affaire, que la conviction à essayer d'échanger les uns avec les autres. Personne n'est convoqué à Copenhague, les pays sont là librement, ils ont une souveraineté. Nous, ce que l'on dit simplement à nos amis Américains : vous émettez à peu près trois fois plus par habitant qu'un Français. Pour autant, nous nous engageons à réduire de l'ordre de 30 %. Un grand pays comme les Etats-Unis peut évidemment faire au moins aussi bien. Partant de beaucoup plus d'émissions, ce n'est quand même pas très difficile. C'est bon pour vos universités, c'est bon pour votre économie, c'est bon pour vos emplois, c'est bon pour votre autonomie énergétique. Donc, voilà. C'est la preuve un peu par l'exemple, sans arrogance, sans arrogance, sans donner des leçons à quiconque, mais vous savez, il faut lutter contre cette vieille idée que la réduction des gaz à effet de serre serait de la décroissance ou contraire au développement économique et social. C'est évidemment faux, et c'est évidemment le contraire. Mais cette idée, elle est encore très, voilà... elle prospère encore.
J.-L. Borloo, si on doit aller vers le compromis, est-ce qu'il pourrait y avoir un scénario où il n'y a pas d'accord, ou alors un accord à minima qui finalement ferait que Copenhague ne va pas tellement plus loin que le sommet de Kyoto, il y a quelques années ?
Non, je crois que dans tous les cas de figure on ira beaucoup plus loin que Kyoto. Enfin, j'ai beaucoup de mal à imaginer, compte tenu de la réalité de la situation, de l'envie, quand même, de tous, les chefs d'Etat et de gouvernement à la différence de Kyoto, et comme l'avait souhaité le Président français, seront présents, tous en même temps, pas pour faire une reculade par rapport à Kyoto. Il y aura des avancées, j'en suis absolument convaincu. Alors, ensuite, l'ampleur des avancées, eh bien il faut attendre la fin de la semaine. On va vivre, quand même, 4 journées très très décisives sur l'organisation du monde, sur l'économie du monde, sur l'emploi du monde, sur les nouvelles solidarités dans le monde, sur le climat bien entendu, donc, c'est cette mise en mouvement qui se joue pendant 4 jours, il faut juste... Vous savez, on peut toujours craindre un... tout d'un coup une mauvaise ambiance, avec un effet domino, mais enfin, on est très attentifs, vous le voyez, très tôt le matin jusqu'à très tard le soir.
J.-L. Borloo, dans ce que vous craignez, est-ce qu'il n'y a pas aussi le scepticisme de certaines opinions publiques. Par exemple, en Grande Bretagne, une partie importante de la population, ce n'est pas le cas en France, mais ne croit pas au réchauffement climatique. Par exemple, les « climato-sceptiques », comme on les appelle, ne sont pas invités à Copenhague. Comment vous gérez ça, en quelques sortes ?
Ecoutez, la machine elle est lancée, ça n'a au fond plus beaucoup d'importance, parce que tout le monde comprend bien, même quelqu'un qui serait un peu climato-sceptique, allez, je lui recommande d'aller au Bengladesh ou au bord du Lac Tchad, mais on peut être climato-sceptique. Dans tous les cas de figure, qu'est-ce que ça change ? De toute façon, notre modèle fondé sur le charbon, sur le pétrole, peu respectueux des ressources naturelles, ou de l'énergie, doit évoluer, dans tous les cas de figure. On ne va pas aller construire des voitures qui font 20 litres aux cent, tout le monde comprend bien que la modernité, que le progrès, ça va être des voitures à un demi litre, un litre ou tout électrique ou très hybride. Tout le monde comprend bien qu'il vaut mieux construire des usines pour des ampoules qui consomment dix fois moins, que des ampoules qui consomment dix fois plus. Tout le monde comprend bien que c'est mieux de construire des bâtiments très performants au plan énergétique, c'est bon pour le pouvoir d'achat, c'est bon pour les économies, des Français, des Allemands, des Britanniques. Donc, quelle que soit la façon dont vous abordez et quel que soit au fond, vos sentiments les plus profonds, quoi qu'il arrive, la nouvelle économie doit être beaucoup plus sobre.
J.-L. Borloo, vous allez avoir des visites, cette semaine, évidemment le président Sarkozy, des chefs d'Etats, mais il y a aussi une part de la classe politique française qui fait le déplacement. Rien que pour le Parti socialiste, il y a M. Aubry, mais aussi S. Royal. Copenhague c'est un peu l'endroit où il faut être. Ça vous réjouit où il y a une sorte de mode, aussi, de l'écologie ?
Non, ce n'est pas... Écoutez, ça me parait la moindre des choses. Moi je suis extrêmement heureux que les responsables des différentes formations politiques de notre pays soient là, qu'on échange, on discute. Vous savez, ce n'est pas une négociation, les uns contre les autres. On essaie de bâtir, tous ensemble, un nouveau monde. Ce n'est pas facile, mais ça peut se faire que dans une forme d'union, d'unité, d'échange de points de vue, de progrès partagé. On demande à le faire entre les continents et on ne le ferait pas dans notre propre pays ! Cela n'a évidemment pas de sens. Ils sont vraiment les bienvenus.
Merci J.-L. Borloo, en direct de Copenhague.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 14 décembre 2009