Texte intégral
En tant que Secrétaire d'Etat chargée des aînés Je suis particulièrement heureuse de m'exprimer aujourd'hui devant vous pour la clôture de ces 7èmes assises du médecin coordonnateur.
Ces assises sont une manifestation incontournable qui réunit évidemment les médecins coordonnateurs, mais plus largement les équipes médicales et les directeurs d'EHPAD.
C'est pour moi l'occasion de remercier l'ensemble des professionnels de l'engagement dévoué qu'ils ont auprès de nos aînés, au quotidien.
Depuis deux jours, vos travaux et vos réflexions, nourrissent le thème « médecins coordonnateurs : comment travailler ensemble ? ».
Je félicite les organisateurs de ces assises d'avoir proposé un programme particulièrement riche.
Vos contributions s'inscrivent dans la dynamique des travaux menés depuis plus d'un an par les groupes de travail animés par le Professeur Claude JEANDEL, Président du Collège Professionnel des Gériatres Français, le Docteur Nathalie MAUBOURGUET, Présidente de la Fédération Française des Associations de Médecins Coordonnateurs en EHPAD et le docteur Alain Lion, gériatre et gestionnaire D'EHPAD.
Ces travaux ont conduit à la rédaction d'un rapport qui me sera remis officiellement le 14 décembre, et ce sera pour moi l'occasion de saluer le travail accompli. Je souhaite dès à présent en partager avec vous les principales orientations.
Je voudrais d'abord souligner la méthode choisie pour surmonter les obstacles qui, depuis des années, entravent l'amélioration de la qualité des soins en EHPAD : il s'agit d'une démarche participative qui a pour but d'assurer un changement global de l'organisation des soins en EHPAD.
En effet, les différents partenaires - médecins coordonnateurs, directeurs d'EHPAD, médecins d'exercice libéral, personnels paramédicaux - ont engagé un dialogue de fond qui a permis de rapprocher les points de vue.
Il existe maintenant un diagnostic partagé sur plusieurs points :
Premier point, la nécessité du médecin coordonnateur fait désormais l'unanimité dans son principe : son rôle est véritablement central dans l'organisation des soins, et dans l'élaboration d'une prise en charge individualisée et de qualité des résidents, au sein des EHPAD.
Le constat également que le médecin coordonnateur a aujourd'hui plus de missions - les décrets en prévoient 12 au total ! - que de moyens de les exercer effectivement.
Deuxième point, les EHPAD sont des lieux de vie et ils doivent le rester même s'ils deviennent de plus en plus des lieux de soins en raison de la dépendance croissante des résidents. En particulier, l'importance de la maladie d'Alzheimer et des pathologies apparentées suppose de renforcer la coordination des soins et leur caractère pluridisciplinaire. Par ailleurs l'importance des enjeux liée à la l'iatrogénie médicamenteuse impose une meilleure maîtrise de la prescription.
Face à ces évolutions, beaucoup a déjà été fait . La réforme de la tarification initiée à compter de 2001/2002 a permis d'instituer les médecins coordonnateurs et d'assurer une médicalisation minimale.
Par ailleurs, les deux décrets du 27 mai 2005 et du 11 avril 2007 sont venus fixer les missions des médecins coordonnateurs et instaurer un temps de présence minimum.
Aujourd'hui, ma conviction est qu'il faut aller plus loin, en instaurant une véritable coordination des soins. Il faut aussi mieux articuler les interventions des professionnels de santé, et optimiser leurs prescriptions.
1. Les propositions du rapport
Dans ce contexte, plusieurs propositions contenues dans le rapport représentent à mes yeux des innovations majeures.
* La coordination demande un minimum de temps
En premier lieu, je pense que la coordination demande un minimum de temps. C'est pourquoi je suis favorable à une augmentation du temps de présence minimal prévu par le décret du 11 avril 2007.
En effet, je ne crois pas que l'on puisse coordonner efficacement les soins avec 1 journée par semaine seulement.
Comme le propose le rapport, il est souhaitable de mieux définir le rôle du médecin coordonnateur aussi bien par rapport au responsable de l'établissement que par rapport à l'équipe soignante. Cela passe notamment par une révision du contrat de travail du médecin coordonnateur. Ce contrat devra positionner clairement sa fonction d'encadrement, dans son domaine de compétence, au regard de l'équipe de soins,
Cette démarche amènera à revoir également le contenu du décret sur les missions du médecin coordonnateur.
* Formaliser et structurer la coordination des soins : création d'une Commission de Coordination Gériatrique (CCG) au sein des EHPAD
De même, la coordination des soins demande aussi à être formalisée, structurée. C'est pourquoi, je souscris également à la proposition de créer une Commission de Coordination Gériatrique (CCG) au sein de l'EHPAD, rassemblant l'ensemble des parties concernées par le projet de soins et présidée par le médecin coordonnateur. Elle a vocation à devenir le lieu où la coordination du projet de soins par le médecin coordonnateur devient une réalité effective.
Il est naturellement indispensable que les professionnels d'exercice libéral participent à cette commission. Il faudra en définir le rythme de réunions minimum. En contre partie, ces professionnels devront bien entendu être indemnisés à ce titre.
* Pour un contrat définissant les droits et les obligations réciproques du médecin coordonnateur
Pour améliorer l'organisation et la coordination des soins, il est également indispensable que les professionnels libéraux de santé, et au premier chef les médecins qui interviennent au sein de l'EHPAD, aient signé un contrat qui définisse les droits et obligations réciproques. Cela me paraît primordial pour assurer une meilleure qualité de prise en charge des résidents, et respecter les impératifs de bonne gestion des soins. Le contenu de ce contrat, qui a été élaboré dans le cadre des groupes de travail, doit encore faire l'objet de concertations associant l'ensemble des partenaires, ainsi que les Ordres professionnels. En tout état de cause, l'existence d'un tel contrat et son caractère opposable pour dispenser les soins en EHPAD me paraissent incontournables.
* Liberté du résident de choisir son médecin traitant
Pour moi, un tel principe ne s'oppose nullement à la liberté pour le résident de choisir son médecin traitant par le résident, dès son entrée dans l'établissement d'accueil. Cette liberté de choix doit être garantie par des informations précises qui devront être communiquées au résident. En signant son contrat de séjour, l'usager manifeste ainsi son acceptation des conditions de prise en charge. Par ailleurs, il me paraît convenable que, dans le cas où le résident n'aurait pas de médecin traitant, l'EHPAD lui propose, à titre informatif, la liste des professionnels médicaux et para médicaux exerçant dans l'établissement et signataires de ce contrat.
Ce contrat portant sur les conditions d'exercice des professionnels libéraux pourra également préciser le mode de rémunération. Il sera choisi d'un commun accord entre le professionnel et l'EHPAD, qu'il s'agisse d'un paiement à l'acte ou, comme le permet la loi, d'une forme alternative de rémunération négociée contractuellement entre le gestionnaire de l'EHPAD et le professionnel.
* Formaliser une charte de bonnes pratiques entre le médecin traitant et le médecin coordonnateur Je retiens également l'idée de formaliser une charte de bonnes pratiques entre le médecin traitant et le médecin coordonnateur. Cette initiative, qui suppose la poursuite des travaux des groupes, s'inscrit pleinement dans la démarche évoquée, pendant ces assises, par le professeur JEANDEL.
Le médecin coordonnateur doit aussi se voir reconnaître un périmètre de prescription, pour faire face aux situations de risque vital ou de pandémie, et dès lors que les médecins traitants, dûment informés, ne seront pas en mesure de répondre dans les délais nécessaires. En particulier, le décret du 11 avril 2007 donne une forte responsabilité aux médecins coordonnateurs en matière de veille sanitaire : il faut aussi leur donner les moyens de gérer au mieux les intérêts des résidents, et les situations d'urgence ou de crise.
* Renforcement du rôle des médecins coordonnateurs dans la gouvernance de l'outil PATHOS
Enfin, je souhaite que les médecins coordonnateurs voient leur rôle renforcé dans la gouvernance de l'outil PATHOS, dont vous savez tous l'importance pour le financement des EHPAD.
Tout d'abord, je souhaite que, dorénavant, un gériatre siège dans la commission départementale de coordination médicale.
Au niveau national, j'ai demandé que des propositions me soient faites d'ici la fin de l'année par les administrations centrales et la CNAM afin d'assurer une gouvernance plus partagée de l'outil pathos. Cette gouvernance devra en effet associer très directement les gériatres à l'évaluation et à l'amélioration de l'outil pathos.
Naturellement, la plupart des orientations que je viens de vous présenter en quelques mots supposent des modifications de nature réglementaire.
C'est sur la base de textes précis que l'ensemble des partenaires sera consulté, avant que ceux-ci ne soient transmis au Conseil d'Etat.
Vous pouvez compter sur moi pour poursuivre une méthode de concertation participative, qui a toujours était la notre Valérie Létard comme moi-même.
Mais, si je suis décidée à prendre le temps de la concertation, je suis en même temps totalement déterminée à mettre en oeuvre les orientations que je viens de vous présenter.
2. Mes observations sur les thèmes évoqués lors des Assises Avant de conclure, je souhaiterais vous dire quelques mots sur certains des thèmes que vous avez abordés au cours de ces assises.
* Les ARS, un gage de décloisonnement des politiques de santé, encore trop segmentées
Vous avez aussi évoqué le sujet de la mise en oeuvre effective en 2010 des ARS. Les ARS représentent une grande avancée pour le secteur médico social, car elles sont un gage de décloisonnement des politiques de santé, encore beaucoup trop segmentées.
Surtout, la mise en oeuvre de la procédure d'appel à projets, qui fera une large place à l'innovation, permettra d'autoriser plus rapidement les établissements et les services qui répondent le mieux aux besoins de la population.
Naturellement, il faudra être attentif à ce que les problématiques du médico social soient bien au coeur des préoccupations des ARS, comme l'exigent l'évolution démographique et la montée des pathologies neuro-dégénératives. Cela suppose notamment que l'organigramme des ARS tienne compte des spécificités de la gouvernance du médico social, en particulier du rôle des collectivités.
* L'expérimentation médicament dans les EHPAD
En ce qui concerne l'expérimentation de la gestion des médicaments en EHPAD je souhaite vous préciser que la circulaire désignant les établissements expérimentateurs et les dotations financières dont ils bénéficieront est dans le circuit de signature et sera diffusée lundi au plus tard. L'expérimentation pourra donc démarrer concrètement le 1er décembre et la première réunion du comité de pilotage aura lieu en janvier
* Les gérontotechnologies : secteur porteur d'avenir
La question des gérontotechnologies était également à l'ordre du jour de vos travaux. Il s'agit là d'un secteur formidablement porteur d'avenir. _ Il faut écarter fermement la crainte de voir les robots chasser les hommes. Bien au contraire, le développement des technologies de l'information et de la robotique doivent permettre de valoriser le travail de plus en plus qualifié pour développer de nouvelles prestations, à domicile comme en EHPAD. A nous de faire des gérontotechnologies un levier de croissance pour notre pays, y compris à l'exportation, comme le Japon a déjà su le faire.
* Lancement du débat sur la perte d'autonomie au printemps prochain
Je voudrais conclure en vous disant quelques mots sur ce qu'il est convenu d'appeler le 5ème risque.
Je veux vous confirmer que ce débat sur la perte d'autonomie aura lieu au printemps prochain. Nous le mènerons avec Xavier Darcos
Il portera sur la manière de mieux répondre aux besoins des plus fragiles d'entre nous, de mieux financer les aides, de les rendre plus équitables.
Mais ce débat ne doit pas être enfermé dans des questions techniques ou financières, aussi importantes soient-elles.
Le défi qui est devant nous : c'est d'adapter l'ensemble de notre société, de nos villes, de nos transports au vieillissement démographique.
C'est aussi le changement de regard de la société sur le vieillissement, qui doit être considéré comme une chance et non comme une charge,
C'est enfin démontrer que la vie vaut la peine d'être vécue à tous les âges.
Impulser ces changements, voilà l'objectif que je me fixe avec vous aujourd'hui !
Il s'agit pour nous tous de bâtir une société de tous les âges. Je sais pouvoir compter sur votre engagement et vos compétences pour mener cette formidable mission.
Je vous remercie.
Source http://www.travail-solidarite.gouv.fr, le 26 novembre 2009