Déclaration de M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication, surle projet architectural du Grand Paris et la politique urbaine culturelle, Paris le 10 décembre 2009.

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Circonstance : Colloque sur le Grand Paris dédié à la culture à Paris le 10 décembre 2009

Texte intégral

Au fond, nous sommes tous à la recherche de ce « S » qui permettra de passer du Grand Pari au Grand Paris, et cette recherche du S non pas perdu, mais à venir, est au coeur de ma modeste contribution culturelle à ce grand projet. Une contribution pas si modeste, en considération des enjeux qui, eux, sont essentiels car ils concernent.
Il y a un peu plus de deux ans, vous vous en souvenez, à l'occasion de l'inauguration de la Cité de l'Architecture et du Patrimoine, le Président de la République avait voulu « remettre l'architecture au coeur de nos choix politiques ». Ce choix n'avait pas été laissé au hasard, mais il répondait à une nécessité et à une évidence : c'est que la politique, au sens noble, a toujours eu des affinités profondes avec l'art de concevoir et de construire l'espace physique des villes, qui dessine les contours et les potentialités citoyennes de notre espace public.
Le lancement de ce projet extraordinaire qu'est le Grand Paris marque donc les retrouvailles d'un humanisme à visage urbain et de la pensée architecturale, c'est-à-dire les retrouvailles de la politique et de la culture.
Pour moi, ès qualité en tant que ministre de la Culture (et de la Communication), mais aussi à titre personnel, il est évident que la culture est une réalité « structurante » de notre vivre-ensemble, qu'elle n'est pas un simple ornement ou un modeste supplément d'âme. L'histoire nous montre que la culture, est souvent en avance, en particulier peut-être l'architecture, tant l'organisation mentale des espaces, et sa traduction dans la réalité des choses, est souvent une anticipation de nos modes de vie et de nos manières d'habiter de demain. C'est pourquoi en remettant l'urbanisme et l'architecture au coeur de notre vivre-ensemble dans le projet du Grand Paris, c'est au fond la culture qui est replacée au centre de nos vies comme au coeur de nos villes. Le Président de la République et moi-même installerons prochainement au Palais de Tokyo les dix équipes d'architectes qui ont été retenues pour constituer l'Atelier international du Grand Paris, le laboratoire de cette nouvelle frontière pour la ville.
Chacun sait aujourd'hui que la puissance d'attraction des villes se développe aussi en fonction de leur dynamisme culturel. L'évidence s'est imposée à tous que la culture, au sens large, est devenu un facteur de rayonnement international, d'attractivité et de développement essentiel pour nos villes. C'est-à-dire que l'aménagement des territoires urbains, les équipements culturels qui en sont pour ainsi dire le poumon et l'oxygène spirituel, tout cela fabrique la qualité distinctive d'un lieu où il fait bon vivre et travailler. La culture est la part tantôt la plus discrète, parfois la plus brillante de cette forme accomplie d'écologie dans la ville.
Ecologie, économie, mais aussi hospitalité : c'est bien ainsi, en nous appuyant sur l'éthique de la culture, que nous devons de penser et créer la métropole de demain, comme un lieu ouvert de ce que j'appelle la « culture pour chacun », non pas de la « culture pour tous », c'est-à-dire toujours pour les mêmes, mais bien pour chacun, dans sa différence et dans sa particularité. En un sens, en voyant grand, avec le Grand Paris une chance historique nous est offerte de dépasser les cloisonnements dommageables pour tous que nous connaissons depuis quelques décennies et de faire d'une ville à l'échelle de l'avenir le creuset de la mixité sociale. Nous avons bien sûr anticipé sur cette réalité décloisonnée de demain, par exemple en installant récemment un bâtiment des archives nationales à Pierrefitte-sur-Seine (dans le 93), ou encore un grand centre de réserves et de recherche patrimoniale à Cergy-Pontoise (dans le 95).
Ce grand pari de la mixité sociale, je suis convaincu que la culture, par sa capacité unique à associer et à rassembler les gens non seulement par la construction d'une mémoire commune, mais aussi par l'invention de formes nouvelles de partage, est la mieux placée pour y répondre.
Je vous remercie.

Source http://www.culture.gouv.fr, le 28 décembre 2009