Entretien de M. Alain Joyandet, secrétaire d'Etat à la coopération et à la francophonie, à Europe 1 le 13 janvier 2010, sur le séisme à Haïti.

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Média : Europe 1

Texte intégral

Q - Vous êtes le secrétaire d'Etat chargé de la Coopération. Donc l'actualité de ce matin c'est le chaos à Port-au-Prince, Haïti frappé par un terrible tremblement de terre. Quelles sont les dernières nouvelles que vous avez ?
R - Les dernières nouvelles, c'est qu'il y a des milliers d'Haïtiens qui sont actuellement, au moment où nous parlons, dans les rues et qui cherchent évidemment leurs proches dans les décombres. Nous avons un certain nombre d'informations très, très concrètes, notamment s'agissant de l'ambassade de France qui a été également touchée. Actuellement, soixante Français y sont rassemblés, d'autres sont en train d'arriver.
Evidemment, nous sommes inquiets, puisqu'il y a 1.400 Français au total en Haïti, dont 1.200 qui sont à Port-au-Prince. Nous savons également que l'hôtel de Montana, dans lequel descendent en général les touristes ou les étrangers qui sont là pour leur travail. Il y avait 300 personnes à l'intérieur de l'hôtel, on sait que cet hôtel est effondré, que pour l'heure, une centaine seulement sont sortis. Vous le voyez, donc nous sommes particulièrement inquiets. C'est vraiment un acharnement contre Haïti qui était touché récemment par les ouragans. J'y étais en septembre 2008 et je crains le pire.
Q - Vous êtes inquiet mais pour l'instant, on ne sait pas s'il y a des victimes françaises que l'on déplore ?
R - Pour l'instant, nous n'avons pas de concret sur d'éventuelles victimes françaises. Nous pensons simplement que ce serait un miracle si aucun Français n'était touché, compte tenu du nombre de Français qui sont là-bas.
Q - On parle de centaine de victimes, en tout cas pour l'instant, peut-être de milliers. Quel soutien la France met-elle en place ? On parle d'un secours qui viendrait des Etats-Unis, du Canada, des pays de la région. La France met quoi, concrètement, en place ?
R - Nous avons très vite réagi dès hier soir 23 heures, avec le Centre de crise, et c'est aujourd'hui deux avions qui partent tout de suite, un de Fort-de-France et un de Marseille. Tous les deux ont chacun à leur bord une soixantaine de personnes, dont à peu près moitié de gendarmes et moitié de sauveteurs, de personnels d'hôpitaux. Les avions contiendront des vivres également. Et nos deux préfectures de Martinique et de Guadeloupe sont en alerte et sont en train de s'organiser pour porter secours également.
Q - Vous pensez que ces avions vont pouvoir atterrir puisque, quand on voit les images, cela à l'air très compliqué quand même...
R - Nous avons eu des informations concernant la possibilité d'atterrissage et nous sommes rassurés sur ce plan : les avions vont pouvoir atterrir.
Q - Les journalistes qui sont sur place parlent de scènes de pillage, des rues jonchées de cadavres et des pillages à Port-au-Prince. Vous le rappelez, Haïti est un pays particulièrement pauvre.
R - C'est le pays le plus pauvre du monde, sans doute. Et vous savez, même la MINUSTAH, les forces des Nations unies qui sont sur place, ont été touchées. Evidemment, les forces de l'ordre gardent leurs armes, parce que dans ce genre de situation, il peut y avoir aussi des pillages d'armes. On est en train, évidemment, de regarder tout cela avec beaucoup d'attention avec la communauté internationale.
Q - Vous avez eu en ligne des Français vous-même ?
R - Bien sûr. Nous avons eu l'ambassadeur cette nuit, qui est un de mes anciens collaborateurs, qui est à la résidence. La résidence de France a été elle-même touchée, là où sont actuellement concentrés un certain nombre de Français qui sont mis en sécurité, heureusement.
Q - Que vous a-t-il décrit, puisque les scènes semblent abominables. Lui-même que vous a-t-il décrit ?
R - Il nous a décrit que ces habitations, hélas, par milliers, en bois, s'écroulent, bien évidemment. Et puis, malgré un certain nombre de belles constructions du centre, il nous a indiqué également que ces constructions étaient particulièrement touchées, puisqu'il semble que le séisme de magnitude 7,3 soit très concentré sur le centre de la capitale, puisqu'au fond, assez proche de cet endroit, les habitations ne sont pas touchées. Donc, il y a une concentration du séisme.
Q - Donc un séisme très fort, qui a duré assez longtemps. On parle d'une minute. Il vous a raconté le séisme lui-même, la minute où la terre a tremblé, où tout s'est effondré ?
R - Bien sûr, avec plusieurs secousses, lui-même s'est mis à l'abri comme il a pu mais cela a été particulièrement long, avec une secousse principale qui a été excessivement forte.
Q - La deuxième édition du festival "Etonnant voyageur" devait débuter demain en Haïti, avec de nombreux écrivains français ou francophones. Savez-vous si ces écrivains étaient arrivés sur place ?
R - Non, je n'ai pas de nouvelles mais nous en aurons dans la journée. C'est vrai que la Francophonie et Haïti ne font qu'un. C'est un partenaire, Haïti, particulièrement proche de notre pays. Et évidemment, nous sommes très proches des Haïtiens et nous allons tout faire pour les aider.
Q - Justement, que dites-vous à la communauté haïtienne en France, très inquiète ?
R - On leur dit que tout est mis en oeuvre, pas uniquement par la France, vous l'avez entendu, par les Etats-Unis et la communauté internationale. Et je puis vous assurer que nous sommes mobilisés et nous leur disons que nous avons évidemment une pensée pour toutes ces familles. Evidemment, nous sommes à leur côté, nous avons beaucoup de compassion... J'ai été là-bas en septembre 2008, à la suite des ouragans, et vraiment, il y a un acharnement sur Haïti et nous sommes de tout coeur avec les Haïtiens.
Q - Donc ce matin, vous nous dites votre inquiétude et les moyens mis en place. Merci beaucoup Alain Joyandet. Vous comptez vous rendre en Haïti ?
R - Cela va se décider ce matin avec le président de la République. Je vais tout à l'heure au Conseil des ministres. Evidemment, le président abordera ce sujet et nous tracera la feuille de route.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 janvier 2010