Déclaration de M. Alain Richard, ministre de la défense, sur la mise en oeuvre du dispositif militaire européen et sur l'amélioration de ses capacités, Bruxelles le 6 avril 2001.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Réunion informelle des ministres européens de la défense, Bruxelles le 6 avril 2001

Texte intégral

Mes chers collègues, mon cher Javier,
Je veux concentrer mon propos sur les deux points principaux qui peuvent nous permettre d'avancer en direction de décisions pour le Conseil affaires générales puis le conseil de Göteborg, c'est-à-dire :
- l'accès au dispositif opérationnel de l'Union
- et l'amélioration de nos capacités militaires.
Je souligne que déclarer l'Union opérationnelle, c'est affirmer qu'elle est en mesure de gérer une crise et qu'elle dispose des instruments pour décider et conduire une opération de gestion de crises. Cela ne signifie pas qu'elle est en mesure de couvrir immédiatement toute la gamme des missions de Petersberg.
Comme cela avait été prévu à Nice, l'UE sera donc en mesure, à partir de la fin 2001, d'assumer progressivement des missions de gestion de crise, " en fonction de la montée en puissance de ses capacités militaires ".
Il est important à cet égard de distinguer clairement l'opérationnalité de l'Union, en 2001, de la réalisation du headline goal en 2003 qui est une échéance de capacités complètes, qui marquera une étape importante.
En ce qui concerne la déclaration d'opérationnalité de l'UE, je veux souligner son importance politique, bien sûr, mais aussi son impact sur des situations concrètes : des crises continuent à se développer, on l'a vu en Macédoine et ce qui se passe dans la Fédération bosno-croate en Bosnie-Herzégovine. Donc il ne faut pas que nous restions dans cette situation d'entre deux où l'UEO, en réalité, est arrêtée et où l'UE n'a pas encore son dispositif de traitement d'une crise.
Je voudrais saluer les avancées déjà réalisées sous la conduite de la Présidence suédoise : nous disposons d'un COPS permanent ; les Chefs d'états-majors des Armées ont, la semaine dernière, sélectionné le général Hägglund comme Président du comité militaire dont ils proposeront la nomination par le CAG de lundi, à la suite de quoi, l'organe militaire intérimaire se transformera en comité militaire de l'UE ; la montée en puissance de l'EMUE se poursuit sous la direction du Général Schuwirth, et nous devrions être en mesure de le créer sous sa forme permanente dès après l'installation dans les locaux du Cortenberg, soit, comme prévu avant la fin juin 2001 ; et nous souhaitons que les procédures de gestion de crise soient finalisées dans les semaines qui viennent si bien que nous aurions l'ensemble des structures politico-militaires au milieu de cette année, ce qui serait un succès.
J'insiste pour qu'à Quinze, nous sachions préserver le rythme de la mise en place et de la validation de nos structures et de procédures, parce c'est un des outils de notre dynamique interne, de notre prise de responsabilité et de notre détermination politique.
En ce qui concerne maintenant les capacités, je crois qu'une des choses qui ont profondément changé le paysage politique au cours des trois ou quatre dernières années, cela a été notre volonté de nous concentrer sur la question des capacités. Nous avons déjà pris de nombreuses décisions politiques et c'est ce qui a conduit je crois, à ce que dans nos opinions publiques, mais aussi chez les partenaires de l'UE, beaucoup aient dit : cette fois-ci cela devient sérieux Cela ne l'est pas encore tout à fait !
C'est pourquoi, j'attache, comme mes autres collègues, beaucoup d'intérêt à toutes les étapes concrètes décrites dans le document Food for Thought 2001 présenté par les Britanniques.
Ce document fournit un cadre très utile aux travaux de la HTF d'ici à la nouvelle étape politique que va constituer la conférence d'amélioration des capacités qui est envisageable à la fin de cette année.
Elle vise surtout à ce que nous prenions des engagements pour combler les lacunes que nous avions relevées en novembre dernier. Aussi doit-elle porter en priorité sur des engagements de projets dans les domaines clés (renseignement, commandement, mobilité).
Il nous faut naturellement rester réalistes et tenir compte du contexte budgétaire contraint qui reste le nôtre. Il n'est pas question de prétendre combler en une fois des lacunes qui sont connues depuis longtemps, et que notre démarche européenne a le mérite de placer sous les projecteurs.
Mais nous savons tous que c'est dans le cadre européen que nous saurons le mieux convaincre nos gouvernements, nos parlements, et nos opinions publiques de consacrer les ressources nécessaires aux efforts d'équipement que nous devons réaliser pour mieux contribuer à la gestion des crises.
Dans la perspective de cette conférence d'amélioration des capacités, il s'agit désormais d'établir un outil de mesure de nos progrès. Le Headline Progress Catalogue, en réalisant l'étude de détail des lacunes par une analyse de la soustraction entre les besoins - Helsinki Headline Catalogue - et les contributions -Helsinki Force Catalogue me semble à même de nous offrir une véritable évaluation d'experts et de déclencher une véritable dynamique de projet.
La HTF (assistée de l'EMUE) doit continuer à jouer le rôle technique principal dans le processus capacitaire car elle permet de conserver la forte implication technique des Etats membres et le caractère intergouvernemental et volontaire du processus d'identification des efforts à réaliser et des contributions pour combler les lacunes.
La HTF plus devrait, nous l'espérons, pouvoir se réunir très rapidement. Des experts nationaux de certains alliés pourraient y participer en qualité d'observateurs, étant entendu que leur présence ne doit pas politiser le fonctionnement de la HTF plus, qui doit rester une enceinte technique. Ce peut être une mesure de transparence, de développement de confiance, ce ne peut être un outil pour transférer vers le HTF des débats politiques qui sont du ressort des relations de l'UE avec les Etats tiers, qui sont du ressort des conseils ministériels de l'alliance.
Je voudrais enfin insister sur les efforts de compatibilité de nos tâches avec celle de l'OTAN, autour de deux grands principes :
- la transparence et le dialogue, à travers le groupe UE/OTAN qui permettra de prévenir d'éventuels risques d'incohérences,
- la non duplication, à travers un DPQ adapté aux besoins de l'UE.
Enfin la compétence technique de l'OTAN devrait continuer d'être recueillie via la HTF plus.
La mise en uvre d'une véritable politique d'exercices contribuera également à l'amélioration qualitative de nos capacités, et au renforcement de notre capacité opérationnelle.
Je me félicite à cet égard de la perspective que soient agréés d'ici Göteborg les documents sur la politique et sur le programme d'exercices.
Il est indispensable en effet que nous puissions tester en tenant compte de la nature civilo-militaire de l'UE, la chaîne de commandement autonome et, en alternance, la chaîne utilisant des capacités de commandement de l'OTAN.
En conclusion, je voudrais exprimer ma confiance dans la réussite de ce double test de crédibilité qui nous attend, sur l'opérationnalité et sur les capacités. Nous avons fait des progrès importants. Nos échanges montrent que la volonté politique qui nous anime ne se dément pas. Les résultats sont là pour nous prouver que les instances qui existent maintenant depuis plus d'un an travaillent bien. Chacun des enjeux qui nous attendent est abordé avec le sérieux et le pragmatisme qui nous ont toujours permis de désamorcer les incompréhensions. Toutes les conditions sont réunies pour que Göteborg soit le succès attendu.
(Source http://www.defense.gouv.fr, le 13 avril 2001)