Déclaration de M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat à la défense et aux anciens combattants, en hommage aux militaires français morts pendant la guerre d'Indochine, à Fréjus le 21 janvier 2010.

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Circonstance : Inauguration de la nouvelle salle pédagogique du Mémorial des guerres d'Indochine, à Fréjus (Var) le 21 janvier 2010

Texte intégral

Monsieur le Préfet,
Messieurs les Présidents,
Mesdames, Messieurs,
C'est pour moi une grande émotion de vous retrouver aujourd'hui à Fréjus, dans cette nécropole nationale, où repose le corps des soldats qui ont servi la France en Indochine. La Seconde Guerre mondiale venait à peine de finir. Beaucoup de ces combattants du Corps expéditionnaire français en Extrême Orient s'étaient illustrés dans la Résistance et les Forces Françaises Libres. Ils ne connurent ni la paix ni le répit. Ils partirent pour une autre guerre et trouvèrent la mort sur une terre lointaine.
Aujourd'hui, nous sommes venus nous incliner, avec respect, devant la mémoire de ceux qui sont tombés de 1946 à 1954. C'étaient des engagés volontaires, qui ne poursuivaient qu'un seul but : servir leur patrie.
Ils ont servi la France. Ils lui ont tout donné. Et ce qu'ils ont fait, ils l'ont accompli dans des circonstances extrêmement difficiles. Sur le terrain : la guérilla, et l'ennemi qui surgit, attaque et tue. Dans le monde : la guerre froide et les grandes puissances qui s'entredéchirent et font couler le sang de ces hommes en Indochine. En France enfin : le régime des partis, qui divise, oppose et détourne les esprits et les regards de cette guerre.
Nous nous souvenons de ces hommes. Leur courage, leur volonté, leur ardeur forcent le respect. Ils étaient des héros. Ils ont inscrit le nom de Dien Bien Phu dans l'histoire nationale, comme l'une des plus terribles épreuves que nous ayons eu à traverser. Beaucoup ne sont pas revenus. Beaucoup furent exécutés ou internés dans des conditions atroces. Près de 80 000 morts et disparus, 72 000 blessés. Ils ont conquis leur propre gloire. Nous leur devons l'honneur et le respect.
Aujourd'hui, nous avons un devoir : celui de ne pas oublier le sacrifice que ces hommes ont accompli il y a maintenant plus de cinquante-six ans.
Nous ne pouvons pas oublier non plus le siècle de présence française en Extrême-Orient. Nous croyons dans les grands principes de notre République. Nous croyons au droit imprescriptible des peuples à maîtriser librement leur propre destin. Mais nous savons aussi ce que la France a accompli là-bas. Nous savons ce que furent ses erreurs. Mais nous savons aussi ce que furent ses réussites et ses succès. Car rien, dans l'histoire humaine, ne s'écrit jamais en noir ou en blanc, mais toujours en nuances et en contrastes.
Rendre compte de la présence française en Extrême-Orient, raviver le souvenir de ceux qui ont donné leur vie au cours des guerres d'Indochine : c'est l'objet des salles pédagogiques que nous inaugurons ensemble aujourd'hui. Et elles prennent place dans cette nécropole, comme le plus bel hommage à ceux qui reposent ici.
Il serait assez vain de venir ici, à Fréjus, honorer nos morts, sans en connaître l'histoire ni savoir pourquoi ils ont donné leur vie. Sans savoir pourquoi le titre de « morts pour la France » leur a été décerné, eux qui sont tombés si loin de chez nous.
Le devoir de mémoire, c'est d'abord un devoir de vérité. Et la vérité, la vérité de l'histoire et du monde, nul ne peut l'atteindre sans la connaissance. C'est cette connaissance de la présence française en Extrême Orient et de la guerre d'Indochine que nous voulons transmettre ici. Nous voulons que les visiteurs de cette nécropole nationale et, en particulier, les plus jeunes, puissent découvrir cette histoire qu'ils n'ont pas connue, cette histoire qui, souvent, est juste effleurée dans les programmes scolaires.
Nous voulons que cette salle pédagogique soit un outil d'apprentissage de l'histoire de France, de mémoire et de connaissance.
Nous voulons que les professeurs qui se rendent ici avec leurs élèves, leurs collégiens ou leurs lycéens puissent saisir l'occasion qui leur est donnée pour évoquer cette guerre, en parler et dire ce qu'elle fut vraiment.
C'est, je crois, le plus bel hommage que nous puissions rendre à ceux qui sont tombés en Indochine, à ceux qui y ont combattu, à ceux qui y ont été internés et qui ne sont jamais revenus.
Le premier historien de tous les temps, Hérodote, écrivait que c'était une oeuvre juste de conserver et de transmettre la mémoire des soldats morts au champ d'honneur. Il écrivait cela il y a plus de 2500 ans et les deux millénaires et demi qui nous séparent de lui n'ont rien changé.
Honneur aux soldats du corps expéditionnaire français en Indochine, honneur à leurs drapeaux, honneurs à leur mémoire.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 26 janvier 2010