Texte intégral
(...)
Q - Nicolas Sarkozy sera demain et jeudi en Afrique. On a l'impression qu'il s'agit éternellement de réparer le discours de Dakar...
R - Pour ceux qui pensaient que Nicolas Sarkozy ne s'intéressait pas à l'Afrique, je rappelle que c'est le huitième déplacement du président, au Gabon, un lieu symbolique, et cela peut être un moment important pour redéfinir les relations entre la France et l'Afrique.
Q - On dit "Année de l'Afrique" cette année, c'est un peu pour faire plaisir à tout le monde ?
R - Non. C'est quand même l'anniversaire des indépendances. Il y aura aussi le 14 juillet avec des troupes africaines sur les Champs Elysées. Vous savez, l'Afrique a beaucoup donné aussi pour la liberté de la France.
Q - Au Rwanda, est-ce que le président va présenter des excuses pour l'attitude de la France à l'époque du génocide en 1994 ?
R - Le président a tracé la voie de notre position diplomatique. Il y a deux ans, le président a déclaré, de mémoire, que la France devait regarder ce qu'elle avait fait dans le passé et qu'elle devait s'interroger sur le rôle qu'elle avait joué, qu'il fallait tenir compte de ce qui s'était passé. Je crois que la déclaration du président Sarkozy a suffi au président rwandais à être d'accord pour rouvrir notre dialogue politique.
Q - On a l'impression qu'à l'occasion de ce voyage, la population rwandaise attend plus. Elle attend de la part du président français des mots, plus, si ce n'est de repentance, du moins d'explication.
R - On attend beaucoup de la France, partout. C'est d'ailleurs un problème parce que quand on ne fait pas assez, on nous dit qu'on se désintéresse et puis quand on en fait trop, on nous accuse de faire de l'ingérence, de nous conduire encore comme d'anciens colons.
Q - La France doit-elle renoncer définitivement à traduire en justice les proches du président Kagamé, que le juge Bruguière suspectait d'avoir provoqué l'assassinat d'Habyarimana en 1994, et donc d'avoir provoqué le génocide ?
R - Vous savez si on veut apaiser les relations avec le Rwanda, je pense qu'il faut laisser les procédures se dérouler. Nous n'avons pas à nous en occuper. En tous cas, ce n'est pas à l'ordre du jour. Le voyage du président, c'est vraiment la réconciliation.
Q - Avec une forme d'amnistie rampante pour ce qui s'est passé à l'époque ?
R - Non, il n'y a pas d'amnistie, il y a simplement un bilan à faire. Le président l'a dit, nous n'avons pas forcément toujours tout bien fait et il faut donc en tenir compte aussi et essayer d'écrire la nouvelle page de nos relations avec cette partie de l'Afrique.
Q - C'est Claude Guéant qui est allé finaliser la réconciliation avec le Rwanda. On a l'impression que sur l'Afrique en général, c'est l'Elysée qui pilote et que le gouvernement, que vous-même, vous n'êtes là que pour suivre.
R - Non, pas vraiment, il y a une équipe. Il y a le président, c'est normal, c'est la politique étrangère de la France, et Claude Guéant qui est vraiment son bras droit pour toutes ces questions.
Q - Toujours une affaire réservée, quand même, l'Afrique, comme sous de Gaulle, comme sous Mitterrand...
R - Oui, pourquoi voulez-vous que cela change fondamentalement ? La politique de la France...
Q - On l'avait dit dans la campagne présidentielle, la "Françafrique", c'était fini.
R - Mais on ne parle pas de "Françafrique" en l'occurrence. L'action extérieure de la France, c'est le président de la République, et puis il y a autour de lui une équipe, Bernard Kouchner, Pierre Lellouche et moi-même. Nous travaillons en équipe. En fonction des sujets, ce sont les uns ou les autres qui interviennent. Mais c'est le président qui fixe la ligne, heureusement.
Q - Après le coup d'Etat au Niger, avez-vous obtenu des engagements de la junte, qu'il y aurait rapidement des élections et, surtout, qu'Areva pourrait continuer à mener ses actions de prospection pour l'uranium ?
R - S'agissant d'Areva, évidemment tout cela va continuer. Nous sommes sereins depuis quelques jours, nous avons un certain nombre d'informations. Il y a eu deux étapes. Tout d'abord, le président Tanja avait voulu se maintenir au pouvoir dans des conditions institutionnelles très mal comprises. Ce coup d'Etat est une deuxième étape, en quelque sorte, et la France demande que l'on revienne très rapidement à des élections libres et transparentes.
Q - Vous n'avez pas de date ?
R - Non, nous n'avons pas de date pour l'instant, mais je pense que ce sera assez rapide, en tout cas avant la fin de l'année semble-t-il, d'après les contacts que nous pouvons avoir. En tout cas, c'est ce que nous souhaitons et ce qui est bien, c'est que l'on peut constater qu'il n'y a pas de violences importantes contre la population qui d'ailleurs manifeste plutôt pour soutenir ce qui vient de se passer. Et puis je crois que les dirigeants qui ont été emprisonnés sont actuellement bien traités. Donc le pire, pour l'instant, est évité.
Q - Toujours pas de présidentielles en Côte d'Ivoire, est-ce qu'il faut rétablir une présence militaire française plus forte pour convaincre le président d'aller vers l'élection ?
R - La réponse est non. Le président d'ailleurs l'a bien dit, ce ne sont pas des troupes qui peuvent remplacer les élections. Pour l'instant, s'agissant de la Côte d'Ivoire, nous attendons dans les heures qui viennent un nouveau gouvernement. M. Soro est maintenu, je crois que c'est une bonne chose pour l'équilibre et la cohésion de la Côte d'Ivoire. Il faut que ce gouvernement soit nommé le plus vite possible. Je crois que c'est ce que M. Soro et M. Gbagbo sont en train de faire. Il faut que très vite ils puissent remettre en route le calendrier électoral. Je rappelle qu'il y a une liste provisoire qui a été publiée pour les élections. Je crois que plus vite la liste définitive et une date sera annoncée et plus vite la communauté internationale s'en réjouira.
Q - Le Mali a libéré des islamistes ; attendez-vous une libération rapide de l'otage français Pierre Camatte ?
R - Bernard Kouchner et Claude Guéant ont fait beaucoup de travail sur ce dossier et c'est un premier signe.
Q - Nicolas Sarkozy n'a pas repris à son compte hier la proposition de Bernard Kouchner, que l'Etat palestinien soit proclamé le plus vite possible. Est-ce un désaveu pour le ministre des Affaires étrangères ?
R - En politique internationale, il y a toujours, à un moment donné, des approches qui peuvent être, à la marge, un peu différentes. Je crois que la voie est indiquée par le président de la République et par le Premier ministre, mais je crois que tout ce qui a été dit n'est pas franchement contraire. D'ailleurs, le président l'a bien expliqué lors de son intervention hier soir : la position française reste une position très cohérente.
Q - Le Sénat a voté hier une disposition permettant à l'Etat de se faire rembourser des opérations de secours pour des personnes qui se seraient délibérément exposées à des risques. On a l'impression qu'il s'agit de dissuader les journalistes d'aller sur des terrains dangereux, comme en Afghanistan.
R - Oui, l'ancien journaliste que je suis est obligé de regarder cela avec un oeil un peu particulier. Je pense qu'il faut trouver le juste milieu entre la possibilité pour les journalistes d'aller partout dans le monde, y compris où c'est particulièrement difficile, et puis ne pas franchir forcément la ligne jaune du risque inconsidéré...
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source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 24 février 2010
Q - Nicolas Sarkozy sera demain et jeudi en Afrique. On a l'impression qu'il s'agit éternellement de réparer le discours de Dakar...
R - Pour ceux qui pensaient que Nicolas Sarkozy ne s'intéressait pas à l'Afrique, je rappelle que c'est le huitième déplacement du président, au Gabon, un lieu symbolique, et cela peut être un moment important pour redéfinir les relations entre la France et l'Afrique.
Q - On dit "Année de l'Afrique" cette année, c'est un peu pour faire plaisir à tout le monde ?
R - Non. C'est quand même l'anniversaire des indépendances. Il y aura aussi le 14 juillet avec des troupes africaines sur les Champs Elysées. Vous savez, l'Afrique a beaucoup donné aussi pour la liberté de la France.
Q - Au Rwanda, est-ce que le président va présenter des excuses pour l'attitude de la France à l'époque du génocide en 1994 ?
R - Le président a tracé la voie de notre position diplomatique. Il y a deux ans, le président a déclaré, de mémoire, que la France devait regarder ce qu'elle avait fait dans le passé et qu'elle devait s'interroger sur le rôle qu'elle avait joué, qu'il fallait tenir compte de ce qui s'était passé. Je crois que la déclaration du président Sarkozy a suffi au président rwandais à être d'accord pour rouvrir notre dialogue politique.
Q - On a l'impression qu'à l'occasion de ce voyage, la population rwandaise attend plus. Elle attend de la part du président français des mots, plus, si ce n'est de repentance, du moins d'explication.
R - On attend beaucoup de la France, partout. C'est d'ailleurs un problème parce que quand on ne fait pas assez, on nous dit qu'on se désintéresse et puis quand on en fait trop, on nous accuse de faire de l'ingérence, de nous conduire encore comme d'anciens colons.
Q - La France doit-elle renoncer définitivement à traduire en justice les proches du président Kagamé, que le juge Bruguière suspectait d'avoir provoqué l'assassinat d'Habyarimana en 1994, et donc d'avoir provoqué le génocide ?
R - Vous savez si on veut apaiser les relations avec le Rwanda, je pense qu'il faut laisser les procédures se dérouler. Nous n'avons pas à nous en occuper. En tous cas, ce n'est pas à l'ordre du jour. Le voyage du président, c'est vraiment la réconciliation.
Q - Avec une forme d'amnistie rampante pour ce qui s'est passé à l'époque ?
R - Non, il n'y a pas d'amnistie, il y a simplement un bilan à faire. Le président l'a dit, nous n'avons pas forcément toujours tout bien fait et il faut donc en tenir compte aussi et essayer d'écrire la nouvelle page de nos relations avec cette partie de l'Afrique.
Q - C'est Claude Guéant qui est allé finaliser la réconciliation avec le Rwanda. On a l'impression que sur l'Afrique en général, c'est l'Elysée qui pilote et que le gouvernement, que vous-même, vous n'êtes là que pour suivre.
R - Non, pas vraiment, il y a une équipe. Il y a le président, c'est normal, c'est la politique étrangère de la France, et Claude Guéant qui est vraiment son bras droit pour toutes ces questions.
Q - Toujours une affaire réservée, quand même, l'Afrique, comme sous de Gaulle, comme sous Mitterrand...
R - Oui, pourquoi voulez-vous que cela change fondamentalement ? La politique de la France...
Q - On l'avait dit dans la campagne présidentielle, la "Françafrique", c'était fini.
R - Mais on ne parle pas de "Françafrique" en l'occurrence. L'action extérieure de la France, c'est le président de la République, et puis il y a autour de lui une équipe, Bernard Kouchner, Pierre Lellouche et moi-même. Nous travaillons en équipe. En fonction des sujets, ce sont les uns ou les autres qui interviennent. Mais c'est le président qui fixe la ligne, heureusement.
Q - Après le coup d'Etat au Niger, avez-vous obtenu des engagements de la junte, qu'il y aurait rapidement des élections et, surtout, qu'Areva pourrait continuer à mener ses actions de prospection pour l'uranium ?
R - S'agissant d'Areva, évidemment tout cela va continuer. Nous sommes sereins depuis quelques jours, nous avons un certain nombre d'informations. Il y a eu deux étapes. Tout d'abord, le président Tanja avait voulu se maintenir au pouvoir dans des conditions institutionnelles très mal comprises. Ce coup d'Etat est une deuxième étape, en quelque sorte, et la France demande que l'on revienne très rapidement à des élections libres et transparentes.
Q - Vous n'avez pas de date ?
R - Non, nous n'avons pas de date pour l'instant, mais je pense que ce sera assez rapide, en tout cas avant la fin de l'année semble-t-il, d'après les contacts que nous pouvons avoir. En tout cas, c'est ce que nous souhaitons et ce qui est bien, c'est que l'on peut constater qu'il n'y a pas de violences importantes contre la population qui d'ailleurs manifeste plutôt pour soutenir ce qui vient de se passer. Et puis je crois que les dirigeants qui ont été emprisonnés sont actuellement bien traités. Donc le pire, pour l'instant, est évité.
Q - Toujours pas de présidentielles en Côte d'Ivoire, est-ce qu'il faut rétablir une présence militaire française plus forte pour convaincre le président d'aller vers l'élection ?
R - La réponse est non. Le président d'ailleurs l'a bien dit, ce ne sont pas des troupes qui peuvent remplacer les élections. Pour l'instant, s'agissant de la Côte d'Ivoire, nous attendons dans les heures qui viennent un nouveau gouvernement. M. Soro est maintenu, je crois que c'est une bonne chose pour l'équilibre et la cohésion de la Côte d'Ivoire. Il faut que ce gouvernement soit nommé le plus vite possible. Je crois que c'est ce que M. Soro et M. Gbagbo sont en train de faire. Il faut que très vite ils puissent remettre en route le calendrier électoral. Je rappelle qu'il y a une liste provisoire qui a été publiée pour les élections. Je crois que plus vite la liste définitive et une date sera annoncée et plus vite la communauté internationale s'en réjouira.
Q - Le Mali a libéré des islamistes ; attendez-vous une libération rapide de l'otage français Pierre Camatte ?
R - Bernard Kouchner et Claude Guéant ont fait beaucoup de travail sur ce dossier et c'est un premier signe.
Q - Nicolas Sarkozy n'a pas repris à son compte hier la proposition de Bernard Kouchner, que l'Etat palestinien soit proclamé le plus vite possible. Est-ce un désaveu pour le ministre des Affaires étrangères ?
R - En politique internationale, il y a toujours, à un moment donné, des approches qui peuvent être, à la marge, un peu différentes. Je crois que la voie est indiquée par le président de la République et par le Premier ministre, mais je crois que tout ce qui a été dit n'est pas franchement contraire. D'ailleurs, le président l'a bien expliqué lors de son intervention hier soir : la position française reste une position très cohérente.
Q - Le Sénat a voté hier une disposition permettant à l'Etat de se faire rembourser des opérations de secours pour des personnes qui se seraient délibérément exposées à des risques. On a l'impression qu'il s'agit de dissuader les journalistes d'aller sur des terrains dangereux, comme en Afghanistan.
R - Oui, l'ancien journaliste que je suis est obligé de regarder cela avec un oeil un peu particulier. Je pense qu'il faut trouver le juste milieu entre la possibilité pour les journalistes d'aller partout dans le monde, y compris où c'est particulièrement difficile, et puis ne pas franchir forcément la ligne jaune du risque inconsidéré...
(...).
source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 24 février 2010