Texte intégral
M.-O. Fogiel.- Merci de prendre enfin la parole ce matin sur Europe 1, vous êtes le secrétaire d'Etat à la justice. Après le suicide de J.-P. Trébert, beaucoup de questions ce matin. Je rappelle que J-P. Trébert faisait l'objet d'une surveillance renforcée à l'isolement et seul dans sa cellule. Généralement, l'isolement et la détention provisoire comme J.-P. Trébert, c'est souvent propice au suicide. Est-ce que la justice n'aurait pas dû prendre plus de précautions ?
Il s'agit d'un prévenu particulier et il était normal, c'est toujours le cas en l'occurrence, de prendre des précautions particulières. Donc imaginez un instant qu'il ait eu un régime ordinaire, qu'il y ait eu des incidents, que sais je. Donc je crois que là, il n'y a pas de reproche.
Mais la question, c'est est-ce qu'on aurait dû en prendre plus, notamment le kit anti-suicide ? Qu'il y ait eu des précautions, certes mais plus de précautions !
On peut toujours prendre plus de précautions mais il faut se mettre dans le contexte. Le contexte, c'est qu'on a affaire à quelqu'un qui a fait l'objet d'expertises, notamment médicales, de spécialistes, qui n'a pas lui-même demandé un suivi particulier. Il ressortait de ces expertises qu'il n'y avait pas de risque particulier. D'ailleurs, tout le monde l'a confirmé.
Mais vous avez vu ses lettres quand même. Dans les lettres, il disait à un moment donné "si jamais je ne m'évade pas, je me suicide".
Oui, j'allais y venir. C'est une autre question, c'est la question de la détermination. Une chose sur les tendances suicidaires où là, effectivement, des précautions adaptées peuvent être prises et ces précautions d'ailleurs ont été encore renforcées par la garde des Sceaux au mois d'août dernier - vous avez cité le kit, etc. Et puis, vous avez la situation de quelqu'un qui est particulièrement déterminé, particulièrement déterminé comme il le dit, ou à s'évader ou... bon. Et là, je dirais que ce soit en liberté ou que ce soit emprisonné, sauf à aller vers des systèmes complètement inhumains, vous n'empêcherez jamais quelqu'un de complètement déterminé de passer à l'acte.
Je comprends bien mais la question qui se pose ce matin, on n'a pas bien compris votre réponse, pourquoi pas de kit anti-suicide dans sa prison ? Ça existe ! Il était quand même repéré comme quelqu'un disons... de problématique. Pourquoi, dans sa cellule, il n'y en n'avait pas ?
Sur tous les aspects de précautions qui ont été prises, certaines ont été évoquées - passage toutes les heures, etc., kit ou pas kit. Il y a actuellement une enquête qui est en cours à la fois bien sûr une enquête judiciaire et une enquête administrative, donc vous comprendrez que je ne veuille pas aujourd'hui préciser cette enquête. Mais je ne veux pas faire porter d'emblée le soupçon sur qui que ce soit, alors que je le répète encore une fois, nous avons à faire tout de même à une personnalité particulière vis-à-vis de laquelle... Le kit n'est pas la réponse à toutes les situations. C'est une analyse au cas par cas. Donc j'imagine, attendons d'avoir tous les éléments, y compris, les éléments judiciaires administratifs. Je pense qu'il y a eu une analyse de la situation qui a été faite en fonction de sa personnalité, en fonction des experts.
Donc ce matin vous ne parlez pas de dysfonctionnement, clairement ?
Ce matin, je ne parle pas de dysfonctionnement parce que tant qu'une enquête n'est pas terminée, on ne peut pas parler de dysfonctionnement.
Et quand P. Marest, le délégué national à l'Observatoire international des prisons dit "qu'est-ce qu'il faut faire pour être repéré comme suicidaire, combien de tentatives de suicide faut-il faire ?". Vous ne pensez pas ce matin que, vu le profil, il était quand même repérable comme problématique ?
Il y a deux types de situations et l'Observatoire des prisons évoque la problématique des suicides en prison en France, qui sont plus nombreux qu'ailleurs, nous le savons. Ce sont des personnes qui ne supportent pas bien le choc de la détention, pour d'autres l'isolement - d'où d'ailleurs des mesures également humaines qui sont actuellement envisagées, de suivi de parrainage. Et puis vous avez là une personnalité, je le répète, qui ne rentre pas dans ces cases. Attendons la suite.
Attendons justement combien de temps ? Le retour de l'enquête c'est quand ?
Les enquêtes administratives iront assez vite. L'enquête du Parquet d'Evry ira assez vite. Et puis, vous savez, le procès aurait dû se tenir le 20 avril prochain aux assises. Au passage, d'ailleurs, j'ai une pensée bien sûr pour les victimes, aussi pour les familles Lherbier et Giraud qui se voient privées d'un procès permettant, en quelque sorte, de faire le deuil, de tourner cette page terrible et dramatique.
Justement, R. Giraud, vous avez une pensée pour lui, mais vous l'avez entendu sur France 2, il était assez dur. Il dit qu'il trouve scandaleux qu'il n'y ait pas assez de surveillants et que les mesures n'ont pas été prises. Et puis son avocat laisse entendre qu'il pourrait demander des comptes à l'administration pénitentiaire.
Chaque chose en son temps. Qu'il ait exprimé son émotion et sa colère, tout le monde peut le comprendre. Mais comprenez aussi que l'administration pénitentiaire, que je commence à bien connaître, que je rencontre régulièrement sur le terrain, est en première ligne de tous les dysfonctionnements de la société. Nous faisons beaucoup d'efforts pour améliorer la situation dans les prisons, tant sur le plan matériel, sur le plan humain, sur le plan du suivi, sur le plan du personnel, d'ailleurs qui augmente. Donc je crois qu'il ne faut pas tout amalgamer. A chaque jour suffit sa peine. Mais libre à lui, effectivement, de souhaiter que toute la vérité soit connue. Je le comprends parfaitement ; c'est également la position de la chancellerie.
La chancellerie justement, vous vouliez prendre en charge les prisons, et hier sur Canal Plus, vous disiez que votre ministre de tutelle ne déléguait pas suffisamment. Regrettez-vous qu'elle ne vous délègue pas les prisons, pour justement la meilleure prise en charge du dossier ?
Hier, on était dans le cadre d'un reportage, on m'a fait dire des choses dans le cadre d'une discussion à bâton rompu que j'avais déjà exprimées dès ma nomination. C'est-à-dire mon souhait de disposer d'attributions plus claires. Cela dit, qu'on ne se comprenne pas mal : mes relations avec la garde des Sceaux sont bonnes ...
Vous dites quand même que la situation actuelle, telle qu'elle est, ne peut pas s'éterniser. Cela sous-entend que vous partiriez...
Après les difficultés du début, j'ai trouvé mes marques. Je fais des choses tout à fait intéressantes, que ce soit sur la question des prisons, la question de la carte judiciaire, la problématique de la prévention de la délinquance, les perspectives de prisons ouvertes, etc. Et naturellement, pour le moment, les choses me satisfont parfaitement. Je suis heureux d'être au Gouvernement, j'en suis fier. Et puis, le moment venu, on verra. Et ce sera d'abord une analyse politique.
Et pour conclure sur l'affaire Trébert en tout cas, si cela révélait des dysfonctionnements dans la prison, est-ce que ce pourrait être un motif de départ pour vous ?
La question ne se pose pas en ces termes. Si chaque fois qu'il y avait un problème dans le monde judiciaire, et le monde judiciaire c'est la vie et donc c'est en quelque sorte le miroir de tous les problèmes de la société. Moi je n'ai pas la démissionnite aiguë, je ne suis pas dans cet état d'esprit. Je suis quelqu'un de responsable qui fait mon travail. Je le fais en loyauté avec la garde des Sceaux, et encore une fois, à chaque jour suffit sa peine.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 12 mars 2010
Il s'agit d'un prévenu particulier et il était normal, c'est toujours le cas en l'occurrence, de prendre des précautions particulières. Donc imaginez un instant qu'il ait eu un régime ordinaire, qu'il y ait eu des incidents, que sais je. Donc je crois que là, il n'y a pas de reproche.
Mais la question, c'est est-ce qu'on aurait dû en prendre plus, notamment le kit anti-suicide ? Qu'il y ait eu des précautions, certes mais plus de précautions !
On peut toujours prendre plus de précautions mais il faut se mettre dans le contexte. Le contexte, c'est qu'on a affaire à quelqu'un qui a fait l'objet d'expertises, notamment médicales, de spécialistes, qui n'a pas lui-même demandé un suivi particulier. Il ressortait de ces expertises qu'il n'y avait pas de risque particulier. D'ailleurs, tout le monde l'a confirmé.
Mais vous avez vu ses lettres quand même. Dans les lettres, il disait à un moment donné "si jamais je ne m'évade pas, je me suicide".
Oui, j'allais y venir. C'est une autre question, c'est la question de la détermination. Une chose sur les tendances suicidaires où là, effectivement, des précautions adaptées peuvent être prises et ces précautions d'ailleurs ont été encore renforcées par la garde des Sceaux au mois d'août dernier - vous avez cité le kit, etc. Et puis, vous avez la situation de quelqu'un qui est particulièrement déterminé, particulièrement déterminé comme il le dit, ou à s'évader ou... bon. Et là, je dirais que ce soit en liberté ou que ce soit emprisonné, sauf à aller vers des systèmes complètement inhumains, vous n'empêcherez jamais quelqu'un de complètement déterminé de passer à l'acte.
Je comprends bien mais la question qui se pose ce matin, on n'a pas bien compris votre réponse, pourquoi pas de kit anti-suicide dans sa prison ? Ça existe ! Il était quand même repéré comme quelqu'un disons... de problématique. Pourquoi, dans sa cellule, il n'y en n'avait pas ?
Sur tous les aspects de précautions qui ont été prises, certaines ont été évoquées - passage toutes les heures, etc., kit ou pas kit. Il y a actuellement une enquête qui est en cours à la fois bien sûr une enquête judiciaire et une enquête administrative, donc vous comprendrez que je ne veuille pas aujourd'hui préciser cette enquête. Mais je ne veux pas faire porter d'emblée le soupçon sur qui que ce soit, alors que je le répète encore une fois, nous avons à faire tout de même à une personnalité particulière vis-à-vis de laquelle... Le kit n'est pas la réponse à toutes les situations. C'est une analyse au cas par cas. Donc j'imagine, attendons d'avoir tous les éléments, y compris, les éléments judiciaires administratifs. Je pense qu'il y a eu une analyse de la situation qui a été faite en fonction de sa personnalité, en fonction des experts.
Donc ce matin vous ne parlez pas de dysfonctionnement, clairement ?
Ce matin, je ne parle pas de dysfonctionnement parce que tant qu'une enquête n'est pas terminée, on ne peut pas parler de dysfonctionnement.
Et quand P. Marest, le délégué national à l'Observatoire international des prisons dit "qu'est-ce qu'il faut faire pour être repéré comme suicidaire, combien de tentatives de suicide faut-il faire ?". Vous ne pensez pas ce matin que, vu le profil, il était quand même repérable comme problématique ?
Il y a deux types de situations et l'Observatoire des prisons évoque la problématique des suicides en prison en France, qui sont plus nombreux qu'ailleurs, nous le savons. Ce sont des personnes qui ne supportent pas bien le choc de la détention, pour d'autres l'isolement - d'où d'ailleurs des mesures également humaines qui sont actuellement envisagées, de suivi de parrainage. Et puis vous avez là une personnalité, je le répète, qui ne rentre pas dans ces cases. Attendons la suite.
Attendons justement combien de temps ? Le retour de l'enquête c'est quand ?
Les enquêtes administratives iront assez vite. L'enquête du Parquet d'Evry ira assez vite. Et puis, vous savez, le procès aurait dû se tenir le 20 avril prochain aux assises. Au passage, d'ailleurs, j'ai une pensée bien sûr pour les victimes, aussi pour les familles Lherbier et Giraud qui se voient privées d'un procès permettant, en quelque sorte, de faire le deuil, de tourner cette page terrible et dramatique.
Justement, R. Giraud, vous avez une pensée pour lui, mais vous l'avez entendu sur France 2, il était assez dur. Il dit qu'il trouve scandaleux qu'il n'y ait pas assez de surveillants et que les mesures n'ont pas été prises. Et puis son avocat laisse entendre qu'il pourrait demander des comptes à l'administration pénitentiaire.
Chaque chose en son temps. Qu'il ait exprimé son émotion et sa colère, tout le monde peut le comprendre. Mais comprenez aussi que l'administration pénitentiaire, que je commence à bien connaître, que je rencontre régulièrement sur le terrain, est en première ligne de tous les dysfonctionnements de la société. Nous faisons beaucoup d'efforts pour améliorer la situation dans les prisons, tant sur le plan matériel, sur le plan humain, sur le plan du suivi, sur le plan du personnel, d'ailleurs qui augmente. Donc je crois qu'il ne faut pas tout amalgamer. A chaque jour suffit sa peine. Mais libre à lui, effectivement, de souhaiter que toute la vérité soit connue. Je le comprends parfaitement ; c'est également la position de la chancellerie.
La chancellerie justement, vous vouliez prendre en charge les prisons, et hier sur Canal Plus, vous disiez que votre ministre de tutelle ne déléguait pas suffisamment. Regrettez-vous qu'elle ne vous délègue pas les prisons, pour justement la meilleure prise en charge du dossier ?
Hier, on était dans le cadre d'un reportage, on m'a fait dire des choses dans le cadre d'une discussion à bâton rompu que j'avais déjà exprimées dès ma nomination. C'est-à-dire mon souhait de disposer d'attributions plus claires. Cela dit, qu'on ne se comprenne pas mal : mes relations avec la garde des Sceaux sont bonnes ...
Vous dites quand même que la situation actuelle, telle qu'elle est, ne peut pas s'éterniser. Cela sous-entend que vous partiriez...
Après les difficultés du début, j'ai trouvé mes marques. Je fais des choses tout à fait intéressantes, que ce soit sur la question des prisons, la question de la carte judiciaire, la problématique de la prévention de la délinquance, les perspectives de prisons ouvertes, etc. Et naturellement, pour le moment, les choses me satisfont parfaitement. Je suis heureux d'être au Gouvernement, j'en suis fier. Et puis, le moment venu, on verra. Et ce sera d'abord une analyse politique.
Et pour conclure sur l'affaire Trébert en tout cas, si cela révélait des dysfonctionnements dans la prison, est-ce que ce pourrait être un motif de départ pour vous ?
La question ne se pose pas en ces termes. Si chaque fois qu'il y avait un problème dans le monde judiciaire, et le monde judiciaire c'est la vie et donc c'est en quelque sorte le miroir de tous les problèmes de la société. Moi je n'ai pas la démissionnite aiguë, je ne suis pas dans cet état d'esprit. Je suis quelqu'un de responsable qui fait mon travail. Je le fais en loyauté avec la garde des Sceaux, et encore une fois, à chaque jour suffit sa peine.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 12 mars 2010