Déclaration de Mme Nora Berra, secrétaire d'Etat aux aînés, sur l'aide aux malades et la solidarité des proches et de l'entourage de la personne malade, Paris le 7 avril 2010.

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Circonstance : Assises nationales de la "Proximologie" à Paris le 7 avril 2010

Texte intégral


Je suis très heureuse d'être parmi vous ce soir car je tiens à souligner le travail fait par Novartis au cours de ces dernières années. Novartis est passé d'un rôle de producteur de médicaments à un rôle de partenaire du système de santé.
Dans ce cadre, vous appréhendez la santé non plus dans une approche individuelle mais dans une approche de santé publique.
En effet, la maladie est aussi un fait social qui met en jeu tout le corps social : dans certaines cultures, la maladie comme la mort, sont des moments de réactivation forte du lien social et d'une solidarité familiale qui se traduisent par la compassion, l'émotion, la disponibilité et parfois même le sacrifice...
Même à notre époque la maladie, surtout quand elle devient chronique, demeure un moment social fort qui mobilise autour de l'individu le milieu familial, les amis, le voisinage, et les réseaux sociaux de proximité.
Il devient alors nécessaire d'être attentif au rôle essentiel de ce milieu, pour mieux le mobiliser et le soutenir dans son engagement.
Cet engagement attentif et bienveillant est indispensable à la réussite du protocole médical (diagnostic, intervention, suivi, coordination...).
Cet engagement est vital pour l'équilibre psychologique du patient.
Il est essentiel pour la dignité de celle ou celui qui livré à la maladie ne doit pas être nié dans sa dimension d'être humain.
Nos aînés sont particulièrement concernés par cette solidarité car majoritairement, leur souhait est de rester à domicile.
Pour répondre à ce souhait notamment l'entourage doit être très présent, actif, dévoué, efficace, compétent et souvent fort et armé de patience....
Souligner et valoriser l'importance de l'entourage de la personne malade ou vulnérable est un engagement que vous avez pris depuis 10 ans au travers de ce nouveau concept de proximologie. Concept intéressant et novateur, la proximologie renvoie à une réalité quotidienne pour les aînés :
- l'entourage, le maintien d'un lien social favorisent le bien-être de la personne âgée,
-la personne vulnérable reste un sujet qui ne se réduit pas à sa maladie ou à sa dépendance. Elle garde l'ensemble de ses attributs individuels et ses rôles sociaux.
Je voudrais saluer votre investissement dans cette approche globale qui est d'autant plus remarquable qu'au delà de la compréhension acquise collectivement, vous êtes en mesure de formuler des propositions concrètes :
? pour contribuer à faire évoluer notre système de santé
? pour changer le regard de la société sur les personnes malades et vulnérables ainsi que sur leur entourage.
? Pour sortir les aidants d'un isolement souvent désespérant et hélas trop fréquent
La maladie ne renvoie pas seulement à un dysfonctionnement physiologique mais elle impacte également toute la société de proximité.
? Je souscris de ce fait pleinement à votre proposition d'instituer une journée des aidants, événement national destiné à mieux reconnaître et à valoriser l'action remarquable des centaines de milliers de personnes qui se dévouent au quotidien pour le bien être des malades et de la société toute entière.
J'aborderai 3 points :
-la reconnaissance des aidants,
-l'aide aux aidants
-le développement de l'entraide entre aidants
1-La reconnaissance des aidants a connu des progrès au cours de ces dernières années à travers la démocratie sanitaire.
Hier c'était la conférence régionale de santé. Aujourd'hui la conférence régionale de santé et de l'autonomie permet de donner la parole à ceux qui sont directement concernés par le système de santé et son environnement.
S'agissant des aînés, c'est souvent l'entourage qui seul est en mesure d'exprimer les attentes et les besoins des malades.
C'est pourquoi, il me paraît primordial de continuer à faire évoluer le rapport soignant-soigné en intégrant l'entourage.
Ce constat que je partage pleinement avec vous me conduit à être particulièrement attentive et réceptive à certaines de vos propositions :
- Tout d'abord je veux lancer une réflexion en vue de définir un statut des aidants bénévoles.
Je crois en effet qu'il faut mieux accompagner le tissu associatif, notamment les petites associations mais aussi mieux reconnaître les aidants individuels.
? Je veux également sensibiliser les professionnels de santé à la place de l'aidant dans le parcours de soin. Aussi dans le cadre de la mission que j'ai confiée au Professeur Matillon sur les référentiels métiers, je veillerai à ce que soit intégrée cette approche dans la formation initiale et continue des professionnels du secteur médico-social.
2- Comment mieux aider les aidants ?
Plus de 3 millions de personnes sont considérées comme aidantes. Il s'agit donc d'une population importante pour laquelle une réponse doit être apportée afin qu'elle dispose d'une information de qualité,
Une réponse doit être apportée aux aidants en termes d'appui dans leur recherche de solutions.
Le caractère innovant des MAIA, Maisons de l`Autonomie et de l`Intégration pour les malades d`Alzheimer, permet de répondre à ces deux objectifs essentiels pour l'aide aux aidants. Mesure phare du Plan Alzheimer, c'est à la fois un guichet unique d'informations et un accompagnement pour trouver effectivement les prises en charge les plus adaptées à la personne, notamment grâce au rôle clef joué en leur sein par les coordonnateurs de cas complexes.
Vous proposez des formations. C'est une préoccupation que je partage avec vous. Beaucoup reste à faire en la matière afin de ne pas les laisser démunis face à la maladie. Dans le domaine de la maladie, l'expérience a été lancée par une convention signée avec France Alzheimer en vue de proposer deux jours de formation par an à chaque aidant familial. Elle apporte des savoirs, savoir-être et savoir-faire qui les soutiennent dans leur accompagnement et évitent ainsi le phénomène d'épuisement. C'est une expérience qui mérite d'être généralisée.
Enfin, une réponse doit être apportée aux aidants en termes de répit car il n'est pas acceptable que les aidants familiaux soient les 2èmes victimes de la maladie d'un proche.
Il faut reconnaître aux aidants la nécessité de pouvoir souffler, ce que vous appelez dans vos propositions le lâcher-prise, pour leur éviter de se retrouver dans des états de saturation et être sujet à des risques de morbidité ou des risques de maltraitance.
Le développement des accueils de jour et de l'hébergement temporaire, prévu dans le Plan Alzheimer, s'inscrit pleinement dans cet objectif.
Afin de favoriser la mise en oeuvre des accueils de jour, j'ai décidé de structurer leur offre en fixant des capacités minimales tout en augmentant leur financement pour mieux prendre en compte les transports.
Par ailleurs, 11 expérimentations de plateformes d'accompagnement et de répit sont lancées à l'échelle nationale dans le cadre du plan Alzheimer. Il s'agit de panel de services allant de l'accueil de jour à la garde de nuit en passant par l'hébergement temporaire ou l'accueil familial. L'objectif visé est bien d'élargir l'offre existante et ainsi répondre de façon adaptée et spécifique aux besoins diversifiés des malades et de leurs aidants.
Je veux même aller plus loin en faisant évoluer le code du travail pour mettre en place ce que l'on appelle la balluchonage. Il s'agit de permettre à un intervenant à domicile d'accompagner sur plusieurs jours un aîné pendant l'absence de l'aidant familial.
3ème point que je souhaiterais aborder avec vous : le développement de l'entraide entre les aidants
Si les aidants ne sont pas des « savants » au sens professionnels, ils sont des « sachants » : parce qu'ils développent des savoirs concrets, des savoirs faire adaptés à des situations vécues. Cette connaissance mérite d'être valorisée à travers :
- La création et le soutien des réseaux d'aidants qui peuvent se formaliser sous forme de groupes de parole ou d'échange d'expérience...
Ces réseaux permettent également de rompre l'isolement de l'aidant, de renouveler le réseau relationnel d'affinités partagées, de se rassurer, de trouver des réponses à ces besoins et de trouver une aide concrète.
Ces lieux d'expression (vécu, expertise...) peuvent alimenter le travail des professionnels s'ils sont constitués en lien avec eux.
- Les savoir-faire des aidants peuvent également être valorisés au sein des réseaux sur le web :
La proximité n'est pas simplement une distance physique linéaire, c'est d'abord une vitesse de mise à disposition et d'accès à un bien, une information, une rencontre. Le réseau web peut jouer un rôle important pour desserrer les contraintes de temps et d'espace.
Le web facilite également l'expression de par sa distance et son anonymat , il permet ce que le face à face parfois peut restreindre en raison de pudeur, préjugé, ou de crainte d'être jugé, de difficulté d'expression en groupe.
Mesdames et Messieurs
En vous préoccupant de la proximologie, ce n'est pas un sujet académique que vous traitez mais c'est une véritable cause que vous avez embrassée. Je voudrais vous témoigner de toute ma reconnaissance pour votre action active et féconde dont je partage évidemment les buts complexes.
Nous sommes au coeur d'une problématique généreuse et humaine que toute civilisation digne de ce nom se doit de développer et de favoriser dans son propre intérêt...s'il ne faut évidemment pas laisser le malade seul face à la maladie ou au handicap , il ne faut pas d'avantage laisser l'aidant seul face à ses difficultés, à ses doutes , à son isolement , à son besoin d'être éclairé....il ne faut pas le laisser seul face à son épuisement ou à ses demandes d'information...
La proximologie c'est une condition : ne pas faire de l'aidant la deuxième victime de la maladie !!
La proximologie c'est surtout un magnifique défi humain et technique qui doit articuler une dynamique médicale plus performante avec un environnement social plus ouvert, plus efficace, plus harmonieux.....
Nous avons fait aujourd'hui ensemble quelques pas tangibles dans cette direction, nous devons poursuivre nos efforts car notre réalité démographique et sociale nous le commande.
Je compte sur vous ....vous pouvez compter sur moi.
Source http://www.accueil-temporaire.com, le 20 avril 2010