Texte intégral
Monsieur le Président,
Cher Hugues Dalleau,
Je voudrais vous remercier des propos que vous venez de tenir.
Pour une raison très simple : à travers vous, c'est le bon sens qui a parlé...
Le bon sens ! Descartes disait, il y a quelques siècles, que c'était la « chose la mieux partagée au monde »...
Je ne suis pas sûr qu'il dirait la même chose aujourd'hui. J'ai même quelques doutes, car, le bon sens, c'est peut-être ce qui manque le plus à un monde qui a perdu ses repères et, parfois, ses idéaux.
Et puis, ce que vous avez dit illustre parfaitement les valeurs dont l'Union nationale des combattants est dépositaire.
Des valeurs d'ouverture, de générosité, de fraternité.
Mais aussi un attachement sans faille à la nation et à ce qu'elle représente.
Et cet attachement-là, cette fidélité incomparable, cet amour de la France, il vient du coeur. Il irrigue chacune des associations que fédère l'UNC. Il rallie entre elles les générations du feu. Il est, pour nous tous, notre bien commun.
Alors permettez-moi de dire toute ma reconnaissance à l'Union nationale des combattants et aux associations qu'elle regroupe.
Partout en France, du plus petit de nos villages jusqu'à la plus grande de nos villes, ce ne sont jamais des intérêts particuliers qu'elles défendent.
Elles n'ont qu'un idéal : servir. Elles unissent les hommes et fédèrent les anciens combattants. Elles répondent présentes quand, dans nos 36 000 communes, on honore devant les monuments le souvenir de nos morts. Elles tissent du lien entre les générations transmettant aux plus jeunes la mémoire combattante. Elles font vivre la camaraderie la plus belle et la plus simple. Elles réinventent, en somme, dans la paix la fraternité acquise dans les armes.
Je voudrais également saisir l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui, Monsieur le Président, cher Hugues Dalleau, pour saluer votre engagement personnel au service du monde combattant. Si nous avons pu avancer sur un certain nombre de dossiers difficiles au cours de l'année qui vient de s'écouler, je sais la part active que vous y avez prise... Je voudrais aujourd'hui vous exprimer, devant tous, ma gratitude.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Il était né à Saint-Rémy-de-Provence et il a exercé longtemps ses talents à Montpellier, mais je crois que l'on n'a pas besoin des dons de prophéties du grand Nostradamus pour deviner, non pas l'avenir, mais le présent.
Nous vivons une période difficile. Une crise exceptionnelle frappe la France comme tous les autres pays du monde. C'est une crise dont les meilleurs économistes disent qu'elle surpasse en gravité la grande dépression de 1929. Regardons ce qui se passe en Grèce pour mesurer l'ampleur du désastre. Le désastre actuel, mais également celui qui risque de bientôt toucher d'autres pays européens. Je pense à nos voisins espagnols et portugais.
En France, le gouvernement a pris des mesures : geler les dépenses de l'Etat, réduire son train de vie, favoriser par tous les moyens la croissance. Ce sont des mesures qui ne sont pas idéologiques. Ce ne sont pas des décisions de droite ou de gauche. Elles sont dictées par la réalité. La réalité implacable des choses. Eh bien, tout le débat médiatique se résume à savoir s'il s'agit d'une politique de « rigueur » ou pas. On ne se demande pas comment servir son pays et le sortir de l'ornière. On se dispute pour un mot...
C'est un signe. Le signe que nous avons changé d'époque et que nous avons, plus que jamais, à réinventer notre modèle national.
Oui, une nation exige, parfois, des sacrifices. Des Poilus de la Grande Guerre à nos soldats qui servent en opérations extérieures, des héros de la Seconde Guerre mondiale aux combattants d'Indochine et d'Algérie, toutes les générations du feu ont éprouvé ce que le service du pays exigeait en sacrifices... Et il s'agissait de sacrifices autrement plus importants que ceux dont on parle aujourd'hui. Il s'agissait de la vie et de la mort...
Cette histoire-là ne s'écrit malheureusement pas au passé. Je pense, aujourd'hui, à nos hommes tombés en Afghanistan. Ils luttent, là-bas, contre l'un des viviers du terrorisme international. Et leur engagement est avant tout un engagement pour notre sécurité nationale.
J'ai pris la décision de réviser les critères d'attribution du statut d'ancien combattant, afin que nos hommes envoyés en Opérations extérieurs puissent en bénéficier. Les formes de la guerre sont nouvelles, la reconnaissance de la nation envers ceux qui la servent et la défendent doit s'adapter.
Les générations qui n'ont pas connu la guerre, celles qui n'ont pas servi sous les drapeaux, ont-elles une seule idée de ce qu'exige parfois une nation ? Pour qu'une nation existe, il faut que chacun de ses citoyens ait conscience d'y appartenir. Pour qu'une nation existe et perdure, il faut que chacun consente des efforts. Bernanos écrivait qu'il n'y avait pas d'orgueil particulier à être Français, mais seulement du travail, un effort permanent, pour s'en montrer digne.
Oui, être Français, cela représente des sacrifices. Cela représente aussi des efforts.
Comme vous, Monsieur le Président, j'ai été choqué par ce qui s'est passé à Nice. Les pouvoirs publics ont choisi d'intervenir et le préfet des Alpes-Maritimes a fait retirer l'inacceptable photo de cette exposition. Nous n'avons pas choisi les grandes déclarations indignées, celles qui généralement soulagent la conscience mais ne changent rien dans les faits. Nous avons choisi l'efficacité, car il aurait été intolérable, à nos yeux, que ce scandale se poursuive un jour de plus.
Aujourd'hui, le temps des questions est venu.
Ce sont des questions d'ordre juridique. Michèle Alliot-Marie, ma collègue garde des Sceaux, a annoncé un texte de loi visant à sanctionner les atteintes à notre drapeau national.
Mais ce sont également des questions morales et politiques : comment dans un pays un individu peut arriver à prétendre faire oeuvre d'art en souillant un symbole national ? Et j'élargirai même la question : comment en vient-on à ce que la Marseillaise soit sifflée dans nos stades ?
Certains de nos concitoyens ne semblent plus avoir conscience de ce qu'être Français veut dire.
Leur a-t-on simplement jamais dit ? Peut-être ont-ils appris l'histoire de leur pays, mais ont-ils suffisamment conscience que cette histoire, c'est la leur et qu'il leur appartient de la poursuivre ?
Oui, être Français, c'est inscrire son destin individuel dans une histoire qui nous dépasse. C'est accepter l'héritage des siècles. L'accepter, pour le transmettre à son tour.
Et les anciens combattants ont un rôle déterminant à jouer. C'est à eux qu'il revient de transmettre la mémoire combattante et les valeurs de notre République.
La mémoire combattante, c'est la mémoire d'une fraternité poussée jusqu'à ses dernières limites. C'est la fraternité des soldats épuisés montant à l'assaut à Verdun. C'est la fraternité héroïque des fusillés du Mont-Valérien qui chantent la Marseillaise face au peloton d'exécution. C'est la fraternité des gars de Bigeard en Indochine. C'est la fraternité des soldats pris en embuscade dans le djebel et voyant tomber l'un des leurs.
Cette fraternité, qui est le socle de nos valeurs républicaines, notre système éducatif a pour mission de l'enseigner. Mais nuls mieux que les anciens combattants peuvent la défendre et la transmettre.
Par le passé, notre pays a eu besoin de vous. Et vous avez été là.
Aujourd'hui, une nouvelle fois encore, il a besoin de vous.
Et je sais que vous répondrez présent. Nous commémorons le 70e anniversaire de la Seconde Guerre mondiale et, chaque fois, je suis admiratif devant l'engagement des anciens Résistants ou des anciens Déportés à aller devant des jeunes pour partager avec eux leur expérience. Certains de nos grands anciens ont déjà un âge avancé, ils connaissent le poids des ans, la fatigue, parfois la maladie. Et pourtant, ils répondent présents, parce qu'ils savent que leur témoignage est irremplaçable.
Etre Français, c'est partager des valeurs. Il y a celles que l'on lit au fronton de nos mairies : liberté, égalité, fraternité... Il y a celles aussi qui en découlent, mais qui sont tout aussi importantes pour notre civilisation. Et parmi ces valeurs, l'égalité entre les hommes et les femmes est l'une des plus fondamentales. C'est la raison pour laquelle on ne peut pas tolérer, en France, que des femmes, de gré ou de force, aient le visage complètement dissimulé aux yeux des autres, pour la seule raison qu'elles sont des femmes... Oui, la France ne veut pas de la burqa. Et je me réjouis que l'Assemblée nationale ait voté mardi, à la quasi-unanimité, une résolution qui rappelle, avec fermeté, les principes de notre République.
Défendre les valeurs qui fondent notre communauté nationale, voilà la tâche qui est aujourd'hui la nôtre. Et défendre ces valeurs, c'est défendre aussi la mémoire de ceux qui ont combattu pour elles.
Nous sommes appelés, plus que jamais, à un devoir de mémoire.
C'est vrai pour la Seconde Guerre mondiale, dont nous célébrons le 70e anniversaire. Face aux révisionnistes et aux négationnistes, nous avons à défendre la vérité historique.
Nous le devons aussi à la mémoire de la Guerre d'Algérie et de ses combattants. C'est la raison pour laquelle le ministère que j'ai l'honneur de conduire travaille de pied ferme à la création de la Fondation pour la mémoire de la Guerre d'Algérie.
Il ne s'agit pas de défendre une vérité d'Etat. Parce qu'il n'y a jamais qu'un pas entre une vérité et un mensonge d'Etat. Non. Il s'agit de défendre la vérité simple, la vérité toute nue. Il s'agit de réunir des historiens et des spécialistes, de récolter les témoignages des anciens combattants et de réaliser sur cette période de notre histoire un travail de réconciliation des mémoires... C'est un travail colossal. Jamais il n'a été effectué. Et c'est un grand manque que nous souhaitons combler.
Mais rien d'autre que la vérité, rien d'autre que la réalité des faits ne peut réconcilier les mémoires entre elles.
Toute une génération est allée combattre en Algérie. Toute une génération a dû choisir le chemin du départ et être rapatriée. Toute une génération a fait le choix de la France puisqu'aucun autre choix n'était permis lorsqu'on était harki...
En créant aujourd'hui la Fondation pour la mémoire de la Guerre d'Algérie, nous voulons que perdure et que se transmette cette mémoire combattante.
Nous n'avons pas à craindre la vérité de l'histoire.
Nous savons ce que fut la présence française en Algérie. Nous savons ce que le système colonial comptait en injustices de tous ordres. Mais nous savons aussi ce que les Français d'Algérie ont apporté à ce beau et grand pays.
Non, la vérité de l'histoire ne nous fait pas peur.
Elle ne nous fait pas peur, sauf lorsqu'on veut la travestir ou la maquiller.
Ce que nous avons à redouter, ce sont les discours simplificateurs, les appels à la repentance perpétuelle tout comme les continuels élans de la nostalgie. Face à tous ces discours, la Fondation que nous créons opposera le travail rigoureux des historiens.
Ce que nous avons à redouter, ce sont aussi les lâches abandons... Qu'un ministre un jour fasse du 19 mars la date commémorant la fin de la guerre d'Algérie, alors l'idéologie aura pris le pas sur la réalité historique. Ce ministre, ce ne sera pas moi. Et, sous l'autorité de Nicolas Sarkozy, notre président de la République, la France continuera à se souvenir de ses morts en Algérie le 5 décembre. Pas à une autre date.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
La crise international, les atteintes au drapeau ou à l'hymne national, le sens civique qui semble se déliter : le tableau de notre époque peut nous paraître bien sombre. Mais nous n'avons pas le droit d'être pessimiste. Nous n'avons pas le droit de l'être, parce que nous savons que notre grand et vieux pays sait toujours se ressaisir lorsque tout semble perdu. Souvenons-nous du 18 juin 1940, lorsque le monde entier pensait que c'en était fini de la France. Elle a su trouver en elle-même les raisons d'espérer et de combattre. Et la vieille nation s'est relevée.
Aujourd'hui, pas plus qu'hier, nous n'avons le droit d'être pessimiste, parce que, tous, nous croyons en la France. Belle, grande, généreuse : la France combattante !
Source http://www.defense.gouv.fr, le 19 mai 2010
Cher Hugues Dalleau,
Je voudrais vous remercier des propos que vous venez de tenir.
Pour une raison très simple : à travers vous, c'est le bon sens qui a parlé...
Le bon sens ! Descartes disait, il y a quelques siècles, que c'était la « chose la mieux partagée au monde »...
Je ne suis pas sûr qu'il dirait la même chose aujourd'hui. J'ai même quelques doutes, car, le bon sens, c'est peut-être ce qui manque le plus à un monde qui a perdu ses repères et, parfois, ses idéaux.
Et puis, ce que vous avez dit illustre parfaitement les valeurs dont l'Union nationale des combattants est dépositaire.
Des valeurs d'ouverture, de générosité, de fraternité.
Mais aussi un attachement sans faille à la nation et à ce qu'elle représente.
Et cet attachement-là, cette fidélité incomparable, cet amour de la France, il vient du coeur. Il irrigue chacune des associations que fédère l'UNC. Il rallie entre elles les générations du feu. Il est, pour nous tous, notre bien commun.
Alors permettez-moi de dire toute ma reconnaissance à l'Union nationale des combattants et aux associations qu'elle regroupe.
Partout en France, du plus petit de nos villages jusqu'à la plus grande de nos villes, ce ne sont jamais des intérêts particuliers qu'elles défendent.
Elles n'ont qu'un idéal : servir. Elles unissent les hommes et fédèrent les anciens combattants. Elles répondent présentes quand, dans nos 36 000 communes, on honore devant les monuments le souvenir de nos morts. Elles tissent du lien entre les générations transmettant aux plus jeunes la mémoire combattante. Elles font vivre la camaraderie la plus belle et la plus simple. Elles réinventent, en somme, dans la paix la fraternité acquise dans les armes.
Je voudrais également saisir l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui, Monsieur le Président, cher Hugues Dalleau, pour saluer votre engagement personnel au service du monde combattant. Si nous avons pu avancer sur un certain nombre de dossiers difficiles au cours de l'année qui vient de s'écouler, je sais la part active que vous y avez prise... Je voudrais aujourd'hui vous exprimer, devant tous, ma gratitude.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Il était né à Saint-Rémy-de-Provence et il a exercé longtemps ses talents à Montpellier, mais je crois que l'on n'a pas besoin des dons de prophéties du grand Nostradamus pour deviner, non pas l'avenir, mais le présent.
Nous vivons une période difficile. Une crise exceptionnelle frappe la France comme tous les autres pays du monde. C'est une crise dont les meilleurs économistes disent qu'elle surpasse en gravité la grande dépression de 1929. Regardons ce qui se passe en Grèce pour mesurer l'ampleur du désastre. Le désastre actuel, mais également celui qui risque de bientôt toucher d'autres pays européens. Je pense à nos voisins espagnols et portugais.
En France, le gouvernement a pris des mesures : geler les dépenses de l'Etat, réduire son train de vie, favoriser par tous les moyens la croissance. Ce sont des mesures qui ne sont pas idéologiques. Ce ne sont pas des décisions de droite ou de gauche. Elles sont dictées par la réalité. La réalité implacable des choses. Eh bien, tout le débat médiatique se résume à savoir s'il s'agit d'une politique de « rigueur » ou pas. On ne se demande pas comment servir son pays et le sortir de l'ornière. On se dispute pour un mot...
C'est un signe. Le signe que nous avons changé d'époque et que nous avons, plus que jamais, à réinventer notre modèle national.
Oui, une nation exige, parfois, des sacrifices. Des Poilus de la Grande Guerre à nos soldats qui servent en opérations extérieures, des héros de la Seconde Guerre mondiale aux combattants d'Indochine et d'Algérie, toutes les générations du feu ont éprouvé ce que le service du pays exigeait en sacrifices... Et il s'agissait de sacrifices autrement plus importants que ceux dont on parle aujourd'hui. Il s'agissait de la vie et de la mort...
Cette histoire-là ne s'écrit malheureusement pas au passé. Je pense, aujourd'hui, à nos hommes tombés en Afghanistan. Ils luttent, là-bas, contre l'un des viviers du terrorisme international. Et leur engagement est avant tout un engagement pour notre sécurité nationale.
J'ai pris la décision de réviser les critères d'attribution du statut d'ancien combattant, afin que nos hommes envoyés en Opérations extérieurs puissent en bénéficier. Les formes de la guerre sont nouvelles, la reconnaissance de la nation envers ceux qui la servent et la défendent doit s'adapter.
Les générations qui n'ont pas connu la guerre, celles qui n'ont pas servi sous les drapeaux, ont-elles une seule idée de ce qu'exige parfois une nation ? Pour qu'une nation existe, il faut que chacun de ses citoyens ait conscience d'y appartenir. Pour qu'une nation existe et perdure, il faut que chacun consente des efforts. Bernanos écrivait qu'il n'y avait pas d'orgueil particulier à être Français, mais seulement du travail, un effort permanent, pour s'en montrer digne.
Oui, être Français, cela représente des sacrifices. Cela représente aussi des efforts.
Comme vous, Monsieur le Président, j'ai été choqué par ce qui s'est passé à Nice. Les pouvoirs publics ont choisi d'intervenir et le préfet des Alpes-Maritimes a fait retirer l'inacceptable photo de cette exposition. Nous n'avons pas choisi les grandes déclarations indignées, celles qui généralement soulagent la conscience mais ne changent rien dans les faits. Nous avons choisi l'efficacité, car il aurait été intolérable, à nos yeux, que ce scandale se poursuive un jour de plus.
Aujourd'hui, le temps des questions est venu.
Ce sont des questions d'ordre juridique. Michèle Alliot-Marie, ma collègue garde des Sceaux, a annoncé un texte de loi visant à sanctionner les atteintes à notre drapeau national.
Mais ce sont également des questions morales et politiques : comment dans un pays un individu peut arriver à prétendre faire oeuvre d'art en souillant un symbole national ? Et j'élargirai même la question : comment en vient-on à ce que la Marseillaise soit sifflée dans nos stades ?
Certains de nos concitoyens ne semblent plus avoir conscience de ce qu'être Français veut dire.
Leur a-t-on simplement jamais dit ? Peut-être ont-ils appris l'histoire de leur pays, mais ont-ils suffisamment conscience que cette histoire, c'est la leur et qu'il leur appartient de la poursuivre ?
Oui, être Français, c'est inscrire son destin individuel dans une histoire qui nous dépasse. C'est accepter l'héritage des siècles. L'accepter, pour le transmettre à son tour.
Et les anciens combattants ont un rôle déterminant à jouer. C'est à eux qu'il revient de transmettre la mémoire combattante et les valeurs de notre République.
La mémoire combattante, c'est la mémoire d'une fraternité poussée jusqu'à ses dernières limites. C'est la fraternité des soldats épuisés montant à l'assaut à Verdun. C'est la fraternité héroïque des fusillés du Mont-Valérien qui chantent la Marseillaise face au peloton d'exécution. C'est la fraternité des gars de Bigeard en Indochine. C'est la fraternité des soldats pris en embuscade dans le djebel et voyant tomber l'un des leurs.
Cette fraternité, qui est le socle de nos valeurs républicaines, notre système éducatif a pour mission de l'enseigner. Mais nuls mieux que les anciens combattants peuvent la défendre et la transmettre.
Par le passé, notre pays a eu besoin de vous. Et vous avez été là.
Aujourd'hui, une nouvelle fois encore, il a besoin de vous.
Et je sais que vous répondrez présent. Nous commémorons le 70e anniversaire de la Seconde Guerre mondiale et, chaque fois, je suis admiratif devant l'engagement des anciens Résistants ou des anciens Déportés à aller devant des jeunes pour partager avec eux leur expérience. Certains de nos grands anciens ont déjà un âge avancé, ils connaissent le poids des ans, la fatigue, parfois la maladie. Et pourtant, ils répondent présents, parce qu'ils savent que leur témoignage est irremplaçable.
Etre Français, c'est partager des valeurs. Il y a celles que l'on lit au fronton de nos mairies : liberté, égalité, fraternité... Il y a celles aussi qui en découlent, mais qui sont tout aussi importantes pour notre civilisation. Et parmi ces valeurs, l'égalité entre les hommes et les femmes est l'une des plus fondamentales. C'est la raison pour laquelle on ne peut pas tolérer, en France, que des femmes, de gré ou de force, aient le visage complètement dissimulé aux yeux des autres, pour la seule raison qu'elles sont des femmes... Oui, la France ne veut pas de la burqa. Et je me réjouis que l'Assemblée nationale ait voté mardi, à la quasi-unanimité, une résolution qui rappelle, avec fermeté, les principes de notre République.
Défendre les valeurs qui fondent notre communauté nationale, voilà la tâche qui est aujourd'hui la nôtre. Et défendre ces valeurs, c'est défendre aussi la mémoire de ceux qui ont combattu pour elles.
Nous sommes appelés, plus que jamais, à un devoir de mémoire.
C'est vrai pour la Seconde Guerre mondiale, dont nous célébrons le 70e anniversaire. Face aux révisionnistes et aux négationnistes, nous avons à défendre la vérité historique.
Nous le devons aussi à la mémoire de la Guerre d'Algérie et de ses combattants. C'est la raison pour laquelle le ministère que j'ai l'honneur de conduire travaille de pied ferme à la création de la Fondation pour la mémoire de la Guerre d'Algérie.
Il ne s'agit pas de défendre une vérité d'Etat. Parce qu'il n'y a jamais qu'un pas entre une vérité et un mensonge d'Etat. Non. Il s'agit de défendre la vérité simple, la vérité toute nue. Il s'agit de réunir des historiens et des spécialistes, de récolter les témoignages des anciens combattants et de réaliser sur cette période de notre histoire un travail de réconciliation des mémoires... C'est un travail colossal. Jamais il n'a été effectué. Et c'est un grand manque que nous souhaitons combler.
Mais rien d'autre que la vérité, rien d'autre que la réalité des faits ne peut réconcilier les mémoires entre elles.
Toute une génération est allée combattre en Algérie. Toute une génération a dû choisir le chemin du départ et être rapatriée. Toute une génération a fait le choix de la France puisqu'aucun autre choix n'était permis lorsqu'on était harki...
En créant aujourd'hui la Fondation pour la mémoire de la Guerre d'Algérie, nous voulons que perdure et que se transmette cette mémoire combattante.
Nous n'avons pas à craindre la vérité de l'histoire.
Nous savons ce que fut la présence française en Algérie. Nous savons ce que le système colonial comptait en injustices de tous ordres. Mais nous savons aussi ce que les Français d'Algérie ont apporté à ce beau et grand pays.
Non, la vérité de l'histoire ne nous fait pas peur.
Elle ne nous fait pas peur, sauf lorsqu'on veut la travestir ou la maquiller.
Ce que nous avons à redouter, ce sont les discours simplificateurs, les appels à la repentance perpétuelle tout comme les continuels élans de la nostalgie. Face à tous ces discours, la Fondation que nous créons opposera le travail rigoureux des historiens.
Ce que nous avons à redouter, ce sont aussi les lâches abandons... Qu'un ministre un jour fasse du 19 mars la date commémorant la fin de la guerre d'Algérie, alors l'idéologie aura pris le pas sur la réalité historique. Ce ministre, ce ne sera pas moi. Et, sous l'autorité de Nicolas Sarkozy, notre président de la République, la France continuera à se souvenir de ses morts en Algérie le 5 décembre. Pas à une autre date.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
La crise international, les atteintes au drapeau ou à l'hymne national, le sens civique qui semble se déliter : le tableau de notre époque peut nous paraître bien sombre. Mais nous n'avons pas le droit d'être pessimiste. Nous n'avons pas le droit de l'être, parce que nous savons que notre grand et vieux pays sait toujours se ressaisir lorsque tout semble perdu. Souvenons-nous du 18 juin 1940, lorsque le monde entier pensait que c'en était fini de la France. Elle a su trouver en elle-même les raisons d'espérer et de combattre. Et la vieille nation s'est relevée.
Aujourd'hui, pas plus qu'hier, nous n'avons le droit d'être pessimiste, parce que, tous, nous croyons en la France. Belle, grande, généreuse : la France combattante !
Source http://www.defense.gouv.fr, le 19 mai 2010