Entretien de M. Pierre Lellouche, secrétaire d'Etat aux affaires européennes, dans "Ouest-France" du 7 juin 2010, sur la politique d'immigration au sein de l'Union européenne.

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Média : Ouest France

Texte intégral

Q - La Commission européenne vient de proposer de libéraliser les visas pour les Bosniens et les Albanais. Vous ne semblez pas d'accord ?
R - Nous sommes pour l'intégration de tous les pays des Balkans à l'Union européenne. Mais cela doit se faire selon le principe "chacun selon ses mérites" dans le strict respect des conditions posées par les Etats membres de l'Union européenne. Libéraliser les visas suppose des préalables rigoureux : un Etat de droit, solide, un système de surveillance des frontières, des passeports biométriques fiables. La Bosnie-Herzégovine et l'Albanie doivent encore remplir des conditions, comme le souligne d'ailleurs la Commission. Les visas, c'est la gestion des flux migratoires. C'est donc très sérieux.
Q - Vous estimez que l'Europe ne prend pas au sérieux la politique migratoire ?
R - Non. Notre principale source d'immigration illégale en Europe provient de Turquie et passe par la Grèce. La Grèce a arrêté l'année dernière plus de 150.000 personnes. Mais elle ne peut pas faire face toute seule. Avec 14 000 kms de frontières, c'est difficile. L'Europe a besoin de plus de moyens pour contrôler les flux d'immigration. C'est ce que soutient la France. L'Europe doit aider la Grèce dans son contrôle de l'immigration. C'est aussi conséquent que les déficits.
Q - La question des Roms vous semble poser problème aussi ?
R - Oui. Il y a 9 millions de Roms en Europe et plusieurs centaines de milliers en France qui proviennent pour l'essentiel de Roumanie. Nous avons, là, un Quart monde dans l'Union européenne, avec des conditions insupportables de traitement des femmes et des enfants. Ce qui se passe dans les camps roms est inacceptable. Ce trafic d'enfants, ces mariages arrangés, parfois dès l'âge de 12-13 ans, ce chiffre d'affaires qu'on fixe pour les femmes qui mendient,... c'est de l'esclavage. Il ne faut pas se voiler la face. Je n'ai pas fait l'Europe pour voir cela. L'Europe doit apporter un "plus" à nos populations, pas un "moins". La Roumanie aussi doit s'occuper de ses citoyens. L'Europe verse à la Roumanie 20 milliards d'euros sur sept ans au titre de la politique régionale, assorti d'un mécanisme de contrôle. Il faut l'appliquer. Ces fonds doivent aussi servir à l'intégration des Roms dans leur pays d'origine.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 8 juin 2010