Texte intégral
Madame et Monsieur les sénateurs, chère Muguette Dini, cher Alain Gournac,
Messieurs les députés, chers Bernard Gérard, Jean-Pierre Decool, Pierre Morel-à-l'Huissier,
Mesdames, Messieurs,
Nous sommes le 9 juin 2010. Il y a exactement un an, le 9 juin 2009, l'Assemblée nationale adoptait en première lecture la proposition de loi « pour faciliter le maintien et la création d'emplois » défendue par Jean-Frédéric Poisson, à la rédaction de laquelle plusieurs d'entre vous avaient activement participé.
L'objectif du télétravail est de promouvoir plus de souplesse dans l'organisation du travail. Il entend réconcilier la croissance économique et le développement durable. Déjà, lors du Grenelle de l'environnement, afin de réduire les déplacements et les émissions de dioxyde de carbone dans l'atmosphère, Jean-Pierre Decool et Bernard Gérard avaient proposé un amendement visant à promouvoir le télétravail. En effet, le télétravail, même à temps partiel, diminue le recours aux transports, et donc la consommation d'énergie et la pollution, en même temps qu'il diminue la fatigue du salarié et le coût de ses déplacements.
Le nombre de télétravailleurs « officiels » est faible en France, en comparaison de nos voisins européens ou nord-américains. Le chiffre de 7% des salariés, souvent cité, date de plusieurs années et doit sans doute être revu à la hausse. Néanmoins, nous sommes incontestablement en deçà du nombre de télétravailleurs potentiels. La demande existe chez les salariés. Tout d'abord, dans les grandes entreprises liées aux nouvelles technologies, au consulting, aux services financiers ou à la communication. Un accord vient ainsi d'être signé chez Atos Origin, qui s'ajoute à ceux signés au cours des dernières années chez Alcatel-Lucent, chez Renault, chez Microsoft France... Mais, plus globalement, une part importante des cadres peut pratiquer le télétravail, ou même le pratique déjà de manière officieuse.
Même si la proposition de loi n'a pas encore fait l'objet d'un examen au Sénat, le gouvernement a mis à profit cette année pour faire progresser l'environnement propice au télétravail.
Pour télétravailler, il faut d'abord disposer d'un accès Internet à haut débit. Je souhaite rappeler l'engagement du Gouvernement d'apporter à tous les Français, avant la fin de l'année 2012 et sur l'ensemble du territoire, l'accès au haut débit.
Les réseaux très haut débit représentent aujourd'hui un enjeu majeur pour la France, avec plusieurs milliards d'euros d'investissements dès les prochaines années. Une première étape a été franchie avec l'adoption, par le Parlement, de la loi n°2009-1572 relative à la lutte contre la fracture numérique. Cette loi prévoit tout d'abord un cadre législatif pour le développement des réseaux à très haut débit dans les zones denses et moyennement denses de notre territoire. Ensuite, afin que ces réseaux puissent être déployés sur l'ensemble du territoire, la loi prévoit plusieurs dispositifs, notamment :
- la mise en place de schémas directeurs territoriaux à l'échelon minimal du département ;
- la création d'un statut d'investisseur minoritaire des collectivités locales dans réseaux très haut débit ;
- la mise en oeuvre d'un fonds d'aménagement numérique de nos territoires au profit des zones les moins denses.
Par ailleurs, le très haut débit fait partie des priorités en matière d'investissements d'avenir. 2 milliards d'euros des investissements d'avenir y seront consacrés.
Les infrastructures sont une condition nécessaire, mais pas suffisante. La manière de les utiliser compte aussi. J'ai commandé l'an dernier au Centre d'analyse stratégique un rapport sur « Le développement du télétravail dans la société numérique de demain ». Ce rapport souligne que depuis au moins dix ans, la France est en retard sur les principaux pays de l'OCDE en matière de développement du télétravail. Les principaux leviers pour le développement du télétravail en France sont, selon le rapport, au nombre de quatre :
1. une évolution de la culture managériale française en lien avec des transformations des modes d'organisation du travail ;
2. une meilleure connaissance des gains envisageables grâce au télétravail, favorisée par le développement d'informations de référence sur le sujet ;
3. la mise à disposition d'infrastructures numériques de qualité à l'échelle de l'ensemble du territoire, mixant haut débit, 3G et télécentres ;
4. la diffusion d'outils techniques performants, accessibles, fiables et de moins en moins onéreux, préalable à tout télétravail formalisé au sein des entreprises. Les questions de sécurité des données et de gestion de la vie privée doivent cependant faire partie des réflexions sur les technologies.
Le télétravail et plus largement le travail avec des outils numériques transforment profondément les relations de travail. En effet, ils mettent à mal les concepts usuels du temps de travail et les frontières entre vie professionnelle et vie privée. Un équilibre doit être trouvé entre ces différentes contraintes. Il apparaît que le télétravail est le plus profitable, aussi bien au salarié qu'à l'entreprise, lorsqu'il est partiel, à hauteur de 2 jours par semaine.
En raison des situations spécifiques de chaque entreprise et de chaque salarié, il importe que le télétravail fasse l'objet d'un « double volontariat », par chacune des parties. Ses modalités doivent faire l'objet d'une négociation avec les représentants des salariés.
Le rapport estime que le potentiel de développement du télétravail pourrait concerner jusqu'à 40 % à 50 % des emplois à l'horizon de dix ans. Certes, toutes les fonctions ne sont pas « télétravaillables », notamment dès lors qu'elles n'utilisent pas les outils numériques. Le développement du télétravail repose donc sur une diffusion large et importante dans les métiers qui lui sont particulièrement propices (emplois de cadres et d'ingénieurs, fonctions administratives support, fonctions intellectuelles, etc.).
Enfin, suite aux débats du printemps dernier sur les possibles conséquences néfastes du télétravail pour les salariés, j'avais demandé au CAS d'étudier si des cas d'abus avaient été constatés dans les pays de l'OCDE, notamment concernant les femmes en congé de maternité ou les salariés en congé maladie. J'ai le plaisir de constater qu'aucun cas d'abus n'a été signalé dans aucun des pays de l'OCDE.
Ce rapport nous permet donc de dédramatiser le télétravail.
Il nous reste maintenant à favoriser l'offre de télétravail. Les entreprises doivent faire évoluer leurs mentalités, et les salariés doivent disposer des outils nécessaires, soit chez eux, soit dans des télécentres. Il faut inventer une nouvelle organisation des entreprises, et une nouvelle organisation des villes. C'est pourquoi, dans la consultation publique que je viens de lancer sur la partie « usages numériques » des investissements d'avenir, figure une thématique « ville numérique ». Le télétravail figure dans cette thématique. Je vous invite donc tous à répondre à cette consultation, et à proposer des contributions constructives sur les investissements à réaliser dans le télétravail.
C'est par des actions concrètes que nous pourrons, aussi, faire progresser la cause du télétravail.
Je vous remercie.Source http://www.prospective-numerique.gouv.fr, le 10 juin 2010
Messieurs les députés, chers Bernard Gérard, Jean-Pierre Decool, Pierre Morel-à-l'Huissier,
Mesdames, Messieurs,
Nous sommes le 9 juin 2010. Il y a exactement un an, le 9 juin 2009, l'Assemblée nationale adoptait en première lecture la proposition de loi « pour faciliter le maintien et la création d'emplois » défendue par Jean-Frédéric Poisson, à la rédaction de laquelle plusieurs d'entre vous avaient activement participé.
L'objectif du télétravail est de promouvoir plus de souplesse dans l'organisation du travail. Il entend réconcilier la croissance économique et le développement durable. Déjà, lors du Grenelle de l'environnement, afin de réduire les déplacements et les émissions de dioxyde de carbone dans l'atmosphère, Jean-Pierre Decool et Bernard Gérard avaient proposé un amendement visant à promouvoir le télétravail. En effet, le télétravail, même à temps partiel, diminue le recours aux transports, et donc la consommation d'énergie et la pollution, en même temps qu'il diminue la fatigue du salarié et le coût de ses déplacements.
Le nombre de télétravailleurs « officiels » est faible en France, en comparaison de nos voisins européens ou nord-américains. Le chiffre de 7% des salariés, souvent cité, date de plusieurs années et doit sans doute être revu à la hausse. Néanmoins, nous sommes incontestablement en deçà du nombre de télétravailleurs potentiels. La demande existe chez les salariés. Tout d'abord, dans les grandes entreprises liées aux nouvelles technologies, au consulting, aux services financiers ou à la communication. Un accord vient ainsi d'être signé chez Atos Origin, qui s'ajoute à ceux signés au cours des dernières années chez Alcatel-Lucent, chez Renault, chez Microsoft France... Mais, plus globalement, une part importante des cadres peut pratiquer le télétravail, ou même le pratique déjà de manière officieuse.
Même si la proposition de loi n'a pas encore fait l'objet d'un examen au Sénat, le gouvernement a mis à profit cette année pour faire progresser l'environnement propice au télétravail.
Pour télétravailler, il faut d'abord disposer d'un accès Internet à haut débit. Je souhaite rappeler l'engagement du Gouvernement d'apporter à tous les Français, avant la fin de l'année 2012 et sur l'ensemble du territoire, l'accès au haut débit.
Les réseaux très haut débit représentent aujourd'hui un enjeu majeur pour la France, avec plusieurs milliards d'euros d'investissements dès les prochaines années. Une première étape a été franchie avec l'adoption, par le Parlement, de la loi n°2009-1572 relative à la lutte contre la fracture numérique. Cette loi prévoit tout d'abord un cadre législatif pour le développement des réseaux à très haut débit dans les zones denses et moyennement denses de notre territoire. Ensuite, afin que ces réseaux puissent être déployés sur l'ensemble du territoire, la loi prévoit plusieurs dispositifs, notamment :
- la mise en place de schémas directeurs territoriaux à l'échelon minimal du département ;
- la création d'un statut d'investisseur minoritaire des collectivités locales dans réseaux très haut débit ;
- la mise en oeuvre d'un fonds d'aménagement numérique de nos territoires au profit des zones les moins denses.
Par ailleurs, le très haut débit fait partie des priorités en matière d'investissements d'avenir. 2 milliards d'euros des investissements d'avenir y seront consacrés.
Les infrastructures sont une condition nécessaire, mais pas suffisante. La manière de les utiliser compte aussi. J'ai commandé l'an dernier au Centre d'analyse stratégique un rapport sur « Le développement du télétravail dans la société numérique de demain ». Ce rapport souligne que depuis au moins dix ans, la France est en retard sur les principaux pays de l'OCDE en matière de développement du télétravail. Les principaux leviers pour le développement du télétravail en France sont, selon le rapport, au nombre de quatre :
1. une évolution de la culture managériale française en lien avec des transformations des modes d'organisation du travail ;
2. une meilleure connaissance des gains envisageables grâce au télétravail, favorisée par le développement d'informations de référence sur le sujet ;
3. la mise à disposition d'infrastructures numériques de qualité à l'échelle de l'ensemble du territoire, mixant haut débit, 3G et télécentres ;
4. la diffusion d'outils techniques performants, accessibles, fiables et de moins en moins onéreux, préalable à tout télétravail formalisé au sein des entreprises. Les questions de sécurité des données et de gestion de la vie privée doivent cependant faire partie des réflexions sur les technologies.
Le télétravail et plus largement le travail avec des outils numériques transforment profondément les relations de travail. En effet, ils mettent à mal les concepts usuels du temps de travail et les frontières entre vie professionnelle et vie privée. Un équilibre doit être trouvé entre ces différentes contraintes. Il apparaît que le télétravail est le plus profitable, aussi bien au salarié qu'à l'entreprise, lorsqu'il est partiel, à hauteur de 2 jours par semaine.
En raison des situations spécifiques de chaque entreprise et de chaque salarié, il importe que le télétravail fasse l'objet d'un « double volontariat », par chacune des parties. Ses modalités doivent faire l'objet d'une négociation avec les représentants des salariés.
Le rapport estime que le potentiel de développement du télétravail pourrait concerner jusqu'à 40 % à 50 % des emplois à l'horizon de dix ans. Certes, toutes les fonctions ne sont pas « télétravaillables », notamment dès lors qu'elles n'utilisent pas les outils numériques. Le développement du télétravail repose donc sur une diffusion large et importante dans les métiers qui lui sont particulièrement propices (emplois de cadres et d'ingénieurs, fonctions administratives support, fonctions intellectuelles, etc.).
Enfin, suite aux débats du printemps dernier sur les possibles conséquences néfastes du télétravail pour les salariés, j'avais demandé au CAS d'étudier si des cas d'abus avaient été constatés dans les pays de l'OCDE, notamment concernant les femmes en congé de maternité ou les salariés en congé maladie. J'ai le plaisir de constater qu'aucun cas d'abus n'a été signalé dans aucun des pays de l'OCDE.
Ce rapport nous permet donc de dédramatiser le télétravail.
Il nous reste maintenant à favoriser l'offre de télétravail. Les entreprises doivent faire évoluer leurs mentalités, et les salariés doivent disposer des outils nécessaires, soit chez eux, soit dans des télécentres. Il faut inventer une nouvelle organisation des entreprises, et une nouvelle organisation des villes. C'est pourquoi, dans la consultation publique que je viens de lancer sur la partie « usages numériques » des investissements d'avenir, figure une thématique « ville numérique ». Le télétravail figure dans cette thématique. Je vous invite donc tous à répondre à cette consultation, et à proposer des contributions constructives sur les investissements à réaliser dans le télétravail.
C'est par des actions concrètes que nous pourrons, aussi, faire progresser la cause du télétravail.
Je vous remercie.Source http://www.prospective-numerique.gouv.fr, le 10 juin 2010