Texte intégral
Merci d'être en direct avec nous ce matin sur France Info. On va évidemment parler des retraites, avec vous, mais d'abord je voudrais vous demander un commentaire sur cette affaire révélée dans Le Canard Enchaîné, le cabinet de la secrétaire d'Etat à la Ville admet d'ailleurs que F. Amara a hébergé, héberge même occasionnellement des membres de sa famille dans un logement de fonction. Vous en dites quoi, vous, ce matin, G. Tron ? Vous aviez eu aussi quelques soucis, en parlant d'appartement.
Oui, pardon de le redire, mais si vous commencez par là, commençons par là. Chaque situation est particulière. Je redis sans difficultés, avec le même ton qu'il y a de cela deux mois, en ce qui me concerne, je suis rentré avec ma famille dans un appartement, il y a 20 ans, je paie plus de 2 000 euros de loyer, c'est un appartement qui n'est pas un appartement HLM, je l'ai expliqué, mais combien c'est difficile de pouvoir faire passer la vérité. Cela étant, je n'ai pas d'autre commentaire à faire que celui-ci, pour ce qui concerne les autres. En ce qui concerne les logements de fonction, moi je n'en ai pas ; il me paraît utile, simplement, d'appliquer à la lettre la « jurisprudence » qu'a mis en place J.-P. Raffarin il y a plusieurs années. Il est évident que les ministres qui n'ont pas d'habitation à Paris ont besoin d'être logés, c'est un travail à peu près 18 heures sur 24, ils ont donc un logement de fonction. Je crois qu'il faut que le logement soit pour eux, et que ce logement...
Là, ce qui est contesté, c'est qu'elle a un logement, F. Amara elle a son propre logement, visiblement c'est le fait qu'elle puisse recevoir des membres de sa famille, qui bénéficient finalement d'avantages en nature.
Je ne suis pas à même de répondre à la question de F. Amara, que je ne connais pas. Ce que je sais c'est que si elle y loge, elle, tout le temps, et qu'elle y reçoit une fois de temps en temps, quand il y a quelqu'un qui passe, ce n'est pas choquant. Si c'est un habitat, ce qui n'est pas le cas, manifestement, habituel, ça pose problème. Donc, je le répète, il y a une jurisprudence Raffarin qui, en gros, aboutit à ce que l'on ait une superficie limitée pour y héberger sa famille, je ne connais pas les conditions de la vie familiale de F. Amara, je dis simplement qu'il suffit d'avoir la jurisprudence Raffarin qui s'applique.
Alors, G. Tron, on va évoquer la politique. Vous avez vu, je suppose, qu'hier, D. de Villepin était à Mantes-la-Jolie, au Val- Fourré, il va lancer son mouvement, le 19, vous y serez ?
Je ne peux pas vous répondre aujourd'hui, je n'ai aucun problème à y aller, la question c'est : est-ce que le débat sur les retraites va accaparer le ministre de la fonction publique... le secrétaire d'Etat à la Fonction publique que je suis, dans le même jour, c'est toute la question. En tout cas, j'ai observé hier que D. de Villepin avait fait une visite, comme on dit, sur le terrain, pour évoquer un problème que je connais bien, je suis maire de Draveil, c'est celui de la politique de la Ville et c'est un vrai sujet.
Vous êtes toujours « villepiniste », G. Tron ?
Je suis toujours « villepiniste », je vois régulièrement D. de Villepin et je n'ai aucun problème d'amitié avec lui.
Vous êtes d'accord quand il dit : il faut donner la parole à des « vrais gens » et confier la politique à des « vrais gens » ?
Eh bien, oui, enfin, je... Oui, je considère cela dit qu'en général, le personnel politique c'est plutôt des vrais gens, je ne sais pas qui est exclus par ces propos.
Et est-ce qu'il a un espace, éventuellement, demain, après demain, pour se présenter ?
Il a un espace dans la majorité et c'est pour moi, et j'en ai discuté plusieurs fois avec lui, je le referai prochainement, un sujet indispensable à traiter. Il faut que nous soyions tous bien conscients que la majorité ne peut pas se diviser, que D. de Villepin est une voix de la majorité, d'ailleurs je crois qu'il n'a jamais nié cet engagement dans la majorité, ça veut donc dire qu'il doit participer à un débat constructif dans la majorité.
Alors, vous parliez de calendrier, vous parliez du 19, vous me disiez il y a quelques instants « je ne sais pas si je pourrai être auprès de D. de Villepin ce jour-là, parce que peut-être retenu par le dossier des retraites ». Précisément, est-ce qu'on en sait plus sur le calendrier ? Quand est-ce que les lettres d'orientation vont être envoyées aux syndicats, dans ces eaux-là ?
Oui, dans ces eaux-là. Ce n'est d'ailleurs pas une surprise, le Gouvernement a indiqué dès le début qu'il y aurait un premier document d'orientation, mi-mai, ça a été le cas, l'avant-projet de loi mi-juin, mi-juin c'est entre le 15, le 20, par-là, ça veut dire que ce sera respecté et que ça passera au Conseil des ministres à peu près mi-juillet, juste avant le 15, juste après le 15, je ne le sais pas. Donc on est exactement dans le calendrier. Ça a débuté, si je peux m'exprimer ainsi, en terme de concertation, mi-mars ; on ira au débat au Parlement à l'automne, ça veut dire que, sans faire de prévisions difficiles à cadrer, on terminera tout cela, si tout se passe normalement, vers octobre, fin octobre/novembre, on aura donc eu 6 à 7 mois d'un débat sur un sujet qui a été largement défriché par le Conseil d'orientation des retraites en particulier, c'est un vrai débat, c'est une vraie concertation.
Précisément, tout le monde est concerné par les retraites, y compris les fonctionnaires. Il y a autre chose qui les préoccupe en ce moment, c'est qu'il y a une augmentation, qui est prévue au 1er juillet, 0,5, si je ne me trompe pas, elle a été actée l'an dernier, elle était négociée. Est-ce que, compte tenu du contexte actuel, on serre quand même pas mal les boulons, est-ce que cette augmentation est maintenue, G. Tron ?
On ouvre la discussion avec les organisations syndicales sur ces sujets, dans à peu près 15 jours, trois semaines. Et on aura une discussion qui durera plusieurs jours, puisque ce sera sur juin et sur juillet. Je voudrais vous faire remarquer que la France ayant plutôt mieux géré la période difficile de la crise, il n'est pas question chez nous d'évoquer ce qui se passe dans à peu près la majorité des pays européens, à savoir la baisse des rémunérations des fonctionnaires et ensuite le gel de ces rémunérations. Nous on va ouvrir une discussion avec les syndicats...
Ça, ça n'est pas évoqué, pour l'instant.
Non, on n'est pas...
Et ça n'est pas d'actualité.
On n'est pas du tout dans cette actualité-là, on aura une discussion pour voir très précisément où on en est, on verra quelle est l'augmentation, comme vous l'avez très justement dit, ou la stabilisation du point d'indice. On verra quelle est la différence entre le point d'indice, qui est en fait le point d'augmentation générale et puis quelle est la réalité du pouvoir d'achat des fonctionnaires. Je vous donne un seul chiffre, qui est parlant : l'année dernière, le point d'indice a augmenté de 0,5 %, le pouvoir d'achat des fonctionnaires a augmenté de plus de 3, on voit bien qu'il y a un décalage entre le point d'indice et le pouvoir d'achat. Cela étant, je le répète, la discussion sur le point d'indice est totalement ouverte.
Vous êtes en train de me laisser entendre qu'effectivement, il est possible que ce 0,5 se transforme en 0,3, 0,2, peut-être moins ?
Non, je ne vous laisse pas entendre les choses, je vous laisse entendre, comme sur d'autres sujets, que la discussion est tout à fait ouverte mais que l'on est certainement pas dans le cadre d'une discussion aussi contrainte que certains de nos partenaires ont été obligés de le faire.
Les inquiétudes, quand même, G. Tron, sont réelles, sur le pouvoir d'achat, concernant les fonctionnaires, mais tout le monde ; si par exemple il y a des augmentations de cotisations de retraite des fonctionnaires, ça revient, de fait, à faire baisser les salaires, non ?
On ne peut pas, si vous voulez, prendre un sujet de cette nature et donner déjà une piste aussi précisément. Disons les choses avec clarté. Dans le privé, tous les salariés qui nous écoutent ont un taux de cotisation de 10,65 %. Dans la Fonction publique, ce taux de cotisation est de 7,85 %, c'est l'un des sept ou huit sujets que nous avons expertisés comme étant une différence entre le public et le privé. Certaines différences privilégient le public, certaines différences privilégient le privé. Sur le taux de cotisation que vous évoquez, c'est une réalité, il y a trois points d'écart. La question est la suivante : est-ce que l'on peut considérer qu'il est équitable, qu'il est normal, que pour avoir une retraite d'à peu près le montant équivalent, on paie trois points de plus dans le secteur privé que dans le secteur public ? Comme je le répète, il y a des avantages dans certains des deux secteurs, il faut mettre tout ça dans une bascule et dans une balance. Et donc, par définition, c'est ce que nous faisons. Il n'y a aucun sujet tabou, il n'y a aucune décision qui est prise, en réalité on voit les choses et on les regarde de près, pour le moment venu, présenter quelque chose qui devra répondre à un principe d'équité. Cette réforme est une réforme...
Mais c'est une piste qui est envisagée.
C'est un des sujets qui est étudié. Et donc, cette réforme, qui est une réforme qui se voudra équitable, doit mettre tout sur la table.
Donc on va vers un alignement privé/public, quoi qu'il en soit.
Non, certainement pas un alignement, parce que les régimes sont trop différents. On est dans la situation où l'on voit ce qui peut être modifié dans le régime de la Fonction publique, dans le sens de l'équité, mais je le répète, il y a dans l'autre sens, des mesures qui sont plus favorables au privé. Prenez le cas par exemple des pensions de réversion pour les veuves, vous avez un taux de 54 % dans le secteur privé, il est de 50 % dans le secteur public.
Vous parlez tout à l'heure de la situation dans les autres pays, précisément, en Italie, on ne remplace pas un fonctionnaire sur 5. Est-ce que c'est quelque chose que nous, on peut envisager de faire aujourd'hui, ou demain peut-être ?
Non, le président de la République...
C'est exclu.
Le président de la République, comme le Premier ministre et E. Woerth et moi-même, répétons depuis plusieurs mois que nous sommes dans une logique qui est une logique de restructuration. Nous avons une Fonction publique qui compte 5 200 000 agents, dont 2 200 000 à l'Etat. Nous avons supprimé 100 000 agents, et encore le chiffre est à peine atteint, nous sommes donc dans une logique sur 1 sur 2 qui ne s'applique pas de façon uniforme à tous les ministères, mais qui s'applique dans certaines administrations, où les progrès notamment de l'informatique et de la télécommunication permettent des économies. On serait la seule entité au monde à ne pas réaliser des économies lorsque, à l'occasion de départs à la retraite, on peut avoir des marges générées par ces nouveaux modes de technologie.
La question que je pose quasiment à tous mes invités, mais sans forcément avoir de réponse : l'âge légal de départ à la retraite, pour vous, G. Tron, le bon, aujourd'hui, ce serait quoi ?
Ce serait celui qui permettrait d'assurer notre système par répartition dans les prochaines années, tout en mesurant bien que l'équité devra nous inspirer quand on l'arrêtera. Ce n'est pas une réponse langue de bois. Je ne crois pas.
Vous ne croyez pas. Eh bien écoutez, les auditeurs de France Info se feront leur avis. Merci en tout cas, G. Tron, d'avoir été avec nous ce matin, sur France Info.
Merci à vous.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 3 juin 2010