Texte intégral
L. Bazin.- Notre invité politique c'est E. Besson, bonjour.
Bonjour.
Ministre de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du Développement solidaire. Je suis sûr qu'on ne vous la fait pas souvent en entier, le titre. Ça fait de vous le ministre du « Drapeau » aussi, d'une certaine manière le ministre du « Maillot ». Je voudrais savoir ce que vous, amateur de foot, avez ressenti en apprenant hier après l'affaire Anelka, après les insultes, après l'exclusion que les joueurs avaient fait grève : « des millionnaires qui font grève » comme dirait J.-L. Mélenchon.
Je suis comme tous les Français, comme tous les amoureux du football, j'ai été consterné, blessé, attristé, je peux additionner tous les adjectifs par ces images. Je me suis dit « mais qu'est-ce qui leur prend, est-ce qu'ils se rendent compte, est-ce qu'il y en a un parmi eux qui se rend compte de l'image en France et à l'étranger qu'ils renvoient ». Ils pouvaient éventuellement - on verra - discuter la sanction qui a été prise contre Anelka, mais ne pas se rendre à l'entraînement à 2 jours d'un match qui reste capital, parce que le paradoxe de l'histoire, tout le monde l'oublie, c'est que la France peut encore se qualifier, et renvoyer cette image au monde entier c'est affligeant.
Est-ce qu'on a ridiculisé la France ?
Oui, oui un peu, oui, à l'étranger tout le monde se moque de nous. On peut dire « ça n'est que du sport, que du jeu », mais ça a une valeur symbolique...
C'est le maillot donc, c'est le drapeau ?
Bien sûr que c'est le maillot, c'est le drapeau, c'est tout ce que vous voulez. Ce sont des joueurs professionnels sélectionnés en équipe de France, il faut qu'ils redeviennent joueurs, pour l'instant ils n'ont pas montré grand-chose et on est nombreux à les avoir, moi le premier, soutenus dans la difficulté. Là, on a envie de leur dire « retournez vite sur le terrain et vous rejouez vite au ballon ». Ce sont des professionnels, ils ne sont pas comportés en professionnels, notamment hier mais pas seulement hier, et ils sont sélectionnés en équipe de France. Ça veut dire qu'ils ont une responsabilité pédagogique vis-à-vis du monde amateur, vis-à-vis des jeunes que nos éducateurs forment tous les week-ends sur le terrain, et toutes les semaines, deux à trois fois par semaine, ils ont des responsabilités particulières. J'ai eu le sentiment hier, en regardant les images, qu'ils ne se rendaient pas compte de leur responsabilité. Alors je crois qu'honnêtement il y a deux temps : jusqu'à demain, il faut d'abord que la mascarade cesse et qu'on se préoccupe du ballon, que le calme revienne...
Ces joueurs, mardi soir peuvent comme si de rien n'était jouer sous le maillot de l'équipe de France ?
De toute façon...
Ils engagent encore la France « footballistiquement » parlant ?
De toute façon nous n'avons pas le choix, quelle est l'autre solution ? Dire « la France déclare forfait »...
On pourrait, après tout on pourrait dire...
Non, non, non.
« Toi tu as mauvais esprit, toi tu as bon esprit ». Ce n'est pas imaginable pour vous, il faut encore gagner d'abord quoi ?
D'abord jouer par respect pour les Africains du Sud, les Sud-africains qui, eux, jouent aussi leur qualification. Par respect...
Vous croyez qu'ils ne jouent pas...
Non, je ne dis pas cela, je dis simplement il faut jouer au sens « il faut bien jouer, il faut assumer son rôle de professionnels ».
Très bien, et après comment on sanctionne ce qui s'est passé, est-ce qu'il faut le sanctionner d'ailleurs ?
D'abord après, il faut essayer de comprendre parce qu'il y a plusieurs versions qui circulent : oui ou non Anelka a-t-il dit ce qui lui est prêté ?
Pardon, on est presque au-delà de ça déjà !
Non, non, ce n'est pas rien parce que si je comprends bien quand même, la réaction des joueurs c'est de dire « il ne l'a pas dit et donc nous sommes solidaires ». Ils ont décidé, j'allais dire de mourir pour Anelka. Vu d'ici, ça paraît un peu gros, mais il faut quand même essayer de comprendre ce qui s'est passé. Qui savait... comment Domenech a-t-il pu accepter de lire le communiqué des joueurs ? Qu'est-ce que savait le président de la Fédération française ? C'est pour ça que je dis « je crois qu'il y a deux temps », et là je m'exprime en tant qu'amoureux du football, pas en tant que ministre, le ministre seul qualifié à aller sur place c'est la ministre des Sports. Mais moi, l'amateur de football, je dis voilà : d'abord on joue demain soir contre l'Afrique du Sud et on essaie de sauver ce qui peut l'être, d'abord l'honneur et éventuellement la qualification ; et puis ensuite il faudra juste après essayer de tirer les choses au clair et que chacun prenne toutes ses...
Ça veut dire quoi, je ne comprends pas, ça veut dire quoi, ça veut dire demander à J.-P. Escalettes de remettre sa démission ?
Ça veut dire d'abord... ils nous doivent tous la vérité sur ce qui s'est passé, et pas seulement depuis hier, depuis un mois : oui ou non, les histoires de clans, de gangs, de bandes, de mise à l'écart de Gourcuff, etc., on a tous dit, moi le premier, « c'est invraisemblable », au bout d'un moment...
...Commencez à le croire ?
On se pose des questions en tout cas, il faut une explication là-dessus...
Il y aurait le clan des gentils Blancs mis à l'écart et des méchants musulmans et des Noirs agressifs ?
Non et j'espère que ça n'est pas ça, et moi j'ai défendu la thèse que ça ne pouvait pas être ça au regard du parcours des joueurs, au regard de leur valeur, etc. Mais au bout d'un moment, tant de témoignages qui rendent compte d'un climat délétère au sein de l'équipe de France, on en revient à se poser des questions. La deuxième chose, c'est qu'il faudra quand même éclaircir la scène de la mi-temps : qui a fait quoi, qui savait quoi, et pourquoi quand même ça n'a été sanctionné réellement - si les propos d'Anelka sont avérés - que 48 heures après et pas sur l'instant. Donc je pense que c'est toute la chaîne de commandement, toute la chaîne de responsabilité. Le vivre ensemble, ça demande autorité : respect mutuel, respect de la règle, respect de l'entraîneur, respect des coéquipiers et là, cette société du respect elle a de toute façon implosé. Qui, pourquoi, comment, sous quelle responsabilité ? Les joueurs de l'équipe de France doivent aux amoureux du football, pas au ministre mais doivent aux amoureux du football des explications.
Il y a donc un problème d'identité nationale dans cette identité tout court ?
Non, j'ai toujours peur de...
Je vous lis la phrase d'A. Finkielkraut, je vous sens prudent, vous êtes ministre après tout, il faut être prudent quand on est ministre : « cette équipe avec ces clans et ces divisions ethniques, dit A. Finkielkraut, renvoie à la France l'image de sa désunion et de sa déliquescence ».
Je crois qu'il ne faut pas tisser ou tresser des passerelles trop rapidement entre le football et la déclinaison politique. Que ça donne en ce moment une image délabrée de la France à l'étranger, c'est une certitude. Mais moi j'ai des souvenirs...
Donc les Bleus ne sont pas la France, voilà ce que vous nous dites ce matin...
Exactement. 1998, la France « black blanc beur », la fête dans les rues, les Champs-Élysées. 21 avril 2002, 3 ans après, Le Pen au 2ème tour de l'élection présidentielle. Et pourtant nous avions tous célébré, moi aussi, la France réconciliée avec elle-même, harmonisée, etc. Donc les déductions politiques faciles, je pense qu'il faut s'en méfier, même si je ne dis pas que ça ne révèlerait rien, c'est pour ça que j'ai évoqué sociét?? du respect, du respect mutuel et du respect d'un certain nombre de valeurs, dont l'autorité.
Vous souhaitez franchement que cette équipe gagne face à l'Afrique du Sud et se qualifie ? On ne veut pas en finir maintenant ?
Non, moi je ne me résoudrai jamais - j'avoue que c'est peut-être la fois où je me suis posé la question hier soir, c'est vrai, mais je ne me résoudrai jamais - à ne pas supporter, à ne pas souhaiter la victoire de l'équipe de France. Mais je voudrais surtout... c'est la première fois que le résultat m'importe peu demain soir... demain après-midi, ce qui est important, là, c'est que la France se réconcilie avec elle-même et surtout avec l'image qu'elle doit avoir à l'étranger. Quand j'entends les joueurs expliquer dans un communiqué qu'ils ne participeront pas à l'entraînement - le seul, le vrai gros (...) - à deux jours du match, mais qu'en même temps ils feront tout individuellement et collectivement pour être dignes de leur valeur et bien jouer au football, je me dis... c'est là que je me dis « ils ne se rendent pas compte ». Et je me demande où sont les leaders dans cette équipe, au bon sens du terme, capables à un moment de leur dire « eh les gars, on est en train de péter les plombs, si on n'est pas d'accord avec ce qu'a fait Anelka ou ce qui a été fait concernant Anelka, on fait un communiqué mais on ne quitte pas le terrain d'entraînement ».
J'ai bien compris, dans votre esprit - et ce sera ma dernière question - on n'aura parlé que de ça mais après tout c'est un sujet qui a tellement envahi le champ que c'est comme ça. Ces joueurs vont donc jouer mardi soir, ils passeront ou ne passeront pas. Après cette Coupe du monde, est-ce qu'ils seront encore dignes de porter le maillot des Bleus ? Ceux qui auront fait ça et nous auront donné ce spectacle-là ?
Je vais vous dire ma conviction profonde, pour avoir moi-même joué au ballon à un petit niveau et connaître bien les vestiaires, je pense que dans ce qui s'est passé, il doit y avoir quelques leaders et il doit y avoir... c'est toujours le problème des dynamiques de groupe, c'est pour ça que je dis « où sont ceux qui ont essayé d'éclairer les autres ». Et on peut deviner que d'autres étaient plus que navrés de ce qui s'est passé, mais ont eu peur d'être...
Les meneurs, c'est donc les meneurs que vous recherchez...
Mais oui, mais bien sûr, mais bien sûr...
Donc il faut chercher les meneurs et leur interdire porter le drapeau... le maillot ?
Je ne sais pas, on verra, ça sera à la Fédération de tirer les leçons. Mais en tout cas, on ne peut pas en rester là, il faut juste respecter le tempo. Le tempo jusqu'à demain, c'est qu'ils doivent encore jouer au ballon et se montrer dignes de l'équipe de France, et essayer de ramener ce qui peut être ramené d'honneur et de fierté à l'égard du monde entier. Et puis ensuite, il faudra quand même avoir un audit complet, j'allais dire une enquête mais on reste dans le sport, un audit très complet pour essayer de comprendre qui a fauté, quand et quels sont les maillons de la chaîne qui se sont révélés plus que fragiles.
Merci d'avoir été notre invité... alors footballistique, mais on a compris qu'on avait parlé de beaucoup de choses à travers le football ce matin. Merci E. Besson, bonne journée à vous.
Merci à vous.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 21 juin 2010
Bonjour.
Ministre de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du Développement solidaire. Je suis sûr qu'on ne vous la fait pas souvent en entier, le titre. Ça fait de vous le ministre du « Drapeau » aussi, d'une certaine manière le ministre du « Maillot ». Je voudrais savoir ce que vous, amateur de foot, avez ressenti en apprenant hier après l'affaire Anelka, après les insultes, après l'exclusion que les joueurs avaient fait grève : « des millionnaires qui font grève » comme dirait J.-L. Mélenchon.
Je suis comme tous les Français, comme tous les amoureux du football, j'ai été consterné, blessé, attristé, je peux additionner tous les adjectifs par ces images. Je me suis dit « mais qu'est-ce qui leur prend, est-ce qu'ils se rendent compte, est-ce qu'il y en a un parmi eux qui se rend compte de l'image en France et à l'étranger qu'ils renvoient ». Ils pouvaient éventuellement - on verra - discuter la sanction qui a été prise contre Anelka, mais ne pas se rendre à l'entraînement à 2 jours d'un match qui reste capital, parce que le paradoxe de l'histoire, tout le monde l'oublie, c'est que la France peut encore se qualifier, et renvoyer cette image au monde entier c'est affligeant.
Est-ce qu'on a ridiculisé la France ?
Oui, oui un peu, oui, à l'étranger tout le monde se moque de nous. On peut dire « ça n'est que du sport, que du jeu », mais ça a une valeur symbolique...
C'est le maillot donc, c'est le drapeau ?
Bien sûr que c'est le maillot, c'est le drapeau, c'est tout ce que vous voulez. Ce sont des joueurs professionnels sélectionnés en équipe de France, il faut qu'ils redeviennent joueurs, pour l'instant ils n'ont pas montré grand-chose et on est nombreux à les avoir, moi le premier, soutenus dans la difficulté. Là, on a envie de leur dire « retournez vite sur le terrain et vous rejouez vite au ballon ». Ce sont des professionnels, ils ne sont pas comportés en professionnels, notamment hier mais pas seulement hier, et ils sont sélectionnés en équipe de France. Ça veut dire qu'ils ont une responsabilité pédagogique vis-à-vis du monde amateur, vis-à-vis des jeunes que nos éducateurs forment tous les week-ends sur le terrain, et toutes les semaines, deux à trois fois par semaine, ils ont des responsabilités particulières. J'ai eu le sentiment hier, en regardant les images, qu'ils ne se rendaient pas compte de leur responsabilité. Alors je crois qu'honnêtement il y a deux temps : jusqu'à demain, il faut d'abord que la mascarade cesse et qu'on se préoccupe du ballon, que le calme revienne...
Ces joueurs, mardi soir peuvent comme si de rien n'était jouer sous le maillot de l'équipe de France ?
De toute façon...
Ils engagent encore la France « footballistiquement » parlant ?
De toute façon nous n'avons pas le choix, quelle est l'autre solution ? Dire « la France déclare forfait »...
On pourrait, après tout on pourrait dire...
Non, non, non.
« Toi tu as mauvais esprit, toi tu as bon esprit ». Ce n'est pas imaginable pour vous, il faut encore gagner d'abord quoi ?
D'abord jouer par respect pour les Africains du Sud, les Sud-africains qui, eux, jouent aussi leur qualification. Par respect...
Vous croyez qu'ils ne jouent pas...
Non, je ne dis pas cela, je dis simplement il faut jouer au sens « il faut bien jouer, il faut assumer son rôle de professionnels ».
Très bien, et après comment on sanctionne ce qui s'est passé, est-ce qu'il faut le sanctionner d'ailleurs ?
D'abord après, il faut essayer de comprendre parce qu'il y a plusieurs versions qui circulent : oui ou non Anelka a-t-il dit ce qui lui est prêté ?
Pardon, on est presque au-delà de ça déjà !
Non, non, ce n'est pas rien parce que si je comprends bien quand même, la réaction des joueurs c'est de dire « il ne l'a pas dit et donc nous sommes solidaires ». Ils ont décidé, j'allais dire de mourir pour Anelka. Vu d'ici, ça paraît un peu gros, mais il faut quand même essayer de comprendre ce qui s'est passé. Qui savait... comment Domenech a-t-il pu accepter de lire le communiqué des joueurs ? Qu'est-ce que savait le président de la Fédération française ? C'est pour ça que je dis « je crois qu'il y a deux temps », et là je m'exprime en tant qu'amoureux du football, pas en tant que ministre, le ministre seul qualifié à aller sur place c'est la ministre des Sports. Mais moi, l'amateur de football, je dis voilà : d'abord on joue demain soir contre l'Afrique du Sud et on essaie de sauver ce qui peut l'être, d'abord l'honneur et éventuellement la qualification ; et puis ensuite il faudra juste après essayer de tirer les choses au clair et que chacun prenne toutes ses...
Ça veut dire quoi, je ne comprends pas, ça veut dire quoi, ça veut dire demander à J.-P. Escalettes de remettre sa démission ?
Ça veut dire d'abord... ils nous doivent tous la vérité sur ce qui s'est passé, et pas seulement depuis hier, depuis un mois : oui ou non, les histoires de clans, de gangs, de bandes, de mise à l'écart de Gourcuff, etc., on a tous dit, moi le premier, « c'est invraisemblable », au bout d'un moment...
...Commencez à le croire ?
On se pose des questions en tout cas, il faut une explication là-dessus...
Il y aurait le clan des gentils Blancs mis à l'écart et des méchants musulmans et des Noirs agressifs ?
Non et j'espère que ça n'est pas ça, et moi j'ai défendu la thèse que ça ne pouvait pas être ça au regard du parcours des joueurs, au regard de leur valeur, etc. Mais au bout d'un moment, tant de témoignages qui rendent compte d'un climat délétère au sein de l'équipe de France, on en revient à se poser des questions. La deuxième chose, c'est qu'il faudra quand même éclaircir la scène de la mi-temps : qui a fait quoi, qui savait quoi, et pourquoi quand même ça n'a été sanctionné réellement - si les propos d'Anelka sont avérés - que 48 heures après et pas sur l'instant. Donc je pense que c'est toute la chaîne de commandement, toute la chaîne de responsabilité. Le vivre ensemble, ça demande autorité : respect mutuel, respect de la règle, respect de l'entraîneur, respect des coéquipiers et là, cette société du respect elle a de toute façon implosé. Qui, pourquoi, comment, sous quelle responsabilité ? Les joueurs de l'équipe de France doivent aux amoureux du football, pas au ministre mais doivent aux amoureux du football des explications.
Il y a donc un problème d'identité nationale dans cette identité tout court ?
Non, j'ai toujours peur de...
Je vous lis la phrase d'A. Finkielkraut, je vous sens prudent, vous êtes ministre après tout, il faut être prudent quand on est ministre : « cette équipe avec ces clans et ces divisions ethniques, dit A. Finkielkraut, renvoie à la France l'image de sa désunion et de sa déliquescence ».
Je crois qu'il ne faut pas tisser ou tresser des passerelles trop rapidement entre le football et la déclinaison politique. Que ça donne en ce moment une image délabrée de la France à l'étranger, c'est une certitude. Mais moi j'ai des souvenirs...
Donc les Bleus ne sont pas la France, voilà ce que vous nous dites ce matin...
Exactement. 1998, la France « black blanc beur », la fête dans les rues, les Champs-Élysées. 21 avril 2002, 3 ans après, Le Pen au 2ème tour de l'élection présidentielle. Et pourtant nous avions tous célébré, moi aussi, la France réconciliée avec elle-même, harmonisée, etc. Donc les déductions politiques faciles, je pense qu'il faut s'en méfier, même si je ne dis pas que ça ne révèlerait rien, c'est pour ça que j'ai évoqué sociét?? du respect, du respect mutuel et du respect d'un certain nombre de valeurs, dont l'autorité.
Vous souhaitez franchement que cette équipe gagne face à l'Afrique du Sud et se qualifie ? On ne veut pas en finir maintenant ?
Non, moi je ne me résoudrai jamais - j'avoue que c'est peut-être la fois où je me suis posé la question hier soir, c'est vrai, mais je ne me résoudrai jamais - à ne pas supporter, à ne pas souhaiter la victoire de l'équipe de France. Mais je voudrais surtout... c'est la première fois que le résultat m'importe peu demain soir... demain après-midi, ce qui est important, là, c'est que la France se réconcilie avec elle-même et surtout avec l'image qu'elle doit avoir à l'étranger. Quand j'entends les joueurs expliquer dans un communiqué qu'ils ne participeront pas à l'entraînement - le seul, le vrai gros (...) - à deux jours du match, mais qu'en même temps ils feront tout individuellement et collectivement pour être dignes de leur valeur et bien jouer au football, je me dis... c'est là que je me dis « ils ne se rendent pas compte ». Et je me demande où sont les leaders dans cette équipe, au bon sens du terme, capables à un moment de leur dire « eh les gars, on est en train de péter les plombs, si on n'est pas d'accord avec ce qu'a fait Anelka ou ce qui a été fait concernant Anelka, on fait un communiqué mais on ne quitte pas le terrain d'entraînement ».
J'ai bien compris, dans votre esprit - et ce sera ma dernière question - on n'aura parlé que de ça mais après tout c'est un sujet qui a tellement envahi le champ que c'est comme ça. Ces joueurs vont donc jouer mardi soir, ils passeront ou ne passeront pas. Après cette Coupe du monde, est-ce qu'ils seront encore dignes de porter le maillot des Bleus ? Ceux qui auront fait ça et nous auront donné ce spectacle-là ?
Je vais vous dire ma conviction profonde, pour avoir moi-même joué au ballon à un petit niveau et connaître bien les vestiaires, je pense que dans ce qui s'est passé, il doit y avoir quelques leaders et il doit y avoir... c'est toujours le problème des dynamiques de groupe, c'est pour ça que je dis « où sont ceux qui ont essayé d'éclairer les autres ». Et on peut deviner que d'autres étaient plus que navrés de ce qui s'est passé, mais ont eu peur d'être...
Les meneurs, c'est donc les meneurs que vous recherchez...
Mais oui, mais bien sûr, mais bien sûr...
Donc il faut chercher les meneurs et leur interdire porter le drapeau... le maillot ?
Je ne sais pas, on verra, ça sera à la Fédération de tirer les leçons. Mais en tout cas, on ne peut pas en rester là, il faut juste respecter le tempo. Le tempo jusqu'à demain, c'est qu'ils doivent encore jouer au ballon et se montrer dignes de l'équipe de France, et essayer de ramener ce qui peut être ramené d'honneur et de fierté à l'égard du monde entier. Et puis ensuite, il faudra quand même avoir un audit complet, j'allais dire une enquête mais on reste dans le sport, un audit très complet pour essayer de comprendre qui a fauté, quand et quels sont les maillons de la chaîne qui se sont révélés plus que fragiles.
Merci d'avoir été notre invité... alors footballistique, mais on a compris qu'on avait parlé de beaucoup de choses à travers le football ce matin. Merci E. Besson, bonne journée à vous.
Merci à vous.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 21 juin 2010