Déclaration de Mme Nora Berra, secrétaire d'Etat aux aînés, sur le bénévolat et la solidarité face à la pauvreté et le vieillissement de la population et les mesures en faveur des personnes âgées dépendantes, Tours le 25 juin 2010.

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Circonstance : 9ème Congrès des Petits frères des pauvres à Tours le 25 juin 2010

Texte intégral


Je suis particulièrement heureuse de me trouver parmi vous aujourd'hui, à l'occasion de ce 9ème Congrès des Petits Frères des Pauvres, qui se déroule cette année dans cette belle ville de Tours, sous le signe du partage, de la convivialité, et de la proximité entre les citoyens et leurs élus.
Vous représentez, depuis la création des Petits Frères des Pauvres en 1946, une belle aventure humaine de solidarité en faveur des personnes âgées fragilisées. Je voudrais rendre un hommage particulier à votre Fondateur, Armand Marquiset, saluer sa mémoire, et vous féliciter toutes et tous d'avoir pérennisé sa philosophie, son projet et son action.
Aujourd'hui, votre action rayonne dans de nombreuses villes en France, et vous êtes également présents dans bien des pays du monde : tels que l'Allemagne, le Canada, l'Espagne, les Etats-Unis, l'Irlande, le Mexique...
Vous faites vivre la République du bien commun, celle de la Fraternité, clé de voûte de votre engagement et de votre philosophie.
Cette fraternité, vous la conjuguez aussi entre vos bénévoles en favorisant les liens entre les générations :
* 21% de vos bénévoles ont moins de 30 ans ; ils illustrent l'engagement civique des jeunes envers leur aînés.
* 41% ont entre 30 ans et 60 ans
* et enfin, 38% sont des aînés de plus de 60 ans. Ils représentent ces très nombreux retraités, socialement actifs, soucieux de continuer un engagement ancien ou s'impliquer nouvellement dans la vie associative et le bénévolat. Ils mettent leurs compétences, leur temps au service des autres.
Permettez-moi de vous adresser à tous mes félicitations, et mes remerciements les plus chaleureux, au nom de cette république citoyenne et humaniste que vous incarnez, et que vous servez.
En effet, bien que la majorité des aînés soient en bonne santé, autonomes et dotés de revenus assurés, des inégalités économiques existent et le constat est fait d'une nouvelle forme de précarité liée au vieillissement.
La maladie, la faiblesse des ressources, le repli sur soi, l'isolement, l'absence ou l'inexistence de l'entourage familial et du voisinage, constituent donc autant de risques auxquels sont confrontés de nombreuses personnes âgées.
Les acteurs associatifs, et notamment vous, les Petits Frères des Pauvres, vous agissez au quotidien afin de prévenir ces risques et d'apporter une aide aux personnes âgées en détresse.
1. Accompagner : c'est votre mission d'action solidaire, vous apportez des réponses concrètes, souvent dans l'urgence : accueillir, informer, trouver un hébergement, visiter les personnes âgées seules, organiser des animations, des sorties conviviales et des vacances...
2. Agir collectivement, c'est votre mission d'action civique pour favoriser la prise de conscience et l'engagement bénévoles des citoyens de tous âges.
3. Témoigner, alerter, c'est agir en direction de l'opinion publique, pour la sensibiliser, la mobiliser, pour relayer la parole des personnes âgées en difficulté.
Nous, les acteurs politiques nous avons mis des moyens et de l'énergie en faveur d'une meilleure prise en charge de la dépendance, grâce notamment à l'amélioration de la qualité des soins et des accompagnements à domicile ou en établissements.
Depuis mon arrivée au Secrétariat d'Etat en charge des aînés, et dans cette continuité, j'ai lancé plusieurs chantiers afin de moderniser le secteur médico-social et mieux accompagner nos aînés.
Cependant, une politique qui se donne les moyens de répondre véritablement aux aspirations des aînés doit agir bien en amont de la perte d'autonomie !
Les aînés souhaitent majoritairement continuer à vivre chez eux et à participer pleinement à la vie de la cité. Plus de 92% des aînés de 80 à 84 ans vivent en logement autonome. Ils sont encore 71% dans la tranche 90-94 ans. C'est une aspiration massive et légitime parce que le « vivre chez soi » renvoie à toutes les dimensions humaines, sociales et culturelles qui nous façonnent depuis notre enfance, depuis des générations.
Mais, avec l'avancée en l'âge, vivre chez soi se heurte à divers obstacles et limites qui rendent sa réalisation difficile, risquée et parfois malheureusement impossible. Cela exige des aînés et de leur entourage familial une plus grande prévoyance qui est la condition même de la liberté de choix.
La responsabilité des pouvoirs publics est de faire en sorte que cette aspiration et cette liberté de choix puissent s'accomplir dans les meilleures conditions.
C'est pourquoi j'ai lancé le projet Vivre chez soi.
Faut-il rappeler que le domicile, lieu préféré des Français, est le premier lieu de risques : isolement, solitude, accidents domestiques, en particulier les chutes, abus de confiance... L'enjeu est de sécuriser le vivre chez soi en réduisant les risques liés à un habitat inadapté, à des installations non conformes et à un environnement inaccessible et insécure.
Je veux donc mettre en place un dispositif diagnostic pour l'autonomie dans l'habitat, afin de proposer des mesures d'adaptation de l'habitat et de son environnement immédiat. Ce diagnostic permettra de réduire les chutes, véritables fléau de notre société, et leurs séquelles.
Ensuite, je crois que les technologies et services de l'autonomie constituent un levier important encore méconnu par les professionnels de la santé et des services d'aide à domicile, mais aussi par les aînés eux-mêmes. Ces technologies et services peuvent rendre le logement plus confortable, faciliter la mobilité, l'accès à l'information et aux services, renforcer la sécurité, la prévention santé, les liens familiaux, le lien social de proximité.
Elles permettent également de rassurer et soulager les aidants familiaux, les professionnels et les bénévoles, de contraintes et tâches matérielles. Elles permettent également de favoriser une plus grande coordination de leurs interventions.
A ce titre, je salue la belle initiative Voisin-âge que vous avez lancée et qui montre tout l'intérêt de s'appuyer sur les réseaux sociaux numériques pour mieux mobiliser nos citoyens qui ne sont pas tous des bénévoles engagés dans des associations mais qui peuvent agir auprès de nos aînés dans la proximité.
Vous me direz que cela n'est pas accessible à tout le monde. C'est pourquoi, j'ai souhaité, dans le cadre du projet Vivre chez soi, identifier les circuits de financement publics et privés existants, et à en créer de nouveaux afin de permettre à nos aînés de pouvoir adapter leur logement, accéder à Internet et à des services domotiques de base.
Vivre chez soi, ce n'est pas rester reclus à domicile. C'est pouvoir aussi sortir de chez soi, c'est aussi accéder aux services et aux équipements collectifs, prendre les transports, se déplacer en toute sécurité. Bref, il s'agit pour moi de préparer nos villes, nos quartiers et nos villages pour un meilleur accueil et une meilleure qualité de vie de nos aînés. Vous savez bien mieux que moi le rôle crucial de l'environnement, vous qui êtes des accompagnateurs, des visiteurs, des organisateurs d'événements festifs, de voyages, de loisirs, de vacances pour les personnes âgées.
Vivre chez soi, c'est aussi une question de respect des droits. En France, comment peut-on tolérer que nos aînés puissent être confrontés au quotidien à des freins, des limitations, voire des discriminations ? A commencer par l'emploi et la gestion des carrières, mais aussi, avec l'avancée en âge, dans l'accès aux services, aux crédits, aux assurances, aux voyages, au logement ?
Mon objectif est de proposer une charte des aînés qui affirme l'égalité des droits et qui valorise les acteurs qui les respectent.
En cela, je rejoins et soutiens totalement la charte que les Petits Frères des Pauvres se sont donnée dès 1998, pour réaffirmer leurs valeurs, mais aussi le sens de leur action, pour la dignité et le respect des droits des aînés.
Répondre aux besoins et aux attentes de nos aînés, notamment les plus fragiles, exige une mobilisation de tous les acteurs, publics et privés. Mais cela ne se fera pas sans l'engagement citoyen et solidaire de proximité.
Et là, je reconnais le rôle des associations, votre rôle, vous les Petits frères des pauvres qui êtes un acteur majeur de solidarité. Grâce à votre réseau de donateurs, de bénévoles, à vos lieux de vie, à vos actions au quotidien.
C'est pour mieux prendre en compte cette dimension essentielle de l'action des aidants que j'ai décidé d'organiser le 6 octobre prochain la Journée Nationale des Aidants familiaux et bénévoles : faire mieux reconnaître leur rôle, les soutenir dans leur engagement, les soulager des contraintes qui pèsent sur eux et les aider dans les difficultés qu'ils rencontrent.
Mesdames et Messieurs,
Ma présence parmi vous est importante pour moi car votre congrès est l'occasion de témoigner que l'action nationale que je mène en faveur de nos aînés se nourrit des mêmes valeurs que les vôtres, et qu'elles sont complémentaires, l'une soutenant l'autre.
Sans cette générosité, sans cette proximité, nos politiques publiques nationales et locales ne pourront porter leurs fruits. C'est pourquoi je tiens à vous rendre hommage à toutes et à tous.
Les associations de solidarité en faveur des aînés sont un partenaire important à mes yeux. Je compte les réunir prochainement afin de faire un état des lieux et d'identifier des préconisations concrètes pour mieux les accompagner dans leur action. Je compte sur vous pour participer à ce projet et apporter votre expérience et votre savoir-faire.
Source http://www.travail-solidarite.gouv.fr, le 1er juillet 2010