Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs les Députés,
Permettez-moi, Monsieur le Président, de vous remercier de cette invitation, qui me donne l'occasion de faire avec vous le point sur deux sujets qui font l'actualité de ces dernières semaines.
Le premier, c'est la rénovation de nos accords de défense avec les Etats africains.
Nous devions prendre acte de trois évolutions fondamentales :
- L'obsolescence des accords de défense, signés pour la plupart aux lendemains des indépendances ;
- Le développement du pôle politique et stratégique de l'Union africaine ;
- Et enfin, la montée en puissance d'une architecture de paix et de sécurité africaine (APSA), avec ses forces armées associées, la force africaine en attente (FAA), qui confèrent d'ores et déjà à l'Afrique une première capacité opérationnelle.
Face à ces évolutions, et dans le cadre de la rénovation plus générale de la relation entre la France et l'Afrique, le Président s'est engagé en février 2008 à réviser nos accords de défense dans la transparence, c'est-à-dire avec approbation par le Parlement et publication au Journal officiel, et en partenariat avec les pays concernés, c'est-à-dire en donnant aux accords un caractère réciproque.
Dans ce contexte, avec nos huit partenaires concernés (le Cameroun, les Comores, la Côte d'Ivoire, Djibouti, le Gabon, la Centrafrique, le Sénégal et le Togo), nous avons souhaité modifier profondément l'esprit et la finalité de ces accords.
A travers ces nouveaux accords de partenariat en matière de défense, il ne s'agit plus de garantir à nos partenaires une assistance militaire permettant d'intervenir directement en cas de menace à leur sécurité. Il s'agit désormais de renforcer la coopération de défense et de sécurité pour appuyer la montée en puissance des forces de sécurité de ces pays.
Cette évolution s'accompagne d'une ouverture vers une dimension multilatérale, avec la possibilité d'associer aux activités d'un partenariat de défense d'autres pays africains ou européens, ainsi que les institutions de l'Union européenne et de l'Union africaine et les ensembles régionaux de cette dernière.
Pour mener à bien ce chantier, un groupe de travail mixte a été constitué par le ministère des Affaires étrangères et le ministère de la Défense. Entre le printemps et l'été 2008, il a conduit une mission d'information et de prise de contacts dans les pays concernés, avant de s'atteler à la rédaction des nouveaux accords.
Sur la forme : il a été décidé de fixer le nouveau cadre juridique de notre relation de défense avec ces Etats dans un texte unique. Ce cadre se décline en deux accords type, selon que la France a ou non des forces de présence dans le pays hôte, qui sont ensuite adaptés à chaque situation particulière. Ces accords sont conclus pour une période de 5 ans, renouvelable par tacite reconduction.
Sur le fond :
- Le nouvel accord ne comporte plus, sauf pour Djibouti, de stipulation impliquant un concours de notre pays en cas d'agression extérieure. Il est centré sur la coopération militaire, menée soit par la direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD) du ministère des affaires étrangères et européennes, soit par l'Etat-major des armées.
- Il prend en compte, dans la relation de défense entre les deux pays, la promotion des systèmes de sécurité collective des Nations unies et de l'Union africaine. L'inscription de cette relation dans le cadre du partenariat stratégique Afrique - Union Européennes complète cette référence première.
- A travers la référence au respect de la souveraineté, de l'indépendance et de l'intégrité territoriale des partenaires, le nouvel accord manifeste la volonté de non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats concernés.
- Enfin, pour les pays où nous maintiendrons des forces de présence, il comporte une annexe spécifique cadrant les facilités qu'accorde le pays hôte pour la vie courante et l'entraînement de nos troupes.
Ce texte unique abroge par ailleurs l'ensemble des accords antérieurs dans le domaine de la défense.
Le processus de rénovation est bien engagé.
- Nous avons déjà conclu trois accords, avec le Togo, le Cameroun, la Centrafrique, et un traité, avec le Gabon.
- Trois autres accords sont en cours de négociation avec le Sénégal, Djibouti et les Comores.
- Le projet élaboré pour la Côte d'Ivoire ne sera transmis qu'après les élections, prévues en principe avant la fin de l'année 2010.
Pour les accords déjà signés, le processus de ratification par le Parlement est engagé. Les projets de loi pour les accords avec le Togo et le Cameroun, qui ont reçu un avis favorable du Conseil d'Etat et du Conseil des Ministres, sont déjà en cours d'examen au Sénat.
Le deuxième sujet que vous souhaitiez aborder, c'est la situation en Afghanistan.
Le 22 septembre 2008, conformément à la volonté du Président de la République et du gouvernement et à la suite de la révision constitutionnelle de juillet 2008, la Représentation Nationale a approuvé par un vote la prolongation de notre engagement en Afghanistan.
Nous nous sommes fixés trois objectifs clairs pour notre intervention :
- Assurer les conditions de la sécurité en Afghanistan, grâce à la formation d'une force de sécurité afghane jusqu'à 400 000 hommes ;
- Renforcer la gouvernance du pays et faire progresser la démocratie ;
- Contribuer à la reconstruction du pays : pour la deuxième année consécutive, nous y consacrons un montant de 15 millions d'euros.
En deux ans, la situation a naturellement évolué sur le théâtre.
Nous avons poursuivi la stratégie que nous portons depuis 2007, stratégie validée lors du sommet de l'OTAN de Bucarest, en 2008, et confirmée au sommet de Strasbourg en avril 2009. Notre intervention repose sur trois principes :
- Stratégie de contre-insurrection, fondée sur le souci prioritaire de la sécurité de la population afghane ;
- Transfert des responsabilités de sécurité aux Afghans, avec des objectifs intermédiaires ;
- Meilleure coordination des efforts civils et de l'action militaire, pour reconstruire le pays et encourager son développement humain, économique et social.
C'est précisément dans cet esprit que nous avons réorganisé notre dispositif en profondeur, avec la création de la task force La Fayette et la concentration de nos troupes et de nos moyens d'aide civile à l'Est de Kaboul, en Kapisa et en Surobi.
- Cette réorganisation nous permet de renforcer la cohérence opérationnelle de nos forces, puisque 2 groupements tactiques interarmées (GTIA) et 5 groupes d'encadrement et de formation (OMLT) sont déployés dans la même zone, sous le même commandement, aux côtés de l'armée afghane.
- Elle nous permet aussi de concentrer nos efforts en matière de sécurité, de développement et de gouvernance, et d'avoir ainsi une action globale et coordonnée, avec le maximum de synergies.
Cette stratégie n'est pas remise en cause par le départ du général Mc CHRYSTAL. Elle est d'autant moins remise en cause qu'aujourd'hui, nos efforts commencent à porter leurs fruits, avec trois avancées majeures.
Première avancée : l'action de la Force internationale d'assistance à la sécurité (FIAS) couvre désormais l'ensemble du pays. Certes, les attaques par engins explosifs sont un défi pour les forces de sécurité. Mais elles ne signifient pas une perte de contrôle du pays. Elles révèlent au contraire l'absence de stratégie globale des insurgés qui, face à la Force internationale d'assistance à la sécurité (FIAS) et à l'Armée nationale afghane (ANA), restent cantonnés dans une tactique de harcèlement.
Deuxième avancée : les forces de sécurité afghanes ont pris forme et leur montée en puissance est réelle, avec en mai, 125 000 hommes pour l'Armée nationale afghane (ANA) et 106 000 pour la Police nationale afghane (ANP).
Cette montée en puissance est le fruit des formations que nous dispensons avec nos alliés. Fin 2009, nos forces ont amené une première brigade afghane - environ 4 000 hommes - au meilleur standard d'autonomie défini par la coalition. Aujourd'hui, nous en encadrons une deuxième.
Cette montée en puissance permet aux forces de sécurité afghanes d'assumer de jour en jour une part croissante de la responsabilité de sécurité de leur pays. Nous leur avons transféré la zone de Kaboul lorsque nous en assurions le commandement. En ce qui concerne la Surobi, nous pourrions envisager de le faire au cours de l'année 2011.
Troisième avancée : notre action en faveur de la reconstruction et du développement progresse. Nous procédons en identifiant des projets d'intérêt local et en les confiant aux habitants eux-mêmes. Lors de mes derniers déplacements sur le théâtre, en inaugurant une école à Surobi ou en découvrant les progrès de « radio surobi », j'ai pu constater combien cette action civilo-militaire est essentielle pour gagner la confiance de la population et conforter dans la durée les progrès réalisés en matière de sécurité.
C'est d'ailleurs pour mieux la coordonner que nous nous appuyons désormais sur des experts civils regroupé au sein d'une task force. Ils interviennent directement dans la zone française dans des domaines concernant la vie quotidienne des Afghans. Je pense à l'agriculture (avec la fourniture de matériels, d'engrais, de semences et de plants), à la santé (avec l'hôpital de Surobi), ou encore à l'éducation.
Autant d'actions tangibles pour la population, qui finiront par porter leurs fruits. Permettez-moi d'évoquer une image devant vous : la première pousse des blés français dans les vallées, qui se distinguent fortement des semences locales par leur vigueur.
Ces progrès nous engagent.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 19 juillet 2010
Mesdames, Messieurs les Députés,
Permettez-moi, Monsieur le Président, de vous remercier de cette invitation, qui me donne l'occasion de faire avec vous le point sur deux sujets qui font l'actualité de ces dernières semaines.
Le premier, c'est la rénovation de nos accords de défense avec les Etats africains.
Nous devions prendre acte de trois évolutions fondamentales :
- L'obsolescence des accords de défense, signés pour la plupart aux lendemains des indépendances ;
- Le développement du pôle politique et stratégique de l'Union africaine ;
- Et enfin, la montée en puissance d'une architecture de paix et de sécurité africaine (APSA), avec ses forces armées associées, la force africaine en attente (FAA), qui confèrent d'ores et déjà à l'Afrique une première capacité opérationnelle.
Face à ces évolutions, et dans le cadre de la rénovation plus générale de la relation entre la France et l'Afrique, le Président s'est engagé en février 2008 à réviser nos accords de défense dans la transparence, c'est-à-dire avec approbation par le Parlement et publication au Journal officiel, et en partenariat avec les pays concernés, c'est-à-dire en donnant aux accords un caractère réciproque.
Dans ce contexte, avec nos huit partenaires concernés (le Cameroun, les Comores, la Côte d'Ivoire, Djibouti, le Gabon, la Centrafrique, le Sénégal et le Togo), nous avons souhaité modifier profondément l'esprit et la finalité de ces accords.
A travers ces nouveaux accords de partenariat en matière de défense, il ne s'agit plus de garantir à nos partenaires une assistance militaire permettant d'intervenir directement en cas de menace à leur sécurité. Il s'agit désormais de renforcer la coopération de défense et de sécurité pour appuyer la montée en puissance des forces de sécurité de ces pays.
Cette évolution s'accompagne d'une ouverture vers une dimension multilatérale, avec la possibilité d'associer aux activités d'un partenariat de défense d'autres pays africains ou européens, ainsi que les institutions de l'Union européenne et de l'Union africaine et les ensembles régionaux de cette dernière.
Pour mener à bien ce chantier, un groupe de travail mixte a été constitué par le ministère des Affaires étrangères et le ministère de la Défense. Entre le printemps et l'été 2008, il a conduit une mission d'information et de prise de contacts dans les pays concernés, avant de s'atteler à la rédaction des nouveaux accords.
Sur la forme : il a été décidé de fixer le nouveau cadre juridique de notre relation de défense avec ces Etats dans un texte unique. Ce cadre se décline en deux accords type, selon que la France a ou non des forces de présence dans le pays hôte, qui sont ensuite adaptés à chaque situation particulière. Ces accords sont conclus pour une période de 5 ans, renouvelable par tacite reconduction.
Sur le fond :
- Le nouvel accord ne comporte plus, sauf pour Djibouti, de stipulation impliquant un concours de notre pays en cas d'agression extérieure. Il est centré sur la coopération militaire, menée soit par la direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD) du ministère des affaires étrangères et européennes, soit par l'Etat-major des armées.
- Il prend en compte, dans la relation de défense entre les deux pays, la promotion des systèmes de sécurité collective des Nations unies et de l'Union africaine. L'inscription de cette relation dans le cadre du partenariat stratégique Afrique - Union Européennes complète cette référence première.
- A travers la référence au respect de la souveraineté, de l'indépendance et de l'intégrité territoriale des partenaires, le nouvel accord manifeste la volonté de non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats concernés.
- Enfin, pour les pays où nous maintiendrons des forces de présence, il comporte une annexe spécifique cadrant les facilités qu'accorde le pays hôte pour la vie courante et l'entraînement de nos troupes.
Ce texte unique abroge par ailleurs l'ensemble des accords antérieurs dans le domaine de la défense.
Le processus de rénovation est bien engagé.
- Nous avons déjà conclu trois accords, avec le Togo, le Cameroun, la Centrafrique, et un traité, avec le Gabon.
- Trois autres accords sont en cours de négociation avec le Sénégal, Djibouti et les Comores.
- Le projet élaboré pour la Côte d'Ivoire ne sera transmis qu'après les élections, prévues en principe avant la fin de l'année 2010.
Pour les accords déjà signés, le processus de ratification par le Parlement est engagé. Les projets de loi pour les accords avec le Togo et le Cameroun, qui ont reçu un avis favorable du Conseil d'Etat et du Conseil des Ministres, sont déjà en cours d'examen au Sénat.
Le deuxième sujet que vous souhaitiez aborder, c'est la situation en Afghanistan.
Le 22 septembre 2008, conformément à la volonté du Président de la République et du gouvernement et à la suite de la révision constitutionnelle de juillet 2008, la Représentation Nationale a approuvé par un vote la prolongation de notre engagement en Afghanistan.
Nous nous sommes fixés trois objectifs clairs pour notre intervention :
- Assurer les conditions de la sécurité en Afghanistan, grâce à la formation d'une force de sécurité afghane jusqu'à 400 000 hommes ;
- Renforcer la gouvernance du pays et faire progresser la démocratie ;
- Contribuer à la reconstruction du pays : pour la deuxième année consécutive, nous y consacrons un montant de 15 millions d'euros.
En deux ans, la situation a naturellement évolué sur le théâtre.
Nous avons poursuivi la stratégie que nous portons depuis 2007, stratégie validée lors du sommet de l'OTAN de Bucarest, en 2008, et confirmée au sommet de Strasbourg en avril 2009. Notre intervention repose sur trois principes :
- Stratégie de contre-insurrection, fondée sur le souci prioritaire de la sécurité de la population afghane ;
- Transfert des responsabilités de sécurité aux Afghans, avec des objectifs intermédiaires ;
- Meilleure coordination des efforts civils et de l'action militaire, pour reconstruire le pays et encourager son développement humain, économique et social.
C'est précisément dans cet esprit que nous avons réorganisé notre dispositif en profondeur, avec la création de la task force La Fayette et la concentration de nos troupes et de nos moyens d'aide civile à l'Est de Kaboul, en Kapisa et en Surobi.
- Cette réorganisation nous permet de renforcer la cohérence opérationnelle de nos forces, puisque 2 groupements tactiques interarmées (GTIA) et 5 groupes d'encadrement et de formation (OMLT) sont déployés dans la même zone, sous le même commandement, aux côtés de l'armée afghane.
- Elle nous permet aussi de concentrer nos efforts en matière de sécurité, de développement et de gouvernance, et d'avoir ainsi une action globale et coordonnée, avec le maximum de synergies.
Cette stratégie n'est pas remise en cause par le départ du général Mc CHRYSTAL. Elle est d'autant moins remise en cause qu'aujourd'hui, nos efforts commencent à porter leurs fruits, avec trois avancées majeures.
Première avancée : l'action de la Force internationale d'assistance à la sécurité (FIAS) couvre désormais l'ensemble du pays. Certes, les attaques par engins explosifs sont un défi pour les forces de sécurité. Mais elles ne signifient pas une perte de contrôle du pays. Elles révèlent au contraire l'absence de stratégie globale des insurgés qui, face à la Force internationale d'assistance à la sécurité (FIAS) et à l'Armée nationale afghane (ANA), restent cantonnés dans une tactique de harcèlement.
Deuxième avancée : les forces de sécurité afghanes ont pris forme et leur montée en puissance est réelle, avec en mai, 125 000 hommes pour l'Armée nationale afghane (ANA) et 106 000 pour la Police nationale afghane (ANP).
Cette montée en puissance est le fruit des formations que nous dispensons avec nos alliés. Fin 2009, nos forces ont amené une première brigade afghane - environ 4 000 hommes - au meilleur standard d'autonomie défini par la coalition. Aujourd'hui, nous en encadrons une deuxième.
Cette montée en puissance permet aux forces de sécurité afghanes d'assumer de jour en jour une part croissante de la responsabilité de sécurité de leur pays. Nous leur avons transféré la zone de Kaboul lorsque nous en assurions le commandement. En ce qui concerne la Surobi, nous pourrions envisager de le faire au cours de l'année 2011.
Troisième avancée : notre action en faveur de la reconstruction et du développement progresse. Nous procédons en identifiant des projets d'intérêt local et en les confiant aux habitants eux-mêmes. Lors de mes derniers déplacements sur le théâtre, en inaugurant une école à Surobi ou en découvrant les progrès de « radio surobi », j'ai pu constater combien cette action civilo-militaire est essentielle pour gagner la confiance de la population et conforter dans la durée les progrès réalisés en matière de sécurité.
C'est d'ailleurs pour mieux la coordonner que nous nous appuyons désormais sur des experts civils regroupé au sein d'une task force. Ils interviennent directement dans la zone française dans des domaines concernant la vie quotidienne des Afghans. Je pense à l'agriculture (avec la fourniture de matériels, d'engrais, de semences et de plants), à la santé (avec l'hôpital de Surobi), ou encore à l'éducation.
Autant d'actions tangibles pour la population, qui finiront par porter leurs fruits. Permettez-moi d'évoquer une image devant vous : la première pousse des blés français dans les vallées, qui se distinguent fortement des semences locales par leur vigueur.
Ces progrès nous engagent.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 19 juillet 2010