Texte intégral
G. Cahour.- Bonjour G. Tron.
Bonjour.
Secrétaire d'État chargé de la fonction publique, nous allons parler évidemment de la réforme des retraites, nous allons parler aussi de l'audition de votre collègue E. Woerth, vraisemblablement aujourd'hui, dans l'affaire que l'on appelle l'affaire Woerth- Bettencourt. D'abord, ce qui marque beaucoup l'actualité ce matin, notamment sur RMC, c'est ce contrat sur la tête de policiers de la Brigade Anti-Criminalité à Grenoble, notamment dans le quartier de la Villeneuve. Ces policiers qui ont abattu un braqueur il y a une quinzaine de jours, et qui aujourd'hui font l'objet de menaces de mort. On parle même, dans des échanges de SMS entre policiers, de menaces de mort à coups de lance-roquettes. Résultats, les policiers sont mis sous protection policière, sont mis au vert, et certains demandent leur mutation. Est-ce qu'il n'y a pas un aveu de faiblesse en protégeant les policiers ?
Il y a une obligation. Par définition, il faut mettre les choses, si vous m'y autorisez, dans le bon ordre. Le bon ordre, c'est quoi : c'est que lorsque l'on apprend que les fonctionnaires - car il s'agit de fonctionnaires - dans l'exercice de leur fonction et pour des actes reliés à leur fonction, sont menacés, la première chose à faire c'est de les protéger, parce que ce qu'ils ont fait était leur devoir, ni plus ni moins. Une fois que l'on a dit ça, le second aspect du sujet, après la protection, c'est bien entendu, pardonnez-moi d'employer ce mot, mais c'est à la limite l'offensive, c'est--dire qu'il est proprement inacceptable que l'on soit dans un ordre inversé. Et l'ordre inversé ça veut dire quoi ? Cela veut dire qu'aujourd'hui ce sont ceux qui sont au ban de la société, qui se croient en mesure de pouvoir menacer à leur tour.
La peur change de camp ?
La peur en tout cas je ne sais pas, mais le sentiment d'obéissance aux règles de la justice doit être remis, si je peux m'exprimer ainsi, dans l'esprit de ceux qui bafouent le droit, et pas l'inverse. Donc, ça veut dire qu'il faut évidemment protéger les policiers, et évidemment être d'une extrême sévérité pour trouver ceux qui auraient - je ne sais pas si c'est avéré ou pas - lancé ces contrats, et avoir des sanctions exemplaires.
Il y a quinze jours, on disait : les policiers visés à armes à feu, à balles réelles, c'est déjà quasiment une première, en tout cas c'est un phénomène qui se confirme ; aujourd'hui ce contrat, est-ce que la politique est la bonne, la politique du tout sécuritaire ? Est-ce qu'on ne fait pas fausse route ? A chaque fois, on monte d'un cran.
Je crois qu'on monte d'un cran, mais ce n'est pas la justice qui monte d'un cran dans la répression, c'est les agressions qui montent d'un cran dans la violence et dans le « je m'applique les règles du non-dit ». On est dans une logique où on peut toujours s'interroger histoire de faire plaisir à quelques uns sur la graduation dans la répression. Le vrai sujet c'est la graduation dans l'atteinte aux règles de la société. Et donc par définition, il y a bien un moment où il faut savoir répliquer à la hauteur de l'attaque, et le problème aujourd'hui, c'est que l'on a, on l'a bien vu à Saint-Aignan, on le voit à Grenoble, on l'a vu dans d'autres lieux, on a aujourd'hui des gens qui croient pouvoir s'autoriser à bafouer toutes les règles. Vous disiez il y a quelques instants : on s'aperçoit qu'on tire sur les policiers. C'est une vue de l'esprit, on ne s'en aperçoit pas. En 2005, lors des émeutes dans les banlieues - je suis élu à Draveil, (donc élu) de banlieue - on a vu des coups de feu tirés des immeubles contre les policiers. Pas simplement dans une ou deux villes, on l'a vu dans plusieurs communes, je l'ai vu dans ma commune. Donc, je crois qu'il faut avoir à l'égard de la police des règles de protection qui seraient des règles de protection juridique, cela va de soi, de l'ordre de la loi, mais il faut également se convaincre que face à des gens qui sont animés de cet état d'esprit, la question ne se pose plus de savoir s'il y a suffisamment de répression.
Ce matin, E. Guigou me disait « Il faut aussi faire plus de social dans les cités, dans les banlieues parce que ces jeunes sont des jeunes fragiles, et tombent dans le panneau du grand banditisme, ils sont embrigadés dans ce grand banditisme ».
Mais Mme Guigou, pardon de le dire, Mme Guigou nous développe des théories qui sont des théories qui font plaisir à Mme Guigou...
C'est la sienne ou celle d'autres, ce n'est pas Mme Guigou en tant que telle, c'est Mme Guigou ce matin, mais ça aurait pu être quelqu'un d'autre.
Mais oui, mais c'est elle qui l'exprime...
Ça revient souvent.
C'est elle qui l'exprime. Quand on vit dans les banlieues, quand on connaît les problèmes des banlieues, quand on travaille, et ça m'est arrivé avec la BAC, on s'aperçoit que le sujet n'est plus celui-là, ça fait des dossiers qui font des rapports et qui font des rapports depuis des années. Le vrai sujet, c'est qu'on...
Il ne faut pas faire de social dans les banlieues.
C'est pas qu'il ne faut pas faire de social dans les banlieues, le social dans les banlieues on le fait depuis des années. Et puis, si vous voyiez le budget des communes de banlieues, vous vous apercevriez qu'entre les actions sociales et les actions de quartier, il y a aujourd'hui tous les outils nécessaires à cela. Le problème c'est que l'on a une frange de la population extrêmement limitée qui, quel que soit l'aspect social de la politique que vous meniez, se met complètement et volontairement en dehors des règles de la société. Donc on peut toujours parler à ces gens là de politique sociale. Ils ont des moyens de vie en général adossés à des grands trafics qui sont complètement déconnectés de toute forme de politique sociale. Ils ont décidé de façon très très réfléchie de se mettre en dehors des règles de la société.
Aujourd'hui, audition d'E. Woerth, votre collègue. Vous vous êtes beaucoup vus ces derniers mois en préparant la réforme des retraites. Dans quel état d'esprit E. Woerth aborde-t-il d'après vous cette audition par la brigade financière ?
Écoutez, il a donné lui-même une réponse par son attitude la semaine dernière. On a eu trois jours entiers d'audition devant les commissions de l'Assemblée nationale, les trois commissions saisies, et au fond, et pour (inaudible) l'Assemblée, il a été présent de la première à la dernière minute, il a mené, j'étais à ses côtés, l'ensemble de...
L'opposition l'a décrit comme fébrile.
C'est absolument faux. C'était l'opposition, je vous dis pour l'avoir vu, enfin c'était pas l'opposition d'ailleurs, c'était quelques membres de l'opposition qui se sont comportés eux-mêmes non pas comme fébriles, mais comme provocateurs, histoire de tenter de le faire sortir d'une réserve et d'un calme dont il ne s'est jamais départi. C'était une manoeuvre tellement visible et, pour tout vous dire, tellement grossière, que personne n'a été dupe. Et d'ailleurs, après le quart d'heure d'entrée où c'était toujours le, même scénario qui se déroulait, celui de la tentative de déstabilisation, on rentrait dans le vif du sujet et ça se terminait comme ça.
Est-ce que E. Woerth doit rester à cette place ? Est-ce que vous à certains moments, vous vous êtes interrogés sur sa légitimité à continuer à défendre cette réforme qui est une réforme majeure du quinquennat de N. Sarkozy, alors que lui-même est affaibli dans cette affaire, et qu'il est évidemment accaparé, à titre personnel, par la gestion juridique de cette affaire ?
C'est une question à laquelle je peux donner deux réponses très précises et très claires. Première question : est-ce qu'il est suffisamment accaparé pour ne plus avoir l'esprit à ses dossier ? Je mets quiconque au défi d'avoir la connaissance, ne serait-ce qu'à moitié, de ce dossier tel qu'il l'a. Il le connaît sur le bout des doigts, il porte cette réforme depuis des mois et des mois, bien avant, d'ailleurs, mon entrée au Gouvernement. Il est totalement investi dans le dossier, et pour vous dire combien il est accaparé, nous avons passé toute la matinée hier, plus de trois heures, à décanter les auditions devant les commissions, et à préciser les points sur lesquels nous évoluerions. Il est totalement, complètement dans le dossier. Première observation. Deuxième observation : depuis des mois et des mois, en tout cas des semaines et des semaines, il n'y a pas une journée sans qu'on lui objecte, sans qu'on lui envoie à la figure les accusations les diverses, les plus fantaisistes. On a tout essayé, y compris de rentrer dans la gestion de sa ville, et chaque fois, ça se dégonfle. Pourquoi ça se dégonfle ? Ça se dégonfle parce qu'en réalité, soit les accusateurs eux-mêmes se rétractent - c'est le cas de Mme Thibout - ; soit, seconde hypothèse, on s'aperçoit que les accusations portées étaient complètement dénuées de tout fondement, ça a été le cas de l'hippodrome de Chantilly. Si E. Woerth, si E. Woerth une seule seconde cédait à une pression de cette nature, ça signifierait tout simplement qu'aujourd'hui, quelle que soit la profession que vous exercez, sur la base d'une espèce de montée en puissance relayée par les médias, d'accusations contre vous, vous ne pouvez plus occuper la fonction dans laquelle vous êtes.
Ses relations, son rapport avec P. De Maistre, le gestionnaire de la fortune de L. Bettencourt, ça ne s'est pas dégonflé, que je sache, ça s'est même plutôt renforcé, et c'est ce que vont chercher à comprendre les enquêteurs aujourd'hui. A savoir, que E. Woerth a bien demandé à P. De Maistre de rencontrer son épouse pour, pourquoi pas, obtenir un poste dans la gestion de fortune.
Vous venez de répondre vous-même à la question que vous vous êtes posée à vous-même. Vous avez vous-même dit « ça ne s'est pas dégonflé », et vous avez vous-même indiqué qu'il avait demandé à rencontrer son épouse, et en aucun cas à l'embaucher. On était parti au début sur des insinuations qui laissaient quasiment entendre qu'il y avait une parfaite détermination de conflit d'intérêts, qu'E. Woerth aurait demandé à P. De Maistre d'embaucher F. Woerth, et ainsi de suite. On s'aperçoit au final, après moult interviews de P. De Maistre dont la dernière dans un grand journal du dimanche, il y a de cela deux jours.
Le JDD.
On s'aperçoit que lui-même dit très clairement que dans cette affaire financement politique n'a rien à voir, qu'E. Woerth qu'il connaît - ce n'est pas très frappant de se connaître dans Paris - ne lui a jamais demandé d'embaucher son épouse, et il le dit et le redit pour la deuxième ou troisième fois consécutive. Je doute...
Quand le ministre du Budget est également trésorier du premier parti de France, donc en permanence en train de chercher des fonds pour la prochaine campagne, pour vous il n'y a pas de conflit d'intérêts ? C'est-à-dire que d'un côté il rencontre des grandes fortunes qui font de l'optimisation fiscale au mieux, au pire de l'évasion fiscale, et de l'autre côté il est ministre du Budget et donc il a peut-être connaissance de ces mêmes noms qui font de l'évasion fiscale, et il n'y a pas conflit d'intérêts ?
Mais attendez ! Mais en juriste que j'ai été, je vous dis que si, sur la base que vous venez de m'indiquer, il y avait conflit d'intérêts, nous sommes tous, vous êtes, moi je suis, tout le monde est en conflit d'intérêts. Un conflit d'intérêts, ça se détermine, et c'est d'ailleurs difficile à déterminer en droit. Le sujet, c'est...
Je ne parle pas de droit, je parle de morale et d'éthique politique.
Et moi je vous réponds en terme de morale et d'éthique politique, que ce n'est pas le fait d'avoir une fonction qui est celle de ministre du Budget et d'exercer une autre fonction, qui fait que vous êtes incapable éthiquement, justement, d'avoir ce minimum de morale. On va devoir déterminer prochainement, sans doute des règles qui vont venir l'interdire. Très bien. Ce que je constate...
Vous vous exposez aux soupçons, vous vous exposez aux soupçons.
Toutes les règles que nous mettons en place depuis des années et des années, et qui se succèdent et qui se juxtaposent les unes aux autres, aboutissent à ce que l'on s'aperçoive qu'il y a toujours quelque chose qui passe entre les mailles du filet. Pourquoi ? Parce que l'on n'a plus, dans aucune conception de morale et d'éthique, pour reprendre votre expression, simplement l'idée que quelqu'un, un homme, une femme, quelque soit son appartenance philosophique, religieuse ou politique, puisse avoir une éthique. Ça va plus loin que cela, on est allé jusqu'à penser qu'il était inconcevable qu'un mari et qu'une épouse, qui ont chacun une activité professionnelle, puissent faire en sorte de ne pas les mêler. C'est invraisemblable quand on transpose à d'autres professions : le secret médical est quelque chose auquel je ne crois pas que quiconque se soit jusqu'à présent attaqué, on peut avoir dans un couple l'un et l'autre qui sont médecins, qui ont des informations peut-être sur des membres communs de la famille, sans pour autant se les divulguer. Là, maintenant, à partir du moment où on touche à la politique et sans doute y a-t-il des raisons à cela...
Dans la presse, il y a des épouses qui ont démissionné de leur poste de journaliste parce que leur mari était ministre.
Écoutez, on a vu cela dans la presse après qu'il y ait eu un ou deux...
A. Sinclair.
Oui, oui, oui mais je...
B. Schönberg...
...Je les connais, ce sont des règles d'éthique qui ont été mises en place dans la presse. De ce point de vue, je m'en réjouis parce que je crois que, pardon de le dire, mais que c'était bien que la presse soit exemplaire sur des sujets de cette nature...
Ça aurait été bien que la femme de M. Woerth soit dans cette démarche aussi alors.
Pour ma part, je me souviens de l'époque où C. Ockrent était en fonction, je me souviens de l'époque où A. Sinclair était en fonction tandis que son mari l'était tout autant, je n'ai jamais fait partie de ceux qui pensaient que ça posait problème, parce que c'était un présupposé selon lequel justement, l'éthique individuelle, la déontologie individuelle n'existent plus. Et donc on la remplace par des règles déontologiques collectives. Le seul problème, c'est que chaque fois, on court pour en rajouter une couche, et ni en France, ni dans les pays anglo-saxons, on a abouti à un résultat qui soit un résultat à la hauteur des choses. Redonnons confiance un peu dans les individus. (Deuxième partie)
G. Tron, il y a une nouveauté dans la réforme des retraites pour les fonctionnaires, ce sont les départs anticipés, notamment pour les femmes qui ont eu trois enfants et qui sont depuis plus de quinze ans dans la fonction publique. Les départs anticipés ne seront plus possibles dans quelque temps, et on craint une effusion de talents et de main d'oeuvre dans la fonction publique, notamment hospitalière et dans l'Éducation nationale, avec des femmes qui vont se précipiter pour partir en retraite anticipée d'ici le 31 décembre. Est-ce que c'est un risque mesuré ?
C'est un risque mesuré, et puis décrit comme ça, effectivement il faut peut-être remettre les choses là encore dans le sens de la nuance. De quoi s'agit-il ? Il s'agit d'une règle qui existe depuis 1924, et qui aboutit à ce que les agents, les femmes, 99 fois sur 100 d'ailleurs, des agents qui cumulent à la fois quinze ans de service et trois enfants, puissent partir à la retraite quand ils le souhaitent. Il y a deux problèmes qui ont été pos??s sur cette règle, qui n'ont pas été posés par le Gouvernement mais qui ont été posés et par le Conseil d'orientation des retraites, et par la Commission européenne. Pour dire les choses brièvement, le premier problème posé par le COR, c'est simplement le fait que ces personnes partent avec les règles qui leur sont appliquées antérieures à la réforme de 2003, et donc il y a une inégalité de traitement entre les fonctionnaires eux-mêmes. Et puis la seconde problématique qui s'est posée, ça c'est l'Europe qui l'a mise en avant, c'est le fait que c'est une disposition qui s'applique aux femmes, et qui jusqu'à présent, ne s'appliquait quasiment pas aux hommes. Donc, là encore une inégalité de traitement. On a donc décidé de le corriger, et on a décidé de le corriger avec quelque chose qui est assez nuancé, puisqu'en réalité, jusqu'à la fin de cette année, il y aura possibilité pour ces femmes de partir avec les règles du moment, c'est-à-dire malgré ce que je viens d'indiquer ; sur l'année 2011, elles pourront faire la même chose, mais on leur appliquera ce que l'on appelle la règle de leur génération, c'est-à-dire qu'en fait, pour parler clair, on leur appliquera les règles de la décote ; et à partir de 2012, le dispositif sera fermé, sauf pour celles qui cumulaient les deux conditions -quinze ans et trois enfants - avant le 1er janvier 2012. Donc première observation, c'est beaucoup plus nuancé qu'un arrêt brutal. Deuxième observation : il y a de bonnes raisons de penser qu'il n'y aura pas cet effet d'effusion que vous évoquiez, d'une part parce que dans le passé, on a constaté, notamment en 2003, que lorsqu'il y a une réforme qui se met en place, il a effectivement un nombre un peu plus important d'agents - de l'ordre de 10 à 15% - qui partent selon les règles anciennes, mais que ça s'équilibre très rapidement. Et en second lieu, pour prendre directement l'exemple des infirmières que vous évoquiez, nous avons mis en place par ailleurs une autre réforme qui concerne les infirmières, et qui va leur donner la possibilité de passer en catégorie A, c'est-à-dire dans la catégorie des cadres de la fonction publique, et tout nous laisse à penser que ça va être un élément qui va les inciter à rester.
Parce que dans l'Éducation nationale, les syndicats disent que ça pourrait concerner 25.000 enseignantes.
Je crois que dans l'Éducation nationale qui effectivement dispose de façon assez récurrente de ce dispositif, nous aurons nombre d'agents qui s'apercevront que cette sortie se fait de façon douce et progressive telle que je viens de l'évoquer, qui seront très intéressés par un maintien dans leur situation ; parce que nous avons toute une série de plans qui se mettent en place dans l'Éducation nationale et qui revalorisent les carrières, notamment ce que l'on appelle la masterisation : on injecte 200 millions d'euros pour pouvoir revaloriser le statut des enseignants, et pardon de le dire, mais ce sont, en terme de pouvoir d'achat, des gains qui seront là encore, de nature à corriger ces chiffres.
En quoi la réforme des retraites apportera de l'équité entre le public et le privé, si ce n'est le nombre d'années de cotisations ?
C'est important de poser la question en termes généraux d'abord. Une des règles qui feront que maintenant il y a cette équité qui s'introduit dans le dispositif, c'est tout simplement le fait qu'elle s'applique dorénavant sans distinguo. Les règles d'âge qui vont s'appliquer au secteur prive - le recul à 62 ans - vont s'appliquer au secteur public. Et il faut bien mesurer que ça s'appliquera également aux régimes spéciaux à partir de 2010 (sic).
C'est-à-dire qu'on ne pourra plus partir à 50 ans à la retraite quand on est fonctionnaire, comme c'est le cas dans certaines franges de la fonction publique aujourd'hui ?
Là, vous évoquez les catégories dites « actives ». Les catégories actives sont des catégories qui sont historiquement reconnues comme étant particulières dans la fonction publique. Je vais vous prendre l'exemple des policiers, dont vous voyez bien dans la première question que vous m'avez posée tout à l'heure, qu'ils effectuent des missions, qu'ils remplissent une mission de service public qui n'a pas de transposition dans le privé.
Je vais vous prendre une comparaison : en quoi un policier pourrait partir à 50 ans, et le couvreur partirait à 62 ans ? Couvreur c'est un métier à risque. A 62 ans être couvreur, c'est dangereux.
Un policier ne pourra plus partir à 50 ans puisque je vous ai indiqué que c'était décalé de deux ans.
Donc à 52.
Voilà.
52/ 62...
Attendez ! Votre question c'était : est-ce que oui ou non il y a de l'équité ? L'équité c'est aujourd'hui, il n'y a plus d'exceptions pour le secteur public. Pour la police, c'est...
Même un agent de sécurité dans le privé...
Je vais vous répondre. La police, c'est une mission particulièrement spécifique à la fonction publique. Vous n'avez pas, y compris dans les agents de sécurité, une mission de service public de sécurité équivalente dans le secteur privé.
On ne peut pas imaginer qu'un policier on lui dise « à 52 ans, tu fais une autre mission dans un bureau, mais tu continues à travailler jusqu'à 62 ans » ? Il n'est pas bon à jeter à 52 ans le policier.
C'est pour cela qu'il ne faut pas le jeter. Sauf qu'il faut bien mesurer que les policiers ont, je le répète, une spécificité que l'on ne retrouve pas dans le secteur privé, qui est adossée à des règles qui sont des règles extrêmement anciennes, parce qu'il n'y a pas d'équivalence. Quand en revanche, il y a une équivalence de statut public/privé, il y a évolution. Prenez, reprenez si vous m'y autorisez, l'exemple les infirmières. Quelle différence y a-t-il entre une infirmière dans le public et une infirmière dans le privé ? Elle est extrêmement minime.
Et dans le public, elles partent à quel âge ?
Justement, c'est ce que je viens de vous redire : nous avons modifié le statut des infirmières dans la fonction publique en leur permettant d'accéder à la catégorie A et en sortant de fait de la catégorie active, ce qu'il fait qu'elles partiront à 60 ans.
J. Mathieu (3216) : J'ai une question de Slimane dans le Var qui est éducateur. Il vous demande : pourquoi supprime-t-on les services publics dans les quartiers et où va l'argent qui est destiné à la réhabilitation des quartiers ? Je pense qu'il fait allusion, enfin étant élu moi-même d'une ville de banlieue, Draveil, je n'ai pas de suppression d'argent public dans les quartiers. J'ai des actions qui sont des actions - enfin j'ai eu des actions qui étaient des actions - de rénovation des quartiers par l'intermédiaire de l'ANRU. Aujourd'hui, c'est vrai qu'il y a une redéfinition des cartes de la géographie spécifique aux quartiers. Mais cela dit c'est pour mieux concentrer l'argent sur les quartiers qui sont plus dégradés que les autres et réduire un peu la voilure. Il y avait 750 quartiers qui étaient dans la politique Ville. Il y en aura moins demain. Donc la réponse à la question posée est : c'est une façon d'injecter plus d'argent sur moins de quartiers. Il n'y a donc pas une évasion financière.
En parlant de réduire la voilure, vous, vous souhaitez qu'on réduise la voilure aussi dans le nombre de fonctionnaires au niveau des collectivités locales, qui ne jouent pas le même jeu que la fonction public nationale, c'est cela ?
On peut dire cela comme cela. En gros, la France n'est pas sous dotée en fonctionnaires, qui sont des gens dans l'immense majorité de très grande qualité. Mais nous avons un nombre de fonctionnaires qui est plus important que dans tous les pays qui nous entourent.
Et qui a augmenté ces dernières années dans les collectivités territoriales. 300.000 postes c'est cela ?
350.000 postes, hors transfert de compétences.
En combien de temps ?
En dix ans : de 98 à 2007. Cela veut dire qu'au moment même où l'Etat commence à réduire, pour reprendre l'expression, la voilure du nombre de ses effectifs, je me permets d'ailleurs de le souligner, en les rémunérant mieux, parce que c'est à cela que ...
De combien mieux ?
Tous les ans, nous donnons l'équivalent d'à peu près 500 à 600 millions d'euros pour revaloriser les statuts.
Mais par personne, cela fait combien en général ?
Tout dépend de la profession dans laquelle vous exercez. Prenez l'exemple de l'enseignement que vous évoquiez. Vous avez par exemple les 200 millions qui vont permettre de revaloriser la carrière des enseignants, vous avez des primes 1500 euros pour les proviseurs des lycées, 1500 euros pour ceux qui s'installent pour leur première installation. Et on pourrait décliner comme cela tout le système de primes. Je veux dire simplement la chose suivante : c'est que les collectivités territoriales pendant ce temps elles ont augmenté de l'ordre 350.000 personnes leurs effectifs. C'est donc de facto, incontestablement, une pression fiscale locale qui s'exerce. Or, demain, la France n'aura plus les moyens - aujourd'hui, d'ailleurs, la France n'a plus les moyens - d'avoir comme cela des collectivités territoriales qui ne s'appliquent pas des règles de gestion comparables à celles de l'Etat.
Les questions politiquement concrètes : qu'est-ce que cela vous évoque Paloma ?
Paloma ! Je ne sais pas trop.
Paloma c'est le yacht de Monsieur Bolloré sur lequel avait passé ses vacances N. Sarkozy. Est-ce que le noeud du problème aujourd'hui du manque de confiance d'une frange de la population vis-à-vis de N. Sarkozy ne vient pas justement du lendemain de son élection : le Fouquet's, le Paloma et de son rapport avec les riches ?
A partir du moment où il y a des images qui deviennent des critères de jugement, celle-ci est une image qu'il fallait corriger. Et je crois que le Président a tout fait pour la corriger. Nous ne sommes plus dans la situation où il y a dans l'opinion publique des images de cette nature qui sont instillées. On est incontestablement obligé de tenir compte d'une évolution de l'opinion publique qui s'attache à ces images-là, et ces images-là il faut y faire attention.
2012 : Sarkozy ou Villepin pour vous ?
2012 ce sera d'abord la décision individuelle, d'une part du président de la République et ensuite de D. de Villepin.
Et vous, s'ils y sont tous les deux, votre bulletin de vote ?
Mais ils ne seront pas tous les deux. Il faudra tout faire et je vous assure que les gens comme moi s'y emploie pour éviter...
Vous êtes villepiniste ?
Mais bien sûr. Je vous quitte là dans quelques minutes pour aller rejoindre et petit-déjeuner avec D. de Villepin.
C'est pour essayer de réconcilier les deux ?
L'objectif c'est évidemment que la majorité soit unie, c'est évidemment cela. Villepin je vais le lui redire, et on a des discussions intéressantes à ce sujet. Villepin à mon sens sous-estime le poids qui est le sien dans la majorité. Et je le redis dans la majorité, il devrait, me semble-t-il, faire entendre sa voix dans le cadre de la majorité beaucoup plus qu'il ne le fait aujourd'hui.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 30 juillet 2010