Déclaration de M. François Fillon, Premier ministre, en réponse à une question sur les enjeux du débat parlementaire sur la réforme des retraites, à l'Assemblée nationale le 7 septembre 2010.

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Circonstance : Question posée par M. Jean-Marc Ayrault, député (PS) de Loire-Atlantique et président du groupe SRC, lors de la séance des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale le 7 septembre 2010

Texte intégral

Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs les députés,
Monsieur le président Ayrault,
Dans notre démocratie, il est légitime qu'une question aussi fondamentale que celle des retraites suscite de vifs débats. Et je veux d'abord dire que ceux qui ont choisi aujourd'hui de manifester doivent être respectés. Le Gouvernement entend leurs inquiétudes, et le Gouvernement écoute leurs propositions et il est ouvert au débat, pour peu que l'on ne perde pas de vue l'objectif de la réforme. La réforme des retraites que nous proposons a un objectif : faire en sorte que les retraites des Français soient payées demain. Ce n'est pas le cas si nous restons dans le statu quo.
Ceux qui ont choisi de ne pas manifester doivent aussi être respectés. Et je voudrais en particulier remercier ceux qui ont fait le choix d'assumer leurs responsabilités professionnelles, n'aggravant pas ainsi la situation économique et financière de notre pays.
Je veux d'ailleurs, au passage, souligner, mesdames et messieurs les députés, que notre démocratie a progressé grâce à une décision importante que vous avez prise, celle sur le service minimum, puisque aujourd'hui en France on peut d'un côté manifester son opposition, faire grève, et de l'autre côté, faire en sorte que le pays ne soit pas bloqué et que les usagers puissent, dans les meilleures conditions possibles, se rendre à leur travail.
La question des retraites, monsieur Ayrault, et vous le savez bien, il suffit de regarder ce qui se passe autour de nous, n'est pas une question de gauche ou de droite. C'est juste une question démographique. Si nous avons choisi de proposer d'augmenter à 62 ans l'âge légal de départ à la retraite, c'est parce que depuis 1950, nous avons gagné quinze années de vie. Et c'est aussi parce que l'ensemble des pays européens, sans aucune exception, a choisi cette solution. Je dirais même plus : aujourd'hui, dans la quasi-totalité des pays européens, le débat qui est engagé et que vous appeliez de vos voeux, entre opposition et majorité, entre syndicats et patronat, c'est un débat pour savoir si on passe de 65 à 66, à 67 ou 68 ans. En proposant 62 ans, le Gouvernement a fait un choix raisonnable, et en même temps un choix qui est incontournable pour assurer le financement des retraites des Français.
Alors, monsieur le président Ayrault, vous nous dites : on va débattre maintenant, projet contre projet. Oui, c'est ici à l'Assemblée nationale, c'est ici dans votre assemblée que désormais se joue le sort des retraites des Français et de la réforme que nous proposons. Projet contre projet, article après article, argument contre argument, ce que je vous demande c'est de vous élever au-dessus des caricatures et des postures. Et nous allons confronter nos chiffres et nous allons confronter les propositions qui sont les nôtres. Et c'est la fierté, et c'est l'honneur du Parlement que d'engager ce débat, lui qui est le dépositaire de la souveraineté nationale.
Mais monsieur Ayrault, et je voudrais en terminer là, un projet c'est important, mais la crédibilité de ceux qui le portent c'est aussi important. Or depuis 1993, la gauche n'a jamais tenu un seul des engagements qu'elle a pris en matière de retraites. Et les Français aujourd'hui doivent le savoir. En 1993, vous aviez promis d'abroger la réforme Balladur, vous ne l'avez pas fait. En 2003, vous aviez promis d'abroger la réforme que nous allons porter ; vous l'avez aujourd'hui intégrée dans les propositions que vous faites. Et en 2007, vous avez combattu la réforme des régimes spéciaux ; je n'ai trouvé aucune phrase dans votre projet qui vise à revenir sur cette réforme. Tout se passe comme si une bonne réforme pour vous, c'était la précédente. Et au moment où nous en proposons une nouvelle, celle que vous avez combattue devient la bonne. Eh bien j'espère que cette fois-ci, vous saurez ne plus être en retard sur l'histoire.Source http://www.gouvernement.fr, le 21 septembre 2010|N|N|N|N|Texte intégral62283|ARLETTE CHABOT
Bonsoir Monsieur le Premier ministre.
FRANÇOIS FILLON
Bonsoir.
ARLETTE CHABOT
Merci d'avoir accepté notre invitation. Nous allons vous interroger avec Jean BOISSONNAT qui pendant des années nous a éclairés sur les enjeux économiques de ce pays sur une radio qui est toujours EUROPE 1. Donc nous serons à deux pour essayer de comprendre ce que vous proposez et de même, ce que propose le Parti socialiste. Alors quand on a su que vous veniez à cette émission certains ont dit, j'ai lu dans les journaux, c'est les confrères qui l'ont écrit, « tiens, ça y est, François FILLON prend en charge la réforme des retraites ». Et puis hier le président de la République intervient au Conseil des ministres et on se dit « voilà, ça y est ». Donc le patron de la réforme de retraites c'est le président de la République...
FRANÇOIS FILLON
Bien sûr. Comment pourrait-il en être autrement, le président de la République est élu par les Français et il décide, il en a d'ailleurs toujours été ainsi, même si parfois les apparences étaient différentes. Ce que je veux vous dire ce soir, c'est qu'il n'y a aucune mesure dans cette réforme des retraites qui n'ait pas fait l'objet de longs débats avec le président de la République, avec le Gouvernement, avec Eric WOERTH, avec Georges TRON, et que toutes les mesures que nous vous proposons sont des mesures que je soutiens, que je porte. Si ça n'était pas le cas, je ne serais pas devant vous ce soir pour les défendre.
ARLETTE CHABOT
Donc 100% d'accord avec tout ce qui est proposé bien sûr ?
FRANÇOIS FILLON
Bien sûr, et les propositions que nous avons faites, que le président de la République a annoncées au Conseil des ministres mercredi, sont des propositions qui ne remettent pas en cause ce qui pour moi est absolument fondamental, c'est-à-dire, parce que je crois que c'est le langage de vérité qu'on doit aux Français, c'est-à-dire le coeur de la réforme, l'allongement de la durée de travail de 60 à 62 ans avec ses conséquences notamment sur la durée au-delà de laquelle la décote ne s'applique plus, c'est-à-dire de 65 à 67 ans, c'est fondamental.
ARLETTE CHABOT
On va en parler dans un instant évidemment avec Jean. Juste une petite précision quand même, vous dites c'est le président de la République qui effectivement mène la réforme, c'est normal, du coup Bernard THIBAULT, François CHEREQUE ont raison de dire que ce n'est pas la peine d'aller discuter avec le ministre, ça ne sert à rien puisque c'est à l'Elysée que tout se décide ?
FRANÇOIS FILLON
Non, je crois que ce n'est pas exact de dire ça. Il y a un ministre qui a préparé cette réforme, qui la défend aujourd'hui devant le Parlement, qui est en train de faire le travail qui est normal dans une démocratie. Et dans le passé je n'ai pas le souvenir lorsque François MITTERRAND était président de la République, lorsque Jacques CHIRAC était président de la République, que les organisations syndicales refusaient de discuter avec les ministres. Vous pensez vraiment un instant que sur une réforme des retraites le président MITTERRAND ou le président CHIRAC n'avait pas leur mot à dire ? Qui peut penser cela ?
ARLETTE CHABOT
Ce soir, dans une interview publiée par LE MONDE, Bernard THIBAULT dit qu'au fond « Nicolas SARKOZY instrumentalise la réforme des retraites pour des raisons politiques ». Il met en garde contre un blocage, voire même une crise sociale...
FRANÇOIS FILLON
Je respecte beaucoup Bernard THIBAULT et je respecte d'une façon générale les organisations syndicales qui jouent un rôle essentiel et qui ont été très responsables dans la gestion, notamment de la crise économique et financière que nous venons de traverser, mais sur ce sujet, il se trompe. Franchement, pour le président de la République et pour le Gouvernement ça aurait été plus simple de ne pas avoir à proposer cette réforme des retraites, ça aurait été plus simple d'attendre les élections présidentielles de 2012 pour en débattre. Si nous avons estimé, avec le président, qu'il était nécessaire de présenter cette réforme, c'est parce qu'il y a une aggravation des déficits, il y a une aggravation des déficits qui est due à la démographie mais qui a été accélérée par la crise économique et financière. J'ai bien noté qu'il y avait beaucoup de gens dans les rues de nos villes mardi dernier. Mais je dis que si on disait aux Français qu'on ne peut plus payer les retraites, si on disait aux Français qu'on doit réduire de façon importante le montant des pensions, il y en aurait, et c'est normal, beaucoup plus à manifester.
ARLETTE CHABOT
Jean BOISSONNAT, 60, 62, 65, 67...
JEAN BOISSONNAT
Oui... Monsieur le Premier ministre, ce n'est pas votre première réforme sur les retraites puisqu'en 2003 c'est vous qui étiez en charge et qui en tant que ministre du Travail avez conduit cette réforme. Et elle s'inscrivait d'ailleurs dans la ligne de BALLADUR en 1993 et dans tous les cas ça passe par un allongement de la période nécessaire pour avoir une retraite à taux plein. Cette fois-ci, vous ajoutez à ce processus, que vous continuez, vous ajoutez le fait que l'on ne pourra plus exiger d'avoir sa retraite à 60 ans. Est-ce que ce problème-là n'était pas déjà clairement posé, compte tenu de ce que l'on sait des évolutions démographiques lorsque vous avez fait votre retraite de 2003. Et pourquoi à l'époque vous ne l'aviez pas retenue que vous la retenez aujourd'hui ? Il peut y avoir deux explications mais vous allez donner la vôtre, c'est peut-être que le système de 2003 n'a pas eu tous les résultats que vous souhaitiez, et pourquoi ? Et, deuxièmement, parce qu'il y avait peut-être un contexte politique qui ne vous permettait pas, à l'époque, de remettre en cause la retraite à 60 ans, alors que à l'évidence, pour les raisons pour lesquelles vous le faites aujourd'hui, cela existait déjà.
FRANÇOIS FILLON
D'abord je crois qu'il faut admettre l'idée qu'il n'y a pas une réforme des retraites définitive, qui réglera le problème des retraites des Français pour très longtemps. Il faut en permanence adapter le système aux évolutions démographiques qui ne sont pas si faciles que cela à prévoir, aux évolutions économiques, aux comportements mêmes des Français. Et il y a une question d'acceptabilité de la réforme. Quand en 1993, Edouard BALLADUR a souhaité que dans le secteur privé on passe de 37 annuités et demie à 40 annuités pour avoir une retraite à taux plein, il y a eu des protestations très fortes. Le Parti socialiste, à l'époque, a pris l'engagement d'abroger cette mesure dès qu'il arriverait au pouvoir. Puis finalement tout le monde a admis que c'était une mesure nécessaire. Quand nous avons proposé de faire la même chose pour le secteur public puis d'engager une augmentation de la durée de cotisation en 2003, nous avons franchi une étape supplémentaire. C'est vrai qu'à l'époque, on s'est posé la question de savoir s'il faut toucher à l'âge légal. On a pensé...
ARLETTE CHABOT
C'est un tabou en France, c'est un tabou à gauche, c'est un tabou pour les syndicats...
FRANÇOIS FILLON
Bon, c'est un tabou. On a pensé qu'il était possible de ne pas le faire et que l'allongement de la durée de cotisation serait suffisant pour changer les comportements, conduire les Français à rester plus longtemps et donc mieux équilibrer les régimes.
JEAN BOISSONNAT
Pourquoi ça n'a pas marché ?
FRANÇOIS FILLON
Ca a marché partiellement. Sur les 20 milliards d'Euros en 2020 que la réforme de 2003 devait apporter, grosso modo on est à peu près dans les clous. Mais ça n'est pas suffisant pour convaincre les Français de travailler plus longtemps. Et beaucoup d'entre eux choisissent toujours, souvent d'ailleurs à mon sens pas exactement en connaissance de cause sur ce qui va être la pension qu'ils vont recevoir, de partir plus tôt. Et quand on regarde ce qui se passe dans les autres pays européens on voit bien que sans une mesure d'allongement de la durée légale on ne peut pas réussir à équilibrer les régimes de retraite.
ARLETTE CHABOT
Et vous auriez pu quand même par exemple maintenir le droit de partir à la retraite à 60 ans mais avec une pénalité très forte. Après, à chacun de choisir...
FRANÇOIS FILLON
C'est un choix que nous avons examiné mais que nous n'avons pas retenu, parce que je pense que c'est un choix très dangereux. C'est un choix qui consiste à fabriquer des très petites retraites, des retraites qui ne permettront pas à nos concitoyens de vivre décemment, simplement parce qu'on n'a pas le courage d'affronter le problème en face. Et le problème en face, c'est l'allongement de l'âge légal. Encore une fois, tous les autres pays européens ont pratiqué avant nous. Nous sommes en train de proposer une réforme qui vise à passer de 60 à 62 ans l'âge légal pour partir à la retraite. Dans tous les autres pays européens sans exception, le débat aujourd'hui est entre 65, 66, 67, voire 68 ans. Donc la réforme que nous proposons est très raisonnable. Elle s'inscrit dans une continuité après celle de 93 et celle de 2003. Mais je crois vraiment qu'elle est incontournable.
JEAN BOISSONNAT
N'est-elle pas menacée, comme celle de 2003, d'un semi échec, compte tenu du contexte dans lequel nous sommes. En 2003, vous aviez prévu pour financer ce qui était mis en oeuvre un transfert des moyens de l'assurance-chômage sur l'assurance vieillesse. Ca n'a pas été possible...
FRANÇOIS FILLON
Nous étions prêts à le faire en 2008, à l'été 2008, les décrets étaient même préparés. Et puis il y a eu la crise économique qui est venue bouleverser complètement, au moins de façon temporaire, les données du problème. Nous avons repris cette proposition dans le projet de réforme à l'horizon de 2018, pour environ un milliard d'euros en 2018, un peu plus en 2020, parce que la démographie de notre pays doit conduire mécaniquement à une réduction du chômage. On ne peut pas à la fois avoir un allongement de la durée de la vie, un nombre de retraités plus important, une démographie qui nous conduit à prendre les mesures que nous sommes en train de prendre, et puis en même temps, ne pas avoir d'effet de cette démographie sur le chômage. Mais en même temps il peut y avoir des incertitudes, il peut y avoir des crises à nouveau et c'est la raison pour laquelle nous avons prévu dans cette réforme un comité de pilotage, avec un premier rendez-vous en 2018, pour le cas échéant ajuster les paramètres de la réforme en fonction de la réalité économique et démographique.
JEAN BOISSONNAT
Oui mais vous avez prévu, si j'ai bien lu, peut-être me suis-je trompé, un taux de croissance de l'économie française d'ici 2018 qui vous permet de tenir dans les clous, que vous avez vous-même indiqué un taux de croissance de l'ordre de 2,5% par an...
FRANÇOIS FILLON
Le Conseil d'Orientation des Retraites, qui est l'organisme qui regroupe les partenaires sociaux et qui a fait faire beaucoup de progrès au débat sur les retraites dans notre pays et qui avait d'ailleurs été créé par Lionel JOSPIN, ce Conseil d'Orientation des Retraites a proposé trois scénarios avec des chiffres en terme de chômage et en terme de croissance. On a retenu le scénario médian. Certains, que vous aurez l'occasion d'interroger tout à l'heure, ont choisi le scénario le plus optimiste. Il y a un scénario plus dégradé, c'est la raison pour laquelle il faudra forcément réaliser des adaptations au cours de la mise en oeuvre de cette réforme. Encore une fois, il n'y aura jamais de réforme définitive, il faudra faire évoluer les choses et c'est la raison pour laquelle il faut que nous abordions ce débat avec un grand sens des responsabilités et une volonté de coller au plus près à la réalité.
ARLETTE CHABOT
Alors beaucoup pense que ce passage 60, 62 est injuste parce que effectivement, Jean le rappelait, j'allais dire qu'il y a double peine. C'est-à-dire qu'on n'a plus le droit de faire valoir ses droits à la retraite à 60 ans, en même temps il faut avoir cotiser 40 ans et demi, 41, 41 et demi, etc., et ceux qui par exemple ont commencé à travailler à 18 ans, je ne parle pas des carrières longues, mais 18, 19 ans ils vont se retrouver à avoir cotisé plus longtemps, 42, 43, 44 ans, « ça ce n'est pas juste », disent les organisations syndicales notamment...
FRANÇOIS FILLON
D'abord il faut dire que c'est la situation d'aujourd'hui et que c'était la situation d'hier, il n'y a pas de nouveauté dans ce domaine.
ARLETTE CHABOT
Sauf qu'on pouvait dire « moi je pars »...
FRANÇOIS FILLON
Non, non, vous pouviez partir à 60 ans, vous ne pouviez pas partir avant...
ARLETTE CHABOT
Voilà, à 60 ans.
FRANÇOIS FILLON
Et l'injustice était la même entre ceux qui ont commencé à travailler à 14, à 15 ans ou ceux qui ont travaillé...
ARLETTE CHABOT
Je parle 18, 19 et 20, pas les carrières longues.
FRANÇOIS FILLON
Ou ceux qui ont commencé à travailler plus tard. Deuxièmement, il faut d'abord évoquer ce qu'est notre système de retraite. On a choisi, c'est notre pacte républicain depuis 1945, un système par répartition. Je pense que beaucoup de Français ne savent pas ce que ça veut dire. Ca veut dire que les actifs cotisent, les salariés et les entreprises, et ces cotisations servent à payer les retraites non pas les leurs mais celles des retraités d'aujourd'hui. Et ce système contributif permet en même temps, par le calcul des trimestres, de calculer la pension que l'on aura lorsqu'on prendra soi-même sa retraite. C'est un système qui a des inconvénients, aucun système n'est parfaitement juste, mais il a un grand avantage, il est très robuste, il est très sûr. Il n'est pas soumis aux aléas des cours de la Bourse, il n'est pas soumis aux aléas, en tout cas pas autant que les autres, de la situation économique. Si on veut garder ce système avec une vie qui s'allonge, 15 ans de plus, on vit aujourd'hui 15 ans de plus que nos parents, on ne peut pas ne pas allonger la durée de travail. On va passer 15 ans de plus que nos parents en retraite, comment est-ce qu'on peut imaginer et qui aujourd'hui nous croirait si on le proposait, qu'on va pouvoir continuer à financer des retraites qui s'allongent en moyenne de 15 ans aujourd'hui, qui vont s'allonger encore plus, sans travailler plus. J'ajoute que la question de la compétitivité de l'économie française avec nos voisins et en particulier avec nos voisins allemands est une question que personne ne peut ignorer. Je ne crois pas qu'il y ait un Français qui puisse croire au fond de lui-même, s'il est sincère, que la France va pouvoir conserver le même niveau de vie qu'aujourd'hui, en travaillant beaucoup moins que nos voisins allemands.
ARLETTE CHABOT
Alors moi je reviens, donc ce n'est pas injuste par exemple pour ceux qui vont devoir travailler 43, 44 ans.18 ans, on parlera des carrières longues après, mais ceux qui ont commencé à travailler à 18 ans, 19 ans, ils ne pourraient pas partir à 60 ans...
FRANÇOIS FILLON
Là aussi pour être honnête il faut dire que jusqu'en 2003, quand vous aviez commencé à travailler à 14 ans, vous partiez à la retraite au même âge que celui qui avait commencé à travailler à 25 ou à 28 ans. Qui a changé ce système ? C'est la majorité actuelle, dans le cadre de la réforme de 2003 à la suite d'une négociation avec la CFDT. Cétait une revendication qui était portée par la CFDT depuis longtemps. C'était d'ailleurs un engagement que la gauche avait pris quasiment à chaque élection législative depuis des années, qu'elle n'avait jamais mis en oeuvre. Donc on a rendu possible le départ anticipé pour ceux qui ont commencé à travailler à 14, à 15 et à 16 ans. Et dans la réforme que nous proposons aujourd'hui on propose d'aller plus loin et de prendre les catégories qui ont commencé à travailler à 17 ans, donc de 17 à 18 ans.
ARLETTE CHABOT
Voilà, vous ne me répondez pas sur les 18, 19 mais avant, les carrières longues...
FRANÇOIS FILLON
Simplement parce que si on veut aller plus loin, compte tenu du nombre de personnes qui sont concernées, alors l'équilibre financier n'est plus assuré et donc il faut soit baisser les pensions, soit augmenter les cotisations, soit allonger encore plus la durée de travail pour les autres. C'est un système dans lequel dès qu'on touche à un paramètre les autres sont impactés. Je pense que l'équilibre que nous avons trouvé, c'est aujourd'hui le plus juste.
ARLETTE CHABOT
Pour que les choses soient précises, pardonne-moi, que tout le monde comprenne, pardonnez-moi, Jean, ça veut dire que le dispositif des carrières longues est maintenu, c'est-à-dire qu'il faudra...
FRANÇOIS FILLON
Il n'est pas maintenu, il est amélioré.
ARLETTE CHABOT
Amélioré puisqu'on va jusqu'à 17 ans.
FRANÇOIS FILLON
Il est amélioré puisqu'on passe à 17 ans, je rappelle que c'est...
ARLETTE CHABOT
Ceux qui pourront faire valoir leurs droits à la retraite quand ils auront obtenu les annuités nécessaires et demandées par la loi, c'est ça, à taux plein ?
FRANÇOIS FILLON
Absolument. Et donc...
ARLETTE CHABOT
Sans majoration, sans plus ?
FRANÇOIS FILLON
Sans majoration et avec un système de lissage qui fait partie des propositions que le président de la République a mises sur la table mercredi dernier, pour éviter ce que certains qui ont profité de ce système ont pu constater, c'est-à-dire des effets de seuil qui sont très importants, on a donc décidé d'améliorer le dispositif. Mais c'est 600.000 Français qui sont partis à la retraite anticipée d'une certaine façon de cette manière et avec le passage à 17 ans, c'est 100.000 Français de plus qui pourront bénéficier de ce dispositif.
JEAN BOISSONNAT
Mais c'est pas ça...
ARLETTE CHABOT
Alors, Jean, 65, 67 ans, Jean...
JEAN BOISSONNAT
Oui puis il y a un autre point sur le sujet que vous venez d'aborder. Est-ce que au passage vous n'avez pas dénaturé le fonds de réserve des retraites. Vous dites souvent « la gauche n'a rien fait sur les retraites », c'est assez vrai, sauf qu'ils ont créé ce fonds de réserve des retraites.
FRANÇOIS FILLON
Le Fonds de réserve et le COR.
JEAN BOISSONNAT
Voilà.
ARLETTE CHABOT
Le Conseil d'Orientation des Retraites qui donne le pilotage.
JEAN BOISSONNAT
Le Fonds de réserve, il a pour objet d'organiser la solidarité entre les générations et il devait être nourri pour servir dans les années 2020 et 2030 à réaliser ça. Or, on a le sentiment - peut-être qu'on se trompe - que vous êtes en train de piocher dedans et de lui enlever en quelque sorte sa caractéristique essentielle qui était de préparer à l'horizon 2020 et 2030, ce qui se posera de toute manière compte tenu de l'état de notre démographie. Est-ce que vous n'êtes pas en train là de changer la nature du Fonds qui devait servir à réaliser entre les générations une solidarité ?
FRANÇOIS FILLON
D'abord, nous, nous n'avons jamais pensé que le Fonds de réserve pourrait avoir ce résultat. Il avait pour objectif de lisser un déficit entre 2020 et 2030. Déficit qui, d'ailleurs, apparaît plus tôt que prévu, compte tenu de l'évolution démographique et de la situation économique. Et aujourd'hui, ce serait tout à fait paradoxal de continuer à mettre de l'argent sur le Fonds de réserve, tout en empruntant en même temps pour rembourser les déficits actuels...
JEAN BOISSONNAT
En empruntant ou en trouvant d'autres ressources...
FRANÇOIS FILLON
Ça a un côté Shadock quand même...
D'un côté, on investit pour l'avenir mais en même temps, on emprunte pour rembourser les déficits actuels. Nous, nous pensons que c'est plus intelligent d'utiliser le Fonds de réserve maintenant pour régler la question du déficit accumulé qu'il va bien falloir régler d'une façon ou d'une autre - surtout que je vous rappelle que nous avons atteint des niveaux d'endettement qui ne nous permettent guère d'aller plus loin -, et de résoudre de façon plus efficace et plus définitive la question de l'équilibre des régimes de retraite par l'allongement de la durée de travail et par un certain nombre de recettes supplémentaires que la loi, le projet de loi propose et qui consiste notamment à prélever environ quatre milliards d'euros sur les plus fortunés de nos concitoyens, sur le capital, sur les entreprises qui vont apporter près de deux milliards, en raison d'un dispositif que nous allons modifier sur les allégements de charges. Je crois qu'aller au-delà dans un pays qui est pratiquement aujourd'hui celui qui a le niveau de prélèvements obligatoires le plus élevé en Europe, ce serait tout à fait irresponsable.
ARLETTE CHARBOT
Alors j'ai bien compris. Pardonnez-moi, qu'on comprenne bien, je résume toujours. Donc vous ne bougerez pas sur le report de l'âge de départ à la retraite (60-62 ans, 65-67 ans). Ce qui pénalise beaucoup les femmes. Je le dis, 65-67 ans, ce sont surtout les femmes qui sont pénalisées. Est-ce qu'on peut réfléchir à la mesure ? Je crois que le président du Sénat est là. Il y a beaucoup de membres du Gouvernement autour de nous ce soir. Je ne sais pas, on n'est pas à la table du Conseil des ministres, on n'est pas au siège de l'UMP. Il y a même Xavier BERTRAND, il y a le président du Sénat. Lui-même s'est dit : et si on réfléchissait, comme le demande la CFDT d'une certaine manière, à ce report 65-67 ans pour avoir sa retraite à taux plein ? Ce qui signifie sans pénalités. Alors on peut réfléchir ou pas ? ...
FRANÇOIS FILLON
Non, d'abord, il faut dire de quoi on parle...
ARLETTE CHABOT
Il a tort Gérard LARCHER ou pas ?
FRANÇOIS FILLON
L'âge de départ à la retraite, ce sera 62 ans...
ARLETTE CHABOT
62 ans...
FRANÇOIS FILLON
Au terme d'une période de montée en puissance d'ici 2018...
ARLETTE CHABOT
Ça commence à partir de juillet 2011...
FRANÇOIS FILLON
Ça concerne les personnes qui sont nées à partir du 1er juillet 1951. Toutes celles qui sont nées avant ne sont pas concernées. Et ensuite à partir de cette date, à raison de quatre mois par génération, le dispositif monte en puissance. Il est normal, dans ce contexte, d'appliquer à la limite pour obtenir une retraite à taux plein sans décote, le même décalage de deux ans. Si on ne le fait pas, c'est environ un tiers des mesures d'âge qui sont le fondement même de cette réforme, qui sont la réponse à la question du déficit, qui vont manquer pour financer les retraites demain. Donc le Gouvernement est naturellement ouvert à toutes les propositions, puis il y a un débat parlementaire. La démocratie, c'est...
ARLETTE CHABOT
Mais les sénateurs ont raison de réfléchir à ça ou la CFDT a raison ? ...
FRANÇOIS FILLON
Non, mais tout le monde a raison de réfléchir...
ARLETTE CHABOT
On peut faire un geste envers les femmes qui ont souvent des carrières un peu compliquées ? ...
FRANÇOIS FILLON
Simplement, je veux dire à tous ceux qui nous écoutent qu'il n'y a pas de solution miracle. Si l'on veut faire bouger ce paramètre-là, il faut trouver ces milliards qui vont manquer pour financer les retraites. Donc ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'il faut baisser les pensions. Ça veut dire qu'il faut augmenter les cotisations. C'est une question qu'on s'est posée. Mais on a déjà un niveau de prélèvements, de charges sur les entreprises qui est très élevé. Si on augmente les cotisations, on aura moins de pouvoir d'achat pour les Français et on aura plus de risque de délocalisation...
JEAN BOISSONNAT
Mais, monsieur le Premier ministre, vous avez fait allusion - et c'est évidemment un événement qui a tout changé - à la crise que nous venons de traverser. Pourrait-on imaginer - et je crois que certains membres de la majorité l'ont évoqué - que compte tenu de cet événement exceptionnel, imprévisible, c'est vrai, qu'était la crise, il n'y ait pas un certain nombre de dispositions que vous avez prises sans savoir que cette crise allait avoir cette ampleur et qui pourraient être en quelque sorte suspendues le temps de maîtriser cette crise ? Je pense à une chose toute simple : le bouclier fiscal. On peut parfaitement avoir une conviction politique pour l'instaurer mais compte tenu de la crise et du caractère exceptionnel de cette crise, pourrait-on imaginer que le Gouvernement prenne l'initiative de dire : « Bon ce bouclier fiscal, nous y tenons, nous le gardons durablement mais pendant un temps, nous le suspendons » ? Or, si je calcule approximativement, il coûte environ six cents millions chaque année. Si vous le suspendiez, disons, trois à quatre ans, eh bien ça vous fait quand même quelques milliards que vous récupérez et pour des raisons qui ne signifient nullement de votre part le renoncement à une orientation politique fondamentale, puisque vous prenez en compte un événement exceptionnel pour prendre une mesure temporaire.
FRANÇOIS FILLON
D'abord Monsieur BOISSONNAT, nous avons décidé, dans le cadre de cette réforme, de proposer une augmentation de la fiscalité sur les Français les plus aisés qui ne sera pas concernée par le bouclier fiscal, c'est-à-dire que le bouclier fiscal ne s'appliquera pas en particulier à l'augmentation de l'impôt sur le revenu...
JEAN BOISSONNAT
Oui, mais ça ce ne sont pas six cents millions...
ARLETTE CHABOT
« Mais on pourrait faire plus », disent certains, notamment sur les stock-options, etc.
FRANÇOIS FILLON
Mais d'abord, alors sur les stock-options, parlons-en. Les stock-options étaient très peu taxées dans le passé. C'est cette majorité qui a décidé de les taxer. Et dans la réforme, il est proposé d'augmenter la taxation des stock-options. Mais il faut aussi être réaliste. Le Parti socialiste propose de taxer les stock-options et tire de cette taxation 2 milliards d'euros. L'assiette des stock-options aujourd'hui, ce sont 2,7 milliards. Ça veut dire que les socialistes imaginent qu'ils vont prélever les deux tiers, près des trois quarts de l'assiette même de leur impôt. La vérité, c'est qu'en imaginant qu'on le fasse, on le ferait une année et l'année suivante, il n'y a plus de stock-options donc il n'y a plus de ressources pour financer les retraites. Donc il faut aussi être réaliste. Mais pour répondre à la question de monsieur BOISSONNAT, d'abord, la question des retraites ne peut pas être financée - mais vous le savez bien - avec des mesures qui ne sont pas durables. Donc oui, on peut bricoler ici ou là pour passer une année, deux années mais ce n'est pas le sujet, la question qui nous est posée. La question qui nous est posée, c'est : l'équilibre en 2018, l'équilibre en 2020, ça passe par l'allongement de la durée légale du travail. Bon, le...
ARLETTE CHABOT
Mais c'est ça qui crée le sentiment d'injustice. Ce que dit à l'instant Jean BOISSONNAT, c'est que d'un côté, on ne touche pas effectivement au bouclier fiscal ; de l'autre, on dit qu'on n'impose pas...
FRANÇOIS FILLON
La question du bouclier fiscal, le président de la République et moi-même, nous y réfléchissons, la majorité y réfléchit. Quel est notre souci ? Notre souci, c'est de faire en sorte qu'il reste dans notre pays des hommes et des femmes qui investissent dans l'économie On parle beaucoup, au moment de la réforme des retraites, de taxer les riches. Encore faut-il qu'il y en ait. Et donc moi, je préfère encourager à ce qu'il y en ait plus pour qu'ils rapportent plus d'impôts aux pays, plutôt que de faire en sorte, par une fiscalité complètement confiscatoire par rapport aux autres fiscalités européennes, de les faire partir. Nous ne sommes pas dans un monde fermé ! On a enregistré depuis une dizaine d'années un décrochage de la compétitivité de l'économie française au regard de l'économie allemande, vous le savez bien. Et notamment avec un point de départ qui est grosso modo les années 2000 et la réduction du temps de travail. Si nous ne sommes pas en mesure, dans les prochaines années, de rattraper notre voisin allemand en termes de compétitivité, donc d'aligner notre fiscalité et la sienne, d'une manière ou d'une autre de rapprocher notre organisation en matière de travail, alors nous aurons de moins en moins d'emplois industriels, nous aurons de moins en moins d'emplois tout court et la question du financement des retraites se posera d'une façon encore plus difficile.
ARLETTE CHABOT
Si on revient au 65-67 ans, vous ne bougerez pas non plus, il n'y aura pas de mesure spécifique, particulière pour des femmes qui ont eu des carrières, souvent - c'est le cas des femmes - du temps partiel, voilà...
FRANÇOIS FILLON
Alors parlons de la question des femmes parce que d'abord, il faut dire que le système de retraite ne peut pas corriger toutes les inégalités qui existent dans la société...
ARLETTE CHABOT
Sinon on ne fait que des régimes spéciaux, c'est ça que vous voulez dire...
FRANÇOIS FILLON
Et simplement, si vous voulez, donner plus de retraite à des hommes et à des femmes qui ont cotisé moins, pour des raisons qui sont indépendantes de leur volonté, vous êtes obligée de le faire au détriment des autres puisque vous êtes dans un système par répartition. Donc la première chose que je veux dire, c'est qu'on ne peut pas demander au système de retraite de tout corriger, toutes les inégalités. Il faut naturellement qu'il y tende. La deuxième chose que je veux dire c'est que la question des femmes, elle va se poser de moins en moins à l'avenir puisque le rapport du COR montre que les jeunes générations, à partir des gens qui sont nés en 1966, ont les mêmes durées de cotisation, pour les hommes et pour les femmes. La question se pose pour tous ceux qui vont arriver maintenant à la retraite et qui ont eu des carrières courtes, des carrières qui ont été plus chahutées. Il y a des mesures, dans ce texte, qui améliorent la situation par rapport à ce qu'elle était auparavant, dans les années précédentes ! On a décidé ainsi de donner deux années de cotisations supplémentaires gratuites par enfant. On a, dans ce texte, proposé de prendre en compte les indemnités journalières à l'occasion des congés de maternité pour qu'elles comptent dans le calcul final de la pension, ce qui n'était pas le cas aujourd'hui ! On a proposé de mettre en place un dispositif de trimestres gratuits à chaque naissance. Je rappelle aussi que beaucoup de femmes qui ont eu des carrières très courtes sont aujourd'hui au minimum vieillesse et que le minimum vieillesse n'est pas concerné par l'allongement de deux ans. Il continuera à être servi à partir de 65 ans. Donc il y a beaucoup de mesures qui permettent d'améliorer la situation, s'agissant des femmes. Je remarque que ce sujet n'est pas nouveau ! Il était posé depuis longtemps ! Il y a beaucoup de Gouvernements qui se sont succédé, il n'a pas été réglé.
ARLETTE CHABOT
Oui, mais là, c'est 65 ans, 67 ans pour les femmes ! Elles voient ça comme une espèce de cauchemar !
FRANÇOIS FILLON
C'est...
ARLETTE CHABOT
C'est loin, 67 ans !
FRANÇOIS FILLON
C'est l'ensemble de la population française qui vit plus longtemps et c'est naturel que l'ensemble des catégories voit sa durée de travail augmenter de deux ans.
ARLETTE CHABOT
Donc vous dites non à Monsieur LARCHER, mais il ne fait pas la tête, ce n'est pas grave.
FRANÇOIS FILLON
Non, je ne dis pas non à Monsieur LARCHER. Je dis qu'on peut toujours discuter, chercher des solutions. Vous savez, si j'avais la possibilité de proposer des solutions plus faciles, ce n'est pas une réforme facile ! Je comprends parfaitement l'inquiétude, le fait que les Français n'approuvent pas massivement cette idée de travailler plus. Mais en même temps, je sais qu'ils sont réalistes au fond d'eux-mêmes et je leur demande de regarder ce qui se passe autour d'eux. Ils constatent que, dans tous les autres pays européens, encore une fois, on parle de passer de 65 à 67 ans ! Et nous, nous parlons de passer à 62 ans.
ARLETTE CHABOT
Vous avez bien vu la mobilisation dans les rues, plus de 2 millions, disent les syndicats, mais en tout cas, très, très forte mobilisation ; vous en avez tenu compte, on se dit « peut-être que la prochaine fois, ils vont encore lâcher autre chose », non ?
FRANÇOIS FILLON
Non, je pense qu'aujourd'hui... Lâcher autre chose, d'abord, ce n'est pas comme ça que ça fonctionne...
ARLETTE CHABOT
C'est exprimé ainsi, pardonnez-moi, la formule est un peu familière.
FRANÇOIS FILLON
... Ca veut dire ne plus assurer le financement des retraites. Il y a un moment où il faut être honnête ! Il faut dire la vérité ! Après, on peut avoir des désaccords et on a, avec les organisations syndicales, un dialogue, il y a des sujets sur lesquels on est en accord, j'ai entendu Monsieur THIBAULT dire plusieurs fois qu'on était le seul pays européen où on ne pouvait pas négocier, il n'y avait pas une négociation entre les organisations syndicales et le gouvernement sur la question des retraites. Mais c'est aussi le seul pays européen où les organisations syndicales nous ont dit : « On ne discute pas des mesures d'âge » ! A partir du moment où on ne discute pas des mesures d'âge, comment pouvons-nous arriver à une négociation qui aboutisse à un financement pérenne ?
JEAN BOISSONNAT
Et le relèvement de la CSG sur les pensions ? Parce que la CSG, aujourd'hui, frappe les retraites à un taux inférieur auquel la CSG frappe les revenus, les autres revenus. Est-ce que là, il y a une marge ou pas ?
FRANÇOIS FILLON
Nous, nous pensons que les retraites ne sont pas... sont en moyenne d'un niveau qui est bas, d'ailleurs je pense que tout au long de votre émission, on entendra les uns ou les autres réclamer une hausse des petites retraites...
ARLETTE CHABOT
C'est surtout les Français qui sont inquiets ! On l'a entendu tout à l'heure, ils disent « on aura 400 euros » !
FRANÇOIS FILLON
... Et donc ajouter une fiscalité supplémentaire sur les retraités, ça ne nous a pas paru raisonnable. Nous avons préféré protéger le pouvoir d'achat des retraités plutôt que de recourir à la fiscalité.
ARLETTE CHABOT
Je disais, vous avez bougé un peu, le Président de la République l'a annoncé hier, notamment sur la pénibilité. Néanmoins, vous gardez le même système, c'est-à-dire c'est l'individu qui est concerné et il n'y a pas... Voilà, une baisse de 20 % à 10 % le taux nécessaire d'invalidité, mais après ce sera une commission qui permettra ou non, si j'ai bien compris, effectivement, à l'homme ou la femme de bénéficier... De partir plus tôt à la retraite ; on peut aller plus loin et pourquoi vous gardez cette conception, j'allais dire, individuelle de la pénibilité ?
FRANÇOIS FILLON
D'abord, ce sera le système le plus avancé, le plus généreux en Europe. Aucun autre pays européen ne s'est engagé aussi loin dans le débat sur la pénibilité. Pourquoi ? Parce que c'est un débat extraordinairement difficile ; vouloir désigner des catégories, des professions qui exercent des métiers pénibles pour leur donner un avantage en terme de départ, c'est, en réalité, reconstituer des régimes spéciaux ! On avait donné des avantages aux cheminots quand ils conduisaient des locomotives à vapeur, et puis ensuite le système est resté et nous avons dû le réformer en 2007. J'ajoute que... C'est la raison pour laquelle les autres pays européens ne se sont pas engagés dans cette voie. Pour donner les avantages massifs en terme d'âge de départ à un grand nombre de Français, il faut que les autres cotisent plus ou travaillent plus longtemps ! Donc on a trouvé un équilibre, pour la première fois, la notion de pénibilité, qui n'avait jamais été introduite dans notre système de retraites, ni par la gauche ni par la droite, est introduite. La mesure qui a été proposée par le Président de la République et par le gouvernement va concerner au moins 30.000 personnes, donc ce n'est pas du tout une mesure négligeable, elle va permettre...
ARLETTE CHABOT
Ce n'est pas beaucoup, disent certains, par rapport aux risques professionnels, à l'exposition de certains !
FRANÇOIS FILLON
Elle va permettre, en tout cas, de prendre tous ceux qui, du fait de la pénibilité du travail, de l'exposition à des travaux pénibles, ont un impact sur leur santé. On a proposé une deuxième solution, c'est d'inciter - on l'avait déjà fait en 2003 mais sans incitation - les branches professionnelles, comme c'est le cas dans d'autres pays européens, en Allemagne notamment - à négocier des accords parce qu'elles sont les mieux à même de déterminer quels sont les postes de travail pénibles, et dans le cadre d'un équilibre global à ces branches. En 2003, on avait voulu inciter les branches à le faire, elles ne l'ont pas fait. Dans cette réforme, nous proposons un Fonds qui sera doté par l'Etat et qui servirait à amorcer une négociation qui permettrait d'expérimenter, dans des branches professionnelles, un dispositif qui serait plus... comment dirais-je, géré de façon plus proche du terrain par les partenaires sociaux eux-mêmes.
ARLETTE CHABOT
Parce qu'il y a un moyen d'évaluer, c'est aussi l'espérance de vie ! On sait très bien qu'en fonction du métier, on vit moins vieux.
FRANÇOIS FILLON
Oui, mais si vous prenez l'espérance de vie...
ARLETTE CHABOT
... Oui, c'est ça, moins vieux.
FRANÇOIS FILLON
Si vous prenez l'espérance de vie, alors il faut que les catégories qui ont des espérances de vie très longue travaillent plus longtemps ! Qui, dans notre pays, a l'espérance de vie la plus longue, Madame CHABOT ? Ce sont les enseignants. Moi, je veux bien que l'on explique aux enseignants qu'ils n'ont pas un métier pénible, mais j'entends tous les jours, dans les micros...
JEAN BOISSONNAT
Les enseignants et les ecclésiastiques.
FRANÇOIS FILLON
Oui, mais... Ils sont assez peu nombreux, c'est pour ça que je ne les ai pas cités. Donc c'est une idée généreuse qui a une vraie logique, mais qui se heurte à la perception que nos concitoyens ont de la pénibilité.
JEAN BOISSONNAT
Question latérale, qui va vous paraître secondaire. Vous dites « attention aux métiers rudes ». S'il est un métier rude, c'est Premier ministre. Est-ce que vous avez hâte de prendre votre retraite ?
ARLETTE CHABOT
Oh, pas tout de suite, Jean, pas tout de suite !
FRANÇOIS FILLON
Monsieur BOISSONNAT, il n'y a pas de Premier ministre qui soit resté quarante et un ans en fonction.
ARLETTE CHABOT
Il y a une autre catégorie qui, effectivement, est souvent en difficulté et on s'aperçoit qu'il y a beaucoup de gens qui sont déjà... sont au chômage, n'ont pas de travail, parce que l'emploi des seniors, en France, ce n'est pas terrible et donc ils sont à 57, 58, 59 ans, ils touchent des allocations chômage, qu'est-ce qui va leur arriver à eux ? Ils vont être prolongés jusqu'à 62 ans avec des allocations qui sont peut-être inférieures à la retraite qu'ils pourraient toucher s'ils étaient partis à 60 ans ?
FRANÇOIS FILLON
Ca, c'est vraiment un défi très, très important pour la société française, que de mieux intégrer les salariés les plus âgés. Il faut que les entreprises fassent de gros efforts pour repenser les carrières, repenser les postes de travail, mieux organiser les fins de carrière ; nous proposons, d'ailleurs, dans la réforme parmi les ouvertures qui ont été faites par le Président de la République et le gouvernement, d'inciter les branches professionnelles à négocier des fins de carrière qui seraient différentes avec des temps partiels, avec du tutorat, avec une organisation différente. Donc c'est vraiment une responsabilité des entreprises, et c'est tout l'intérêt des entreprises de le faire parce que les travailleurs les plus âgés apportent à l'entreprise une compétence dont on s'est privé ces dernières années, avec une vision à courte vue sur la nécessité d'offrir des nouveaux postes de travail en se débarrassant le plus rapidement possible des salariés les plus âgés, on voit bien que ça n'a, en rien, réduit le chômage, mais cela a privé l'économie française d'une grande capacité.
ARLETTE CHABOT
Oui. Et ça, je ne voudrais pas être désagréable avec vous, loin de moi, mais ce n'est pas la première fois qu'on entend qu'il faut effectivement conserver les seniors !
FRANÇOIS FILLON
Il y a des nouvelles choses...
ARLETTE CHABOT
Ca ne marche pas trop !
FRANÇOIS FILLON
Il y a des nouvelles choses dans la réforme, il y a des aides à l'embauche des plus de 55 ans, il y a cette incitation à la négociation dans les branches, mais bien entendu, il faudra du temps pour que cela se fasse. Deuxième chose que je veux dire, c'est qu'il y a des progrès qui ont été faits, contrairement - quand il y a des progrès qui sont faits dans notre pays, il faut le dire ! - ...
ARLETTE CHABOT
Oui.
FRANÇOIS FILLON
... L'emploi des seniors, ça ne s'est pas dégradé depuis quelques années, ça s'est amélioré. La vérité, c'est que, depuis 2002, le taux d'activité des seniors en France a augmenté de près de 4 % et si on corrige les variations démographiques, c'est en réalité de 5 %.
JEAN BOISSONNAT
Oui, mais il est moitié moindre que dans les pays scandinaves.
FRANÇOIS FILLON
Ca, dans les pays scandinaves peut-être, mais la comparaison avec les autres pays européens, elle est aussi totalement faussée par les statistiques qu'on a l'habitude de donner puisqu'on compare ce qui se passe dans des pays où les gens travaillent jusqu'à 65 ans. C'est naturel que, entre 60 et 65 ans en France, il y ait assez peu de gens au travail, puisque l'âge de la retraite est à 60 ans. Mais si on prend les Français qui... Les salariés de 55 à 59 ans, on a un taux d'activité qui est à peu près comparable, il est de 1 point inférieur à la moyenne européenne. Malgré tout, immédiatement, il restera des travailleurs âgés qui sont au chômage et qui doivent être aidés. Il y avait un dispositif qui s'appelle l'allocation équivalent-retraite qui existait ; on l'avait suspendu, on l'a remis du fait de la crise économique, on l'a prolongé jusqu'en 2011, donc il va être prolongé jusqu'à la fin de 2011 et les partenaires sociaux qui gèrent l'assurance-chômage vont devoir intégrer, dans la convention assurance-chômage, la réforme des retraites, une fois qu'elle sera votée ! Donc nous attendons la négociation qui va être... qui va avoir lieu entre eux. Mais je leur dis dès aujourd'hui, que une fois qu'ils auront négocié la nouvelle convention Retraites, alors nous mettrons en place un système équivalent à l'allocation équivalent-retraite, pérenne pour les travailleurs les plus âgés.
ARLETTE CHABOT
On va, dans un... Tout à l'heure, donc je rappelle que François CHEREQUE, Bernard THIBAULT vont vous répondre, que Ségolène ROYAL présentera les propositions du Parti socialiste. En attendant, on va faire un tour au siège du PARISIEN - AUJOURD'HUI EN FRANCE. Thierry BORSA, est-ce qu'on a répondu à peu près aux questions que se posent vos lecteurs et qu'ils vont ont transmises ces derniers jours ?
THIERRY BORSA, DIRECTEUR DE LA REDACTION DU PARISIEN
Ecoutez, beaucoup des questions que nos lecteurs nous ont transmises sur le site www.leparisien.fr ont été abordées dans ce que vient de dire le Premier ministre. Il y a, malgré tout, un certain nombre de points sur lesquels il reste des interrogations. Un de ces points, c'est la durée de cotisation pour les personnes qui ont connu des interruptions de carrière, des interruptions de carrière qui sont notamment liées à des périodes de chômage. Donc ces personnes aimeraient savoir ce qu'il est prévu pour compenser ces interruptions de carrière et la perte de cotisations qui en a découlé. L'autre question qui revient, aussi, beaucoup dans ce que nous envoie... dans les messages que nous envoient les internautes, c'est : est-ce que cette réforme sera de nature à garantir le montant de la rémunération pour les personnes lorsqu'elles arriveront à l'âge de la retraite ? Et puis enfin il y a une autre question qui apparaît de façon assez forte, ce soir, c'est sur une réforme de cette ampleur, une réforme de cette importance, est-ce que le gouvernement n'aurait pas dû consulter les Français par référendum ?
ARLETTE CHABOT
Voilà, merci Thierry, on vous retrouvera tout à l'heure. Le plus simple, le référendum... Pourquoi ? Parce que, en fait, c'est une question présidentielle ! Ce n'était pas... Effectivement, cette réforme n'était pas dans le programme de Nicolas SARKOZY, en 2008 il avait même dit « je n'ai pas reçu de mandat pour le faire », il y a eu la crise, elle est faite. Pourquoi ne pas consulter les Français ?
FRANÇOIS FILLON
Je crois que c'est tout à l'honneur du Président de la République d'avoir choisi cette voie difficile parce qu'elle s'imposait, en raison, encore une fois, de l'accélération du calendrier liée à la crise économique. Je pense qu'il y a un Président de la République élu au suffrage universel, des députés, des sénateurs, une majorité, on est dans un système démocratique, il y a un dialogue avec les partenaires sociaux, ce sont des problèmes extrêmement complexes, on le voit bien avec le temps qu'il faut pour les expliquer ! Je ne crois pas que ce soit des questions qui soient compatibles avec la simplicité d'un référendum. Sur la question des carrières qui ont été interrompues...
ARLETTE CHABOT
Interrompues...
FRANÇOIS FILLON
... Les améliorations dans le projet de loi puisque, en particulier, pour les jeunes, les huit trimestres de cotisations seront gratuitement ajoutés pour ceux qui ont commencé à travailler tard. La loi de 2003 prévoyait des dispositifs pour racheter des périodes d'interruption. On travaille autour de ces sujets pour améliorer les choses. Quant au niveau des pensions, je pense que vraiment, la meilleure garantie du niveau des pensions, c'est l'allongement de la durée du travail ! J'ai entendu beaucoup d'experts s'exprimer ces derniers jours sur l'idée qu'on pourrait faire une réforme plus systémique, enfin une réforme très... qui changerait... les choses...
ARLETTE CHABOT
C'est-à-dire on change complètement de système de retraites...
FRANÇOIS FILLON
... Ce qu'on appelle la retraite par points ou les comptes notionnels. Ce sont des sujets intéressants que le gouvernement ne s'interdit pas de regarder ! D'ailleurs, il y a un rendez-vous en 2018, un comité de pilotage ! Simplement, il ne faut pas tromper les Français, il faut leur dire la vérité. On peut tourner le sujet dans tous les sens, on peut avoir des comptes notionnels, on peut avoir des retraites par points ; si on ne travaille pas plus longtemps, on ne cotisera pas plus, et donc on n'arrivera pas à financer nos régimes de retraites.
ARLETTE CHABOT
Mais vous avez entendu, au tout début de l'émission, dans ces... On entendait, les Français disaient « moi, j'aurai quoi ? Quatre cents euros, cinq cents euros », qu'est-ce qu'on peut garantir ? On sait que pour les fonctionnaires, on est... Quoi, à peu près...
FRANÇOIS FILLON
Aujourd'hui, le niveau moyen, tous régimes confondus, c'est un peu plus de 1.100 euros en moyenne, tous régimes confondus.
ARLETTE CHABOT
D'accord. Mais le taux de remplacement, comme on dit, c'est-à-dire « combien j'aurai du salaire », et d'ailleurs ce n'est pas le même calcul pour les fonctionnaires et pour ceux du privé, mais ça va s'arranger... Un jour.
FRANÇOIS FILLON
La loi de 2003 avait fixé un taux minimum à 85 % du SMIC, qui n'était d'ailleurs pas atteint précédemment et qui a été atteint à partir de 2009....
ARLETTE CHABOT
Pour les salariés du privé...
FRANÇOIS FILLON
La réforme, elle vise à maintenir un taux de remplacement équivalent à celui d'aujourd'hui ! C'est tout notre objectif !
ARLETTE CHABOT
C'est-à-dire tous les salariés du privé, la Présidente de la Caisse nationale d'assurance vieillesse, c'est-à-dire les salariés du privé...
FRANÇOIS FILLON
Vous voyez les chiffres !
ARLETTE CHABOT
... S'inquiètent de ça ! C'est quoi ? C'est 50 % à peu près ?
FRANÇOIS FILLON
Une moyenne de 1.100 euros par... En moyenne, tous régimes confondus, alors que la moyenne des salaires dans notre pays est de l'ordre de 1.300 euros. Voilà, vous avez les chiffres. Et c'est ça que nous voulons maintenir. C'est un choix politique très important, celui de maintenir le niveau des retraites, de maintenir le pouvoir d'achat des retraités, plutôt que de compter sur des recettes aléatoires, sur des recettes... J'ai entendu beaucoup de propositions de taxation du capital des entreprises, je veux d'ailleurs dire à ce sujet que les entreprises paient déjà 70 % des cotisations de retraite ! Quand j'entends dire que ce sont les salariés qui paient l'essentiel de la réforme, ça n'est pas exact ! Les entreprises paient 70 % des cotisations, aujourd'hui, dans notre pays, et pour le reste, faire trop appel au capital, faire trop appel à des recettes financières, c'est exposer nos concitoyens à avoir des baisses de pensions.
ARLETTE CHABOT
De façon très courte...
JEAN BOISSONNAT
Vous dites... Vous dites...
ARLETTE CHABOT
Oui ?
JEAN BOISSONNAT
Vous dites « il faut dire la vérité aux Français ». Je voudrais revenir sur ce point qui est très important. Est-ce que, au fond de vous-même, quand vous regardez ce qui s'est passé après les efforts que vous aviez déployés en 2003, est-ce que, au fond de vous-même, la question que vous vous posez, à partir du moment où vous limitez l'horizon à 2018, ce qui est quand même très proche dans ces domaines-là, où tous les autres pays regardent à vingt ans, à trente ans, est-ce que vous ne vous demandez pas, au fond, la situation est plus grave que je ne peux, aujourd'hui, l'avouer à mes concitoyens ?
FRANÇOIS FILLON
Non, je crois que ce que nous disons - d'ailleurs on nous accuse beaucoup de dramatiser, nous ne dramatisons pas - on connaît à peu près les chiffres, il manquera 45 milliards en 2020 si on ne fait rien, 75 à l'horizon 2050. Simplement, nous avons estimé, avec le Président de la République que, compte tenu du fait que cette réforme n'avait pas été dans le débat présidentiel, que l'on était obligé de l'avancer en raison de l'aggravation des déficits et des risques courus par notre économie, il était raisonnable de se fixer un horizon assez court, 2018, de mettre en place un système de pilotage, et puis de permettre les réflexions ultérieures sur l'évolution, y compris vers des systèmes de retraites différents.
ARLETTE CHABOT
C'est-à-dire que cent fois sur le métier, il faut remettre l'ouvrage des retraites, et on recommencera...
FRANÇOIS FILLON
D'ailleurs quand on regarde ce qui se passe en réalité dans les autres pays européens...
ARLETTE CHABOT
Ca sera un débat de 2012 et 2017 ?
FRANÇOIS FILLON
... C'est ça aussi ! La plupart des autres pays européens ont ajusté, en fonction de la démographie et de l'économie, leur système. Mais ils l'ont fait beaucoup plus tôt que nous, et ils l'ont fait, dans presque tous les cas, dans le cadre d'un consensus relatif entre les partenaires sociaux, le patronat, la droite et la gauche, que pour le moment, notre pays n'a pas été capable de construire.
ARLETTE CHABOT
Donc ça sera le débat des prochaines élections présidentielles. Deux, trois petites questions très rapides. Bernard TAPIE, 210 millions d'euros, Madame LAGARDE, qui est là aussi ce soir, on se souvient, c'est : on solde l'affaire du Crédit Lyonnais qui, à l'époque, effectivement, j'allais dire pour faire simple, appartenait à l'Etat. On n'avait pas compris ce chiffre, on ne pensait pas que, comme le disait tout à l'heure effectivement, Jean, il y a d'un côté, le bouclier fiscal, on voit que Bernard TAPIE, même si c'est tout à fait normal, 200 millions...
FRANÇOIS FILLON
Ah je vous arrête, ça n'a rien à voir ! On a...
ARLETTE CHABOT
Non mais ça a choqué ! Est-ce que...
FRANÇOIS FILLON
... Une décision de justice !
ARLETTE CHABOT
D'accord, mais est-ce que ça peut...
FRANÇOIS FILLON
Une décision de justice sur...
ARLETTE CHABOT
Comment... Vous comprenez que ça puisse choquer d'un seul coup, interpeller les Français ?
FRANÇOIS FILLON
Non, enfin je veux dire, il y a une décision de justice qui concerne Monsieur TAPIE, qui est favorable à Monsieur TAPIE. Je ne sais pas le montant exact qui lui sera versé. Ce que je sais, c'est que sur ce montant, l'Etat prélèvera la fiscalité qui doit être prélevée, et donc on verra, au bout du compte, ce qui restera à Monsieur TAPIE. Ca sera sans doute assez différent des chiffres qui sont donnés, mais encore une fois, ce n'est pas une décision du gouvernement ! C'est une...
ARLETTE CHABOT
Non mais vous comprenez que ça choque ! C'est ça, ma question !
FRANÇOIS FILLON
Enfin je veux dire, c'est une décision de justice ; Monsieur TAPIE, la Justice a estimé que Monsieur TAPIE...
ARLETTE CHABOT
Ca fait beaucoup d'argent.
FRANÇOIS FILLON
... Qui avait été, je le rappelle, ministre d'un gouvernement de gauche, avait été spolié dans l'affaire du Crédit Lyonnais. Moi, je ne commente pas les décisions de justice, je les applique.
ARLETTE CHABOT
Vous continuez à penser que l'affaire BETTENCOURT ne perturbe pas le débat sur les retraites ?
FRANÇOIS FILLON
Je vais vous dire, avec le Président de la République, on ne s'est jamais posé la question de savoir si on devait soutenir Eric WOERTH. Parce que nous, nous pensons qu'un pays dans lequel on peut faire démissionner un ministre qui n'a rien à se reprocher, - cela fait près de trois mois que ce débat dure, personne n'a été capable de trouver une seule faute qualifiable sur le plan judiciaire, qui puisse entraîner une procédure judiciaire -, un pays où on force un ministre à démissionner simplement parce qu'un certain nombre de médias l'ont décidé, ce n'est plus tout à fait une démocratie. Je sais que c'était comme cela dans le passé, que cela faisait partie des traditions de notre pays ; et bien c'est une rupture que nous avons voulue avec le Président de la République, et moi, je suis plutôt fier de diriger un gouvernement qui a su résister. Eric WOERTH est un homme honnête, il n'a pas commis de faute, je ne crois pas que le fait...
ARLETTE CHABOT
Il y a eu des oublis de temps en temps...
FRANÇOIS FILLON
Je ne crois pas que le fait de demander une décoration soit une faute, ou alors il faudrait que je publie la totalité des lettres qui me sont envoyées tous les jours par des hommes de droite et de gauche, et des femmes, pour me recommander à la Légion d'honneur ou au mérite telle ou telle personne. Il faudrait s'assurer à chaque fois qu'ils n'ont aucun lien.
ARLETTE CHABOT
Il y a beaucoup de ministres ici, il y en a qui doivent se dire « oh lala, oh lala, il y a un remaniement qui s'annonce, qu'est-ce que je fais dans un mois, un mois et demi ? » ... Franchement, c'était une bonne idée d'annoncer avant l'été qu'il y aurait un remaniement au mois d'octobre ? Est-ce que ça n'affaiblit pas l'autorité de certains, en dehors de leurs angoisses personnelles ?
FRANÇOIS FILLON
La caractéristique des Institutions de la Vème République, c'est que le Premier ministre ne commande pas les remaniements. Ils sont...
ARLETTE CHABOT
Non, pas le remaniement, c'est l'annonce d'un remaniement !
FRANÇOIS FILLON
Qui sont... Qui sont de la responsabilité du Président de la République...
ARLETTE CHABOT
Ca n'affaiblit pas tous ceux qui sont là, qui se font du souci ?
FRANÇOIS FILLON
Ecoutez, nous, on a devant nous, avec le gouvernement, une réforme des retraites, comme vous avez pu le constater, une loi sur la sécurité qui est en cours de débat au Sénat, un budget qui, vous avez pu aussi le constater, n'est pas facile à construire compte tenu de la situation économique et financière qui est celle de la France et de l'Europe et du monde, une réforme des collectivités locales qui passionne beaucoup le Sénat. Voilà, c'est notre horizon, c'est mon horizon, c'est l'horizon du gouvernement.
ARLETTE CHABOT
Justement, Jean vous a demandé de façon un peu brutale tout à l'heure, si ce n'était pas votre... Enfin brutale, à la façon Jean BOISSONNAT, c'est-à-dire extrêmement bien élevée, si votre retraite... Tout le monde vous trouve extrêmement détendu, serein, beaucoup plus qu'avant ! Qu'est-ce qu'il se passe, c'est bientôt fini ? C'est...
FRANÇOIS FILLON
Pourquoi est-ce que ce serait le...
ARLETTE CHABOT
C'est le soulagement qui arrive, ou au contraire, vous vous dites...
FRANÇOIS FILLON
Le fait de s'approcher de la fin qui me rendrait serein ?
ARLETTE CHABOT
... « J'ai tenu plus de trois ans et c'est formidable » ? C'est vrai que vous avez l'air beaucoup plus détendu...
FRANÇOIS FILLON
Simplement parce que je fais ce que je crois juste, parce que j'ai le sentiment que la politique que nous conduisons est en train de porter ses fruits, on voit que l'économie est en train de redémarrer, on voit que le chômage a commencé, pour la première fois, même si c'est encore timide, à baisser, parce que les perspectives de croissance de l'économie française sont meilleures, parce qu'on fait des réformes structurelles qui étaient absolument indispensables, j'ai dit qu'il fallait dire la vérité aux Français, que la France pouvait supporter la vérité ; le Président de la République et la majorité me donnent l'occasion de mettre en oeuvre une politique qui est en cohérence avec mes convictions, donc c'est normal que cela me rende détendu, Madame CHABOT.
ARLETTE CHABOT
Juste un mot, il y a une femme en Iran qui est menacée d'exécution, il y a une pétition en France, il y a la mobilisation. Vous pensez que vraiment, la pression du gouvernement français peut faire changer les choses et l'épargner ?
FRANÇOIS FILLON
Je voudrais dire qu'on est tous révoltés par cette espèce d'acte de barbarie dont est menacée Sakiné ; le Président de la République est intervenu personnellement, il a dit que nous étions désormais responsables de sa vie, responsables de son sort. C'est notre soeur à tous parce que c'est une femme qui est menacée par la pire des barbaries. Je pense que la pression internationale a déjà abouti à un premier résultat...
ARLETTE CHABOT
Un report...
FRANÇOIS FILLON
Il faut continuer, ce n'est pas gagné, mais je pense que l'Iran et les dirigeants Iraniens doivent comprendre que cet acte de barbarie mettrait l'Iran au ban des Nations.
ARLETTE CHABOT
Merci Monsieur le Premier ministre...
FRANÇOIS FILLON
Madame CHABOT puis-je simplement avant de vous quitter dire qu'on a beaucoup parlé de vérité, il faut au moment où cette réforme va s'engager que chacun comprenne bien qu'à chaque réforme précédente il y a eu des contestations, il y a eu des manifestations, la gauche en général s'est engagée à abroger les réformes précédentes ; elle ne l'a jamais fait. Et finalement chaque réforme précédente est intégrée dans l'héritage social de notre pays et ma conviction, c'est qu'aujourd'hui on a un débat vif autour de cette réforme des retraites, mais dans quelques années lorsqu'il s'agira de la faire évoluer, alors cela aura été la réforme de tous les Français.Source http://www.gouvernement.fr, le 21 septembre 2010|N|N|N|N|Texte intégral 62284|Mesdames et Messieurs les ministres,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs,
D'abord, je voudrais vous dire que c'est avec beaucoup de joie et beaucoup d'émotion que je viens pour la première fois ici dans ce qui est pour moi le temple de l'automobile. J'ai déjà eu l'occasion de dire que j'ai eu une longue histoire avec PEUGEOT. Mon grand-père travaillait dans la concession PEUGEOT du Mans ; il avait été engagé aux 24 heures du Mans sur une PEUGEOT dans les années 30. La première voiture dans laquelle je suis monté était une 203 et puis, ensuite, une 403 et puis, une 404 et puis j'ai même roulé sur le toit avec une 304 16 soupapes qui n'avait pas la tenue de route des voitures que j'ai essayées tout à l'heure et enfin, j'ai eu l'immense privilège de faire quelques tours du circuit du Mans il y a quelques mois au volant de ce prodige de technologie qu'est la 908. Je sais que vous n'avez pas gagné les 24 heures du Mans cette année, mais c'est pour mieux les gagner l'année prochaine et comme vous me l'avez proposé, si vous avez besoin d'un pilote remplaçant, je suis toujours disponible !
Si j'ai tenu à venir ici, évidemment, c'est pour rendre hommage à cette usine PEUGEOT de Sochaux, qui appartient à l'histoire de notre industrie automobile, et même à l'histoire de toute l'industrie française. Ce site a longtemps été le plus grand site industriel en Europe. Avec 12.000 salariés, il reste aujourd'hui le plus important de France. Ici, sont sortis des modèles de voiture qui ont marqué les grandes heures de la production nationale, depuis la 201 dans les années 30. Le site de Sochaux aura bientôt 100 ans. PEUGEOT, cette année, célèbre ses 200 ans. Je pense que ceux qui travaillent ici, y compris ceux qui viennent d'être recrutés, perpétuent la noblesse d'une tradition dont ils peuvent être fiers.
Le pays de Montbéliard a connu les moments fastes, mais aussi ces moments terribles que traverse toute grande aventure industrielle.
L'usine PEUGEOT avait surmonté la crise de 29 grâce au succès de la 201. Au lendemain de la Seconde guerre mondiale, il a fallu la rebâtir en profondeur. Et tout récemment encore, vous vous êtes mobilisés pour la faire repartir au plus vite après l'épisode dramatique de grêle du mois de juin, qui a endommagé verrières et toitures.
Je sais que certains de vos élus souhaiteraient que cet épisode soit reconnu comme catastrophe naturelle. La loi ne permet pas de prendre un arrêté de catastrophe naturelle dans ce cas, parce que la grêle est un risque assurable. Cet arrêté ne changerait d'ailleurs pas de manière significative les conditions d'indemnisation des victimes. Mais je veux vous dire que le gouvernement est conscient du fait que la population de votre région a été choquée par la gravité de cet épisode. Et c'est la raison pour laquelle j'ai décidé de nommer un médiateur, Monsieur BOARETTO, qui a été médiateur à l'occasion de la grande catastrophe qu'ont connue les Landes, qui a été médiateur à l'occasion de la tempête Xynthia et qui va pouvoir répondre à beaucoup des questions que vous vous posez et faire en sorte que le niveau d'indemnisation soit le meilleur.
Je ne suis pas seulement venu pour saluer un passé glorieux, mais je suis aussi venu pour vous dire que l'industrie automobile reste déterminante pour notre présent et notre avenir. Avec plus de 500.000 salariés chez les constructeurs et chez les sous-traitants, l'automobile, c'est l'un des secteurs industriels les plus importants de notre pays, à la fois pour la valeur ajoutée et pour l'emploi. En France, 10 % des emplois sont liés à la vitalité de l'automobile. Il était donc absolument essentiel, absolument décisif d'aider le secteur à passer le cap de la crise exceptionnelle qui a frappé, à la fin de 2008, et qui fut pour l'industrie automobile une des épreuves les plus rudes de son histoire.
Cette crise a d'abord été une crise de la demande. Au dernier trimestre 2008, les ventes étaient en recul de plus de 20 % et l'année 2009 s'annonçait catastrophique. C'était aussi en même temps une crise financière puisque les entreprises ne trouvaient pas les liquidités dont elles avaient besoin.
Toute la filière était menacée. Nous avons décidé d'agir, nous l'avons fait vite. Face à la crise de la demande, nous avons instauré la prime à la casse, dès le mois de décembre 2008. Cette prime à la casse, tout le monde aujourd'hui peut le constater, elle a nettement enrayé la chute des ventes. Elle a d'ailleurs inspiré d'autres grands pays industrialisés qui, après avoir hésité, ont adopté sur notre exemple une mesure similaire. Je pense naturellement à l'Allemagne. Cette prime était destinée à être temporaire; mais en même temps, nous avons voulu que la sortie hors de ce dispositif se fasse de façon très progressive au cours de cette année.
En avril 2009, face à la crise de financement, nous avons proposé des prêts exceptionnels aux constructeurs: 6 milliards d'euros répartis à égalité entre PSA et RENAULT. Au moment où il était devenu extrêmement difficile d'emprunter sur les marchés, ces prêts ont rendu possible la poursuite des programmes d'investissements et - ce qui est absolument fondamental pour l'avenir de nos entreprises - la conception de modèles. Je pense à la DS4 ou à la 3008 Hybrid4 chez PSA. Ces prêts ont permis aux constructeurs de préparer l'avenir. Quand la crise est survenue, nous avons choisi une politique de relance de l'investissement. Certains ont critiqué la pertinence de ce choix. Je pense en réalité que c'était le choix qu'il fallait faire. Quand on soutient des secteurs essentiels pour notre économie, quand on préserve leur avenir, je pense qu'on peut dire que l'argent des contribuables est utilisé à bon escient.
Ces prêts, l'Etat ne les a pas accordés gratuitement et l'Etat ne les a pas accordés non plus sans espoir de retour. Il les a accordés contre une juste rémunération et contre des contreparties et je veux saluer le fait que les constructeurs ont respecté les engagements auxquels ils avaient souscrit en échange de ces prêts.
Aujourd'hui, nous signons une convention de remboursement anticipé. Qui aurait imaginé, il y a un an et demi, au coeur de la crise, que dans un délai aussi court, les constructeurs puissent rembourser les prêts qui leur avaient été faits alors que tous les constructeurs, dans tous les grands pays, faisaient face à des difficultés qui ont conduit certains, vous le savez, à la faillite ?
En 2009, le marché européen a légèrement baissé, de 1,6 %, mais en France, il a progressé de plus de 10 % ! Et cette dynamique s'est prolongée au premier semestre 2010, avec une croissance du marché des véhicules particuliers de plus de 5 % par rapport au premier semestre 2009. Quand la crise s'est déclenchée, on redoutait des fermetures d'usines. Cela ne s'est pas produit. Au premier semestre 2010, la production automobile en France a progressé de 27 % par rapport au premier semestre 2009 et ce chiffre atteint 35 % si on prend les seuls constructeurs français. Je remarque d'ailleurs que leur production en France progresse plus vite que leur production mondiale. C'est le cas chez PSA : +29 % pour la production mondiale, +36 % pour la production en France. Je pense que ça s'explique par le succès de modèles comme la 308, comme la 3008, comme la 5008, produits justement sur le site de Sochaux, avec des cadences qui ont augmenté depuis plusieurs mois. Et du coup, 250 nouvelles embauches en CDI ont été annoncées au mois de juin sur le site de Sochaux, auxquelles s'ajoutent les nouveaux recrutements qui viennent d'être décidés. Je veux saluer cet engagement de PSA.
Ces signes de bonne santé concernent aussi Renault, ce dont je me réjouis. Le redressement des constructeurs français est une réussite collective. Et même si nous savons que le contexte demeure difficile, ce redressement n'est pas un redressement artificiel. C'est un redressement qui provient de la mobilisation de tous, qui provient avant tout du travail de chacun d'entre vous, de votre compétence, de votre capacité d'innovation et qui montre les ressources de notre industrie.
Je veux dire que, pendant trop longtemps, on a présenté la désindustrialisation comme une fatalité pour notre pays et pour la plupart des pays développés. Bien sûr, nous avons des défis terribles qui nous sont lancés par des continents entiers qui n'ont pas la même organisation sociale que nous, qui n'ont pas le même niveau de vie, mais je crois que nous pouvons tenir le choc. Nous pouvons tenir le choc si nous avons une politique industrielle. C'est un enjeu absolument essentiel pour notre puissance nationale. Par rapport aux chiffres de 1980, l'Allemagne construit 2 millions de véhicules de plus par an. Et en France, nous en construisons 400.000 de moins !
C'est la preuve, puisque l'Allemagne y arrive, qu'un pays comme le nôtre peut le faire. Il faut une politique industrielle ambitieuse, cela passe d'abord par le développement de notre compétitivité. C'est la raison pour laquelle, avec Christine LAGARDE, nous avons réformé la taxe professionnelle l'an dernier. Je sais naturellement que cela a suscité beaucoup d'inquiétudes chez les élus locaux à juste titre puisqu'il s'agit d'une ressource importante pour eux.
Nous avons tout fait pour mettre en oeuvre les compensations nécessaires, mais enfin, chacun peut comprendre qu'il n'était pas possible de continuer à faire peser sur l'industrie, sur les investissements, des charges qui n'existent pas chez nos voisins. On ne peut pas continuer à accepter que la production d'un véhicule en France coûte 400 euros de plus qu'en Allemagne alors même que l'Allemagne, est un pays développé avec un système social développé, avec des niveaux de salaires qui sont des niveaux de salaires élevés. L'industrie est le principal bénéficiaire de cette réforme, avec un allègement de 32 % de cette charge fiscale, soit plus de 2 milliards d'euros par an ! Et pour l'automobile, l'effet de la réforme est en proportion encore plus important, avec une réduction de près de 60 %.
Une politique industrielle ambitieuse, c'est aussi une politique de soutien à l'innovation. C'est un thème qui est cher à PSA, puisque PSA est pour la troisième année consécutive le groupe français qui a déposé le plus de brevets. L'innovation passe aussi par le crédit impôt recherche. Pour favoriser l'investissement des entreprises dans la recherche, nous avons réformé, dès 2007, ce dispositif qui est aujourd'hui considéré comme l'un des plus puissants dans tous les pays développés. Je veux redire devant vous que le Gouvernement est tout à fait déterminé à le maintenir dans la même structure dans le cadre du budget 2010 - 2011.
L'année dernière, Christian ESTROSI a conduit les Etats généraux de l'industrie. Les 23 mesures qui en sont issues sont engagées. Je pense notamment aux prêts verts et au dispositif de soutien à la réindustrialisation. Ces Etats généraux ont souligné l'importance de développer une véritable stratégie de filière, en consolidant le partenariat entre les constructeurs et les sous-traitants. Cela vaut en particulier pour l'automobile. J'ai envie de dire, ça vaut beaucoup pour l'automobile. Aujourd'hui, la situation des constructeurs s'est améliorée, mais nous savons bien celle des sous-traitants reste encore dans certains cas très difficile.
Dès le début de la crise nous y avons été attentifs. Les mesures d'urgence ont bénéficié aux sous-traitants: les prêts consentis aux constructeurs ont contribué pour un tiers au financement des commandes aux équipementiers. La réduction des délais de paiement, prévue par la loi de modernisation de l'économie, a permis d'injecter 2 milliards d'euros dans la filière. Et le Fonds stratégique d'Investissement a joué son rôle. En février 2009, au plus fort de la crise, ce Fonds que nous avons créé a annoncé un investissement de 24 millions d'euros dans Valéo, qui compte près de 15 000 salariés en France. A l'époque, l'entreprise avait perdu 80 % de sa valeur par rapport à 2007. Le FSI a eu confiance dans l'avenir du secteur automobile, au moment où les investisseurs privés ne voulaient plus y mettre un seul euro. Et bien, depuis lors, la valeur de la participation du FSI chez Valéo a progressé de 200 %, ce qui montre que l'on peut parfaitement allier politique d'investissement dans nos entreprises stratégiques et en même temps, protection des intérêts de l'Etat.
Mais il n'y a pas que les grands sous-traitants. Pour renforcer les fonds propres des entreprises stratégiques du secteur, nous avons aussi créé le Fonds de Modernisation des Equipementiers automobiles (FMEA), en partenariat avec les constructeurs. Un fonds d'investissement spécifique, dédié aux sous-traitants de second rang a également été mis en place. Enfin, les dispositifs de garanties de prêts mis en place par OSEO, dans le cadre du plan de relance, ont permis de faciliter l'accès au crédit des équipementiers et des sous-traitants. Depuis le début de 2009, plus de 2 000 entreprises de la filière automobile ont bénéficié de ces mesures, pour plus de 825 millions d'euros de prêts garantis.
Mais ça, c'était des mesures d'urgence et il faut maintenant que nous soyons en capacité de construire une véritable stratégie de filière. La mise en place d'une relation partenariale avec l'ensemble des sous-traitants était l'un des engagements que les constructeurs avaient pris en échange des prêts accordés par l'État. La pression sur les prix est nécessaire, mais elle ne peut tenir lieu de seule stratégie d'achat. Il faut aussi préserver la solidité et la capacité d'innovation de chaque maillon, parce que au bout du compte, c'est l'ensemble de la chaîne qui en bénéficie ! En juin 2009, nous avons créé la Plateforme de la filière automobile pour renforcer la relation entre les donneurs d'ordre et les sous-traitants et la rendre plus partenariale. Nous avons nommé un médiateur de la sous-traitance, Monsieur Jean-Claude VOLOT. Nous avons créé des comités pour les filières stratégiques, pour 11 filières stratégiques, dont naturellement l'automobile, pour consolider la relation entre tous les acteurs. C'est absolument essentiel parce que la capacité d'innovation qui fait la force de notre industrie, et en particulier de notre industrie automobile, repose certes sur les constructeurs, mais elle repose aussi de façon importante sur les sous-traitants. Et cette capacité à innover est essentielle pour l'avenir de la filière, au moment où cette filière doit négocier un tournant absolument décisif. Ce tournant décisif, c'est un tournant technologique. Dans les années 50, l'innovation, c'était de créer des modèles économiques, des modèles qui soient accessibles au plus grand nombre; dans les années 60, l'innovation, c'était essentiellement d'améliorer les performances; dans les années 70, c'était la fiabilité; et dans les années 80, la sécurité. Le défi, à présent, même si tous les autres restent d'actualité, c'est la diminution à grande échelle des émissions de CO2.
C'est évidemment un défi environnemental. C'est un défi stratégique, parce que nous avons le devoir anticiper l'augmentation des tensions sur les ressources pétrolières, qui risquent de créer, un jour ou l'autre, des situations de pénurie, et qui risquent aussi de se répercuter sur la facture des consommateurs. Et puis, enfin, c'est un défi économique, parce que c'est l'occasion pour l'industrie automobile française de conquérir des nouvelles parts de marché avec la production de véhicules propres. Si nous sommes les premiers à sortir les meilleurs véhicules propres, nous prendrons des parts de marché sur les autres constructeurs. Et enfin, c'est un défi technologique, dans lequel nous devons mettre en avant notre tradition de savoir-faire, notre tradition d'innovation, qui nous donne des avantages compétitifs pour réussir cette transition historique.
Le véhicule du futur, c'est pour une part le véhicule électrique ; c'est aussi le véhicule thermique à faible émission de CO2 ; c'est le véhicule hybride (comme la 3008 Hybrid4 que vous m'avez donné l'occasion d'essayer tout à l'heure et qui est le premier hybride diesel au monde), et c'est le véhicule hybride rechargeable. Il faut, en effet, travailler en même temps dans toutes les directions. L'objectif que nous avons avec nos partenaires, c'est que ces véhicules propres représentent 20 % du marché européen du neuf en 2020. Il faut soutenir l'émergence de ce marché, et c'est ce que nous avons commencé à faire dès 2007, avec l'instauration du bonus malus qui est l'une des premières mesures issues du Grenelle de l'environnement et qui a eu un effet extrêmement puissant sur les choix des consommateurs. Au total, plus de 1,2 million de véhicules immatriculés en 2009 ont bénéficié d'un bonus. C'est 55 % des immatriculations. Et on voit déjà les effets de cette politique et du travail que vous avez conduit dans vos entreprises puisqu'en en France, en trois ans, le niveau moyen d'émission de CO2 des véhicules a diminué de plus 15 grammes au kilomètre. Et je veux rappeler que, dans ce registre, les constructeurs français sont parmi les plus performants.
Il faut soutenir aussi l'effort d'innovation. C'est ce que nous sommes en train de faire avec le programme d'investissements d'avenir. 750 millions d'euros sont destinés à des projets de R&D qui concernent le développement des véhicules propres : je pense aux batteries de nouvelle génération, aux chaînes de traction électriques, à l'optimisation des moteurs thermiques qui vont pouvoir bénéficier de ce grand emprunt.
Le véhicule électrique requiert des mesures spécifiques car le marché est encore à l'état naissant. Et nous avons besoin d'action publique pour accélérer son émergence. En effet, les consommateurs attendent d'être rassurés sur un certain nombre de questions : les infrastructures de recharge, la définition des normes. C'est la raison pour laquelle depuis maintenant près de 18 mois, je réclame inlassablement, et je pense que nous allons finir par être entendus, à l'Union européenne d'engager une grande politique de mise en oeuvre de ces infrastructures, de ces normes pour faire en sorte que l'Union européenne soit le premier continent à développer de manière large, de manière massive ce marché. J'ai demandé dans cet esprit au sénateur Louis NEGRE, de préparer un livre vert sur le sujet afin qu'avec Jean-Louis BORLOO et Christian ESTROSI la France soit au rendez-vous de cette nouvelle donne technologique et pour que nos entreprises soient en mesure d'y jouer un rôle pionnier.
Au fond, nous sommes avec cette révolution technologique, avec la conception de ces nouveaux véhicules devant une nouvelle révolution industrielle. Une nouvelle révolution qui a pour enjeu la préservation du monde, alors que la première révolution industrielle - celle que symbolisent la machine à vapeur et le moteur à explosion - était liée à la conquête du monde. Cette révolution est en train de créer de nouvelles sources de croissance et de nouvelles sources d'emploi. Elle demande un haut niveau de technologie pour lequel les industries françaises sont particulièrement compétitives. Les industriels, les ingénieurs, les ouvriers français ont marqué l'histoire de l'automobile, en produisant, à toutes les époques, des modèles innovants et, parfois, des modèles révolutionnaires. Et bien, cette histoire, il faut que vous continuiez de l'écrire. Et comme je le disais tout à l'heure à votre président, faites des voitures efficaces, faites des voitures confortables, faites des voitures qui émettent peu de CO2, faites des voitures sûres, mais faites aussi des voitures belles. L'achat automobile n'est pas complètement objectif et ceux qui pensent que l'on peut totalement rationaliser les comportements des consommateurs, se trompent. Nous avons besoin aussi de rêver et la gamme des constructeurs français doit être une gamme complète à l'image de celle de nos voisins, pour faire en sorte que dans le monde entier, l'industrie automobile française ait une image de qualité, une image de confort, une image d'efficacité et une image en matière de protection de l'environnement.
Voilà, Mesdames et Messieurs, j'ai été avec Madame Lagarde et Monsieur Estrosi heureux et fier de vous rencontrer. Je sais qu'ici, les ouvriers et les ingénieurs contribuent aux succès de la France. Chacun ici est utile ; chacun doit être respecté. Je ne sous-estime pas les difficultés que vous traversez ; je ne sous-estime pas les défis que vous devez relever en permanence. La France, comme tous les grands pays développés, est plongée dans une immense bataille économique, et ce serait irresponsable de promettre des lendemains faciles.
En défendant devant vous notre industrie, en militant pour la compétitivité de notre pays, en invitant nos concitoyens à se mobiliser pour faire face à la compétition internationale, je défends au bout du compte notre modèle social.
Il faut dire la vérité parce que la vérité est au coeur de la justice sociale. Et la vérité, c'est que pour continuer à avoir l'une des meilleures santés du monde, pour continuer à avoir l'école et l'université gratuites, pour pouvoir continuer d'assurer des retraites pour tous, nous devons être plus compétitifs et nous devons faire preuve de courage et réformer.
Nous avons, avec le président de la République, engagé la réforme des retraites. On peut être contre cette réforme, on peut la juger incomplète, mais on ne peut pas nous accuser de faire notre devoir. Nous aurions pu laisser à nos successeurs le soin de gérer le problème ; nous pourrions laisser aux générations futures le soin de régler nos factures, mais cela n'est pas notre conception du service de la République.
Aujourd'hui déjà, 10 % des retraites des Français ne sont pas financées. En 2020, il manquera 45 milliards d'euros pour payer les retraites. Ne pas agir serait irresponsable.
Je mesure parfaitement les inégalités, les imperfections de notre système de retraite, qui est pourtant si on le compare à beaucoup d'autres dans le monde l'un des plus justes. Et je suis naturellement conscient des efforts qui sont demandés aux Français, mais quelle serait la crédibilité d'un gouvernement qui prétendrait qu'il ne faut pas toucher à l'âge de la retraite alors que nous avons gagné 15 ans d'espérance de vie ? Chacun d'entre-vous a sans doute son opinion personnelle sur cette réforme, et c'est donc à vous, en conscience, d'analyser ce qui est utile et crédible pour sécuriser nos retraites. J'ai confiance dans le bon sens de nos concitoyens et je pense que le goût de la vérité est finalement dans le coeur de chacun.
Ce que j'ai vu aujourd'hui, Mesdames et Messieurs, me conforte dans l'idée que la France a des atouts, que la France a des atouts pour aller chercher la croissance. Avoir des états d'âme maintenant alors que le pire de la crise est derrière nous n'a pas de sens. Nous avons résisté à la récession, avec des résultats qui, comparés à ceux de nos partenaires, ont été souvent à notre avantage. Nous devrions avoir une croissance d'au moins 1,5 % sur l'année 2010 et pour 2011, nous faisons une prévision de croissance de 2 %. Le chômage a diminué au cours des deux premiers trimestres de cette année, après presque deux ans de hausse consécutive.
Rien évidemment n'est définitivement acquis, et il serait dangereux de relâcher nos efforts. Mais je suis convaincu que nous sommes sur le chemin de la reprise économique. Et sur ce chemin, je veux vous dire pour conclure, que je crois aux valeurs de l'unité, aux valeurs du travail, aux valeurs de la solidarité, ces valeurs que ici dans cette entreprise, à Sochaux, vous incarnez si fidèlement et qui sont l'honneur de notre pays.Source http://www.gouvernement.fr, le 21 septembre 2010|N|N|N|N|Texte intégral 62285|La réforme des retraites, dont l'examen a débuté hier à l'Assemblée nationale, est l'une des plus importantes pour la France. A l'heure où une pension sur dix est financée par de la dette, nous devons assurer aux Français que leurs retraites et celles de leurs enfants seront payées.
C'est une réforme essentielle. Il est donc normal qu'elle suscite des inquiétudes et des mobilisations importantes, comme cela a été le cas hier. Les organisations syndicales sont dans leur rôle lorsqu'elles appellent à des manifestations ou à des grèves. Je suis attentif aux préoccupations qui sont ainsi exprimées. Tout comme je suis attentif à la gêne que cela représente pour les usagers des services publics. C'est la raison pour laquelle nous avons mis en place un service minimum dans les transports, dont le bon fonctionnement ne s'est pas démenti depuis 2007.
En demandant au gouvernement de mener à bien la réforme des retraites, j'assume mes responsabilités. Le devoir du Chef de l'Etat n'est pas d'ignorer les difficultés ou de laisser à ses successeurs le soin de les régler. C'est au contraire de regarder la situation en face et d'y apporter des réponses durables et justes. C'est également pour cela que j'avais indiqué avant l'été que j'étais prêt à compléter le projet du gouvernement sur plusieurs points, notamment la prise en compte de la pénibilité, dans le respect de l'équilibre général de la réforme.
Le premier axe de cette réforme, c'est un nouvel âge de départ à la retraite. Cet âge sera progressivement augmenté, de 4 mois par an, pour atteindre 62 ans en 2018 tandis que l'âge d'annulation de la décote sera relevé au même rythme d'ici 2023. Il n'est pas question de revenir sur ce point. Je rappelle que pour financer les retraites, il y a trois voies possibles : la première est de baisser les pensions des retraités. Je m'y refuse. La deuxième est d'augmenter massivement les prélèvements obligatoires. Je m'y refuse également car ce serait pénaliser le pouvoir d'achat, détruire la croissance, l'emploi et encourager les délocalisations. Enfin, la troisième est de travailler un peu plus longtemps. C'est la voie la plus raisonnable, celle que tous les autres pays ont choisie et celle que le gouvernement a retenue car nous vivons plus longtemps : depuis 1950, nous avons gagné 15 ans d'espérance de vie.
Le deuxième axe de la réforme, c'est de ne pas demander le même effort à chacun car pour être juste il faut tenir compte du fait que certains ont des vies professionnelles plus dures que les autres. Ainsi, le dispositif carrières longues créé en 2003 sera maintenu et élargi : tous ceux qui sont rentrés très jeunes sur le marché du travail, c'est-à-dire avant 18 ans, et qui ont toutes les années de cotisations requises, pourront continuer à partir à 60 ans, voire avant. Je demande au gouvernement d'améliorer le dispositif afin d'éviter tout effet de seuil et de renforcer par conséquent l'équité entre les générations. Cela représente un effort supplémentaire de 350 Meuros pour nos régimes de retraite.
Ne pas demander à chacun le même effort, c'est aussi tenir compte de la pénibilité, ce qu'aucun autre pays européen n'a fait jusqu'à présent. Le projet de loi a prévu que pour tout assuré présentant un taux d'incapacité supérieur ou égal à 20%, l'âge de la retraite sera maintenu à 60 ans. Nous pouvons aller plus loin. Comme me l'a proposé Eric WOERTH, après les échanges qui sont intervenus avec les partenaires sociaux, et en accord avec le Premier ministre :
* Je souhaite que ce dispositif soit étendu aux agriculteurs ;
* je souhaite que toute personne présentant un taux d'incapacité de 10% puisse faire valoir ses droits devant une commission pluridisciplinaire. Sur la base des éléments que lui présentera le salarié, cette commission pourra décider de lui accorder le bénéfice d'un départ à la retraite à 60 ans ;
* je souhaite que des branches professionnelles ou des entreprises s'engagent dans des négociations pour proposer à leurs salariés exposés à des facteurs de pénibilité un aménagement de la fin de leur carrière, qu'il s'agisse de temps partiel ou d'actions de tutorat. Ces branches ou ces entreprises pourront compter sur le soutien financier et l'ingénierie d'un fonds public expérimental. Un bilan de ces actions sera dressé en 2014 ;
* enfin, un comité scientifique sera créé pour progresser rapidement dans notre connaissance des effets de certains facteurs de pénibilité à impacts dits différés de manière à ce que nous puissions en tirer toutes les conséquences.
Mais nous ne pouvons nous contenter de compenser la pénibilité. Le plus important est de la prévenir. C'est pourquoi le projet de loi engagera la réforme de la médecine du travail et demandera aux entreprises de négocier des accords ou de prévoir des plans d'action en matière de prévention. A défaut, une pénalité leur sera appliquée.
Le troisième axe de la réforme consiste à renforcer la solidarité de notre système de retraites par l'effort supplémentaire que nous demandons aux hauts revenus, aux revenus du capital et aux entreprises, ce qui représentera dès l'année prochaine près de 4 Mdseuros de recettes supplémentaires.
Enfin, nous nous sommes engagés à faire converger les règles entre public et privé car c'est une question d'équité. Non seulement le relèvement de l'âge de départ à la retraite concernera tout les assurés mais nous rapprochons également les règles qui s'appliquent aux agents publics de celles des autres travailleurs. Cela nous a notamment conduit à fermer le dispositif qui permettait aux agents ayant 3 enfants et 15 ans de service de liquider leur pension avant l'âge de droit commun. Mais personne ne doit voir ses projets de vie bouleversés. C'est pourquoi nous proposerons que pour tous les agents qui sont à 5 ans de l'âge de la retraite et qui entendaient demander le bénéfice de cette mesure, les conditions de celle-ci demeurent inchangées.
L'équité commande aussi de traiter la question des polypensionnés. Je souhaite qu'on arrête en particulier de pénaliser ceux qui accomplissent leur carrière pour partie dans le public et pour partie dans le privé.
Sur ces bases, je demande avec le Premier ministre à Eric WOERTH de présenter dans les meilleurs délais au Parlement les amendements du gouvernement.
Je rappelle qu'il n'est pas question de laisser quiconque dénaturer la réforme car ce serait mettre en péril le retour à l'équilibre de nos retraites. Notre premier objectif est de sauver notre régime par répartition et de garantir ainsi à nos concitoyens que le pacte social conclu après-guerre est toujours bien vivant. |N|N|N|N|Texte intégral 62286|Mesdames et Messieurs,
C'est un très grand plaisir pour moi de vous accueillir aujourd'hui à Matignon pour donner un nouvel élan à un projet qui représente un partenariat public-privé qui est absolument sans égal dans notre pays.
Vous l'avez dit, monsieur le Président, depuis 23 ans, la Convention pour la création et l'exploitation d'Euro Disneyland offre un exemple de ce que peut donner l'alliance de compétences des pouvoirs publics et de l'investissement privé.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes : les 650 millions d'euros d'investissements publics investis ont attiré près de 7 milliards d'euros d'investissements privés. 56.000 emplois sont nés, plus de 215 millions de touristes sont venus se divertir dans les parcs de Disneyland Paris.
Et pourtant, pour ceux qui s'en souviennent, en 1987, le pari n'était pas gagné d'avance.
Il a fallu beaucoup d'audace, de la confiance et une part d'anticipation visionnaire de la part des pouvoirs publics pour s'ouvrir à l'installation d'un grand parc, d'origine américaine et d'envergure européenne, à l'orée de notre capitale.
Et bien vingt ans après, le succès d'Eurodisney est devenu l'un des emblèmes d'une France ouverte aux investissements étrangers et capable de développer une industrie touristique de grande ampleur.
Si le pari de 1987 a été un pari gagnant, c'est d'abord parce que chacun s'est fait confiance, c'est parce que nous avons tous misé sur la complémentarité de nos compétences.
L'Etat et les collectivités locales ont oeuvré ensemble, et au premier rang d'entre-elles, je veux citer le Conseil régional d'Ile-de-France et le département de Seine-et-Marne qui ont été des partenaires absolument décisifs de ce projet.
Il a fallu aussi la mobilisation de la RATP et l'Etablissement Public d'Aménagement pour que l'ensemble des acteurs publics soit prêt à accueillir l'expérience et le dynamisme d'Euro Disney.
Aujourd'hui encore, le projet que nous pérennisons prend en compte l'ensemble des intérêts de ceux qui vivent et de ceux qui travaillent sur ce territoire.
Et si cette nouvelle étape est possible, c'est encore, et je veux le dire devant vous, grâce à la mobilisation remarquable aux côtés de l'Etat de Jean-Paul Huchon et de Vincent Eble.
Nous sommes connus pour notre scepticisme, et pourtant le monde nous regarde d'un autre oeil, puisque depuis 2007, la France est le deuxième pays d'accueil européen pour les investissements étrangers créateurs d'emploi.
En 2009, nous étions le premier pays d'Europe par le nombre d'investissements étrangers créateurs d'emploi dans l'industrie et dans les éco-technologies, et nous étions en tête pour les emplois créés par les investissements étrangers dans les activités de recherche et développement, et de logistique.
Si les investisseurs étrangers choisissent la France, s'ils sont trois fois plus nombreux à venir implanter leurs quartiers généraux dans notre pays qu'auparavant, c'est parce que notre pays est perçu comme solide, parce qu'il est perçu comme moderne et solidaire. C'est aussi parce que nous avons des infrastructures de qualité et parce que nos concitoyens sont considérés comme productifs et bien formés.
C'est enfin, parce que ces investisseurs jugent favorablement les mesures que nous avons prises.
Je pense au crédit d'impôt recherche, à la suppression de la taxe professionnelle, mais aussi au programme d'investissements d'avenir.
Et à l'heure où la bataille pour l'emploi dans notre pays, comme tous les grands pays développés est si cruciale, le nouvel élan que nous donnons à la convention est un atout formidable. A l'horizon 2030, ce sont entre 70 et 100.000 emplois qui verront le jour, induits directement et indirectement, par l'activité touristique et par l'extension urbaine.
Pour la première fois depuis le début 2008, notre économie a recommencé à créer de l'emploi en 2010.
Le taux de chômage a diminué de 0,2 point au deuxième trimestre, et le nombre d'inscriptions à Pôle Emploi a reculé en juin et en juillet.
Ce sont des tendances encourageantes.
Elles tiennent à la bonne tenue de l'activité mais aussi aux effets de la politique de l'emploi.
Nous avons agi avec les partenaires sociaux pour amortir les effets de la crise qui nous a frappés, comme les autres pays développés. L'activité partielle pour prévenir les licenciements, le soutien massif à l'apprentissage et à l'alternance, l'aide à l'embauche des personnes les plus en difficulté avec les contrats aidés, le développement de la formation professionnelle, tous ces dispositifs nous ont permis de tenir le choc de la récession.
L'évolution de l'emploi des jeunes est particulièrement significative : le chômage des jeunes a sensiblement diminué dans notre pays, - 5,2 %, depuis son pic de mai 2009, et vous savez qu'à partir du 1er septembre, les jeunes actifs déjà engagés dans la vie professionnelle pourront bénéficier avec le RSA d'un complément de revenus afin de pouvoir s'insérer durablement dans l'activité.
Ce sont des chiffres encourageants, et c'est dans ce contexte, monsieur le Président, que nous accueillons avec enthousiasme cette nouvelle étape dans le partenariat avec Eurodisney.
DisneyLand Paris, c'est le premier site touristique en Europe.
En France, le tourisme emploie un peu plus de deux millions de personnes. Il contribue à près de 7 % de notre PIB, et il génère d'importantes rentrées de devises.
Et aujourd'hui, Hervé Novelli, comme tous les acteurs qui sont ici le savent bien, nous sommes confrontés à des nouveaux défis. Le marché mondial du tourisme est en pleine expansion, on s'attend à ce que les flux touristiques mondiaux doublent d'ici 2020. Cela nécessite évidemment une adaptation permanente de notre offre touristique. Et nous voulons que Paris et que l'Ile-de-France demeurent une destination phare dans le monde.
L'avenant que nous signons aujourd'hui renforce l'offre autour des parcs actuels. Il double leur capacité d'accueil, il offre la possibilité de créer un troisième parc après 2020, et il triple la capacité hôtelière.
Ces projets hôteliers vont bénéficier du nouveau système de classement des hébergements touristiques marchands instauré par la loi de 2009, qui rend notre offre hôtelière plus réactive. Ce nouveau classement rend en particulier cette offre plus lisible.
Il a permis la création de la 5e étoile, qui a été attribuée à ce jour à plus de 100 établissements. Cette nouvelle catégorie permet aux établissements français de bénéficier d'un niveau de reconnaissance analogue à celui dont bénéficiaient déjà leurs concurrents.
C'est un atout pour l'accueil des congrès, pour celui des réunions d'affaires, sur lesquels nous sommes en compétition avec d'autres destinations prestigieuses dans le monde.
J'observe que depuis la réforme, la fréquentation de l'hôtellerie haut de gamme connaît déjà une hausse significative.
Dans la même logique, Hervé Novelli a engagé ces dernières semaines une réflexion sur la création d'un label «Palace», réservé à un nombre très réduit d'établissements d'exception.
Je souhaite que ce label soit effectivement créé, parce qu'il permettra de mettre en valeur à l'international l'excellence française dans ce domaine, qui s'appuie notamment sur le savoir-faire de nos artisans.
Pour le Val d'Europe, nous introduisons une nouveauté, avec la mise en oeuvre des « Villages Nature ». C'est un projet de tourisme durable, qui est porté par un champion américain et un champion français, Disney et Pierre et Vacances, qui est le leader européen des résidences de tourisme.
A terme, ce projet permettra de créer 9.000 emplois. Sa première phase, qui est prévue pour 2015, représente à elle seule un investissement de 650 millions d'euros.
C'est un projet qui est destiné à devenir une véritable référence internationale en termes d'insertion environnementale.
Le nouvel avenant s'est donné pour ambition de développer l'ensemble du secteur du Val d'Europe, à l'Est de Paris.
Ces territoires accueillent 28.000 habitants ; en 2030, ils pourront en accueillir plus du double grâce à un ambitieux programme de construction de logements.
Accroître de façon significative la construction de logements en Ile-de-France, c'est l'un des objectifs du Grand Paris et de la Région.
Les projets de Val d'Europe y participeront très largement.
Je sais que Benoist Apparu et le Préfet Canepa y travaillent en lien avec les collectivités, et notamment la région Ile-de-France.
Tout l'enjeu, c'est que les nouveaux quartiers qui naîtront de l'élan donné par les projets touristiques privilégient un cadre de vie de qualité.
Nous voulons ensemble que ces quartiers soient de vraies villes : d'une part, les habitants bénéficieront de la proximité d'un bassin d'emplois en pleine croissance, et d'autre part, l'implantation de services et de commerces est prévue, ainsi que des infrastructures de transport améliorées, et notamment de transport en commun.
Les habitants de nos communes apprécient leur cadre de vie, et je dis aux maires qui sont présents ici que ces projets urbains doivent contribuer à l'améliorer encore.
Les échecs du passé doivent nous instruire.
Le dynamisme qui a présidé à la mise en place des villes nouvelles comme celle de Marne La Vallée peut désormais s'appuyer sur des méthodes de mise en oeuvre que le Grenelle de l'environnement a fait profondément évoluer.
Il n'y a pas de projet d'aménagement durable sans lien avec les territoires concernés, c'est la raison pour laquelle la croissance envisagée doit bénéficier aux espaces qui les accueillent.
Une concertation a été conduite avec les communes du syndicat d'agglomération nouvelle et vient de se traduire par un protocole avec l'Etat et l'établissement public d'aménagement.
Une nouvelle phase du projet concerne également les communes du Sud de l'autoroute A4 qui vont accueillir les Villages Nature de Val d'Europe.
Là encore, les attentes des communes seront prises en compte, parce que c'est une aventure commune qui est engagée et sa réussite dépend de nous tous.
Voilà, Mesdames et Messieurs,
La France a besoin de croissance, cette croissance ne se décrète pas, elle se gagne !
Elle se gagne par des réformes. Elle se gagne par une rationalisation de la dépense publique qui doit être plus efficace.
Elle se gagne aussi par la mise en oeuvre d'investissements d'avenir, comme celui qui nous réunit cet après-midi.
Voila la raison pour laquelle, outre le grand plaisir d'accueillir une grande entreprise mondiale et son responsable, j'ai estimé nécessaire de vous réunir ici pour que nous puissions solennellement marquer ensemble cet évènement.Source http://www.gouvernement.fr, le 21 septembre 2010|N|N|N|N|Texte intégral 62287|Q - Le Commissaire européen au budget s'est récemment déclaré favorable à un réexamen du rabais britannique. Son idée serait de revenir sur la réduction de la contribution de la Grande-Bretagne au budget communautaire octroyée en 1984. La France est-elle sur cette ligne ?
R - Oui, la France est totalement sur cette ligne. Ceci est d'ailleurs conforme aux conclusions du Conseil européen de 2005, qui demandaient à la Commission le réexamen du volet recettes du budget, y compris le chèque britannique. C'est ce que j'ai dit au Commissaire européen, Janusz Lewandowski, puis à mon homologue britannique, David Lidington, quand je les ai reçus il y a quelques jours au Quai d'Orsay.
Q - Mais un réexamen signifie t-il la suppression de ce fameux chèque ?
R - C'est le sens logique de l'histoire. Le rabais britannique, mis en place en 1984, se justifiait à l'époque par le fait que la prospérité britannique était bien moindre que dans le reste de l'Europe. Ce n'est plus le cas maintenant ! D'ailleurs, pour tenir compte à la fois de cette évolution, et de l'entrée des nouveaux Etats membres, qui réclamaient à l'Europe leur part de solidarité financière, le rabais a déjà été revu à la baisse par décision du Conseil européen en 2005. Pour nous, c'est une évolution normale vers plus de justice et de lisibilité entre les Etats membres dans le financement du budget européen.
Q - Combien coûte le rabais britannique ? Sa suppression aurait-elle des conséquences pour la France ?
R - Je rappelle que la France est le premier contributeur au chèque britannique. En 2009, il représentait 5,4 milliards d'euros environ, dont 1,4 milliards à la charge de la France, soit 25 % de la facture acquittée par nos soins ! La France qui a pris, face à la crise, des engagements sans précédent en matière de maîtrise des finances publiques, est aujourd'hui le deuxième contributeur net au budget européen avec un solde négatif de près de 5 milliards d'euros par an. Cette situation ne doit pas perdurer au-delà de 2013.
source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 21 septembre 2010|N|N|N|N|Texte intégral 62288|Madame le Garde des Sceaux, Chère Michèle,
Monsieur le Secrétaire d'Etat,
Monsieur le Vice-Président,
Mesdames et Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs,
A l'heure où notre pays s'égare sous les flots d'une actualité brouillonne, à l'heure où beaucoup de nos concitoyens sont tentés de croire que leur sort ne s'attache plus à un destin commun, il est utile de rappeler que notre unité vient de loin et il est nécessaire de les rassurer sur la permanence de l'ordre républicain dont votre juridiction constitue l'un de socles.
Il ne m'est pas indifférent de venir, selon la tradition, devant vous, dans ce palais du Cardinal de Richelieu, qui fut l'un des fondateurs de l'Etat moderne.
Le grand corps que vous formez n'oeuvre qu'au service de l'État; et en venant présider aujourd'hui son assemblée générale, je veux saluer ses travaux, rendre hommage à ses membres et rappeler avec force les idéaux qui les guident.
Je dis «idéaux», car rien ne se fait ici, qui ne traduise une vision élevée des intérêts de la République.
A ceux qui parlent bureaucratie, lourdeurs administratives, pesanteur du système; à ceux qui pensent jeux de pouvoirs et bruits de couloirs; à ceux qui, par une sorte de délectation morose, arrêtent leur vision de l'État à celle de ses petitesses, je réponds au contraire que l'idée de l'État ne cesse pas de transcender ces obstacles et que l'intérêt général demeure son horizon permanent.
Vous devinez, et sans doute vous partagez les inquiétudes qui justifient ce préambule. Elles sont d'ordre historique.
Les années récentes ont lancé à l'idée même d'État un défi nouveau, par son ampleur, et par sa complexité. L'affaiblissement des valeurs républicaines et la perte des repères nationaux y ont instillé le doute. Les coups de boutoir de la mondialisation l'ont ébranlée. Les forces de l'économie de marché ont mis sa légitimité en cause; et peut-on nier que la volonté politique, elle aussi, lui ait parfois fait défaut ?
Dans ces épreuves, il était tentant, il était facile de faire le procès de l'État.
J'ai entendu comme vous, et avec amertume, les accusations portées contre l'inefficacité de nos institutions.
J'ai déploré comme vous, les évolutions trop lentes d'une loi trop souvent profuse et indécise.
J'ai regretté comme vous, ces réquisitoires sévères à l'endroit de nos administrations dont les manquements n'étaient pas imputables à leurs principes et leurs agents, mais à leur organisation.
Depuis trois ans, malgré la crise, nous avons oeuvré ensemble à une mise à jour de l'action publique.
Depuis trois ans, j'ai plaidé le courage, la réforme, la modernisation.
La difficulté, je le crois, justifie nos combats plus qu'elle ne les infirme. Jamais le besoin d'un État crédible, efficace et respecté n'a été aussi fort.
Rien ne répond mieux à la critique de l'État que l'image de pays qui se meurent d'un manque d'État.
A cette heure, le véritable défi de l'Irak, ou de l'Afghanistan, n'est pas d'inventer un nouveau modèle de laisser-faire, mais bien de rétablir l'autorité de la puissance publique, et les garanties essentielles dont elle est porteuse, en termes de sécurité, de cohésion, de développement.
Sur le continent africain, il est des nations qui jouissent de ressources exceptionnelles et d'une société civile active, mais qui paient le prix d'une faiblesse des pouvoirs centraux.
Ailleurs, il est des nations qui encourent les hasards d'un État en trompe-l'oeil, dont les actes arbitraires révèlent une démocratie d'apparences.
Prôner la liberté sans en assurer les conditions politiques réelles; prôner l'autonomie d'un peuple sans fonder l'autorité représentative qui l'incarne; prôner la démocratie sans lui donner aucune structure en termes d'administration, de réglementation ou de service public, c'est prendre un risque pour toute nation.
Sur notre propre sol, l'instabilité inquiétante de certains quartiers délaissés, l'augmentation alarmante de certaines violences, sont-elles autre chose que le symptôme d'une inadaptation de l'action publique ?
Et faut-il encore plaider pour que dans nos frontières, comme au dehors, la défense de l'État reste un mot d'ordre constant ?
Je n'ai, pour ma part, aucune hésitation à dire que l'action du gouvernement va dans le bon sens, quand elle exalte les symboles de la République, quand elle protège ses représentants, et quand elle sanctionne avec une sévérité particulière les coups qui leur sont portés.
Aujourd'hui, le mépris de l'État est dangereux.
Entendons-nous sur ce mépris. Je ne crois pas que l'État coure, en France, le danger de disparaître. Mais je crois que le dédain dont il est trop souvent l'objet révèle une incompréhension majeure.
Juges administratifs, vous savez mieux que personne:que l'État n'est pas coupé des Français. Il est leur interlocuteur quotidien. L'État n'est pas indépendant des Français. Il est l'interprète de leurs projets et l'émanation de leur volonté concertée.
Le lien qui unit l'État aux particuliers n'est pas un lien théorique. C'est un lien direct et vivant !
Certains veulent croire que l'État n'agit que pour lui-même, en pesant sur l'individu. Mais croit-on vraiment qu'au sein de la crise économique, quand il s'est agi de garantir le crédit des banques, d'assurer la sécurité des dépôts et d'éviter l'effondrement des monnaies, l'État ait eu d'autre horizon que l'intérêt de chacun des Français ?
La crise financière l'a montré, au sein du désordre mondial, la compétence des États reste le pivot de la sécurité individuelle.
Nos concitoyens ne s'y trompent pas, qui attendent toujours plus de l'État, même quand ils en critiquent les décisions.
Jusque dans la rue, les Français se prononcent en faveur d'un État qui rassemble, qui protège et qui inspire.
L'État qui rassemble, c'est celui qui, dans l'histoire singulière de la France, n'a cessé de fédérer populations, , langues et cultures locales.
Celui qui a cimenté la nation, autour des valeurs de sa devise. Celui dont le Général de GAULLE disait ici même, le 28 janvier 1960, en présence du Président CASSIN : «Il n'y a eu de France que grâce à l'Etat. La France ne peut se maintenir que par lui».
Eh bien cet État qui rassemble n'est pas achevé !
Il doit aujourd'hui affronter de nouvelles lignes de clivage identitaires, communautaires ou confessionnelles.
Il doit prendre en compte de nouveaux réseaux de solidarité, de nouveaux cercles d'appartenance.
Il doit apprendre, avec tout le respect nécessaire, à apprécier leur légitimité spirituelle ou sociale. Mais il doit aussi soumettre, et sans indulgence, leurs forces de division aux valeurs communes du pays.
Nous savons que l'ouverture sur le monde estompe progressivement les marqueurs de l'identité nationale. Notre langue, notre culture, nos élites s'internationalisent; nos grandes entreprises se fondent dans un marché sans attaches.
Il y a dans ces évolutions beaucoup d'aspects positifs; et leur premier avantage est évidemment de diffuser au-delà de nos frontières ce que j'appellerai - l'expression vaut ce qu'elle vaut... - le génie français. L'écho international de votre réflexion juridique en est un exemple.
Mais risquerons-nous délibérément que cette ouverture encourage le relativisme, et qu'à force de diluer ses principes, l'État invite les Français à chercher dans d'autres sphères, sous d'autres étendards, la protection de leur identité ?
Il est aujourd'hui trop clair - et votre contentieux en témoigne - que la revendication des particularismes teste la solidité du modèle républicain.
Seul l'Etat, par les principes de laïcité, d'égalité, d'impartialité et de progrès partagé qu'il incarne, a la capacité de lui répondre.
Je vous demande de rester les garants de la vigilance avec laquelle cette réponse se formule. Je compte sur vous pour que la justice et le droit restent les références uniques de son application.
Rassembler les Français sous l'abri de la loi commune, c'est au fond les protéger de l'émergence de nouveaux privilèges.
De même, c'est au nom de tous que l'État qui protège assure la défense du territoire national, la protection des personnes et des biens, la sécurité des situations juridiques, les libertés publiques et les droits inaliénables de la personne humaine, ou la protection de ceux que menacent un état de faiblesse physique ou économique.
L'Etat qui protège n'est plus dans son rôle si, par faiblesse ou par choix doctrinal, il n'affronte plus qu'une partie des facteurs d'insécurité.
Sa protection doit procéder d'une vision globale et continue. Une cohérence profonde unit d'ailleurs les politiques publiques qui y concourent, de la création d'un défenseur des droits, désormais prévue par notre Constitution, au renforcement des services chargés de réprimer le crime organisé.
L'honneur de notre République est de concilier les dispositifs qu'elle inaugure avec les principes généraux de son droit.
L'aide du Conseil d'Etat, dans la phase d'élaboration des textes, a contribué à cette réussite, comme y contribuent l'oeuvre des juridictions administratives et judiciaires et le contrôle vigilant du Conseil constitutionnel.
Dans chacun des domaines que j'ai évoqués, les réponses doivent être concrètes, effectives et s'adapter en permanence à l'évolution des risques.
Depuis trois ans, cette conviction a conduit le Gouvernement et le Parlement à porter une attention particulière aux questions de sécurité et à déployer plus efficacement les moyens juridiques et matériels dont dispose l'Etat pour accomplir ses missions: modernisation de notre outil de défense, ajusté aux nouvelles menaces; modernisation de l'institution judiciaire et de la législation pénale, à la lumière des nouvelles attentes qu'elles rencontrent; modernisation des moyens d'action de nos forces de police, qui garantissent le respect des droits et des libertés; modernisation de l'ensemble des services publics chargés de la prévention et de l'aide aux personnes en difficulté.
La procédure de la question prioritaire de constitutionnalité, instaurée par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, tient évidemment une place révélatrice dans ce combat pour les droits de chacun.
Six mois après l'entrée en vigueur de cette révolution juridique, il est clair que la possibilité donnée, par le Président de la République et le Parlement, à chaque citoyen, à chaque entreprise ou association, de contester la constitutionnalité des lois qui lui sont opposées est un véritable renforcement de l'État de droit.
Le succès de cette réforme doit beaucoup à l'acuité avec laquelle le Conseil d'Etat exerce sa mission de filtrage et de transmission. Je tiens à vous en rendre hommage.
Aux représentations caricaturales d'un État passéiste, rigide, répressif, je veux opposer, Mesdames et Messieurs, sa capacité d'inspirer et de servir le progrès.
Notre besoin de réformes est l'indice du rôle déterminant que conserve l'État dans le développement économique et social.
Depuis le début de notre histoire contemporaine, chaque grande étape de notre histoire contemporaine a été le fruit d'un Etat créatif et ambitieux, qui a su peser sur le cours des choses, pour rénover une société bloquée ou meurtrie.
Vous-mêmes, vous participez constamment à ce dialogue entre permanence et innovation. Votre expérience et votre capacité de proposition, votre connaissance de la jurisprudence et votre habileté à l'infléchir sont l'image même d'une culture d'État.
Voilà pourquoi nous voulons d'un État qui dialogue, qui débat, qui intègre une réflexion de plus en plus complexe, et voilà pourquoi nous ne voulons pas d'un État technicien. Voilà pourquoi nous voulons d'un État qui pense sa propre histoire, et pas d'un État gestionnaire.
Vous l'avez compris, je ne crois pas à la postmodernité en politique.
Je ne crois pas que l'histoire de l'État soit achevée, et que notre marge d'action se réduise à en combiner les procédures, dans un bricolage de plus en plus frénétique et de plus en plus stérile.
Je crois au contraire que les conditions existent pour perpétuer la culture d'État à la française.
Depuis un quart de siècle, notre pays a traversé des périodes de doute et d'immobilisme. La frilosité des responsables, et la rigidité des structures ont débouché sur l'affaiblissement du pays.
Aujourd'hui, la volonté réformatrice a été replacée au coeur de l'Etat; elle exige une immense détermination de la part de tous ceux qui en ont la charge.
Aucun des grands domaines d'intervention de la puissance publique ne peut rester à l'écart de la réforme :
- ni la vie sociale, qui appelle la modernisation des règles de représentativité des organisations syndicales et la consolidation des régimes de protection sociale, notamment celui des retraites ;
- ni la vie économique, qui exige de nouvelles règles de gouvernance, une réduction de nos déficits et la relance des grands investissements d'avenir;
- ni la vie éducative, qui profite déjà des nouvelles libertés universitaires;
- ni la vie locale, qui appelle une simplification des compétences et des structures;
- ni la vie internationale enfin, avec la nouvelle dynamique insufflée à l'Union européenne et les progrès de la gouvernance mondiale.
L'Etat lui même se réforme, pour être plus efficace, plus économe et plus proche des usagers. L'immobilisme est inadmissible en cette matière où le gouvernement dispose de tous les leviers d'action.
Nous conduisons, dans le cadre d'une révision générale des politiques publiques, la rénovation de l'ensemble de l'appareil étatique - carte judiciaire, administration de la défense, administrations centrales, régionales et départementales, réseaux financiers ...
C'est d'abord au Gouvernement qu'il appartient de conduire cette mutation, mais il doit pouvoir compter sur tous ceux qui, dans les administrations de l'Etat, travaillent sous son autorité.
L'Etat doit viser la même exemplarité dans son rôle d'employeur que dans la conduite de ses politiques. Il doit veiller en permanence à l'optimisation de ses structures et garantir à ceux qu'il emploie les conditions d'un travail efficace.
Chaque agent de l'Etat doit avoir l'ambition et la capacité d'incarner un rôle de progrès. Quant à ceux qui les encadrent, ils doivent porter encore plus haut cette ambition, et animer cette mobilisation avec d'autant plus d'énergie.
La rénovation du dialogue social au sein de la fonction publique, à laquelle le législateur vient de procéder après une concertation approfondie, doit permettre à l'ensemble des agents de l'Etat d'y contribuer.
Au niveau même des institutions, la stabilité de notre Ve République n'exclut pas la recherche d'un progrès dans le fonctionnement des pouvoirs.
Pour avoir été longtemps parlementaire, dans la majorité et dans l'opposition, et pour avoir siégé dans les deux chambres, je sais que le rééquilibrage des institutions va porter des effets positifs. Et je suis heureux que cette réforme de la Constitution permette désormais au Conseil d'Etat d'épauler les assemblées parlementaires dans l'élaboration de leurs propositions de lois.
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs
Le Conseil d'Etat a apporté un concours irremplaçable à chacune des réformes que j'ai mentionnées. Il a su s'organiser pour accompagner le Gouvernement et le Parlement dans un processus de rénovation du droit.
Bien sûr, il arrive que le Gouvernement ne suive pas complètement les avis de votre assemblée générale. Mais ce n'est jamais à la légère. L'exemple récent de la loi sur la burqua illustre cette dialectique nécessaire entre la sécurité juridique et les faits de société qui poussent le législateur à intervenir.
Tout a été dit à ce propos par le rapport que vous m'avez remis.
Le Gouvernement a pris le parti d'assumer politiquement un choix qu'il croit nécessaire pour la cohésion de la société française, en sachant bien que l'interdiction générale de la burqua procédait d'une conception novatrice de l'ordre public. L'avenir nous dira si ce pari, fait en connaissance de cause grâce à vous, était le bon.
J'apprécie à sa juste valeur la sécurité que le Conseil d'Etat apporte à la marche des affaires publiques.
Et je vois en vous l'expression de la rigueur intellectuelle et même morale.
Je ne cesserai de rappeler, à ceux qui servent l'Etat, l'exigence éthique aussi bien que technique dont le respect s'impose.
Cette exigence est la contrepartie des prérogatives de puissance publique. Elle se rattache aussi à une conception du service public dont votre maison a constitué la doctrine au long des décennies.
Cette doctrine n'a jamais été aveugle au regard des nécessités publiques. Elle a toujours su fixer le juste équilibre entre les droits individuels et l'impératif de l'action publique.
L'Etat ne saurait en effet être désarmé face à l'exercice de droits individuels. Cela est vrai quand il agit. Cela est vrai aussi quand il se défend.
Notre législation sur les interceptions de sécurité en est un exemple. Votre jurisprudence sur la déontologie des agents publics en est un autre. Les fonctionnaires et les magistrats doivent à l'Etat le respect du secret professionnel.
Dans l'univers médiatique où nous sommes tous, ce rappel est nécessaire. Il n'enlève rien à la considération que l'on doit à l'indépendance de la presse !
Je sais, Monsieur le Vice Président, que vous avez à coeur que les promesses de rénovation de la juridiction administrative se poursuivent.
L'Etat a consenti depuis plusieurs années un effort budgétaire important en faveur des cours d'appel et des tribunaux administratifs. Cet effort a produit des résultats
D'autres projets sont en instance, comme vous l'avez rappelé.
Il nous faudra ensemble tenir compte des contraintes de l'agenda parlementaire, mais cela n'empêchera en rien la dynamique que vous portez de produire ses effets.
Mesdames et messieurs,
La position de notre pays dans le monde, le rôle de l'État au coeur du pays, et nos propres pratiques au coeur de cet État, connaissent des remises en question profondes.
Elles nous demandent une détermination de chaque instant, mais elles ne condamnent pas la confiance que nous plaçons en l'action publique au service des Français, et si nous le voulons, elles en raviveront le sens.
C'est là l'idéal républicain que nous avons en partage, lui qui dicte nos efforts et nos devoirs.Source http://www.gouvernement.fr, le 21 septembre 2010|N|N|N|N|Texte intégral 62289|Mesdames et Messieurs,
Avec mes collègues canadien, belge, italien, grec et britannique, nous avons souhaité vous rendre compte des travaux auxquels nous venons de consacrer la matinée, et qui se poursuivront au ministère de l'immigration autour d'un déjeuner de travail.
Il y avait ce matin autour de la table les représentants de sept pays qui reçoivent à eux seuls 50% de la demande d'asile mondiale, en présence de la commissaire européenne chargée des affaires intérieures.
Ce séminaire ministériel restreint nous a permis d'échanger très librement sur le besoin partagé de renforcer nos échanges en matière d'asile et de lutte contre l'immigration irrégulière.
Je suis heureux que cette initiative franco-canadienne, conçue voici maintenant près de trois mois, ait pu se concrétiser aujourd'hui à Paris.
Lors de mon déplacement à Ottawa en juin dernier, nous avions fait, avec le ministre canadien de la citoyenneté, de l'immigration et du multiculturalisme, un constat très simple : les principaux acteurs européens et internationaux en matière d'asile et de lutte contre l'immigration clandestine sont confrontés aux mêmes défis, et ne pourront les relever que dans le cadre de coopérations plus étroites.
C'est pourquoi j'avais alors proposé à Jason KENNEY que sa prochaine visite à Paris soit l'occasion d'une rencontre élargie à quelques ministres européens.
Vous voudrez bien convenir avec moi que la comparaison de nos situations nationales, la présentation de nos réformes et la recherche de nouvelles coopérations opérationnelles, constituent autant de sujets d'intérêt commun justifiant que nous tenions plus régulièrement de telles rencontres.
Nous nous sommes efforcés d'apporter ensemble une réponse à une question aussi simple à poser que difficile à résoudre : comment honorer nos engagements internationaux et notre tradition d'accueil et de protection, tout en dissuadant et en démantelant les filières clandestines qui détournent nos procédures d'asile pour organiser la traite des êtres humains ?
Avant de vous présenter une synthèse de nos travaux, permettez-moi de mettre certaines choses au clair :
- Nous n'avons abordé aucune situation nationale particulière. Notre ordre du jour était consacré à des enjeux généraux qui sont ceux du pacte européen sur l'immigration et l'asile.
- N'attendez donc pas de nous que nous fassions des commentaires sur d'autres sujets que ceux traités ce matin. Vous avez devant vous des ministres de toute sensibilité politique, souverains dans leurs pays respectifs, et qui souhaitent rechercher ensemble des solutions à des problématiques mondiales.
- Notre rencontre informelle ne fait concurrence à personne. Nous n'avons pris aucune décision qui relèverait de l'Union Européenne ou qui engagerait les intérêts d'un autre État membre.
Maintenant que ces choses sont dites, je voudrais en revenir à ce qui constitue l'essentiel.
Nous nous sommes mis d'accord ce matin sur un certain nombre de principes et de pistes d'action possibles en matière d'asile et de lutte contre l'immigration irrégulière :
1) D'abord la nécessité de garantir des procédures d'asile aussi équitables qu'efficaces, c'est-à-dire prenant autant en compte la protection des personnes persécutées que la nécessité d'écarter les demandes abusives.
- Cela doit passer par des procédures accélérées pour les demandes infondées et une distinction claire de ce qui relève de la procédure administrative et du recours juridictionnel.
- Mais cela nécessite aussi que chacun de nos pays mette en oeuvre les moyens nécessaires pour garantir un droit effectif à la protection des personnes qui remplissent les conditions de la convention de Genève.
2) Nous avons également souligné l'urgence de coordonner plus étroitement nos pratiques :
- En appliquant les règles communes existantes au niveau européen, tout en faisant jouer la solidarité pour y parvenir quand cela est nécessaire.
- En renforçant notre coopération opérationnelle, pour rapprocher nos analyses des risques-pays et appliquer un traitement homogène aux ressortissants des principaux pays d'origine de la demande d'asile, sans bien évidemment remettre en cause le droit à l'examen particulier de chaque situation individuelle.
- En coordonnant nos listes des pays sûrs à chaque fois qu'elles existent.
Au niveau de l'Union Européenne, la prochaine conférence ministérielle sur l'asile, les 13 et 14 septembre à Bruxelles, pourrait nous donner l'occasion de présenter ensemble ces orientations, en proposant qu'elles soient placées au coeur du mandat du nouveau bureau européen d'appui en matière d'asile.
Pour élargir cette approche coordonnée aux dix principaux pays de destination de la demande mondiale d'asile, des officiers de liaison américain, canadien et norvégien pourraient être intégrés à ce bureau dont le siège sera prochainement inauguré à Malte.
Nous sommes également tombés d'accord pour créer un « groupe des dix » réunissant informellement, une fois par an, les ministres chargés de l'asile et de l'immigration des dix principaux pays de destination de la demande d'asile mondiale, et échangeant de façon constante au niveau des responsables nationaux de l'asile.
3) Nous devons parallèlement nouer de nouvelles coopérations dans la lutte contre l'immigration irrégulière.
Le 29 mai dernier à Varese, j'ai proposé aux ministres du G6 (Allemagne, Espagne, Italie, Pologne, Royaume-Uni, France), ainsi qu'aux Etats-Unis, de créer une « task-force » euroaméricaine de démantèlement des filières.
Cette « task-force » devra envisager la possibilité d'élargir la mutualisation de nos renseignements opérationnels et de nos dispositifs d'officiers de liaison partout dans le monde, ainsi que la coordination de nos actions de coopération avec les principaux pays d'origine et de transit.
Dans les prochains jours, j'écrirai aux ministres concernés pour convier les chefs de leur police à participer à une réunion de lancement fin octobre à Paris. Afin de tenir compte des résultats de notre séminaire ministériel, j'élargirai ces invitations à l'ensemble des dix principaux pays de destination de la demande d'asile au niveau mondial.Source http://www.immigration.gouv.fr, le 21 septembre 2010|N|N|N|N|Texte intégral 62290|Monsieur le Président,
Mesdames et messieurs les députés,
La France reste une terre d'accueil de l'immigration. Elle continue à délivrer chaque année plus de 180.000 titres de longs séjours. Et elle est désormais au deuxième rang mondial, derrière les Etats-Unis, pour l'accueil des réfugiés.
Dans le même temps, la France doit rester une terre d'intégration. Car notre cohésion nationale ne s'est pas construite par la juxtaposition de communautés. Dans la conception française de la Nation, tout ressortissant étranger qui s'établit en France a vocation à s'intégrer, puis à s'assimiler, et, à terme, à devenir Français.
Dans le cadre du débat sur l'identité nationale ouvert l'an passé, le séminaire gouvernemental présidé par le Premier ministre le 8 février 2010 a conclu à la nécessité de renforcer nos politiques d'intégration des immigrés qui s'établissent en France.
C'est pourquoi le projet de loi conditionne tout d'abord l'accès à la nationalité française à la signature d'une charte des droits et devoirs du citoyen.
Le projet de loi vise à faire de l'adhésion aux principes et valeurs essentiels de la République, et non plus de la seule connaissance des droits et devoirs conférés par la nationalité française, un élément d'appréciation de l'assimilation du postulant à l'acquisition de la nationalité française. Cette adhésion sera formalisée par la signature, au cours de l'entretien d'assimilation conduit en préfecture, d'une charte des droits et devoirs du citoyen. La charte sera remise au cours de la cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française, à tous les nouveaux Français, quel que soit le mode d'acquisition de la nationalité (naturalisation, mariage, naissance en France de parents étrangers, etc.).
C'est aussi pourquoi le Gouvernement déposera une proposition d'amendement étendant les motifs de la procédure de déchéance de nationalité aux personnes ayant porté atteinte à la vie d'une personne dépositaire de l'autorité publique, en particulier les policiers et les gendarmes.
Des actes d'une gravité sans précédents ont été récemment commis, avec la prise à partie de forces de l'ordre par des assaillants, l'utilisation d'armes de guerres, et l'intention de tuer des agents au seul motif qu'ils exercent la mission première de l'Etat : assurer le respect de l'Etat de Droit. D'autres policiers ont fait l'objet de menaces de mort.
L'article 25 du Code civil précise, depuis la loi du 22 juillet 1996, qu'un individu peut, après avis du Conseil d'Etat, et dans un délai de 10 ans suivant son accession à la nationalité française, être déchu de la nationalité « s'il est condamné pour un acte qualifié de crime ou délit constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou pour un crime ou un délit constituant un acte de terrorisme ».
Dans l'objectif de protéger l'autorité de l'Etat, le Gouvernement souhaite que la procédure de déchéance de nationalité prévue à l'article 25 du Code civil soit étendue aux personnes qui, dans un délai de 10 ans suivant leur accession à la nationalité française, portent atteinte à la vie d'une personne dépositaire de l'autorité publique, en particulier un policier ou un gendarme.
Cet amendement respecte la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Dans sa décision validant l'extension des motifs de déchéance opérée en 1996, le Conseil a jugé que ce principe d'égalité « ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que dans l'un et l'autre cas la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l'objet de la loi qui l'établit » et que le législateur « peut, compte tenu de l'objectif tendant à renforcer la lutte contre le terrorisme, prévoir la possibilité, pendant une durée limitée, pour l'autorité administrative de déchoir de la nationalité française ceux qui l'ont acquise, sans que la différence de traitement qui en résulte viole le principe d'égalité ».
L'objectif de l'amendement est de lutter contre les atteintes aux intérêts essentiels de l'Etat, c'est-à-dire à la vie de ses agents. Les actes portant atteinte à la vie d'une personne dépositaire de l'autorité publique, par leur nature et par leur gravité, peuvent être rapproché des « atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation » et des « actes de terrorisme » auxquels l'article 25 du Code civil fait d'ores et déjà référence.
Cet amendement maintient les motifs de déchéance bien en-deçà de ce qu'ils étaient depuis 1945 et jusqu'à la loi du 16 mars 1998. L'article 98 de l'ordonnance du 19 octobre 1945 portant code de la nationalité prévoyait ainsi la déchéance pour l'étranger « condamné en France ou à l'étranger pour un acte qualifié crime par la loi française et ayant entraîné une condamnation à une peine d'au moins cinq années d'emprisonnement. » Rien n'indique que le Conseil constitutionnel validerait un amendement revenant au texte de 1945, et mon pronostic, je vous le dis, est plutôt réservé sur ce point.
La France participe par ailleurs à la construction progressive d'une politique européenne de l'immigration et de l'asile, complément indispensable du grand espace de libre-circulation issu des accords de Schengen. Elle est à l'origine du Pacte européen sur l'immigration et l'asile, adopté à l'unanimité par l'ensemble des Etats membres de l'Union européenne le 16 octobre 2008. Trois directives européennes ont été adoptées par la suite, qui créent un cadre juridique global et harmonisé pour une politique européenne de l'immigration, dont le projet de loi assure la transposition en droit français :
* Première directive transposée par ce projet de loi : la directive du 25 mai 2009 établissant les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d'un emploi hautement qualifié, dite « directive carte bleue » ;
En application de cette directive, le projet de loi met en place le premier titre de séjour européen, ouvrant le même droit au séjour et au travail dans l'ensemble des 27 Etats membres de l'Union européenne, pour les travailleurs hautement qualifiés (au minimum, diplôme BAC+3, ou justifiant d'une expérience professionnelle d'au moins 5 ans).
Une part importante des ressortissants étrangers qui entrent et séjournent aujourd'hui en France satisfont d'ores et déjà les critères de formation et d'expérience professionnelle conditionnant la délivrance de ce titre de séjour européen. En 2009, plus de 25% des ressortissants étrangers autorisés à entrer et séjourner en France pour une durée supérieure à 3 mois étaient titulaires d'un diplôme de l'enseignement supérieur.
* Deuxième directive transposée par ce projet de loi : la directive du 18 juin 2009 prévoyant des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l'encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, dite « directive sanctions ».
L'objectif est de lutter contre ceux qui exploitent l'immigration irrégulière.
En application de cette directive, le projet de loi met en place un ensemble de sanctions administratives, financières et pénales contre les personnes physiques ou morales qui recourent sciemment, directement ou indirectement, à l'emploi d'étrangers sans titre de séjour.
Le projet de loi oblige les employeurs à tenir, au moins pendant la durée de la période d'emploi, une copie de l'autorisation de séjour à la disposition des autorités compétentes.
Le projet de loi met en place un arsenal de sanctions administratives très dissuasif. L'autorité administrative pourra, en cas d'emploi d'étrangers en situation irrégulière :
. rendre les employeurs inéligibles aux appels d'offres nationaux et européens, pendant une durée maximale de 6 mois ;
. rendre les employeurs inéligibles aux aides publiques nationales et européennes en matière d'emploi, de formation professionnelle et de culture, pendant une durée maximale de 5 ans ;
. imposer aux employeurs le remboursement des aides publiques reçues l'année précédant l'infraction relevée, en matière d'emploi et de formation professionnelle ;
. ordonner par décision motivée la fermeture d'un établissement, à titre provisoire et pour une durée ne pouvant excéder trois mois. Les modalités de cette fermeture, qui pourra s'accompagner de la saisie à titre conservatoire du matériel professionnel des contrevenants, seront fixées par décret en Conseil d'Etat. En tout état de cause, cette décision de fermeture administrative d'un établissement sera proportionnée à l'ampleur des faits constatés.
Le projet de loi responsabilise les donneurs d'ordre. Il prévoit que tout maître d'ouvrage informé par écrit par un agent de contrôle, par un syndicat ou une association professionnels ou une institution représentative du personnel, de l'intervention d'un sous-traitant en situation irrégulière au regard de l'emploi d'étranger sans titre de séjour, doit enjoindre aussitôt à son cocontractant de faire cesser sans délai cette situation. A défaut, il est tenu ainsi que son cocontractant solidairement avec le sous-traitant employant l'étranger sans titre au paiement des impôts, taxes, cotisations, ainsi que des rémunérations et charges, contributions et frais. La responsabilité solidaire des maîtres d'ouvrage est l'un des points important du texte.
* Troisième directive transposée par ce projet de loi : la directive du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, dite « directive retour ».
En application de cette directive, le projet de loi ouvre la possibilité pour l'autorité administrative d'assortir sa décision d'éloignement d'une « interdiction de retour sur l'ensemble du territoire européen » d'une durée de 3 ans, pouvant être portée dans certains cas à 5 ans. Tout étranger ne respectant pas le délai de départ volontaire (1 mois), qui lui a été accordé, pourra se voir infliger cette interdiction de retour sur le territoire des 27 Etats membres de l'Union européenne.
La procédure de l'interdiction de retour est entourée de plusieurs garanties :
. Elle n'est pas automatique. Le préfet peut la prendre dans certains cas, par exemple le non-respect du délai de retour volontaire. Il n'y est jamais obligé.
. Elle est modulable et proportionnée. La loi pose le principe selon lequel il sera tenu compte de la durée de la présence de l'étranger sur le territoire, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France.
. Elle est abrogée automatiquement si l'étranger respecte le délai qui lui est accordé pour quitter volontairement le territoire.
Enfin, nos efforts d'intégration de l'immigration légale et de lutte contre l'immigration illégale seront vains, si nos procédures d'éloignement des étrangers en situation irrégulière restent aussi peu efficaces. Sur 96.109 ressortissants étrangers en situation irrégulière interpellés en 2009 en France métropolitaine, 85.101 ont fait l'objet d'une décision d'éloignement (APRF ou OQTF), et 29.288 seulement ont été effectivement reconduits dans leur pays d'origine, de manière volontaire (8.268) ou contrainte (21.020). Le taux d'échec des décisions d'éloignement dépasse 75%.
Afin d'améliorer l'efficacité des procédures d'éloignement, le projet de loi s'inspire des conclusions du rapport de la commission présidée par Pierre Mazeaud, ancien président du Conseil constitutionnel, remis le 11 juillet 2008.
* Première mesure visant à renforcer l'efficacité de nos procédures d'éloignement : une meilleure articulation de l'intervention du juge administratif et du juge judiciaire.
En France, deux juges interviennent dans la procédure d'éloignement, en cas de placement en rétention. Le juge administratif, doit être saisi dans les 48h, et dispose d'un délai de 72h pour se prononcer. Le juge judiciaire doit pour sa part être saisi et statuer dans un délai de 48h.
Cette situation pose d'importantes difficultés :
. Comme le rapport Mazeaud l'a souligné, ce délai de 48 heures imparti au juge judiciaire est trop court, et abouti à « l'enchevêtrement des procédures judiciaire et administrative », cause d'insécurité juridique ;
. L'administration a une double tâche en un court moment, car elle doit conduire deux procédures juridictionnelles en parallèle (escorte, présentation, défense). L'étranger est transporté dans des délais très courts en plusieurs endroits différents.
. Surtout, les décisions juridictionnelles rendues peuvent être contradictoires :
- Une décision du JLD qui refuse la prolongation du maintien en rétention au-delà de 48h, sur le fondement de l'illégalité de la mesure administrative de reconduite, et remet ainsi le retenu en liberté, puis du TA, dans le délai de 5 jours, qui confirme la légalité de la mesure.
- Une décision du JLD qui autorise la prolongation du maintien en rétention au-delà de 48 heures, sur le fondement de la légalité de la mesure administrative de reconduite, puis du TA intervenant après 5 jours de rétention pour annuler cette mesure.
- Le rapport de la commission présidée par Pierre Mazeaud conclut ainsi que « la précipitation actuelle est excessive et nuit à la fois à la justice, dont elle mobilise abusivement les membres : juge, personnel de greffe, personnels de sécurité, à la mise en oeuvre de la politique des pouvoirs publics, dont les demandes sont examinées dans des conditions exécrables, et aux étrangers eux-mêmes qui, levés à l'aube, attendent interminablement dans les salles du TGI, sans confort et dans la promiscuité ».
Le projet de loi prévoit un délai de 48h pour saisir le juge administratif, puis un délai de 72h accordé au juge administratif pour statuer, puis un délai de 24h pour saisir le juge judiciaire.
Cet enchaînement résulte de plusieurs nécessités incontournables :
. Le délai de 48h pour saisir le juge administratif est indispensable pour permettre à la personne placée en rétention et aux personnes qui l'assistent dans l'exercice de ses droits de prendre connaissance de l'ensemble du dossier, et de préparer la procédure contentieuse.
. Les concertations avec les associations de magistrats et le Conseil d'Etat ont abouti à la fixation d'un délai de 72h, indispensable pour permettre au juge administratif de se prononcer sur la légalité des 6 décisions pouvant désormais viser la personne placée en rétention (décision de refus de titre de séjour, décision d'éloignement, décision de refus du délai de départ volontaire, décision fixant le pays de renvoi, décision d'interdiction de retour sur le territoire européen, décision de placement en rétention).
. Ce délai de 5 jours pour l'intervention du juge judiciaire après celle du juge administratif :
- N'exprime aucune défiance à l'égard du juge judiciaire. Le juge administratif est le juge naturel de la légalité des décisions administratives. Le juge judiciaire doit statuer sur le maintien en rétention. Et le juge administratif n'est pas moins protecteur des libertés que le juge judiciaire. La Cour de cassation a d'ailleurs jugé que seul le juge administratif pouvait connaître de la légalité de la décision administrative de placement en rétention, le JLD ne devant intervenir qu'au stade de la prolongation.
- Ne réduit pas l'étendue du contrôle juridictionnel. Rien ne permet de présager de la jurisprudence de la juridiction administrative, notamment dans le cadre du référé liberté en cas « d'atteinte grave et manifestement illégale » à la liberté individuelle.
- Ne porte pas atteinte à la possibilité pour l'étranger en situation irrégulière visé par une mesure d'éloignement de déposer un recours suspensif contre cette décision : aucun étranger ne pourra être éloigné sans avoir eu la possibilité de former un recours suspensif contre la décision d'éloignement.
- Répond à un objectif de valeur constitutionnelle : l'amélioration du fonctionnement de la justice.
- Est proche de durées déjà validées par le Conseil constitutionnel, comme le délai de 4 jours de maintien en zone d'attente avant l'intervention du juge judiciaire, prévu par la loi du 20 novembre 2007.
* Deuxième mesure visant à améliorer l'efficacité de nos procédures d'éloignement : l'allongement de la durée maximale de rétention administrative, afin de faciliter l'obtention des laissez-passer consulaires.
Afin de permettre la délivrance du laissez-passer consulaire dans le délai nécessaire, le projet de loi porte la durée maximale de rétention administrative de 32 jours (2 jours + 15 jours après une première prolongation + 15 jours après une deuxième prolongation) à 45 jours (5 jours + 20 jours après une première prolongation + 20 jours après une deuxième prolongation).
. Cet allongement est nécessaire pour faciliter la délivrance par les pays d'origine des laissez-passer consulaires.
. Cet allongement est aussi nécessaire pour permettre la conclusion d'accords bilatéraux de réadmission.
Les accords de réadmission récemment conclus avec des pays sources d'immigration prévoient des délais de délivrance des laissez passer consulaire proches de 30 jours. Or ce délai court à partir de la présentation de la demande de laissez-passer voire de la présentation de la personne devant le consulat, et n'intègre pas le délai nécessaire à l'organisation matérielle de la reconduite.
. Cet allongement est désormais nécessaire pour permettre la conclusion d'accords européens de réadmission.
Un nombre croissant d'accords de réadmission se négocient désormais au niveau européen. Les négociations sont engagées depuis un an, au niveau européen, avec de grands pays sources d'immigration de la France. La France se trouve désormais placée devant une contradiction entre sa volonté de favoriser la conclusion d'accords au niveau européen, et une durée de rétention très inférieure à celle des autres Etats membres de l'Union européenne. Le projet d'accord européen en cours de négociation avec la Turquie prévoit par exemple un délai de réponse aux demandes de réadmission de 25 jours, incompatible avec une durée maximale de rétention administrative de 32 jours. Le projet d'accord européen en cours de négociation avec le Vietnam s'oriente vers un délai de 30 jours, incompatible avec une durée maximale de rétention administrative de 32 jours.
. Cette durée restera très nettement inférieure à la durée maximale fixée par la directive communautaire, qui est de 6 mois, avec possibilité de 12 mois supplémentaires.
. La France restera le pays européen dont la durée maximale de rétention est, de loin, la plus courte. Elle est aujourd'hui de 60 jours au Portugal, de 6 mois aux Pays-Bas, en Autriche ou en Hongrie, de 8 mois en Belgique, 18 mois en Allemagne, de 24 mois en Suisse, illimitée au Royaume-Uni. L'écart de la France par rapport aux autres pays européens tend même à s'accroître. Deux partenaires essentiels de la France pour la lutte contre les filières d'immigration irrégulière, l'Espagne et l'Italie, ont récemment accru la durée maximale de rétention administrative :
- L'Espagne, par la loi du 11 décembre 2009, vient de porter sa durée maximale de rétention de 40 jours à 60 jours.
- L'Italie, par la loi du 2 juillet 2009, vient de porter sa durée maximale de rétention de 2 mois à 6 mois.
* Troisième mesure visant à améliorer l'efficacité de nos procédures d'éloignement : le projet de loi crée un dispositif d'urgence adapté aux afflux d'étrangers en situation irrégulière en dehors des points de passage frontaliers.
Le préfet pourra créer une zone d'attente temporaire, qui relie les lieux de découverte d'un groupe de migrants au point de passage frontalier, où sont normalement effectués les contrôles des personnes. Pour recourir à cette disposition, il sera nécessaire d'établir que le groupe d'étrangers contrôlés vient manifestement de franchir la frontière en-dehors d'un point de contrôle.
L'affaire des 123 ressortissants kurdes arrivés sur les plages de Bonifacio le 22 janvier 2010 a une nouvelle fois révélé une faiblesse de notre législation, justement sanctionnée par les juges : lorsque de nombreux ressortissants étrangers se présentent à notre frontière en dehors de tout point de passage, compte tenu de la difficulté à réunir dans des délais suffisamment courts les interprètes, avocats, médecins, les autorités judiciaires se trouvent devant l'impossibilité d'organiser l'interpellation et la garde à vue de ces personnes, et les autorités administratives se sont trouvées devant l'impossibilité matérielle de les maintenir sous un quelconque régime de contrôle administratif.
Le régime juridique applicable à la zone d'attente temporaire sera identique à celui de la zone d'attente permanente, créé par loi du 6 juillet 1992.
* Enfin, des mesures supplémentaires seront ajoutées. Le Gouvernement déposera trois propositions d'amendement facilitant ces éloignements, y compris, dans certaines circonstances, lorsqu'ils concernent des ressortissants de l'Union européenne.
Il convient de rappeler que les ressortissants européens ne jouissent pas d'une liberté de séjour sans limite au sein de l'Union européenne. Ces limites sont fixées par la directive communautaire du 29 avril 2004 : Pour les séjours de moins de trois mois, ils ne doivent pas menacer l'ordre public ou constituer une charge déraisonnable pour notre système d'assistance sociale. Pour les séjours de plus de trois mois, ils doivent disposer d'un emploi ou de ressources suffisantes.
Un premier amendement permettra de sanctionner par une obligation de quitter le territoire français (OQTF) ceux qui abusent du droit au court séjour par des allers-retours successifs, afin de contourner les règles plus strictes du long séjour.
Un deuxième amendement permettra la reconduite dans leurs pays d'origine des personnes qui représentent une charge déraisonnable pour notre système d'assistance sociale.
Un troisième amendement élargira les possibilités de prendre des arrêtés de reconduite à la frontière pour menace à l'ordre public, à l'occasion d'actes répétés de vols ou de mendicité agressive.
Mesdames et messieurs les députés, avec ce projet de loi, nous contribuons à la mise en place d'une politique française d'immigration et d'intégration équilibrée, juste et ferme, assurant à la fois la maîtrise de l'immigration et l'intégration effective des migrants. Avec ce projet de loi, nous respectons les engagements souscrits par le Président de la République devant les Français, et l'une des priorités de l'action du Gouvernement.
Je vous remercie de votre attention.Source http://www.immigration.gouv.fr, le 21 septembre 2010|N|N|N|N|Texte intégral 62291|Mesdames, messieurs,
Depuis ma nomination au sein du Gouvernement, j'ai souhaité organiser une conférence de presse tous les six mois, afin d'une part de rendre compte du mandat qui m'a été confié par le Président de la République et le Premier ministre et des résultats obtenus, et d'autre part de présenter mon programme d'action pour les prochains mois.
A la tête de ce ministère, j'ai une préoccupation permanente : Assurer un équilibre entre humanité et fermeté, entre respect de notre tradition d'accueil et d'intégration d'une part, et lutte contre l'immigration irrégulière d'autre part. Car la France ne peut accueillir indistinctement tous ceux qui souhaitent s'y établir, précisément parce qu'elle doit bien accueillir ceux à qui elle a donné droit de séjour. La qualité de l'accueil et de l'intégration de l'immigration légale et la fermeté dans la lutte contre l'immigration illégale constituent les deux pans d'une même stratégie.
Le bilan des huit premiers mois de l'année 2010 reflète parfaitement cet équilibre :
Du 1er janvier 2010 au 31 août 2010 :
122.246 autorisations de long séjour ont été accordées, soit une croissance de 9,7%. Cette croissance s'explique principalement par l'augmentation des autorisations de séjour délivrées aux étudiants (+30,9%), l'immigration professionnelle étant relativement stable (+1,8%), et l'immigration familiale connaissant une croissance modérée (+5,9%).
Dès ma nomination j'ai souhaité accorder la priorité au renforcement de nos politiques d'accueil et d'intégration des étrangers entrant et séjournant légalement sur notre territoire. Les parcours de formation, qui étaient uniformes, sont désormais individualisés. Le bilan de compétences professionnelles est désormais généralisé. Le budget consacré au dispositif d'accueil et d'intégration passera de 47 millions d'Euros en 2009 à 56.5 millions d'Euros en 2010, soit une augmentation de plus de 20%.
Par ailleurs, l'opération « Ouvrir l'école aux parents pour réussir l'intégration » a été étendue à 10 départements supplémentaires portant le total des départements couverts à 41.
J'ai souhaité mettre un accent particulier sur l'intégration par l'emploi. Le taux de chômage des immigrés non européens reste en effet 2,5 fois supérieur à la moyenne nationale. Un accord cadre a été signé le 3 mars 2010 avec Pôle Emploi, afin de faciliter l'intégration professionnelle des étrangers primo-arrivants. Un suivi individuel à 3 mois et à 6 mois a été mis en place. Une première étude montre qu'un quart des demandeurs d'emploi ont trouvé un travail au bout de trois mois, et un tiers au bout de six 6 mois. Ce premier bilan est tout à fait encourageant. Des accords de partenariat ont aussi été conclus avec les branches professionnelles connaissant des difficultés de recrutement : services à la personne, transports, propreté, hôtellerie-restauration, informatique, avec de grands réseaux économiques, comme l'Association nationale des directeurs de ressources humaines (ANDRH), la Fondation agir contre l'exclusion (FACE), ainsi qu'avec de grands groupes industriels, comme Vinci, Manpower, Casino, ou Coca-Cola.
Depuis novembre 2009, nous conduisons une expérimentation sur le CV anonyme qui a déjà mobilisé près de 1.000 entreprises, soit dix fois plus que les 100 entreprises prévues au départ. Cette expérimentation touche à sa fin. Le dernier comité de pilotage aura lieu à la fin du mois de septembre et les conclusions seront rendues publiques en octobre. Nous serons alors en mesure d'évaluer l'impact de cette mesure.
Nous poursuivons aussi nos efforts pour étendre le label diversité. 90 entreprises et organismes publics et privés, représentant plus de 500.000 salariés, ont obtenu le label diversité, délivré avec l'AFNOR. Je souhaite atteindre l'objectif de 200 entreprises labellisées avant la fin de l'année. Pour cela, nous avons mis en place des outils pour simplifier l'accès au label des PME et des administrations. En octobre prochain, je signerai également une convention avec la Fondation Agir contre l'Exclusion pour renforcer l'accompagnement gratuit des PME vers le label. Le 21 septembre prochain, je donnerai le coup d'envoi du « tour de France de la diversité », qui a pour but de promouvoir les bonnes pratiques de promotion de la diversité dans le recrutement et la gestion des carrières.
Par ailleurs, dans le cadre du projet de loi qui sera prochainement discuté devant l'Assemblée nationale, je proposerai un amendement législatif qui rendra obligatoire, pour les entreprises cotées, la présentation, au sein de leur rapport annuel, des actions qu'elles conduisent pour la promotion de la diversité et la lutte contre les discriminations. Enfin, l'exécution des grands marchés publics de l'Etat devra être prise en compte la mise en oeuvre par les entreprises d'actions de promotion de la diversité et de lutte contre les discriminations. L'article 14 du code des marchés publics sera prochainement modifié dans ce sens.
A cette générosité de nos politiques d'intégration s'ajoute l'ouverture de nos procédures d'accès à la nationalité. Le nombre de naturalisations est passé de 58.400 à 67.300 sur les 8 premiers mois de l'année, soit une croissance de 15,2%. Le stock de demandes de naturalisation en instance dans les services est passé de 107.000 au 1er janvier 2009 à 66.000 au 1er septembre 2010, soit une baisse de 38%. Le délai moyen des procédures de naturalisation était de 12 mois en 2009. Il est aujourd'hui de 5 mois. Ces chiffres démontrent le succès considérable de la réforme de la procédure de naturalisation engagée l'an passé. Ils adressent un démenti cinglant à tous ceux qui avaient accusé le Gouvernement de vouloir restreindre l'accès à la nationalité française.
Tous ces chiffres démontrent le respect, par la France, de sa tradition d'accueil et d'intégration. Dans le même temps, la lutte contre l'immigration irrégulière a, elle aussi, enregistré de très bons résultats :
Le nombre d'étrangers en situation irrégulière reconduits dans leurs pays d'origine est resté stable, avec 19.042 retours, contre 19.456 en 2009. Au rythme actuel, l'objectif de 28.000 éloignements d'étrangers en situation irrégulière sera atteint.
Au sein de ces éloignements, le nombre des retours volontaires connaît une augmentation importante. Il est passé de 5.250 sur les 8 premiers mois de l'année 2009 à 6.020 sur les 8 premiers mois de l'année 2010, soit une croissance de 14,7%. Les retours volontaires en direction de la Roumanie sont les plus nombreux. Les prochains vols affrétés à destination de Bucarest partiront les 14, 16 et 30 septembre prochains.
La France poursuivra la mise en oeuvre de ces éloignements d'étrangers en situation irrégulière, quelles que soient leurs origines ethniques ou leurs nationalités. Ces mesures sont toujours prises sur une base individuelle, en application de la loi de la République et des traités européens et internationaux, et sous le contrôle très strict des juges administratif et judiciaire.
Depuis un an, j'ai aussi souhaité mettre l'accent sur la lutte contre l'immigration irrégulière dès le pays d'origine. 93 attachés de sécurité intérieure, 22 officiers de liaison immigration, et 20 conseillers sureté immigration, sont désormais affectés dans les principaux pays sources d'immigration. Ils couvrent plus de 150 pays. Reconduire dans leurs pays d'origine les étrangers en situation irrégulière interpellés sur notre territoire est une nécessité. Mais la priorité est que les étrangers sans visa ni titre de séjour n'entrent pas sur notre territoire. En 2009, nos officiers de liaison ont empêché l'embarquement de 11.034 personnes, ce qui constituait déjà une augmentation importante. Grâce au déploiement et à la mobilisation de ce réseau, sur les sept premiers mois de l'année 2010, 11.579 personnes ont été empêchée d'embarquer, soit plus que sur toute l'année 2009.
Par ailleurs, la lutte contre les filières qui organisent cette immigration irrégulière s'amplifie :
- Le nombre de filières démantelées est passé de 95 sur les 8 premiers mois de l'année 2009 à 128 sur les 8 premiers mois de l'année 2010, soit une croissance de 34,7%.
- Le nombre de trafiquants de migrants interpellés est passé de 3.403 à 3.843, soit une croissance de 13%.
Les 4 prochains mois seront marqués par la discussion devant le Parlement du projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité. Ce projet de loi s'inspire de trois sources :
Premièrement, le débat sur l'identité nationale lancé l'an passé, le séminaire gouvernemental organisé dans ce cadre le 8 février 2010, et les Lundis Républicains qui réunissent désormais, chaque mois, des philosophes, des historiens, des sociologues, pour débattre des valeurs qui fondent notre Nation. Ces débats nous ont confortés dans la conviction qu'il convient de renforcer l'intégration des immigrés qui entrent et séjournent sur le territoire national. Le projet de loi prévoit notamment la mise en place d'une charte des droits et devoirs du citoyen, qui devra être signée par l'ensemble des étrangers naturalisés et remise à toute personne accédant à la nationalité française. Cette charte ne sera pas un simple rappel de nos principes constitutionnels et législatifs. En la signant, l'étranger accédant à la nationalité française s'engagera à être fidèle aux valeurs de la France, à respecter ses symboles, à servir notre pays et contribuer à son rayonnement.
Le Gouvernement déposera par ailleurs une proposition d'amendement étendant les motifs de déchéance de nationalité aux personnes ayant porté atteinte à la vie d'une personne dépositaire de l'autorité publique.
Deuxième source de ce projet de loi : Trois directives européennes, qui mettent en place un premier cadre pour l'harmonisation des politiques d'immigration en Europe :
- la directive « carte bleue européenne », qui crée un premier titre de séjour européen, ouvrant le même droit au séjour et au travail dans l'ensemble des 27 Etats membres de l'Union européenne pour les travailleurs qualifiés ;
- la directive « retour », qui ouvre la possibilité d'assortir une mesure d'éloignement d'une interdiction de retour sur l'ensemble du territoire européen ;
- la directive « sanctions », qui met en place un ensemble de sanctions administratives, financières et pénales contre les personnes physiques ou morales qui recourent sciemment, directement ou indirectement, à l'emploi d'étrangers sans titre de séjour.
Troisième source de ce projet de loi : le rapport de la Commission présidée par Pierre Mazeaud intitulé « Pour une politique des migrations transparente, simple et solidaire », remis le 11 juillet 2008.
75% des procédures de reconduite dans leurs pays d'origine d'étrangers en situation irrégulière ne vont pas à leur terme, en raison de la complexité des procédures. Afin d'en améliorer l'efficacité, le projet de loi :
- Organise de manière plus cohérente l'intervention des deux juges compétents en matière de contentieux de l'éloignement des étrangers.
- Allonge de 32 à 45 jours la durée maximale de rétention administrative des étrangers en situation irrégulière visés par des mesures d'éloignement, afin de faciliter l'obtention des laissez-passer consulaires auprès des pays d'origine, et de permettre la conclusion d'accords de réadmission eu niveau européen.
- Crée un dispositif d'urgence adapté aux afflux d'étrangers en situation irrégulière en dehors des points de passage frontaliers : la zone d'attente temporaire.
Le Gouvernement déposera enfin trois propositions d'amendement facilitant la reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière, y compris, dans certaines circonstances, des ressortissants de l'Union européenne.
- Un premier amendement permettra de prendre une obligation de quitter le territoire français (OQTF) pour ceux qui abusent du droit au court séjour afin de contourner les règles plus strictes du long séjour ;
- Un deuxième amendement permettra la reconduite dans leurs pays d'origine des personnes qui représentent une charge déraisonnable pour notre système d'assistance sociale.
- Un troisième amendement élargira les possibilités de prendre des arrêtés de reconduite à la frontière pour menace à l'ordre public à l'occasion d'actes répétés de vols ou de mendicité agressive.
Les prochaines semaines seront aussi marquées par nos efforts en faveur de l'asile. La France demeure la patrie de la liberté et des droits de l'Homme, en étant le pays le plus généreux en Europe et le deuxième au monde en matière d'asile. Mais cette tradition d'asile est menacée par ceux qui y voient une porte ouverte à l'immigration irrégulière. Avec une augmentation des premières demandes d'asile de plus de 43% en deux ans, et de 12,5% depuis le début de l'année, nous sommes confrontés à une véritable crise nationale de l'asile. La saturation de nos capacités d'accueil et l'allongement des délais de traitement des demandes atteignent un niveau sans précédent depuis le milieu des années 2000, alors même que la demande d'asile mondiale ne progresse pas et que celle adressée à l'ensemble de l'Union Européenne ne connaît qu'une hausse de 3%.
Dans l'immédiat, j'ai décidé de créer 1.000 places supplémentaires d'hébergement au 1er juillet, et d'affecter de nouveaux moyens à l'OFPRA et à la CNDA. Au total, 415 millions d'euros seront consacrés aux demandeurs d'asile en 2010.
Je souhaite aussi que nos efforts portent sur la recherche de solutions européennes et internationales coordonnées :
- Le 6 septembre dernier, j'ai réuni à Paris sept ministres européens et canadien, en présence de la commissaire européenne chargée des affaires intérieures. Nous avons décidé de créer un groupe de coordination des dix principaux pays destinataires de la demande d'asile mondiale, en vue notamment de parvenir à un traitement harmonisé des demandes d'asile.
- Dès demain à Bruxelles, dans le cadre de la conférence européenne sur l'asile, je présenterai avec le ministre de l'intérieur allemand une initiative conjointe pour mettre fin au « supermarché européen de l'asile » exploité par les filières d'immigration clandestine. Nous demanderons la création sans délai d'un régime d'asile européen commun.
- La prise en compte de l'immigration clandestine dans l'explosion de la demande d'asile nécessite également que nous poursuivions sans relâche la lutte contre ces filières au niveau international. Le 29 mai dernier à Varese, dans le cadre du G6 qui regroupe les ministres des six principaux pays européens et des Etats-Unis, j'ai proposé la création d'une « task-force » euro-américaine de démantèlement des filières. La première réunion de cette « task-force » des directeurs de police se tiendra fin octobre à Paris.
Nos efforts internationaux s'appuieront sur le plan national de lutte contre les filières d'immigration clandestine, qui sera finalisé dans les prochains jours et qui associera, aux côtés de mon ministère, les ministères de l'intérieur, des affaires étrangères et de la défense. Dans le cadre de ce plan national, je procèderai à l'installation, le 21 septembre prochain, de la première unité inter-services de coordination opérationnelle de la lutte contre le trafic de migrants.
Notre action ne peut être efficace et bien comprise que si elle s'inscrit dans un partenariat avec les pays sources d'immigration. Au cours de l'année écoulée, j'ai signé de nouveaux accords avec la Russie, le Brésil, la Serbie, le Monténégro, la Macédoine, le Liban. Des négociations sont également engagées avec le Maroc, le Qatar, le Vietnam, l'Inde, la Géorgie, l'Autorité palestinienne, la Bosnie-Herzégovine et l'Albanie.
L'Afrique continue bien sûr de constituer une priorité, tant les destins de la France et de ce continent sont intimement liés. A l'occasion du sommet Afrique-France, le 2 juin dernier à Nice, j'ai obtenu des acteurs bancaires et financiers des engagements sans précédent de réduction des coûts des transferts d'argent des migrants. Dans les prochaines semaines, je lancerai avec un important opérateur la première solution de transfert d'argent par téléphonie mobile entre la France et des pays africains.
Les quatre prochains mois verront surtout l'aboutissement d'un grand projet qui placera la mobilité des jeunes au coeur de la construction d'un espace méditerranéen de la circulation des personnes, du savoir et des compétences.
Le 14 décembre dernier à Paris, j'ai proposé la création d'un Office Méditerranéen de la Jeunesse qui mettra en oeuvre un programme « Erasmus » pour les étudiants du Nord et du Sud de la Méditerranée.
Avec quinze autres pays riverains, et six Etats membres de l'Union Européenne, nous nous sommes donnés un an, d'ici la fin 2010, pour y parvenir. Nous travaillons étroitement avec le secrétariat général de l'Union Pour la Méditerranée. Dès la rentrée universitaire 2011- 2012, l'Office Méditerranéen de la Jeunesse offrira aux meilleurs étudiants des bourses méditerranéennes, des facilités de visa et de séjour, un parrainage professionnalisant, l'accès à une plateforme de stages et d'emplois, ainsi que la possibilité d'exercer une première expérience professionnelle dans le pays de leur choix.
Après le Maroc en avril et le Monténégro en juin, j'ouvrirai à Chypre, le 18 octobre, une troisième et dernière réunion d'experts, avant de procéder au lancement officiel de l'Office Méditerranéen de la Jeunesse par les ministres des seize pays.
Mesdames et Messieurs, avec l'Office Méditerranéen de la Jeunesse, nous voulons dire aux jeunes de la Méditerranée qu'ils constituent notre avenir commun. Un avenir qui passe par le dialogue des cultures, la compréhension mutuelle et des projets concrets rapprochant les deux rives. Un avenir fondé sur l'intérêt partagé de développer des migrations circulaires qualifiantes profitant autant au pays d'accueil qu'au pays d'origine.
Mesdames, messieurs, les migrations ne contribuent au progrès de l'humanité que si elles respectent le triple intérêt du migrant, du pays de destination, et du pays d'origine. Elles sont l'un des aspects de la mondialisation en cours des échanges. Et il n'y a pas de mondialisation heureuse sans régulation. Je vous remercie de votre attention.Source http://www.immigraton.gouv.fr, le 21 septembre 2010|N|N|N|N|Texte intégral 62292|La ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, a présenté un projet de loi portant transposition de diverses directives du Parlement européen et du Conseil en matière civile et commerciale.
Ce texte adapte le droit français des fusions et scissions de sociétés afin de le mettre en conformité avec les exigences posées par la directive 2009/109/CE du 16 septembre 2009, qui prévoit des mesures de simplification dans la mise en oeuvre de ces opérations. Il allège les obligations d'information pesant sur les sociétés qui y participent, en prévoyant, sous certaines conditions, des dispenses de rapport ou d'assemblée générale, accompagnées de garanties propres à préserver les droits des actionnaires concernés.
Il habilite le Gouvernement à transposer par voie d'ordonnance la directive 2007/36/CE du 11 juillet 2007, qui tend à favoriser l'exercice effectif de leurs droits par les actionnaires de sociétés cotées, en permettant une meilleure information et une meilleure représentation de ces actionnaires au sein des assemblées générales.
Conformément aux exigences de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, le régime des magasins généraux est par ailleurs assoupli par la suppression d'un avis obligatoire préalable des organismes professionnels concernés, ainsi que par un allègement des conditions de délivrance de l'autorisation.
La loi du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse est également adaptée par la suppression d'une part, de l'exigence de nationalité des membres des organes de direction et d'autre part, du contrôle a priori des publications étrangères de l'Union européenne.Le projet de loi autorise enfin le Gouvernement à transposer par voie d'ordonnance la directive 2008/52/CE du 21 mai 2008, sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale et à étendre, le cas échéant, les dispositions prises aux médiations qui ne sont pas de nature transfrontalière. Cette directive a pour objet de donner un cadre à la médiation civile et commerciale, qu'elle soit conventionnelle ou judiciaire : la confidentialité et la possibilité de rendre exécutoire l'accord issu de la médiation sont ainsi garanties par le projet de loi.|N|N|N|N|Texte intégral 62293|La ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi a présenté une communication relative à la régulation financière.
Le projet de loi de régulation bancaire et financière, actuellement en discussion au Parlement, met en oeuvre au niveau national les décisions du G20 pour refonder la régulation du système financier.
Il met en place, pour la première fois en France, un dispositif de régulation des agences de notation, des ventes à découvert et des marchés dérivés. Il renforce considérablement les pouvoirs de sanction de l'Autorité des marchés financiers. Il introduit une surveillance des marchés du carbone. Il renforce la transparence sur l'action des fonds d'investissement.
Le projet de loi ratifie l'ordonnance réformant les autorités d'agrément et de contrôle de la banque et de l'assurance. La France est ainsi le premier pays à réformer son système de supervision du secteur financier, autour d'une Autorité de contrôle prudentiel aux pouvoirs étendus.
Enfin, le projet de loi améliore la sécurité des consommateurs de produits financiers en renforçant la régulation des intermédiaires bancaires et financiers.
La France participe par ailleurs activement aux travaux entrepris aux niveaux européen et international pour refonder la régulation financière.
Sous son impulsion, le G20 de Pittsburgh a décidé de fortes mesures d'encadrement des bonus des opérateurs de marchés. La France est le premier pays à les avoir mises en oeuvre, et est attentive à ce qu'elles soient reprises au niveau européen.
Au cours du mois écoulé, plusieurs avancées supplémentaires ont été obtenues.
Les ministres des finances des 27 Etats membres de l'Union européenne ont approuvé la réforme de la supervision financière, qui donnera naissance à un Conseil européen du risque systémique, chargé de veiller à la stabilité financière en Europe, et à trois nouvelles autorités européennes chargées de superviser les banques, les assurances et les marchés.
Le Comité de Bâle a conclu un accord important pour renforcer la solidité des banques en augmentant leur montant minimum de fonds propres. Cet accord sera présenté aux chefs d'Etat et de gouvernement lors de la réunion du G20 à Séoul les 11 et 12 novembre.
La Commission européenne a proposé deux règlements pour encadrer pour la première fois en Europe les marchés dérivés, les ventes à découvert et les dérivés de crédit (dits « CDS ») sur dette souveraine, comme l'avaient souhaité le Président de la République et la Chancelière allemande Mme Merkel. La mise en place d'une régulation appropriée des « hedge funds » est par ailleurs en cours de discussion au niveau européen.
Enfin, des propositions sont attendues de la Commission européenne d'ici le printemps 2011 pour renforcer la régulation des agences de notation, notamment s'agissant de la concurrence dans ce secteur, de son modèle de financement et des spécificités de la notation souveraine.Au total, la réforme de la régulation du système financier a ainsi connu des avancées décisives. Ces avancées montrent que le G20 obtient des résultats pour que les activités financières soient mieux encadrées. La présidence française du G20, qui débutera en novembre, permettra de poursuivre les réformes dans ce domaine.|N|N|N|N|Texte intégral 62294|Le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire a présenté une communication relative à l'Office méditerranéen de la jeunesse.
À l'initiative de la France, seize pays riverains de la Méditerranée, réunis à Paris le 14 décembre 2009, ont décidé, avec le soutien de l'Union pour la Méditerranée, de créer d'ici fin 2010 un Office méditerranéen de la jeunesse. L'office rassemblera quatre pays de la rive sud (Egypte, Liban, Maroc et Tunisie), cinq pays non membres de l'Union Européenne (Albanie, Bosnie-Herzégovine, Croatie, Monténégro et Turquie) et sept États membres (Chypre, Espagne, France, Grèce, Italie, Malte et Slovénie).
Dans un premier temps, l'Office méditerranéen de la jeunesse donnera la priorité à la mobilité des étudiants et des jeunes professionnels. Il s'agit de promouvoir des « migrations circulaires qualifiantes », en associant dans un même projet l'obtention d'un diplôme d'enseignement supérieur, l'accès au marché du travail et le retour dans le pays d'origine.
Dès la rentrée 2011-2012, l'Office méditerranéen de la jeunesse mettra en oeuvre un programme « Erasmus » de la Méditerranée, offrant des bourses de mobilité, des facilités en matière de visa et de séjour, un parrainage professionnalisant, l'accès, en association avec des entreprises, à des stages et à des emplois.
100 à 150 masters et doctorats seront sélectionnés pour participer à ce programme. Ils devront dispenser une formation dans l'une des treize filières universitaires d'intérêt méditerranéen retenues en tenant compte des besoins des marchés du travail du bassin méditerranéen.La priorité sera donnée aux masters et doctorats s'inscrivant dans l'un des six domaines d'action de l'Union pour la Méditerranée : dépollution, autoroutes maritimes et terrestres, développement des énergies renouvelables, enseignement et recherche, protection civile et développement des petites et moyennes entreprises.|N|N|N|N|Texte intégral 62295|Le ministre auprès de la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, chargé de l'industrie, a présenté une communication relative à l'industrialisation des véhicules électriques et hybrides rechargeables.
La diffusion des véhicules électriques et hybrides rechargeables constitue un nouveau marché prometteur, que le Gouvernement entend encourager au profit de l'activité et de l'emploi sur notre territoire. Un dispositif de prêt « véhicules décarbonés » doté de 250 Meuros a ainsi été créé en février 2009, afin d'accompagner l'implantation en France des lignes de fabrication dédiées à ces véhicules. 450 Meuros sont par ailleurs consacrés aux programmes d'innovation en la matière entre 2008 et 2012. Enfin, ces efforts seront poursuivis dans le cadre des investissements d'avenir, qui consacrent 750 Meuros au véhicule du futur.Grâce à cette politique volontariste, une large gamme de véhicules fabriqués en France sera disponible : Renault Zoé (début 2012) et Kangoo ZE (mi-2011), Peugeot 3008 hybride diesel (printemps 2011), Mia d'Heuliez Electrique (mi-2011), Smart de Daimler. Les industriels français seront également présents sur la fabrication de batteries et le marché des systèmes de recharge.|N|N|N|N|Texte intégral 62296|Le secrétaire d'État chargé de l'emploi a présenté une communication relative au bilan de la politique de l'emploi des seniors.
Le taux d'emploi des 55-60 ans atteint 60 % au 2ème trimestre 2010. C'est la première fois que le taux d'emploi de cette tranche d'âge atteint cette barre symbolique, plaçant enfin la France dans la moyenne européenne. Il était de 48,2 % en 2000 et de 54,6 % début 2007. Au total cela signifie que 300 000 seniors supplémentaires sont en emploi depuis 2007.
Depuis trois ans, l'emploi des seniors est en effet une priorité de l'action gouvernementale. Après avoir mis fin à la « culture » des préretraites, le Gouvernement a encouragé la prolongation d'activité en levant les contraintes sur le cumul emploi-retraite et la surcote. En parallèle, il a également agi pour que les employeurs modifient leur comportement. Les branches et les entreprises ont dû signer avant le 1er janvier 2010 des accords pour recruter ou maintenir des seniors dans l'emploi : à ce jour, plus de 80 accords de branche et 33 900 accords d'entreprises ont été négociés ; la quasi-totalité des salariés des entreprises de plus de 50 salariés sont désormais couverts.Cette mobilisation se poursuit. C'est pourquoi l'article 32 du projet de loi portant réforme des retraites prévoit de mettre en place un dispositif simple et opérationnel d'aide à l'embauche pour les demandeurs d'emploi de plus 55 ans.|N|N|N|N|Texte intégral 62297|Le conseil des ministres a adopté les mesures individuelles suivantes :
Sur proposition du Premier ministre :
- M. Benoît LECLERCQ est nommé conseiller maître en service extraordinaire à la Cour des comptes ;
- M. Yann JOUNOT, préfet, est nommé directeur de la protection et de la sécurité de l'État au secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale.
Sur proposition de la ministre de la santé et des sports :
- Mme Mireille FAUGERE est nommée directrice générale de l'Assistance publique-hôpitaux de Paris.
Sur proposition du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire :- M. François LUCAS, préfet, est nommé directeur de l'immigration au ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.|N|N|N|N|Texte intégral 62298|Le président de la République a reçu aujourd'hui M. Eric Schmidt, PDG de Google. Cet entretien fait suite à la rencontre entre le président Sarkozy et le co-fondateur de Google, M. Larry Page, en mai 2010, au cours de laquelle avait été évoqué un plan pour accroître les investissements financiers, scientifiques et humains de Google en France. Le président avait également souligné l'importance de construire une relation équilibrée et un dialogue constructif entre Google et l'industrie culturelle française et européenne dont les modèles économiques comme les pratiques sont bouleversées par les nouvelles technologies du numérique.
Le président de la République a accueilli avec satisfaction l'important plan d'investissement que Google s'apprête à accomplir en France, et les modalités du nouveau dialogue que propose Google aux acteurs français de la culture.
En effet, M. Eric Schmidt est venu annoncer la création d'un centre de recherche et développement de la société Google en France, qui attirera les meilleurs ingénieurs mondiaux sur notre territoire et devrait participer à la dynamique d'innovation de notre économie numérique. Cet investissement atteste de l'attractivité de notre territoire, de la compétitivité de notre cadre juridique et fiscal (notamment grâce au Crédit Impôt Recherche), et surtout de la qualité de nos ingénieurs, de nos universités, et de notre savoir-faire technologique, que l'Etat encourage (Plan Campus, Grand Emprunt, Pôles de compétitivité).
Le président a également apprécié le projet d'Eric Schmidt de créer un Institut européen de la Culture à Paris, où seront centralisés tous les projets de Google qui concernent le monde de la culture en Europe. Cet institut est une première mondiale : il sera piloté par un comité scientifique animé par des personnalités de haut niveau.
Eric Schmidt a également annoncé au président la volonté de Google d'investir dans les universités françaises et de financer des programmes de recherche en sciences de l'ingénieur comme des programmes de recherche en humanités (sciences politiques, droit, journalisme) liés aux questions posées par Internet à nos sociétés. Ces investissements à venir seront la reconnaissance de l'attractivité de nos universités, notamment depuis le vote de l'autonomie des universités et le Plan Campus.
Enfin, Eric Schmidt a proposé de mettre au point un programme d'aide aux start-up françaises auxquelles Google pourrait proposer des formations et la mise à disposition de savoir-faire et outils technologiques. Google s'est aussi engagé à proposer un programme de formation et de mise à disposition d'outils clés en main pour les PME qui voudraient se développer en ligne, par le commerce électronique.
Le président de la République se réjouit des initiatives de Google en France, qui répondent à l'expression d'une réelle ambition de notre pays dans le domaine de l'innovation technologique et attestent de l'attractivité de notre territoire.|N|N|N|N|Texte intégral 62299|R. Sicard.- Bonjour à tous, bonjour F. Baroin.

Bonjour.

Avant de parler du budget 2011 que vous finissez de préparer, je voudrais que l'on dise un mot de la Une du journal France Soir, le journal vous donne comme successeur possible de F. Fillon, est-ce que vous vous préparez à entrer à Matignon ?

Non. Non, je ne rentre dans aucune de ces spéculations. Le président de la République est maître du jeu et du temps, et puis j'ajoute que l'on a un Premier ministre qui est un homme de très grande valeur, qui a de grandes qualités, avec lequel il est très agréable de travailler. On a beaucoup de travail. Moi ma mission c'est de trouver 40 milliards et je présente ça au Conseil des ministres dans une dizaine de jours.

Alors, à propos de ces 40 milliards, chaque jour on apprend de nouvelles informations, ce matin on apprend que c'est les mariés et les divorcés qui seraient dans le collimateur. Jusqu'ici, ils faisaient trois déclarations d'impôts ; ils n'en feraient plus qu'une ou deux, en tout cas, ils perdraient un avantage fiscal. Est-ce que vous confirmez cette information ?

Eh bien je vous confirme que ça fait évidemment partie des pistes à l'étude, mais les mariés ou les divorcés ne sont pas dans le collimateur du Gouvernement. Ce qui est dans le collimateur du Gouvernement, c'est d'essayer d'agir de manière puissante, déterminée, sur les dépenses, ce que nous faisons, ce qui permettra de récupérer plus de la moitié des efforts que l'on a à produire, de la marche que nous avons à gravir pour l'année prochaine, c'est-à-dire 40 milliards. Et puis on a 10 milliards autour des niches fiscales et des avantages fiscaux en tout genre, sur lesquels nous nous efforçons de porter la dernière touche et le président de la République donnera son arbitrage cette semaine. 10 milliards, c'est un effort important, on a épargné les publics fragiles, ce qui est normal, nous sommes en sortie de crise nous avons encore les stigmates de la crise, aussi bien sur le plan social que sur le plan budgétaire, dans la présence globale de l'Etat, et nous avons, en effet une piste à l'étude, c'est plusieurs centaines de millions d'euros d'économies, ça fait partie du radar.

Alors, cette centaine de millions d'euros, ces centaines de millions d'euros, ça serait donc les mariés et les divorcés, vous confirmez l'information.

Non, je vous confirme que nous travaillons dessus, de même qu'il y a d'autres pistes encore qui sont actuellement soumises à l'arbitrage, je vous confirme naturellement que ça fait partie, au fond, des avantages. Le mariage est un acte heureux, et on ne se marie pas pour des raisons exclusivement fiscales, en tout cas je veux encore croire à cette certaine idée du bonheur. Le divorce est un acte plus malheureux, mais il peut y avoir des séparations cordiales, plus que des concordats orageux, toujours est-il que pour la Direction générale des finances publiques, pour le ministère du Budget, pour la partie fiscale, il faudra faire le choix de l'un ou de l'autre, de la déclaration commune ou de la déclaration individuelle, mais plus des deux, si cette proposition est retenue par le président de la République.

Vous parliez de 10 milliards de rabotage, en tout cas de suppression de niches fiscales, ça fait 10 milliards d'impôts en plus, est-ce que ça ne contredit pas un engagement de N. Sarkozy qui avait dit qu'il n'y aurait pas de hausse d'impôts ?

Pardon, je ne veux pas être en contradiction avec vous, ce n'est pas 10 milliards d'impôts en plus, on n'augmente pas la TVA, on n'augmente pas l'impôt sur les sociétés, on n'augmente pas l'impôt sur le revenu. Il y a une grande différence entre toucher aux impôts, pour tout le monde, en même temps, de la même manière, et raboter des éléments de dépenses fiscales, qui est une dépense de l'Etat, sous la forme d'un choix d'avantage fiscal. On ne pousse personne à aller dans une niche fiscale. Et ces éléments de rabot, compte tenu de la situation des finances publiques - je veux dire, réduire les déficits, c'est une ardente obligation, c'est un élément de relance de la confiance, donc, de relance de la croissance - on doit faire des choix, on choisit plutôt les niches, que de choisir les prélèvements obligatoires. Tant que N. Sarkozy sera président de la République, on n'augmentera pas les impôts, nous sommes un pays qui dépense énormément, qui a parfois un peu arrosé le sable, et sur lequel nous avons une grande marge de manoeuvre.

Dans ce contexte, en tout cas, le bouclier fiscal, les chiffres du bouclier fiscal, ont choqué beaucoup de monde ; le Nouveau Centre, vos alliés du Nouveau Centre demandent sa suppression, est-ce que le Gouvernement va finir par le supprimer, ou en tout cas par le modifier ?

C'est un peu une politique de donnant/donnant cette affaire de bouclier fiscal. La France est un pays qui impose les gens qui ont de la fortune, du patrimoine, des éléments de revenus suffisamment importants, à travers l'impôt de solidarité sur la fortune. Nous sommes le dernier pays de l'Union européenne à disposer d'un impôt de cette nature. Donc, si nous touchons au bouclier...

Est-ce qu'il faut le supprimer ?

Moi je crois que si nous touchons au bouclier, alors il faut toucher à l'ISF, mais il ne faut pas que ça soit un marché de dupes, il ne faut pas d'un côté que la gauche porte en bandoulière, vêtue de probité candide et de lin blanc, une certaine idée de la justice sociale, en demandant la suppression du bouclier fiscal, et de l'autre, dire : « on n'est pas d'accord pour supprimer l'ISF ». C'est l'idée de la convergence fiscale avec l'Allemagne, c'est l'idée du travail souhaité par N. Sarkozy entre la Cour des Comptes française et son homologue allemand. Si nous sommes prêts pour la loi de finances, on pourra ouvrir ce débat, je pense que nous ne serons pas prêts pour la loi de finances 2011, mais ce débat ISF contre bouclier est sur la table et pourra certainement faire l'objet de débats au moment de la présidentielle.

Ca c'est une information : on pourrait à la fois envisager de supprimer l'ISF et le bouclier fiscal, les deux en même temps ?

Quelle est l'idée du bouclier ? Le bouclier, d'abord, ça me fait un peu sourire de voir les gens de la rue de Solferino, monter au créneau pour dire : « Le bouclier, c'est scandaleux, ça protège les riches ». Bien sûr que ça protège les riches, puisque ça a été fait pour ça. Ça a été fait pour que l'on ne paie pas plus d'un jour sur deux de son travail à l'Etat. Alors, après, on peut contester les modalités, mais c'est la gauche qui l'a inventé, c'est M. Rocard, Premier ministre, qui a mis en place le système de plafonnement. C'est ensuite D. de Villepin...

Pas au même niveau.

Oui, mais l'idée du bouclier, puisque c'est l'idée même qui est contestée, il y a son application mais il y a aussi son principe, c'est les deux qui sont contestés aujourd'hui par les ténors du PS. Donc il faut un peu de cohérence et puis leur rappeler un peu d'histoire, comme ils donnent l'impression de n'avoir rien appris et rien oublié sur un certain nombre de sujets, y compris celui-ci, c'est monsieur Rocard qui a mis en place l'idée du bouclier. Il a été ensuite développé par D. de Villepin à 60 %, il a été ensuite appliqué dans le cadre des engagements de N. Sarkozy pendant sa campagne, à 50 %. Si nous déplaçons le curseur sur le bouclier, alors il faut aussi permettre à des gens qui ont de l'argent, de conserver cet argent dans notre pays. Il faut quand même aussi avoir un peu de courage politique et de dire que l'ion a besoin de gens qui ont de l'argent, qui gagnent de l'argent, pour investir et créer de la richesse.

Je reviens sur les déficits. Ce matin, la presse cite le chiffre de 7,8 % de déficit pour l'année en cours, vous confirmez ce chiffre ?

On avait prévu plutôt 8 % pour la fin de l'exercice, c'est ce que l'on avait dit, ça veut dire que la marche à franchir, de passer de 8 à 6 % pour l'année prochaine, était une marche élevée. L'addition des bonnes nouvelles, les chiffres de l'ACOSS, les résultats sur le front de l'emploi, l'augmentation de la croissance pour cette année, confirmée par F. Fillon, il y a quelques jours encore, à hauteur de 1,5 nous permettent raisonnablement de penser que l'on peut tomber à 7/8 de niveau de déficit pour la fin de l'année.

A propos de croissance, justement, vous vous basez sur quel niveau pour 2011 ?

Alors, on se fixe une croissance à hauteur de 2 %, qui est à peu près dans la fourchette relativement haute, mais la fourchette atteignable, du consensus des conjoncturistes, comme on dit, ça veut dire qu'on aura une croissance d'un demi point supérieur à ce que l'on avait cette année, c'est-à-dire que nous sortons de la crise, mais ça veut dire aussi que nous devons faire partager cette conviction, faire encore un peu de pédagogie pour tout le monde, que nous devons revenir le plus vite possible au niveau de déficit d'avant la crise. Et moi, je dirais, il faudra aller plus loin et réfléchir à la tendance et atteindre un jour l'équilibre budgétaire. Les Allemands le font...

A quelle échéance ?

2014, on peut se fixer 2 % de niveau déficit ; 2015 peut-être autour de 1 %, les Allemands seront à 0,35 en 2016, nous serons peut-être un peu plus tard à ce niveau-là, mais c'est ce vers quoi nous devons tendre.

Merci F. Baroin.

Merci.

Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 20 septembre 2010|N|N|N|N|Texte intégral 62300|C. Barbier.- N. Sarkozy défendra aujourd'hui à Bruxelles la politique française envers les Roms. L'image du pays n'est-elle pas en train de se désagréger dans un tel degré qu'il faudrait cesser les expulsions massives de Roms ?

On est quand même à front renversé dans cette affaire. La France est le premier pays de terre d'asile d'Europe ! C'est le deuxième au monde, et on vient se faire prendre des leçons par une commissaire européenne qui compare la politique, tout simplement d'application du droit, de la loi nationale et européenne, à ce qui s'est passé au moment de la Seconde Guerre mondiale ?

Elle a exprimé ses regrets. Est-ce que N. Sarkozy ne doit pas aussi s'excuser pour avoir dit : « vous n'avez qu'à accueillir des Roms au Luxembourg » ?

Le temps va être à l'apaisement, on va rentrer dans une séquence diplomatique. En tout cas, moi, responsable politique français, qui entend une commissaire européenne insulter la France, alors que ce n'est pas un échec français sur l'affaire des Roms, c'est un échec européen, depuis les élargissements de 2004 et de 2007, et que c'est un échec européen et que c'est à la Commission d'appréhender avec la Roumanie, et de voir quels sont les dispositifs budgétaires, financiers, légaux, d'application des traités, pour faire en sorte que l'on n'ait plus la question des Roms, et par extension, la question des gens, qui sont des gens du voyage, où les lois sont appliquées. Et je rappelle qu'aucune décision prise par le Gouvernement français, n'a été prise sans une autorisation de la justice. Donc il faut...

La circulaire était quand même d'une grande maladresse. Elle donnait l'impression qu'on abandonnait notre tradition...

Elle aussi a été retirée. Madame Reding retire ses propos infamant, cette circulaire qui pouvait être mal interprétée a été retirée. On est sur le chemin traditionnel de l'application du droit, c'est le respect de l'état de droit. Et je vais même aller plus loin : j'ai tendance à penser que ne pas respecter le droit dans un pays comme le nôtre, c'est abimer, dans les deux sens du terme, notre pacte républicain. C'est-à-dire prendre le risque de l'égratigner en profondeur et peut-être même de le faire échouer.

La réforme des retraites, elle, a été votée hier. Pourquoi ce passage en force de la majorité ? Vous pouviez redonner encore 24 heures de débats aux socialistes.

On peut même donner deux jours, dix jours... C'est hallucinant. Je ne suis pas sûr d'ailleurs que le groupe socialiste ait donné une bonne image de lui-même. Et je crois comprendre que monsieur Ayrault avait même une idée supplémentaire au moment du vote, c'est-à-dire de tourner le dos à la présidence. Il y a une part de théâtre, dans un hémicycle, il y a une part de flibusterie de la part de l'opposition, et puis il y a une part de responsabilité. Qu'est-ce que l'on retiendra de ce dossier des retraites ? C'est que le gouvernement de F. Fillon, sous l'impulsion de N. Sarkozy, a adapté démographiquement, une réponse démographique et un projet démographique, et que la gauche, elle, s'est crispée dans sa probité candide, dans un dogme d'il y a trente ans, totalement dépassé par les évolutions démographiques.

F. Fillon a surtout brillé par son absence hier. Est-ce qu'il laisse filer les affaires, maintenant qu'il sait qu'il va être remanié ?

Je ne crois pas. Ce n'est pas le sentiment que j'ai. Je suis aux réunions d'arbitrages à ses côtés quasiment tous les jours, il est très impliqué. Simplement, il y a une organisation, il y a un ministre du Travail, ils ont été là, jour et nuit, et G. Tron et E. Woerth, c'est bien normal. Enfin, je ne vois pas le problème.

Vous évoquez les arbitrages dans la préparation du budget 2011. C. Lagarde a tout donné, hier, dans Le Figaro. A quoi sert le ministre du Budget ? Avez-vous été court-circuité ?

C. Lagarde s'occupe de l'Economie et de l'Emploi et de...

Ah ben elle s'est un peu occupée du Budget hier ! Elle a parlé...

... et de l'Industrie. Elle ne me demande pas l'autorisation pour parler du budget, je ne lui demande pas l'autorisation pour parler d'économie. Elle a remis dans sa voix tout ce qui était déjà sorti, on n'a plus beaucoup d'arbitrages, les derniers arbitrages ont été rendus. Notre objectif commun, c'est d'avoir 40 milliards d'économies.

Ce coup de rabot sur les niches fiscales, dit G. Carrez, le rapporteur du Budget, n'est qu'un coup de lime à ongles". Que lui répondez-vous ?

Je lui ai déjà répondu. J'ai quand même plutôt l'impression d'être un charpentier et menuisier, qui est en train de bâtir une maison solide pour réduire nos déficits, que d'une manucure qui va couper les vieilles peaux d'un fakir.

Est-ce que, à l'inverse, vous n'êtes pas en train de casser la reprise économique, en supprimant des niches fiscales qui incitaient à investir ?

Je ne crois pas. Je crois que justement tout l'objectif est de profiter de ces bonnes nouvelles, importantes, sur le front de l'emploi, sur le front des recettes, sur le front des réformes également, qui ont permis d'avoir quelques milliards devant nous, qui nous ont permis aussi d'éviter de prendre des mesures trop difficiles, trop rigoureuses. Le budget il est équilibré, il est juste, il a un sens politique. Le sens politique, c'est que l'on épargne les publics les plus fragiles, et l'autre sens politique, c'est qu'on évite de basculer dans des plans trop récessifs, trop durs, et qui nous permet d'éviter de casser, en effet, la croissance. On sera à 1,5, peut-être même, peut-être même un peu plus. J'ai déjà annoncé, mardi dernier, que nous aurions un niveau de déficit en dessous de 8. Est-ce qu'on tombe à 7,9, est-ce que l'on tombe à 7,8 ? C'est vraiment atteignable. Cela veut dire que vraiment, nous sommes dans une sortie de crise.

Les niches fiscales favorisant l'Outre-Mer : vous avez été ministre de l'Outre-Mer, est-ce qu'elles seront préservées ?

J'ai été ministre de l'Outre-Mer pendant deux ans et j'en ai retiré une conviction, c'est que s'il n'y a pas de dispositif dérogatoire au droit commun en matière fiscale, il n'y a pas de perspective d'économies. Il y a eu la crise guadeloupéenne, N. Sarkozy a pris des engagements très forts de ne pas déstabiliser ces territoires, qui lorsqu'une crise mondiale impacte, les impacte encore beaucoup plus, y compris socialement. Donc ceux qui voulaient "supprimer" - entre guillemets - les niches fiscales de l'Outre-Mer, avant l'été, n'auront pas de réponse positive du Gouvernement. Nous préservons le dispositif de défiscalisation, qui passe sous le rabot de 10 %. C'est un effort collectif, avec une préservation d'un outil efficace pour ces territoires.

Et pour l'intéressement en entreprise ? Le Gouvernement, l'année dernière, a incité les entreprises à s'engager dans cette voie, et là, vous allez casser les reins en supprimant la niche fiscale ?

On est obligé de faire des choix. Comme disait Gide, "choisir, c'est renoncer", on ne renonce ni à l'intéressement ni à la participation, mais on a besoin de trouver 40 milliards. 40 milliards, ça ne s'est jamais fait. 10 milliards de réductions de niche, ça ne s'est jamais fait. Réduire de 2 points le déficit, ça ne s'est jamais fait. Notre conviction, et ma conviction, c'est que réduire les déficits de manière drastique, c'est un élément de relance de la confiance. C'est ça qui va redonner de l'énergie collective à notre pays.

Il y a une belle niche fiscale, c'est le bouclier fiscal. Est-ce que vous êtes pour conditionner le bouclier à l'investissement des plus riches dans les PME ?

On n'est pas pour ouvrir le débat autour du grand soir fiscal, ni sur le bouclier ni sur l'ISF. Il y aura des tentations, naturellement, pendant le débat parlementaire. Moi, je suis pour une stabilité fiscale, je pense qu'à l'échelle d'une législature, il faut conserver ces outils. Maintenant, s'il y a un débat sur le bouclier, il doit y avoir un débat sur l'ISF. Est-ce que ça ne risque pas d'être un marché de dupes ? C'est le sens du travail que l'on est en train de mener avec nos amis Allemands. Vous connaissez l'idée de la convergence fiscale...

Ça va nous permettre de supprimer le bouclier fiscal et l'ISF en même temps ?

Il ne peut pas y avoir de suppression de bouclier, s'il n'y a pas de suppression de l'ISF. On n'est pas prêts pour cette loi de finances. Le débat est vertueux, il avancera au fur et à mesure où on se rapprochera de l'élection présidentielle. Mais ce ne sera pas que ça, ce sera aussi la fixation d'un taux d'une tranche d'imposition supplémentaire à l'impôt sur le revenu. C'est ça le grand soir fiscal. Je crois qu'il faut attendre encore quelques mois.

C. Lagarde ne se sent pas capable de diriger le Gouvernement. Et vous ? Votre nom revient régulièrement...

Je ne rentre pas dans ces spéculations, ni dans un sens ni dans l'autre. Je trouve que l'on a un excellent Premier ministre, et puis...

Vous ne vous sentez pas incapable quand même ?

...Et c'est le président de la République qui est maître du jeu et du temps. Moi, j'ai 40 milliards à trouver, on les a trouvés et on les présentera.

Si le directeur général de la Police nationale, F. Péchenard, est bien intervenu, comme le dit Le Parisien, pour éviter des ennuis judiciaires à son fils, ne doit-il pas démissionner ?

Ça, c'est quand même aller bien vite en besogne. F. Péchenard est un immense policier, c'est quelqu'un qui a rendu des services considérables à un certain nombre de...

Ça vaut autorisation d'intervenir ?

Ça vaut d'abord vérification. Et entre les uns et les autres, j'ai tendance à accorder une pleine confiance à F. Péchenard.

Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 17 septembre 2010