Déclaration franco-britannique sur l'immigration, le 2 novembre 2010.

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Intervenant(s) : 

Auteur(s) moral(aux) : Présidence de la République

Circonstance : Déplacement du Président de la République à Londres (Grande-Bretagne) à l'occasion du Sommet Franco-Britannique, le 2 novembre 2010

Texte intégral

La France et le Royaume-Uni continueront de lutter avec la plus ferme détermination contre l'immigration irrégulière et les trafiquants qui exploitent les migrants et organisent la traite des êtres humains.
Nous nous réjouissons que l'ensemble des engagements pris lors du sommet d'Évian aient été tenus.
- La création d'un centre conjoint de renseignement dédié à la lutte contre les filières d'immigration clandestine, installé à Folkestone, a permis de réunir les spécialistes français et britanniques et de généraliser les échanges d'information entre les services de police, contribuant au succès de plusieurs opérations communes et à l'arrestation de 80 personnes entre janvier et septembre 2010.
- Dans le port de Calais, les contrôles frontaliers ont été encore renforcés par la mise en place d'un centre de coordination opérationnel conjoint, regroupant la police aux frontières et les douanes françaises et l'Agence frontalière du Royaume-Uni, et par le déploiement de nouveaux équipements de sûreté financés par le Royaume-Uni.
- Le démantèlement des campements illicites le long du littoral de la Manche et de la mer du Nord a privé les passeurs de leurs bases arrières logistiques pour le trafic de migrants vers le Royaume-Uni.
- Au cours de l'année écoulée, les tentatives de franchissement illicite de la frontière franco-britannique à partir du port de Calais ont diminué de 75 %.
Conformément au Pacte européen sur l'immigration et l'asile, et fidèles à l'esprit de responsabilité et de solidarité qui anime les deux pays, nous engagerons de nouvelles initiatives pour renforcer la sécurité de notre frontière commune, en vue notamment de la rendre étanche à l'immigration clandestine et à ses filières. Nous entendons :
- Mettre en oeuvre la deuxième phase de l'arrangement d'Évian en réalisant une analyse des risques dans les ports du Nord de la France par lesquels transitent des flux de véhicules, en particulier Dunkerque et Coquelles, qui devra être achevée d'ici mars 2011, afin de renforcer encore la sécurité aux frontières par l'utilisation des technologies les plus appropriées et des infrastructures associées d'ici le prochain sommet franco-britannique.
- Continuer d'adapter les technologies de détection et les contrôles aux frontières dans le port de Calais, ainsi que le déploiement de personnel, au trafic de véhicules à haut risque sur la base d'informations obtenues par l'intermédiaire du centre de coordination opérationnel conjoint.
Ces mesures interviendront dans le cadre d'un partage équitable des activités opérationnelles et des charges de toute nature, conformément à l'arrangement administratif signé ce jour par le Ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de la République française et le Ministre délégué chargé de l'immigration du Royaume-Uni.
- Renforcer les opérations coordonnées de police contre les réseaux de trafiquants de migrants, tant sur le territoire français que sur le territoire britannique, en étroite coopération avec les autres États membres de l'Union européenne et d'autres partenaires internationaux, en particulier les pays voisins du littoral de la mer du Nord. Pour renforcer l'échange de renseignement, nous inviterons la Belgique à rejoindre le centre conjoint de renseignement de Folkestone et nous examinerons la possibilité pour d'autres partenaires de s'y associer également ;
- Développer de manière significative les activités nationales et conjointes en matière de retour forcé et de programmes de retour volontaire vers les principaux pays d'origine et de transit de l'immigration irrégulière. Les retours forcés seront mis en oeuvre lorsque les personnes concernées ne demandent pas l'asile ou ne sont pas éligibles à l'asile sur le territoire respectif de la France et du Royaume-Uni où elles se trouvent, et lorsqu'elles refusent une offre de retour volontaire. Les opérations de retour seront conduites en tenant compte de la situation dans les pays concernés.
- Nous ouvrirons, sans délai et dans le respect des lois européennes et nationales, des négociations sur les échanges de données afin de conclure d'ici le prochain sommet franco-britannique un accord intergouvernemental visant à renforcer l'échange d'informations et de renseignement nécessaires à la lutte contre l'immigration clandestine.
Nous reconnaissons que la lutte contre l'immigration irrégulière ne peut pas se limiter à nos territoires, mais doit être tout autant menée en amont et selon une démarche préventive, dans les principaux pays d'origine et de transit et en étroite coopération avec ceux-ci.
A cet effet, nous mettrons en place un plan d'action sur les principales routes internationales de l'immigration clandestine :
- En nous appuyant sur nos réseaux d'officiers de liaison déployés dans les pays tiers.
- En coordonnant la lutte contre les embarquements clandestins, par voie aérienne, vers les territoires français et britannique, et en appliquant des programmes de coopération policière dans les principaux pays d'origine et de transit.
- En menant conjointement, en Afghanistan et au Vietnam, une campagne d'information pédagogique et dissuasive, en étudiant les projets possibles en Iraq ainsi que des projets communs de co-développement dans les régions d'origine des migrants. Nous continuerons d'assurer le suivi et de tirer parti au besoin des possibilités de mettre en place des projets dans d'autres pays d'origine d'intérêt commun.
Au niveau international et européen, nous travaillerons ensemble à mobiliser nos partenaires dans le cadre de coopérations concrètes et opérationnelles, tant en matière de lutte contre l'immigration irrégulière que dans le domaine de l'asile.
Dans le prolongement de la réunion ministérielle du G6 organisée à Varese (Italie) le 28 mai 2010, nous soutenons le renforcement de l'interaction opérationnelle entre les polices européennes et américaine pour optimiser l'échange de renseignement et la coordination des opérations de démantèlement des filières d'immigration clandestine.
Attachés à honorer notre tradition d'asile et nos engagements internationaux, nous coopérerons pour mettre fin au détournement croissant de la demande d'asile par les trafiquants de migrants, ainsi que pour renforcer les capacités des systèmes d'asile des pays européens les plus exposés. Nous entendons :
- Inviter les dix principaux pays de destination de la demande d'asile mondiale à systématiser leurs échanges dans le cadre de discussions au niveau des ministres, afin d'échanger les bonnes pratiques et de développer la coopération pratique visant à réduire le détournement de la demande d'asile et à lutter contre les flux d'immigration clandestine.
- Au plan européen, nous donnerons la priorité à la mise en oeuvre de coopérations efficaces par le nouveau Bureau européen d'appui en matière d'asile en veillant à ce que sa coordination d'actions pratiques permette de progresser dans les domaines où les besoins sont les plus importants, notamment pour appuyer le plan d'action grec dans le domaine de l'asile, et offre le meilleur rapport coût-efficacité.
- Dans le cadre des négociations européennes en cours, les deux pays veilleront à promouvoir le respect des règles existantes de l'Union européenne par l'ensemble de ses États membres, ainsi que des procédures efficaces et équitables, garantissant tant l'accès à la protection internationale des personnes fuyant les persécutions que l'examen accéléré des demandes manifestement infondées.
Nous rappelons que la pérennité des systèmes européens d'asile nécessite que les personnes ayant vu leur demande rejetée soient reconduites dans leur pays d'origine.