Eléments de la déclaration de Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'Etat à l'écologie, sur les enjeux liés à l'accès à l'eau potable dans la perspective du forum mondial de l'eau de 2012, Paris le 8 novembre 2010.

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Circonstance : Colloque de la Fondation Suez Environnement sur le thème "Eau pour tous : pour en finir avec l'inacceptable", à Paris le 8 novembre 2010

Texte intégral

I/ L’eau est l’enjeu de ce siècle
Enjeu d’urbanisation au même titre que les déchets
Enjeu de progrès humain : libérer les jeunes filles et les femmes de la corvée d’eau qui les prive d’éducation ; participer à l’éradication possible de la famine (ACF) et des grandes épidémies (Haïti)
Enjeu de solidarité : accès à l’eau est un problème, y compris en France
Et pourtant, quel turbulent et troublant silence autour de cette question.
Turbulent silence de l’AG des Nations Unies qui a effleuré cette question lors du bilan des OMD
Troublante erreur des OMD d’assimiler l’eau à l’environnement
Etrange absence des Nations-Unies sur ce sujet
Etrange lenteur à reconnaître que le droit à l’accès à l’eau et à l’assainissement fait partie des droits humains. Les débats ont duré 20 ans, 20 ans de lenteur coupable.
Nous sommes sans doute à un tournant de l’humanité. Qui l’emportera :
Les hyperréalistes cyniques, nos silencieux, qui pensent que la lutte pour l’eau est perdue d’avance, battue par les inégalités ou les ambitions.
Les peut-être « idéalistes » qui voient qu’aucune famine, aucune épidémie, aucun mort de manque d’eau n’est une fatalité.
II/ J’appartiens comme vous au camp des optimistes qui ont foi en l’humanité.
1/ Parce que le monde avance.
# La reconnaissance de l’accès à l’eau et à l’assainissement comme inhérent aux droits humains était mon combat depuis le Forum mondial d’Istanbul. L’AG des Nations Unies et le Conseil des droits de l’homme l’ont enfin entendu.
# Des progrès dans la réalisation des OMD. Depuis 1990, 87% de la population mondiale a accès à une « source améliorée d’eau ». Mais, encore de grosses lacunes sur l’assainissement notamment en Afrique subsaharienne, en Océanie ou dans les bidonvilles. Et surtout, des indicateurs très imparfaits de la notion de « source améliorée d’eau ».
# En France, le Sénat a adopté une proposition de loi pour aider les plus démunis à payer leur facture d’eau ; et fin novembre à l’Assemblée nationale, nous intégrerons la deuxième partie pour que la charge de l’eau ne représente jamais plus de 3% des revenus.
# L’existence de fondations comme la vôtre qui oeuvrent pour le bien commun.
2/ Parce que nous avons en 2012 et en 2015 l’opportunité de franchir la dernière étape.
En 2012, la France organise le Forum mondial de l’eau.
Nous avons deux ambitions :
Une ambition de méthode : organiser des débats participatifs à l’échelle de chaque pays et de chaque continent, avec les associations.
Une ambition de résultat : répondre à « comment mettre en oeuvre le droit d’accès à l’eau et à l’assainissement ». Evidemment, la question n’est pas la gratuité de l’eau (M. Camdessus). Il faut sans doute la prévoir pour les plus démunis ou les situations d’urgence. Mais aucun système durable ne peut fonctionner sans un minimum de participation aux frais. Nous voulons un forum concret, un forum de solution, un forum qui remette à plat la question des financements et de la gouvernance.
En 2012, la France sera au coeur de la préparation de RIO +20 et nous serons en pleine préparation des nouveaux objectifs du millénaire pour le développement pour 2015.
Notre ambition est que l’eau soit en tête des objectifs du millénaire pour le développement. Remettons les enjeux à leur juste place. L’eau, l’eau propre, passe avant tout le reste ; l’accès à l’eau propre est le droit fondamental de tous les peuples.
Notre ambition est de refaire le lien entre eau et développement.
Sur tous ces sujets, le débat est aujourd’hui ouvert. Avant le forum mondial, je souhaite un débat national, puis un débat européen pour porter des propositions concrètes. Nous l’organiserons dès le début 2011 avec l’ensemble des représentants de la société civile, des collectivités, avec le Parlement.
Mesdames et Messieurs, dans un monde qui s’aveugle de chiffres, nous avons la chance d’être des cordes de rappel. Tous les progrès sont possibles, toutes les innovations, toutes les découvertes. Mais à nous de rappeler l’essentiel : à quoi sert un téléphone portable si on meurt de faim ? Dans ce nouveau siècle, nous avons autant de signes qui nous font douter, que de signes qui nous permettent d’espérer et de croire en l’humanité. A nous de choisir notre camp.Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 9 novembre 2010