Texte intégral
G. Durand.- Avec Chantal Jouanno. J'allais dire, enfin on retrouve une sportive au ministère des Sports, c'est un peu la tradition du gaullisme, même d'ailleurs la gauche, avec Roger Bambuck. Est-ce que vous avez conscience que d'une certaine manière vous prenez la place d'une icône en France, Rama Yade - enfin d'une icône - d'une icône des sondages, et qui ce matin l'a très mauvaise quand même !
Je prends la place de deux icônes. J'étais hier encadrée par Roselyne Bachelot et Rama Yade, et...
Grâce à François Fillon, Roselyne Bachelot a sauvé sa tête, Rama Yade non.
Ceci dit... non, juste pour terminer, il serait difficile pour moi d'effacer ces deux personnalités, qui sont deux personnalités très affirmées, mais mon but n'étant pas de faire une quête de popularité, mais simplement d'être efficace, je n'ai pas d'état d'âme. Et puis c'est un tel plaisir.
De toute façon, l'une et l'autre étaient quand même... vous savez que le milieu du sport est quand même souvent un milieu assez macho, et on ne peut pas dire que ni Bachelot, ni Rama Yade, étaient extrêmement populaires dans les fédérations, chez les champions.
Ecoutez, ça, je ne saurais pas vous le dire.
ais moi je vous le dis. Je vous le dis.
Je ne saurais pas vous dire. Le milieu du sport est macho, le milieu politique est macho, donc finalement on est toujours dans notre élément.
Est-ce que fondamentalement ça vous fait plaisir ? Parce que par rapport au parcours que vous avez eu, qui est un parcours qui, semble-t-il, est un parcours ascendant, le sport ça reste, dans l'histoire de la Vème République, quand même la deuxième division, pour employer une métaphore sportive.
Holà là, mais vous savez, quand j'étais à l'Ecologie on me disait la même chose, donc. Moi ça me fait fondamentalement plaisir. Le sport c'est la moitié de ma vie...
De rester.
C'est la moitié de ma vie - ça fait toujours plaisir de rester au gouvernement, c'est un honneur, de travailler dans un gouvernement - le sport c'est la moitié de ma vie, il y a beaucoup de choses derrière le sport, et honnêtement c'est quand même ce que pratiquent le plus les Français, donc ça parle à tout le monde.
Il va falloir régler le problème de la prime des Bleus, aller à Wembley demain, la finale de la Coupe Davis dans 15 jours...
Absolument.
S'intéresser à la préparation du championnat du monde de rugby...
Préparation des J.O, la préparation de l'Euro 2016, la préparation de la candidature d'Annecy 2018, il y a des tas de très très beaux dossiers. Mais surtout, au-delà de ça, ce qui est bien dans le sport, c'est comme l'écologie, on véhicule des valeurs de société. On véhicule des valeurs, le respect des règles, fondamentalement le respect des règles, le dépassement de soi. Le sport ça rassemble tout le monde, c'est fédérateur. Il n'y a plus de problème de clivages politiques, il n'y a pas de problème d'âge, il n'y a pas de problème...
C'est formidable, en 48 heures terminée l'écologie, bonjour le survêtement.
Non, ce n'est pas terminé... Moi j'ai été structurée avec ces deux domaines, l'écologie et le sport, j'en ai toujours pratiqué et je l'ai toujours revendiqué, et j'ai toujours revendiqué d'ailleurs que pour bien travailler il fallait en même temps avoir une activité sportive, donc non, non, je me retrouve totalement. Et, vous savez, il y a des fondamentaux qui sont communs. On a parlé de mon livre la dernière fois ensemble tous les deux - il y a des fondamentaux communs, et notamment, comme le sport, on met plus l'accent sur l'être que sur l'avoir.
Je vais faire mon petit lecteur de L'Equipe de tous les matins. Vous savez qui est premier du championnat de France de football, actuellement en tête ?
Non.
Brest. Je dis ça parce que, vous savez, ils sont quand même...
Je débute.
C'est un milieu qui est quand même particulier, celui du sport.
Absolument.
Il y a un côté fans...
Ah mais c'est très technique. Il ne faut pas croire qu'il suffit d'être hyper médiatique pour s'occuper du sport, c'est très technique. Il faut très vite rentrer effectivement dans la connaissance des règles, dans la connaissance de l'histoire des différents clubs, on y rentre assez vite d'ailleurs, mais c'est passionnant. Je lisais ce matin, pas dans le même journal d'ailleurs, le classement des...
Le Financial Times c'est terminé, c'est L'Equipe tous les matins...
Ce n'est pas dans L'Equipe ce matin que je lisais le classement des 10 meilleurs joueurs vus par les Anglais, c'est marrant.
Et alors ?
C'est marrant de voir que pour eux c'est Cantona. Vous auriez dit qui vous ?
Cantona, pour les Anglais, on sait que Cantona à Manchester c'est une véritable idole. Avant qu'on passe à la politique, parce que c'est quand même important, c'est pour ça qu'on est là ce matin aussi. Le plus grand souvenir que vous ayez eu justement comme sportive ?
Comme sportive. Il y en a tellement.
Choisissez-en un.
Comme sportive ça a été...
Un titre ?
On était deuxième en Espagne sur une compétition amicale avec l'Espagne, on était partis avec mon équipe, et il y a un des bagages de ma coéquipière qui a été perdu, qui est parti dans un autre pays, où elle avait toutes ses affaires et notamment son kimono, et donc on a dû emprunter des kimonos à quelqu'un d'autre pour faire la compétition. Donc c'était assez drôle, et ça s'est bien terminé.
Mais pourquoi vous avez fait du karaté d'ailleurs ?
Pourquoi j'ai fait du karaté ? Parce que mon père faisait du karaté, il a participé à l'implantation de ce sport en France. Mon frère faisait du judo, ma mère faisait du aïkido, donc voilà, c'est de famille.
C'est une famille à qui il faut s'adresser gentiment. Parlons maintenant un petit peu des conséquences politiques du remaniement. D'abord vous l'avez lu comme moi, 64% des Français, nous sommes à quelques heures de l'intervention du président de la République, ne font absolument pas confiance à ce nouveau gouvernement. Donc il y a quand même une défiance assez considérable.
Oui, mais les Français veulent voir sur pièce maintenant. La balle est dans notre camp, c'est à nous de faire nos preuves. Ils veulent voir sur pièce. Il n'y a pas de raison qu'ils fassent spontanément confiance, donc c'est à nous de faire nos preuves.
Mais il n'y a même plus vraiment de sarkozystes du premier moment. Estrosi est sorti, Woerth n'est plus là, le retour des chiraquiens, Hervé Morin parle même d'un retour du RPR au plus haut niveau. Il reste Hortefeux comme sarkozyste.
Le sarkozysme, pour moi, ce n'est pas une question de clan et d'hommes, c'est une question d'idées, c'est une question de principe, c'est une question de pragmatisme, et de se dire que face à un problème on ne se préoccupe pas de savoir qui est à l'origine de telle ou telle idée, mais simplement de savoir si c'est une bonne idée pour apporter une réponse.
Et est-ce que vous considérez qu'avec François Fillon le président de la République a à côté de lui, maintenant, quelqu'un qui sera fiable jusqu'au bout ? Parce que si on se souvient des aventures de Barre, de Rocard, ou de Balladur, ou même de Villepin, un quart d'heure à Matignon et on pense déjà à l'Elysée.
Je pense que François Fillon a prouvé depuis, bien avant, d'ailleurs, la campagne présidentielle, qu'il était fiable. François Fillon c'est un homme d'Etat, donc c'est un homme profondément républicain
Justement.
Il n'est pas dans ses petits calculs. Ils ont effectivement choisi de travailler ensemble, et ils le font...
Et il l'accompagnera jusqu'au bout pour une deuxième candidature, sans y penser lui-même ?
Il y a eu beaucoup de petits débats, de suspicions, dans le débat médiatique et politique, la réalité c'est qu'il n'y a jamais eu la moindre preuve d'une feuille de papier de cigarette entre les deux.
Je voudrais qu'on écoute ce matin les principales déclarations de la matinée, sur les autres radios et télévisions, c'est l'une des caractéristiques enrichies de Radio Classique. Canal+ 7H46, Jean-Luc Mélenchon revient sur la guerre des centres. Ça n'existe pas.
Jean-Luc Mélenchon : Sur le fond c'est quoi leur position à ces gens ? Ils ont été d'accord avec tout depuis le début du quinquennat, il n'y a pas une ignominie qu'ils n'aient pas avalée en matière d'immigration, de nationalité, rien, ils ont tout avalé, et maintenant, tout d'un coup, ils ne sont pas contents. De quoi ? Qu'est-ce qu'ils proposent d'autre ?
Journaliste : Le centrisme ça ne représente, à vos yeux, rien de...
Jean-Luc Mélenchon : Non, ça n'existe pas. Ça n'a jamais existé le centre en France.
Le centrisme ça n'existe pas. RTL, 7H51, voici un centriste qui n'existe pas, Hervé Morin. Il faut, dit-il, un candidat pour 2012, et les centristes en dehors de l'UMP.
Hervé Morin : La première chose que je souhaite c'est que nous ayons ensemble l'ambition qu'il y ait un homme pour porter le message centriste à l'élection présidentielle. Je souhaite que cela se fasse avec des formations qui ont ensemble la volonté d'être indépendantes de l'UMP. Nous sommes dans une majorité, nous voulons construire un centrisme de construction, mais nous voulons le faire dans l'indépendance.
France 2 7H54, Jean-Pierre Raffarin, l'ancien Premier ministre qui parle de gouvernement bancal.
Jean-Pierre Raffarin : Ce gouvernement a été fait un peu rapidement, il est assez...
Roland Sicard : Trop rapidement ?
Jean-Pierre Raffarin : Ecoutez, c'est le paradoxe un peu. Il a mis beaucoup de temps à s'épanouir et finalement il donne le sentiment d'avoir été un peu bâclé. Entre le moment où le Premier ministre a été nommé, et le moment où il a proposé son gouvernement, il y a eu peu de consultations, peu de concertations, donc, au fond, la méthode a été un peu brutale, le résultat est un peu bancal, ça manque de diversité dans la majorité.
Eric Besson à 8H22 sur Europe 1. Oui, c'est un gouvernement de la droite républicaine et c'est démocratique.
Eric Besson : Je ne peux pas laisser dire que nous serions ligotés, en plus c'est presque amusant. Si Ségolène Royal avait gagné l'élection présidentielle, et qu'il y avait une majorité de membres du Parti socialiste à l'intérieur du gouvernement, est-ce que ça offusquerait quelqu'un ? C'est Nicolas Sarkozy qui a gagné l'élection présidentielle, et on compte le nombre de ministres UMP. Arrêtons ce pharisianisme. Bien évidemment que c'est un gouvernement de la droite républicaine et du centre, élargi à un certain nombre de personnalités, dont je suis. C'est tout.
Voilà, 8H22, c'était Eric Besson sur l'antenne d'Europe 1. Ce soir le président de la République intervient à la télévision, Chantal Jouanno. Jusqu'en 2007 tout le monde a considéré, les observateurs, qu'il était extrêmement bon à la télévision, et depuis qu'il est Président, pas vraiment. On a l'impression qu'il n'a jamais fait - pour employer une métaphore sportive encore une fois - la télé de référence.
Oui, ça c'est un commentaire qu'on fait en général pour tous les présidents quels qu'ils soient. C'est un commentaire qu'on fait systématiquement. On attend beaucoup de choses du président de la République, parce qu'il est élu au suffrage universel direct, parce que c'est le quinquennat aussi - clairement, la réforme du quinquennat a poussé à cela - donc c'est vrai qu'on attend énormément de lui.
Mais comment se fait-il justement que les dernières interventions, seul avec Pujadas ou dans l'espèce de cafeteria de TF1, n'aient pas marquée l'opinion, alors qu'avant 2007 tout le monde se souvient des grandes émissions politiques où il avait donné l'impression de dominer la situation ?
On était...
Ce n'est pas moi qui parle, c'est les commentateurs.
Oui, c'est les commentateurs, comme vous le dites. On était plutôt en campagne avant 2007, on n'était pas du tout dans la même situation.
Ce qui veut dire qu'il est meilleur...
Honnêtement, l'exercice du pouvoir est toujours extrêmement difficile. C'est toujours extrêmement difficile, beaucoup plus difficile de rendre des comptes et de dire voilà ce qu'on a fait, et en général quand vous êtes en responsabilité, on vous critique, une fois que vous ne l'êtes plus - vous verrez ça de tous les anciens présidents de la République - vous devenez quelqu'un d'autre et tout le monde vous aime. Ça, je trouve ça assez... c'est systématique.
Le sarkozysme a-t-il fabriqué de telles amertumes que Borloo, par exemple, ira à la présidentielle ?
La question des centristes...
Parce que là il a beau sourire et dire que tout va bien, on ne peut qu'imaginer une seule chose, c'est qu'il est fou de rage.
Il n'y a que lui qui pourra vous répondre.
Non, mais vous avez suffisamment l'habitude des hommes en politique pour savoir que c'est forcément le cas, même s'il sourit.
Les centristes ont toujours souhaité... enfin c'est un débat entre eux de savoir s'ils envoient quelqu'un à la présidentielle, Morin n'a jamais changé d'avis d'avoir un candidat du Centre en dehors de l'UMP, il l'avait toujours dit avant de rentrer au gouvernement, il le redit en sortant du gouvernement, donc il n'a pas tellement changé d'avis sur ce sujet.
Est-ce que le remaniement n'a pas été une fabrique d'amertumes ?
C'est toujours, toujours, une fabrique d'amertumes. C'est-à-dire que tous ceux, soit qui en sortent, soit qui n'en sont pas, effectivement trouvent quelque chose à redire, c'est systématique. Simplement, il ne faut quand même pas se tromper de débat, on n'est pas titulaire de notre poste. Moi je n'ai jamais candidaté à rien, pour une raison simple, c'est que, voilà, on nous connaît, on sait quelles sont nos compétences, c'est le Président le seul qui est élu, et c'est le Premier ministre qui propose. Donc nous, dans ce débat-là, on n'est pas titulaire de notre poste. On n'a pas à avoir un ego tellement développé à considérer qu'on est indispensable.
Quand la gauche donne rendez-vous à Sarkozy en 2012, au Président Sarkozy en 2012...
Ça on le savait déjà.
Oui, ça on le savait, sauf que quand même beaucoup de gens commentent l'arrivée de Dominique Strauss-Kahn au micro de France Inter, au lendemain du remaniement, normalement il est plutôt au FMI à Washington, et là aussi il y a beaucoup de commentaires qui disent peut-être que Strauss-Kahn, finalement...
Ça, la décision lui appartient.
Non, mais d'accord, mais vous en pensez quoi ?
Non, mais depuis le début...
Sarkozy/ Strauss-Kahn 2012 ?
C'est un très beau match, deux belles personnes. Peut-être qu'il viendra, ça c'est son problème, pour l'instant, ceci dit, on a d'abord le sujet du G20, qui à mon avis doit passer avant toutes choses.
Merci Chantal Jouanno d'être venue ce matin commenter ce remaniement...
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 2 décembre 2010