Interview de M. Maurice Leroy, ministre de la ville à RFI le 16 novembre 2010, sur la position du Nouveau Centre dans le cadre du remaniement ministèriel et les relations au Centre avec le MoDem.

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Média : Radio France Internationale

Texte intégral


 
 
 
F. Rivière.- Bonjour Maurice Leroy.
 
Bonjour.
 
Alors, est-ce que vous faites partie d'un gouvernement RPR, comme l'a dit dès dimanche soir Hervé Morin ?
 
Oui, il l'a dit dimanche soir, mais je comprends la déception d'Hervé, comme des autres membres du Gouvernement qui n'avaient pas démérité. Je pense à Hervé Novelli ou à d'autres collègues. Et c'est comme ça, et ça se passe comme ça à chaque remaniement. Mais je note que lundi matin - la nuit avait dû porter conseil à mon ami Hervé - les propos étaient plus mesurés. Ce n'est pas un gouvernement RPR...
 
Pourquoi était-il tellement en colère alors, dimanche soir ?
 
Mais écoutez, parce que quand vous avez travaillé pendant trois ans assidûment, il faut comprendre ça, ce n'est pas facile. J'ai fait la passation de pouvoir avec Fadala Amara hier au ministère de la Ville, eh bien, voilà, il faut comprendre et entendre que dans « homme politique », il y a aussi homme ou femme, voilà, et que vous considérez que vous n'avez pas démérité. Vous savez, moi, j'ai parfaitement conscience par exemple qu'en entrant au Gouvernement, nommé ! En confiance par Nicolas Sarkozy et avec François Fillon, par définition c'est un contrat à durée très déterminée. Mais on a beau le savoir, même quand on est nommé, eh bien, vous ne pouvez pas empêcher que vous en avez un peu gros sur le coeur au moment où vous partez. Mais vous savez, les rancoeurs en politique ne sont jamais bonnes, et heureusement, elles ne durent jamais longtemps, ça dure quarante-huit heures, il y a la pression médiatique, tout le monde vous saute dessus, cherche la petite déclaration, le bon mot. Vous savez, les Français ne sont pas dupes, ils prennent aussi beaucoup de recul par rapport à ça. Et j'aimerais dire d'ailleurs, parce que, à chaque fois, on dit : il y a deux ministres centristes, non, il y en a trois...
 
Eh bien, voilà, c'est-à-dire que...
 
Michel Mercier...
 
Ce que disait Hervé Morin dimanche soir, on va rappeler qu'Hervé Morin est le patron du Nouveau Centre, auquel vous appartenez...
 
Oui, bien sûr...
 
C'est que les centristes étaient très sous-représentés au sein de ce gouvernement, vous ne vous y sentez pas trop seul, vous, alors ?
 
Pas du tout, ils étaient déjà sous-représentés dans les déclarations, puisqu'on en donnait deux, Michel Mercier et moi-même, en oubliant le centriste Philippe Richert, président de la région Alsace, la seule qui soit restée à droite et au centre, et l'Alsace qui est centriste...
 
Mais alors, il est de quel centre, parce qu'on s'y perd, vous savez, dans les centres...
 
Non, on ne s'y perd pas, non, mais ce n'est pas... et puis ça n'intéresse pas trop les auditeurs. Il y a trois ministres centristes, voilà. Et Michel Mercier...
 
Et de quel centre il est alors Philippe Richert ?
 
Il n'y a pas cinquante centres. Michel Mercier est garde des Sceaux, ministre de la Justice, ça n'est pas rien, il est quatrième dans l'ordre protocolaire gouvernemental. Moi-même, Nicolas Sarkozy et François Fillon ont décidé de me confier un ministère de la Ville plein, et Fadela Amara, hier, se réjouissait devant ses collaborateurs et collaboratrices qu'elle quittait en disant : voilà un ministère plein, à part entière, de la politique de la Ville. Ce qui veut dire que la ville est une des priorités du Gouvernement.
 
On va en parler. Mais tout de même, d'un mot, vous avez participé hier soir à la réunion des centristes, organisée par Jean-Louis Borloo, à l'Assemblée nationale. Il a été chargé d'animer la coordination des centres, ce qui veut bien dire qu'il y a des centres, qu'est-ce que ça veut dire concrètement, cette mission qui est confiée à Jean-Louis Borloo ?
 
D'ailleurs, je vous remercie de relever ma liberté de ton, de parole et d'action, vous voyez que je ne suis pas dans un gouvernement RPR, puisque j'ai été nommé ministre avant hier, et dès hier, j'étais aux côtés de Jean-Louis Borloo, Pierre Méhaignerie, Marc-Philippe Daubresse, Jean-Marie Bockel et bien d'autres...
 
Et même Jean-Pierre Raffarin, qui a passé une tête...
 
Et Jean-Pierre Raffarin, bien sûr, oh, il n'a pas fait que passer une tête, il a passé tout le corps, il était là une grande partie de la soirée. Et donc vous voyez que je suis d'ailleurs parfaitement libre, voilà. Et donc nous avons travaillé effectivement à la refondation, et j'espère que d'autres nous rejoindront. Hervé Morin déjeune avec Jean-Louis Borloo ce midi, voilà une bonne nouvelle, il faut qu'on se rapproche tous, il faut que l'on s'organise...
 
Mais attendez, c'est difficile à comprendre, pour vous, qui êtes Nouveau Centre, vous participiez hier soir à une réunion avec Jean-Louis Borloo au cours de laquelle il est chargé d'animer la coordination des centres. Ce n'est pas le boulot d'Hervé Morin, ça, alors ?
 
Mais c'est le boulot d'Hervé Morin, c'est le boulot de Jean-Louis Borloo, c'est le boulot de Pierre Méhaignerie, c'est le boulot de toutes les bonnes volontés...
 
De François Bayrou aussi ?
 
Mais, François Bayrou est le bienvenu, ça ne tient qu'à lui évidemment. Vous savez, ça ne sert à rien de jeter des oukases et des anathèmes. Les centristes aujourd'hui sont divisés - j'ai oublié Jean Arthuis, pardon, qui ne pouvait pas être là hier, mais qui était des nôtres - vous savez, quand vous avez des centristes à l'Alliance Centriste, des centristes à l'UMP, des centristes au Nouveau Centre, et des centristes au MoDem, par définition, le centrisme ne pèse pas, c'est une réalité, voilà. Donc commençons par refonder le centre, réunissons les centristes, rassemblons-les...
 
Alors, pour les Français, c'est François Bayrou qui incarne, de très loin, le mieux les idées et les valeurs du centre, 41%...
 
Ça n'est pas très juste ce que vous dites, pardon, parce qu'il y a d'autres enquêtes d'opinion qui démontrent, encore ce matin d'ailleurs, que Jean-Louis Borloo est très apprécié comme personnalité du centre, et regardez vos enquêtes d'opinion, regardez-les dans le détail, c'est l'ancien porte-parole de François Bayrou qui vous le dit, on s'était tous réjouit des très bons sondages à la dernière présidentielle, et quand vous regardez dans le détail, vous verrez que ce qui caractérisait François Bayrou, c'est qu'il y a un électorat de gauche, un électorat de gauche qui effectivement fait monter la cote de Bayrou, mais cet électorat de gauche, il fait monter la cote de Bayrou dans les sondages, mais quand cet électorat de gauche est dans l'isoloir, il rentre au bercail, et il vote pour le candidat socialiste. Je suis bien placé pour vous le dire, c'est ce qui nous a évité d'être au second tour.
 
Alors, il nous reste à peu près deux minutes, et j'ai deux questions : qu'est-ce que vous attendez de l'intervention de Nicolas Sarkozy ce soir à la télévision ?
 
Oh, Nicolas Sarkozy va - et ça lui appartient - fixer le cap, donner la ligne, et la vision des réformes jusqu'à la fin de son quinquennat. Car le président de la République a été élu pour cinq ans, il a pris des engagements...
 
Mais gouvernement d'action ou gouvernement de campagne jusqu'en 2012 ?
 
Mais gouvernement d'action, évidemment, vous savez, la campagne viendra à son heure et à son temps. Et quand je vois franchement qu'il n'y a aucune alternative à gauche, et comme je suis un homme honnête, je veux bien reconnaître qu'au Parti socialiste, aujourd'hui, le seul que je vois bosser sérieusement avec des propositions alternatives, c'est François Hollande, mais en dehors de François Hollande, je ne vois pas grand monde qui a des propositions alternatives. On a vu sur les retraites, et je pourrais ainsi décliner beaucoup de sujets. Je ne partage pas les opinions de François Hollande, mais lui, il travaille, et l'équipe qui est autour de lui travaille, mais ailleurs... il y a quoi en face de Nicolas Sarkozy, c'est quoi l'alternative, à part les invectives permanentes de madame Aubry, où il est le projet alternatif ? Mais vous savez, comme on dit dans mon Perche Vendômois : il ne faut pas prendre les Français pour des « berlots », ça, ils le comprennent très bien, et ils le voient bien, ça, les Français, qu'il n'y a pas d'alternatives.
 
Alors, il nous reste trente secondes, ça fait très bref pour parler de ce que vous allez faire à la Ville, parce qu'il y a énormément de boulot, vous reviendrez pour ça, mais en deux mots...
 
Avec grand plaisir...
 
En deux mots, quelles sont... ou quelle est votre priorité ?
 
Eh bien, d'abord, je suis très heureux, parce que c'est un sujet qui me passionne, je vais recontacter très vite mon ami Roland Castro, architecte, et bien d'autres. Le ministère de la Ville redevient un ministère de plein exercice, c'est une bonne nouvelle pour la politique de la Ville. Vous savez, la politique de la Ville, elle n'est ni de droite ni de gauche, pas même du centre, elle est efficace ou pas. Je travaillerai avec tous les maires, sans aucune exclusion...
 
Vous allez prendre ça à bras le corps. Vous reviendrez nous voir pour en parler...
 
Avec grand plaisir.
 
Merci Maurice Leroy. Bonne journée.
 Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 2 décembre 2010