Interview de M. Maurice Leroy, ministre de la ville, à LCI le 10 décembre 2010, sur la place du Nouveau Centre dans le remaniement ministériel et les relations de ce parti avec l'UMP et le MoDem.

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Média : La Chaîne Info

Texte intégral


 
 
 
C. Barbier.- M. Leroy bonjour.
 
Bonjour.
 
F. Fillon n'a-t-il pas eu tort d'accuser Météo France d'être à l'origine de la pagaille en Ile-de-France, en ayant sous-estimé les chutes de neige ?
 
C'est un peu réducteur...
 
C'est un peu ce qu'il a dit.
 
Ce n'est pas complètement ce qu'il a fait. Oui mais écoutez, il y a eu effectivement... il y a eu une différence entre le bulletin annoncé de Météo France et ce qui s'est passé en réalité. Mais bon, ce sont des choses qui arrivent, vous savez j'ai vécu ça en Loir-et-Cher régulièrement, et le président du Conseil général de Loir-et-Cher que je suis pourrait vous révéler qu'à chaque fois qu'il y a un « météo », je dis à mes services : « soyez plus prudents », à chaque fois ils se sont plantés.
 
Le problème c'est ça, vos services en Loir-et-Cher fonctionnent, on a l'impression que l'Etat n'a plus les moyens de protéger les gens contre les règlements !
 
Si, l'Etat a les moyens et voilà, je crois qu'il ne faut... ça ne sert à rien la polémique, ce n'est pas ça qui va faire que les gens n'ont pas couché dans leur voiture. Je crois qu'il faut avancer, les Français en ont assez un peu qu'on soit toujours dans la polémique.
 
Ça donne l'impression, quand B. Hortefeux dit « il n'y a pas de pagaille » qu'il est coupé des réalités, comme beaucoup de ministres.
 
Non mais... attendez, les ministres ne sont pas coupés des réalités. D'ailleurs c'est intéressant ce sujet, vous voyez moi je reste vraiment les pieds dans ma glaise locale du Loir-et-Cher pour précisément ne pas être coupé des réalités. Et la plupart de mes collègues au gouvernement sont sur le terrain, et ils maîtrisent parfaitement bien les réalités.
 
Vous étiez hier au dîner de J.-L. Borloo, dîner républicain. Quand il parle des conservateurs raisonnables, sérieux et bien coiffés pour les critiquer, vous avez reconnu F. Fillon vous aussi !
 
Non, je ne l'ai pas reconnu, je me doutais bien que toute la presse et tous les médias reconnaîtraient F. Fillon. Il n'y a pas que lui qui est bien coiffé...
 
Mais il est bien coiffé et conservateur.
 
Même mon ami A. Santini, qui était à la table à côté, était bien coiffé pour les raisons que vous savez. Donc ce n'est pas...
 
Nous saluons A. Santini mais...
 
Ce n'est pas le seul...
 
Mais Fillon est conservateur.
 
Non, par contre ce qui... non, Fillon n'est... Fillon est tout sauf un conservateur. Et ce n'est pas ce qu'a dit J.-L. Borloo, j'y étais à ce dîner, c'était d'ailleurs un dîner qui avait beaucoup d'allure. Toutes les sensibilités politiques étaient représentées : M. Boutih, J.-P. Chevènement, je ne vais pas dresser la liste. Et surtout ce que j'ai aimé dans l'intervention de J.-L. Borloo précisément, ce n'était pas droite/gauche son truc, c'était conservateurs et progressistes, et il a raison. Je pense qu'en France, le clivage n'est plus droite/gauche, il est conservateur et réformateur ou progressiste. Et franchement, moi si j'ai suivi avec H. Morin, F. Sauvadet et le Nouveau Centre N. Sarkozy et F. Fillon c'est parce qu'ils sont tous deux des réformateurs.
 
Alors et maintenant...
 
Et la réforme c'est le progrès.
 
La réforme c'est le progrès, est-ce que le progrès c'est le centre, est-ce que c'est la confédération des centres ?
 
Bien sûr, bien sûr.
 
Alors qu'est-ce qui va se passer ?
 
Qu'est-ce qui va se passer ? D'abord, je me réjouis qu'H. Morin et J.-L. Borloo se parlent, se rapprochent, décident ensemble en commun de dialoguer et de faire en sorte que Parti radical et Nouveau Centre puissent se regrouper dans une forme de confédération. C'était la proposition de F. Sauvadet d'ailleurs, et il a eu raison de le faire et faire en sorte qu'effectivement, on rassemble les familles du centre. Et la confédération c'est bien parce que ça respecte les identités de chaque famille politique.
 
Première condition pour que cette confédération existe, que les radicaux s'éloignent de l'UMP, quittent l'UMP ?
 
Ecoutez, il ne peut pas y avoir de rassemblement dans l'UMP, c'est vrai, alors c'est au Parti radical de le décider. Mais je pense - comme mon ami J.-C. Lagarde ou H. Morin - qu'effectivement le Parti radical doit sortir de l'UMP. C'est à lui à le décider, ce n'est pas à nous à lancer des oukases, c'est à lui à cheminer. Mais on ne peut pas se rassembler en étant dans l'UMP.
 
Pour que cette confédération des centres ait de la force, il faut aussi un candidat de la confédération des centres à la présidentielle !
 
Oui mais vous voyez C. Barbier, les deux sont indissociables. J'aime beaucoup la formule de Victor Hugo qui disait : « la forme c'est toujours du fond qui remonte à la surface ». Et dans la famille centriste, tant que vous n'aurez pas rassemblé toutes les familles du centre, il n'y a pas de candidature présidentielle viable. Il ne faut pas se raconter d'histoire, c'est la 5ème République...
 
Mais si on se rassemble...
 
Vous la connaissez mieux que personne.
 
C'est pour porter une candidature.
 
Eh oui, et inversement si vous ne vous êtes pas rassemblés, une candidature n'a pas de sens, elle est mortelle, surtout quand à côté il y a déjà F. Bayrou.
 
Demandez-vous à l'UMP de faire un geste vers le Nouveau Centre, en donnant de vraies responsabilités à l'Assemblée et en faisant entrer des ministres ou des secrétaires d'Etat complémentaires au gouvernement ?
 
Ce n'est pas à moi à le faire, je ne suis pas président du Nouveau Centre, H. Morin l'a fait, il a eu raison de le faire. Le Nouveau Centre est présent, les centristes sont présents dans le gouvernement, 3 centristes : mes amis Mi. Mercier et P. Richert. Nous sommes...
 
Mais vous n'avez rien eu à l'Assemblée.
 
Oui, ça c'est bien dommage, c'est dommage que l'UMP à l'Assemblée nationale... et ça le gouvernement n'y est pour rien, N. Sarkozy n'y est pour rien, c'est bien dommage qu'à l'Assemblée nationale on ne s'ouvre pas davantage, ça c'est vrai.
 
N. Sarkozy vous entend sur un petit remaniement technique...
 
Oui.
 
Pour s'ouvrir au centre ?
 
Ecoutez, il n'a pas besoin de m'entendre, c'est le président de la République...
 
Mais il...
 
Il a... Vous savez, n'oubliez jamais C. Barbier, N. Sarkozy n'a jamais lui voulu l'UMP, l'UMP ce n'est pas lui d'ailleurs comme vous le savez très bien...
 
C'est J. Chirac.
 
Voilà, il n'a jamais voulu avoir en marche en file indienne derrière lui, c'est vraiment lui qui a toujours ouvert avec l'UDF d'hier, je peux vous ressortir les papiers où on parlait des connivences, des complexités... des complicités entre F. Bayrou et N. Sarkozy , donc il n'a jamais voulu. C'est un homme ouvert N. Sarkozy.
 
Est-ce que F. Bayrou n'est pas...
 
Et il serait bien d'ailleurs que le groupe UMP de l'Assemblée nationale... S'inspire. S'en inspire plus souvent du chef de l'Etat.
 
Est-ce que F. Bayrou n'est pas le seul vrai centriste, comme dit G. Longuet, Bayrou qui sera reconduit à la tête du MoDem ?
 
Non, ce n'est pas le seul vrai centriste, je vois bien l'habileté de G. Longuet, ça ne m'a pas échappé. Mais ce n'est pas le seul vrai centriste, qu'est-ce que ça veut dire le seul vrai centriste ?
 
Il a été candidat à la présidentielle...
 
Ah oui.
 
Il incarne le centre.
 
Ça va faire quoi alors, au Conseil constitutionnel on va mettre un bureau pour vérifier l'ADN pour savoir si elle est vraiment centriste, ça n'a pas de sens. Il y a beaucoup de centristes, heureusement, il y en a même eu beaucoup à la dernière présidentielle puisque ça a fait presque 19 % des suffrages, voilà. Donc F. Bayrou est centriste, ça n'est pas le seul centriste.
 
Tapie, Borloo, Amara, pour être un bon ministre de la Ville, est-ce qu'il ne faut pas être un « emmerdeur » ? Est-ce que vous n'êtes pas trop gentil ?
 
Je ne le pense pas. Mais vous savez, moi je n'aime pas les effets d'annonce qui sont souvent des annonces sans effet. Ça ne sert à rien de parler de plan Marshall si derrière ça ne se traduit pas, et les gens en ont soupé, vous le savez. Je connais bien la politique de la ville, je connais bien ces quartiers, d'ailleurs ma nomination a été bien reçue y compris à gauche, tant mieux parce que la politique de la ville c'est trans-courant et c'est transversal, et c'est aussi comme ça que je vais travailler sur le grand projet présidentiel du Grand Paris en dépassant les clivages. La politique de la ville, c'est ni de droite ni de gauche ni du centre.
 
M. Leroy merci, bonne journée.
 Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 10 décembre 2010